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| Babel | |
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Auteur | Message |
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Narkissos
Nombre de messages : 12429 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Babel Jeu 08 Jan 2015, 00:24 | |
| et entre deux merci, un temps pour pleurer... |
| | | free
Nombre de messages : 10072 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Babel Lun 12 Jan 2015, 18:02 | |
| La dispersion de l'humanité et la multiplicité des langues sont-elles des malédictions ou des bénédictions ? Selon Uehlinger, le noyau du récit, qu'il appelle un "mythe construit", semble refléter un événement historique identifiable: le subit arrêt de construction de la nouvelle capitale (Dur Sarrukin) du roi assyrien après sa mort en bataille en 705 av. J.-C. Ce texte s'oppose à l'idéologie assyrienne du langage unique et à l'impérialisme qui veut imposer a tous la même langue et la même culture. L'intervention de Dieu est alors salutaire, les diversités culturelle et linguistique de l'humanité sont vues comme positives. Dieu s'oppose dans cette version de Gn 11 (où la tour ne joue aucun rôle, il s'agit simplement de la construction d'une ville avec sa citadelle) à toute pensée unique. La même intention est maintenue dans l'élargissement du récit à l'époque babylonienne, les versets ajoutés (notamment v. 3 et 9) se comprennent comme une polémique contre les constructions gigantesques d'un roi comme Nabuchodonosor. Lorsque le récit est intégré dans l'histoire des origines, le discours divin, au v. 6, est compris comme allusion à Gn 3 (cf. Gn 3,22: " Yhwh dit: Voici que l'homme est devenu comme l'un de nous Ö maintenant, qu'il ne tende pas la main pour prendre aussi l'arbre de vie Ö" ; Gn 11,6: "Yhwh dit: Voici un peuple unique Ö Maintenant, ne le sera pas impossible tout ce qu'il projettent"). Le texte est alors intégré dans la série des conflits divino-humains et perd partiellement sa dimension politique. L'insistance sur la dispersion, peut se comprendre comme allusion à la situation de diaspora que vit le judaïsme dès l'époque perse (cf. Dt 4,27; 28,64, etcÖ) ou, suivant Uehlinger, comme une étiologie théologico-politique qui comprend, en conformité avec l'idéologie impériale achéménide, le monde ordonné en multitude de langues et de nations. Gn 11,1-9 montre à sa façon que la théologie de la Bible hébraïque ne peut se construire en pensée unique. C'est un texte qui valorise d'abord la diversité des cultures et qui comprend l'intervention de Yhwh comme salutaire, "anti-impérialiste"; le parallélisme avec Gn 3, et partiellement aussi avec Gn 4 par le thème de la dispersion, invite également à lire l'agir divin comme sanction. Le texte fait apparaître ainsi une tension entre l'aspiration de l'humanité à l'unité et l'insistance sur le maintien nécessaire de la diversité et la richesse culturelle des humains. http://www.unige.ch/theologie/distance/cours/ats3/lecon3/lecon3.htm( voir aussi : https://etrechretien.1fr1.net/t887-la-terre-entiere-se-servait-de-la-meme-langue-et-des-memes-mots-genese-111) N.B.: les deux sujets ont été fusionnés ici. |
| | | free
Nombre de messages : 10072 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Babel Mer 06 Déc 2017, 16:56 | |
| Ambivalence de l’activité humaine
L’humanité, désignée au début et à la fin du récit par « toute la terre », est une dans sa langue et son langage. Elle « décampe »de l’orient, c’est-à-dire de son univers de nomadisme pour affermir son unité par la construction d’une ville et d’une tour. Le même écrivain non P avait déjà mentionné la construction de villes par Caïn (4,17) et par Nemrod (9,10-11). Babel n’est donc pas la première ville. La thématique urbaine est ici traitée pour elle-même et non comme une étape dans la chronologie de l’humanité.
L’objectif des humains est double : se faire un « nom » et éviter la dispersion. Qu’y a-t-il de répréhensible ? Le texte n’en dit rien. Mais dans la suite du récit non P, c’est Yhwh qui promettra à Abram de lui faire un « grand nom » et c’est en son nom que se béniront les peuples de la terre et qu’ils trouveront leur unité par-delà la dispersion (Gn 12,2). Autre indice : face à Yhwh, la « terre » est constituée des « fils de l’adam », c’est-à-dire ses créatures (Gn 11,5). L’entreprise civilisatrice de l’humanité, sorte d’avancée dans la prise en charge de l’œuvre de la création, serait ainsi déficiente du fait de l’absence de Yhwh dans ce plan.
De plus, l’association d’un « nom » et de la construction d’une tour unique évoque les grands travaux qui exigeaient, en Mésopotamie comme en Égypte, des hordes d’esclaves dont, au vie siècle av. J.-C., les juifs exilés à Babylone ont pu faire partie.
Enfin, l’érection d’une tour dont la tête atteint le ciel, comme l’Ésagil (litt. « maison à tête surélevée ») de Mardouk à Babylone, évoque une maîtrise totale sur ce qui est en dessous, c’est-à-dire sur toute la terre. Faut-il y voir aussi l’ambition de se passer d’un Dieu supérieur ? L’un peut-il aller sans l’autre ?
Plusieurs indices laissent ainsi deviner les insuffisances d’une entreprise par ailleurs normale et constatée en maintes cultures. En d’autres termes, c’est, comme en Gn 2–3, l’ambivalence de l’existence et de l’activité humaines qui est ici illustrée.
Entre les personnages du récit, les « enfants de l’adam », collectif et anonyme d’une part, Yhwh de l’autre, nulle trace d’un quelconque échange, ce qui est frappant au regard de l’importance des paroles qui occupent une bonne moitié du texte. Nous sommes devant deux mondes qui ne se rencontrent pas. Avons-nous là l’une des clés de la signification de l’épisode ? Certes la tension est évidente entre une humanité dont l’ambition est de conquérir la terre aussi bien que le ciel et Yhwh qui veut mettre une limite à l’action humaine, comme s’il défendait jalousement son territoire (comparer 3,22 et 11,6). Mais, à la différence des histoires d’Adam et Ève et de Caïn, il n’y a ici aucun procès, aucune mention de faute. L’absence de tout dialogue signe non pas une faute mais plutôt un échec de l’entreprise humaine. La confusion des langues et la dispersion qui s’ensuit apparaissent dès lors comme un renvoi de l’humanité à sa réalité terrestre. Le récit raconte un côte à côte plutôt qu’un face à face.
https://www.bible-service.net/extranet/current/pages/1607.html |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12429 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Babel Mer 06 Déc 2017, 17:49 | |
| Bien vu (ou bien entendu) !
Ce qui rend particulièrement sensible cette absence de dialogue, c'est qu'il y a de la parole des deux côtés, semblable et symétrique, "cohortatifs" pluriels de part et d'autre (allons, faisons, etc.), délibération et décision du côté des hommes et du côté des dieux (car il reste du "polythéisme" dans la délibération de Yahvé, comme d'Elohim en Genèse 1 et de Yahvé à la fin du chapitre 3). Les deux mondes parlent séparément et ne se rencontrent que dans l'acte -- mais là il y a rupture de symétrie, car si l'humain n'atteint pas le ciel le divin affecte l'humain à même sa langue, en la condamnant (mais rien ne dit que ce soit un mal) à la différence et à la dissémination horizontale, à l'encontre de son projet centripète, unificateur, rassembleur, ascendant et édifiant. Si le divin parle à l'humain ce sera désormais à même cette dissémination ethnique, géographique, linguistique. Même la Pentecôte des Actes n'est pas le "contraire", puisqu'elle reproduit le même modèle de dispersion ethno-géographico-linguistique -- elle ne rassemble que pour renvoyer (aux quatre coins du monde, ou plus si affinités). |
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