Qui entend les prières ?
Tout le monde et personne tout à la fois. Les oraisons dites à voix haute par une foule plus ou moins importante, à la suite du récitant, seront perçues par le passant, même le plus distrait, se trouvant à proximité du lieu de prière. Tandis que la prière prononcée en son cœur ne sera entendue que par son divin destinataire ; c’est à peine si l’on perçoit un tremblement des lèvres qui forment les mots sans leur donner un son. Tout se passe à l’intérieur, le mouvement du cœur rythme par ses battements, telles les perles d’un chapelet, la mélodie de la prière. Les phrases se suivent de façon plus ou moins fluide, les demandes s’entrechoquent avec les ex-voto. De temps en temps une pause marque un moment de réflexion et ne représente pas un malaise.
Les maintes jointes, dans un calme inhabituel, démontrent une profonde proximité avec l’extase momentanée ; ou bien elles décrivent, ces mains, la situation évoquée dans la prière pour bien accentuer la demande énoncée dans le cœur, comme pour accompagner la pensée d’un geste tellement humain, le rendant plus accessible à Dieu. Il n’est pas loin Dieu, proche de nous et des autres sans pour autant nous habiter
Parfois il n’est pas dans notre pouvoir d’agir, il reste cependant la prière. Pas seulement une suite de demandes destinées à Dieu, mais aussi l’émission d’une onde de bonnes volontés, le désir d’aimer les malheureux proches de nous. La prière est la forme d’espoir en marche, ne renonçant pas.
Tel le son aigu de la flûte, la prière s’élève en lents méandres décrits par nos pensées. Se bousculent alors demandes et actions de grâce. Parfois la méditation se substitue à la prière proprement dit. Ce n’est plus une mélopée qui monte vers le ciel, mais plutôt une introspection fouillant notre cœur, notre esprit ; une réponse de Dieu à notre questionnement en quelque sorte.
Dieu ne nous parle pas à voix haute, mais les rappels de notre cœur se font ses ambassadeurs, nous présentant, nous remémorant nos lectures de textes sacrés. Ainsi comme une piqure de rappel d’un vaccin moral, nous sommes enseignés par la spiritualité présente en nos cœurs qui se fait gardienne de nos pensées et actions.
Ce qui trouble le plus le croyant ce n’est pas l’absence de réponses entendues clairement, comme les réponses provenant du buisson ardent devant lequel Moïse s’agenouilla, c’est sans doute le cheminement lent et méticuleux de nos pensées dans notre esprit. Il ne s’agit pas de pensées comme celles qui nous habitent à demeure, à des propos plus ou moins léger ; ce sont plutôt des rappels qui nous mettent face à un texte lu il y a quelques années peut-être, que nous pensions avoir oublié. Ce texte écrit pas un homme, il y a fort longtemps, parle à notre esprit et nous permet d’être dans la disposition pour entendre, alors, Dieu nous parler.