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 Oralité et écriture

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MessageSujet: Oralité et écriture   Oralité et écriture Icon_minitimeMer 15 Déc 2021, 15:59

Oralité et écriture

Il est écrit (Exode, 34, 27) : « [L’Éternel dit à Moïse :] Écris ces choses, car c’est sur la parole [litt. sur la bouche] de ces choses [que J’ai conclu avec toi et Israël une alliance]. » Comment concilier « Écris » et « sur la parole » ? [Réponse :] les choses qui sont par écrit, tu n’as pas l’autorisation de les dire oralement [c’est-à-dire de les citer sans support écrit], les choses qui sont orales, tu n’as pas l’autorisation de les mettre par écrit.Talmud de Babylone, traité Gittin 60b.

La Mishna est un recueil antique, compilé par Rabbi Yehuda ha-Nassi vers l’an 200, de sentences juridiques émises par les maîtres de la tradition rabbinique et organisées en six ordres thématiques. La Mishna et son commentaire la Guemara1, qui composent ensemble le Talmud, relèvent strictement de cet enseignement oral, qu’il est en principe interdit de coucher par écrit. De fait, jusqu’à la fin du ii e siècle de l’ère commune, l’enseignement rabbinique était exclusivement oral. La compilation de la Mishna est classiquement considérée comme une transgression de ce principe, rendue inévitable par le contexte historique qui menaçait la pérennité de la transmission traditionnelle. Telle est en tout cas la vision classique de cet événement. Il convient pourtant de nuancer, ce qui permettra de mieux cerner ce que l’on entend ici par oralité et écriture, et donc de mieux comprendre les méthodes et les enjeux du savoir talmudique.

https://www.savoirs.app/en/articles/torah-ecrite-et-torah-orale-l-architecture-du-savoir-talmudique
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MessageSujet: Re: Oralité et écriture   Oralité et écriture Icon_minitimeMer 15 Déc 2021, 17:13

Article très instructif -- qui montrerait, si besoin était, combien la distinction entre "parole" et "écriture" est relative, fragile, compliquée par toute sorte de co-implications: c'est de la parole qu'on écrit et qu'on (re-)lit, à voix haute ou basse, il y a aussi une sorte d'écriture dans la mémoire des mots, des intonations et des gestes que l'on apprend, que l'on retient, que l'on répète ou que l'on récite; et chaque changement technique, phonique ou graphique, entraîne des modifications incalculables de la parole, de l'écriture et de la lecture, de la pensée aussi: c'est spectaculaire avec l'imprimerie dans le cas du Talmud, comme on le voit ici, ça l'est tout autant (mais c'est mieux connu) dans le cas de "la Bible" chrétienne, qui n'apparaît vraiment comme "livre", détaché d'une église et d'une liturgie (donc d'un certain type de "commentaire" et par là même disponible pour d'autres "commentaires"), qu'avec l'imprimerie (Gutenberg) et une floraison générale de livres en tout genre. A cet égard toutes les formes d'écritures (hiéroglyphiques, cunéiformes, alphabétiques ou idéographiques) et de supports (pierre, argile, parchemin, papyrus, codex, papier, écran), mais aussi la poste, la machine à écrire, le journal, le télégraphe, le téléphone, la télévision, l'ordinateur et le traitement de texte, l'Internet et l'hypertexte, le téléphone portable où on lit et on écrit autant qu'on écoute et on parle, sont à chaque fois des bouleversements complets de l'économie générale de l'écriture et de la parole, qui affectent les langues, les langages, les discours, les énoncés, la pensée... Dans un sens, Derrida n'aura parlé -- et écrit -- que de cela, même s'il l'a fait d'abord à partir d'un corpus philosophique grec ou allemand et n'a pris conscience que tardivement (mais profondément) du rapport que cela pouvait avoir avec la tradition juive qui était aussi la sienne...
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MessageSujet: Re: Oralité et écriture   Oralité et écriture Icon_minitimeJeu 16 Déc 2021, 12:11

Le récit du livre d’Isaïe nous présente le prophète en situation d’oralité, ce qui caractérisait peut-être la prophétie en Israël, par comparaison avec la norme en usage au sein du Proche-Orient ancien, où les prophéties étaient mises par écrit avant d’être transmises au souverain comme en témoignent les archives de Mari ou les tablettes assyriennes. Mais aux viiie et viie siècles avant notre ère, l’écriture, comme technique de transmission de savoirs, a pu s’installer en position de concurrence face aux outils de transmission et d’autorité des prophètes, fondés sur l’oralité et le spectaculaire métaphorique. Christophe Batsch développe l’hypothèse que dans certains passages du livre d’Isaïe on voit le prophète « tenter de s’approprier et de détourner les techniques de l’écrit pour en faire un usage métaphorique et symbolique qui s’accorde à la tradition prophétique, mais ignore les qualités propres, la portée et l’usage de l’écrit ». Un indice de ce phénomène se trouverait dans le chapitre 8. N’ayant pas été écouté par le roi Akhaz, Isaïe reçoit l’ordre de Dieu de prendre un cylindre-sceau et d’écrire dessus, avec un burin ordinaire, le nom de son fils à naître : Maher-Shalal-Hash-Baz, Prompt-Butin-Proche-Pillage, un cri de guerre signifiant la déroute complète des ennemis. Le sens en est aussitôt donné : avant que l’enfant ne sache parler, les deux rois du nord auront été vaincus. L’acte est accompli devant témoins et en faisant usage d’un outil, le burin, qui manifeste le geste de graver durablement les volontés divines. Dans ce même chapitre figure une consigne d’Isaïe : Enferme l’attestation, scelle l’instruction parmi mes disciples (8,16). Ce qui est décrit ici, c’est le scellement d’un acte juridique effectué en présence de plusieurs témoins. L’instruction (tôrah) renvoie aux agissements du prophète en tant qu’ils dévoilent le projet divin ; l’attestation (teûdah), comme le signale la racine hébraïque et l’usage du mot (cf. Rt 4,16), est un acte officiel posé devant témoins, qu’il est possible de reproduire et de répéter. Dans ce cadre « l’écrit, scellé et fermé, n’est donc pas spontanément conçu comme un moyen de transmettre la prophétie. Ce qui importe au prophète c’est la transformation, au moyen d’une série de gestes connus et pratiqués par la société de son temps, de sa tôrah en une teûdah, qui engage la divinité et son peuple dans un rapport contractuel ».

 L’écriture apparaît donc ici d’abord comme une fonction sociale dont l’usage symbolique renforce la puissance convaincante de la prophétie. En scellant dans sa persistance l’intervention non-entendue du prophète, elle met ses destinataires face à leur endurcissement et à l’intervention inéluctable de Dieu (cf. 8,14-15). Dans la forme canonique du livre, cette révélation d’une logique historique en forme de jugement met le lecteur en présence d’un drame qui a commencé avant lui mais qui, en quelque sorte, ne se résoudra pas sans lui : le destinataire du livre réussira-t-il à discerner et à savoir reconnaître là où le peuple a, pour l’instant, échoué ? … « Écoutez de toute votre écoute et ne comprenez pas … et vous serez prêts à recevoir l’inouï de Dieu comme la raison ultime de l’écriture prophétique », vous serez prêts à entendre les paroles du livre (29,18). Les paroles prophétiques d’Israël ne s’épuisent pas dans leur seul cadre historique : elles sont une signification pour toutes les générations à venir qui les relisent et les réactualisent.

https://www.cairn.info/revue-transversalites-2013-4-page-27.htm
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MessageSujet: Re: Oralité et écriture   Oralité et écriture Icon_minitimeJeu 16 Déc 2021, 13:09

Intéressant.

L'écriture ou le livre, comme tout "cadre", "support" ou "medium" (aussi le cadre et la toile du tableau, la scène et le décor de théâtre, l'écran de cinéma, de télévision, d'ordinateur ou de smartphone) tend à se faire oublier, c'est même essentiel à sa fonction: quand on lit on ne pense pas qu'on lit, pas plus aux signes qu'à l'encre ou au papier, a fortiori quand on écoute une lecture à haute voix -- où l'on oublie aussi la voix, le timbre, au profit d'un "sens" intelligible, prescriptif, narratif ou rhétorique. On est "dedans", le cadre ne cadre qu'autant qu'il s'efface, et avec lui la différence même entre dedans et dehors (voir là-dessus les réflexions de Derrida sur le "parergon", dans La vérité en peinture).

L'"oralité biblique" est par définition une oralité écrite, au même titre que le reste (événements, actes, gestes "prophétiques" ou autres, racontés, décrits). L'écriture y bénéficie par conséquent d'un supplément de mise en abyme, écriture dans l'écriture (comme la pièce dans la pièce chez Shakespeare ou le film dans le film), qui met en valeur autant l'acte d'écrire et ses effets que le "contenu" de l'écriture: c'est vrai chez les Prophètes "écrivains" (Isaïe, mais aussi Jérémie avec ou sans le scribe Baruch, jusque dans les images de l'écriture mangée chez Ezéchiel comme la parole ailleurs, par retournement de l'"oralité" du langage à la nourriture, cf. ici ou là), ça l'est tout autant dans la Torah qui met en scène sa propre écriture (par Dieu et/ou Moïse), ou encore dans Job qui parle d'écrire sa plainte contre Dieu sur le rocher pour qu'elle reste et puisse être lue, reprise ou relevée par d'autres voix après sa mort... Les jeux de la "parole" et de l'"écriture" sont potentiellement infinis et il n'est pas question de les séparer, tout au plus de les opposer fonctionnellement pour comprendre comment elles jouent ensemble, l'une avec et contre l'autre.
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MessageSujet: Re: Oralité et écriture   Oralité et écriture Icon_minitimeJeu 16 Déc 2021, 16:49

"Comment pouvez-vous dire : Nous sommes sages, la loi du SEIGNEUR est avec nous ! C'est bien pour le mensonge que s'est mis à l'œuvre le stylet mensonger des scribes !" (Jér 8,8). 

La Loi « mensongère » des scribes : des prophètes bibliques contre l’écriture

Fonction épistémologique et appropriation des techniques de l’écrit dans la mise en cause de l’autorité d’une parole révélée, au viie siècle av. J.-C.

Moins soumis à la relecture censurante du rédacteur final que les textes narratifs, législatifs ou historiographiques, les écrits prophétiques de la Bible hébraïque nous ont parfois conservé le témoignage étonnant de querelles et/ou de contradictions non résolues au sein du judaïsme ancien. L’un des plus surprenants de ces passages est sans conteste celui où le prophète Jérémie dénonce la « Torah mensongère » des scribes (Jérémie 8,8-9). Aucune ruse exégétique ni interprétative des religions établies sur la Bible n’est parvenue à expliquer ni à gommer cette choquante mise en cause de la Loi par l’un des plus importants prophètes. Pour être comprise, elle doit, à mon sens, être resituée dans le cadre historique du développement économique, démographique, culturel et politique du royaume de Juda au VIIe siècle avant l’ère vulgaire, suite à la destruction de Samarie et à l’annexion du royaume voisin d’Israël par l’Empire assyrien.

Un certain nombre de chercheurs et d’archéologues s’accordent aujourd’hui à considérer que c’est cet essor de Juda (en gros, sous les règnes des rois Ézéchias, Manassé et Josias) qui a créé les conditions d’un développement de l’écriture comme instrument d’exercice du pouvoir politique et religieux sur le royaume. En atteste le fameux récit de la découverte d’une loi écrite enfouie dans la cour du temple sous le règne de Josias (2 Rois 22-23 passim), loi dans laquelle on reconnaît le noyau initial du Deutéronome et de la Torah.

Les prophètes contemporains de ce phénomène de l’essor de l’écrit, dont les textes sont regroupés sous les noms du Proto-Isaïe et de Jérémie, ont donc été confrontés à l’émergence de cette nouvelle technique de transmission des savoirs, d’exercice du pouvoir et d’affirmation de l’autorité ; cette technique dont ils n’ont pas la maîtrise s’installe très vite en position de concurrence efficace contre leurs propres outils de transmission et d’autorité, fondés sur l’oralité et le spectaculaire métaphorique. Quelques passages tirés de ces deux recueils prophétiques attestent un conflit qui se développe alors entre ces deux techniques d’expression, d’interprétation, de compréhension et de transmission de la volonté divine, fondement ultime de tous les pouvoirs religieux et politiques. Ce sont deux de ces passages dont nous présentons ici une analyse.

https://books.openedition.org/pressesenssib/1952?lang=fr
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MessageSujet: Re: Oralité et écriture   Oralité et écriture Icon_minitimeJeu 16 Déc 2021, 18:27

Très bon article -- il me semble que l'avons déjà vu. Là encore, l'opposition de l'écriture au "prophétisme ancien" et à sa "pure oralité" présumée (que ce soit dans les "Premiers Prophètes", notamment Samuel-Rois, ou dans les morceaux d'allure "biographique" des "Derniers Prophètes" ou Prophètes-livres, Isaïe, Jérémie, etc.) néglige à mon sens le fait que celui-ci aussi est écrit, ne serait-ce que sur un mode narratif et descriptif -- c'est l'effet même de l'effacement du cadre dont on parlait précédemment. La différence n'en est pas moins considérable avec les "prophéties" écrites (en particulier sous forme "poétique") dans ce que nous appelons les livres "prophétiques", mais elle en est aussi relativisée (on a toujours de l'écriture, qui met en scène ou non, plus ou moins, de la parole, du geste et de l'écriture).

Ce qu'il me paraît en revanche très important de souligner, surtout par contraste avec la banalité superficielle de l'écriture contemporaine (e-mail, SMS, Twitter et autres réseaux sociaux), c'est bien le caractère "sacral" ou "magique" de l'écriture antique: variable sans doute, d'autant plus sensible que l'écriture et la lecture sont récentes, rares et restreintes à des "corporations" particulières ("scribes") dans un lieu et un milieu donnés, se banalisant au contraire à mesure qu'elles se répandent ou se "démocratisent". L'écriture, la mention, le récit ou la description de l'écriture, le rapport de l'écriture à la parole, tout cela ne pèse pas du même poids d'un texte à l'autre, ni d'une lecture à l'autre du même texte. Nous n'avons évidemment pas d'autre instrument que notre sensibilité pour mesurer ces différences, autant dire que nous ne les mesurons pas du tout, mais nous savons ou sentons quand même qu'il y en a. Il y va aussi, comme toujours, du rapport polyvalent entre "religion", "magie" ou "sacré", "savoir", "connaissance", "sagesse", "science" ou "technique", "société", "culture", "économie" et "politique".

A ce propos, on aurait probablement tort d'imaginer les "scribes" comme une corporation idéologiquement cohérente, car de fait des "scribes", dès lors qu'il y en a, il y en a dans des "milieux" différents (royaux, sacerdotaux, prophétiques, sapientiaux, outre les administratifs et les commerciaux), y compris dans des "écoles" et des "partis" antagonistes (p. ex. pharisiens et "chrétiens" chez Matthieu): c'est effectivement "écriture contre écriture", et sur ce point l'analyse de Batsch (d'après Grottanelli) me paraît tout à fait pertinente. Je serais en revanche plus prudent sur le rapport du mot torah à l'un ou l'autre groupe, d'autant que les groupes ne sont pas hermétiquement cloisonnés: la torah reste "sacerdotale" chez Jérémie (18,18) qui, comme Ezéchiel, est "prêtre" autant que "prophète" (prêtre "désaffecté" en l'occurrence, peut-être par la loi de Josias dans le premier cas, par l'exil dans le second); on peut d'ailleurs imaginer une situation similaire pour Isaïe (le prophète est situé dans le temple, comme un prêtre, au chap. 6).
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MessageSujet: Re: Oralité et écriture   Oralité et écriture Icon_minitimeMer 22 Déc 2021, 11:58

"Moïse descendit du mont Sinaï : les deux tablettes du Témoignage étaient dans la main de Moïse lorsqu'il descendit de la montagne ; Moïse ne savait pas que la peau de son visage s'était mise à rayonner lorsqu'il avait parlé avec lui. Aaron et tous les Israélites regardèrent Moïse : la peau de son visage rayonnait, et ils avaient peur de s'approcher de lui. Moïse les appela : Aaron et tous les princes de la communauté vinrent auprès de lui, et Moïse leur parla. Après cela, tous les Israélites s'approchèrent, et il institua pour eux tout ce que le SEIGNEUR lui avait dit sur le mont Sinaï. Lorsque Moïse eut achevé de leur parler, il mit un voile sur son visage" (Ex 34, 29-33).

On remarquera que, dans ce texte, la transmission semble se faire en deux temps : d’abord à Aaron et aux chefs de la communauté puis à tout le peuple.

"Car ce commandement que j'institue pour toi aujourd'hui n'est pas au-dessus de tes forces ni hors de ta portée. Il n'est pas dans le ciel, pour que tu dises : « Qui montera pour nous au ciel afin de nous l'apporter et de nous le faire entendre, pour que nous le mettions en pratique ? » Il n'est pas de l'autre côté de la mer, pour que tu dises : « Qui passera pour nous de l'autre côté de la mer afin de nous l'apporter et de nous le faire entendre, pour que nous le mettions en pratique ? » Cette parole, au contraire, est tout près de toi, dans ta bouche et dans ton cœur, afin que tu la mettes en pratique" (Dt 30, 11-14).

Ce texte affirme tout simplement que la Loi chacun peut y accéder par l’oralité et la porter dans sa mémoire où elle reste à sa disposition, à tout moment.
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MessageSujet: Re: Oralité et écriture   Oralité et écriture Icon_minitimeMer 22 Déc 2021, 13:00

En Exode 34,31, la "médiation" des "princes de la communauté" (ns'ym b-`dh, mot-à-mot "princes dans la communauté", ce dernier terme étant voisin de ceux qui désignent le "témoin" ou le "témoignage") peut rappeler celle des "anciens" dans la première partie du livre (3,16ss; 4,29; 12,21; 17,5s; 18,12; 19,27; 24,1.9.14; cf. aussi le rôle des "prêtres" avant toute détermination lévitique ou aaronide, 19,22ss), quoique les occurrences se chevauchent en partie (on trouve déjà nsy' pour "prince" ou "chef" en 16,22; 22,28, à nouveau en 35,27). Au chapitre 34 ce serait toutefois une médiation sans médiation, puisque Moïse parle aussi aux "fils d'Israël" (v. 32)... en tout cas il s'agit bien d'une transmission "orale", mais celle-ci n'exclut nullement l'écriture (à commencer par les "tables de la loi"), au contraire, elle se joue avec elle, autour d'elle et par rapport à elle, depuis la "lecture" (à haute voix) jusqu'à l'"interprétation" qu'impose d'emblée toute "pratique", casuistique ou judiciaire: quoi faire, ce n'est jamais "évident" à partir d'un "texte" (mais pas davantage à partir d'une "tradition orale", du moins si elle n'est pas ritualisée) -- même un "mode d'emploi" écrit spécifiquement pour ça requiert un minimum d'interprétation pour passer des mots ou des dessins aux (bons) gestes.

Outre le fait que dans un texte tout est "écrit", même l'"oralité" (je n'y reviens pas), l'écriture (de Dieu et/ou de Moïse) est bien explicitement mentionnée dans l'Exode (17,14; 24,4.12; 31,18; 32,15s.32; 34,1.27s; 39,30), mais au moins autant dans le Deutéronome (cf. 4,13; 5,22; 10,2.4; 28,58; 29,20s.27; 30,10; 31,9.19s.22), où elle se diversifie de multiples manières (6,9; 11,20 sur les linteaux des portes; 17,18 le roi devra copier la loi; 24,1ss l'acte de répudiation; 27,3.8 loi transcrites sur d'autres pierres, monumentales). Dans des passages comme 6,4-9 ou 11,13-21, il est quasiment impossible de distinguer un sens "propre" et "figuré", "concret" ou "métaphorique" de l'écriture, puisque tout se mêle ou se suit dans une métonymie générale (dans le cœur, sur le bras ou la main, sur le front et sur les portes; cf. aussi 10,16 et 30,6 pour la "circoncision du cœur").

On pense forcément à "Paul" et à la façon à la fois semblable (disons "midrashique", même si ça ne veut pas dire grand-chose) et différente (quant aux énoncés) dont "il" utilise ces deux textes: Exode 34 en 2 Corinthiens 2--4, Deutéronome 30 en Romains 10. D'un côté c'est la "lettre" contre "l'esprit", le "voile" jeté sur l'écriture et la lecture (juives) de la Torah contre le dévoilement face au "Seigneur" (le Yahvé de l'Exode devient autant l'"esprit" que le "Christ" portés par l'"évangile", la "bonne nouvelle" proclamée oralement par les "apôtres"; cf. p. ex. ici), de l'autre la "parole" dans la bouche et dans le coeur identifiée à la proclamation apostolique et à la confession ecclésiale de la foi au Christ, "le Seigneur" qui "sauve", "foi" qui elle-même dépend d'une parole entendue. Ces textes mettent différemment en valeur une certaine oralité, mais ils n'en sont pas moins des textes, des "épîtres" elles-mêmes prises dans un jeu d'écriture et d'oralité (écrites et lues, à haute voix, d'abord par et pour les "destinataires", puis par la "canonisation" et la lecture liturgique); et des textes sur des textes (interprétations et commentaires écrits de la "lettre" de l'Exode et du Deutéronome).
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MessageSujet: Re: Oralité et écriture   Oralité et écriture Icon_minitimeMar 11 Jan 2022, 12:47

Le livre des questions met donc en scène des rabbins imaginaires, qui débattent autour de quelques motifs provenant du judaïsme biblique, comme le désert, l’exil, le Jardin, l’écriture et la parole. Derrida suit Jabès très scrupuleusement, soucieux de la lettre du poète. Et pour cause : son commentaire dans son ensemble se veut une réflexion sur la lettre, sur l’écriture et la parole comme modalités bibliques. Ici, nous pouvons voir comment la pensée de Derrida se structure autour du motif de l’écriture, de la question de l’écriture. Or, il est frappant que ce questionnement prenne appui sur la figure du Juif, comme Derrida l’écrit presque au commencement de son texte :

« Dans le livre des questions, la voix ne s’altère pas, ni l’intention ne se rompt, mais l’accent s’aggrave. Une puissante et antique racine est exhumée et sur elle une blessure sans âge dénudée (car ce que Jabès nous apprend, c’est que les racines parlent, que les paroles veulent pousser et que le discours poétique est entamé dans une blessure) ; il s’agit d’un certain judaïsme comme naissance et passion de l’écriture. Passion de l’écriture, amour et endurance de la lettre dont on ne saurait dire si le sujet en est le Juif ou la Lettre elle-même. Racine peut-être commune d’un peuple et de l’écriture. »

Il s’agit ici de ce que Derrida appelle aussi, toujours dans le sillage de Jabès, « une longue métonymie » , par laquelle la « situation judaïque » se confond avec l’aventure de l’écriture. Le Juif serait l’homme de l’écriture, comme le peuple juif le peuple du texte. Avant de nous demander sur quoi s’appuie Derrida dans cette affirmation péremptoire, il importe de le suivre dans son questionnement autour de l’écriture. Mais peut-on définir l’écriture ? Ou alors est-on réduit, parlant de l’écriture, à décrire son mouvement, ou même simplement à suivre ce mouvement qui porte l’homme dans le désert ? Il semble ainsi que le texte de Derrida se contente de suivre un chemin, précisément le chemin de l’écriture qui est aussi, nous l’avons compris, le chemin du Juif. Or, ce chemin le conduit dans le désert, car le l’écriture trace précisément son sillon dans le sable du désert :

« Ce chemin qu’aucune vérité ne précède pour lui prescrire sa rectitude, c’est le chemin dans le Désert. L’écriture est le moment du Désert comme moment de la Séparation. »

Le chemin de l’écriture est « chemin dans le Désert », chemin qui ose « se confier aux traces », dans la mesure où il est sans origine et sans fin, chemin perdu entre « la parole perdue et la parole promise » . Derrida suit ici les grandes lignes du récit biblique qui situe le Désert comme moment intermédiaire entre la parole originaire, entendue au Jardin d’Éden, et la parole de la promesse, qui se fera entendre à nouveau à la fin des Temps. Derrida cite Jabès, qui écrit : « La jardin est parole, le désert écriture. Dans chaque grain de sable, un signe surprend. » Le Jardin renvoie à l’origine édénique, où la voix de Dieu se faisait entendre clairement et distinctement, sans intermédiaire. Or, à la suite de la faute, nous avons été définitivement chassés du Jardin, dans le désert. Le désert est le lieu de l’écriture parce qu’il s’agit d’un lieu sans origine et sans terme, lieu d’errance où l’écriture doit se frayer un chemin comme on se fraie un chemin dans le sable.

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MessageSujet: Re: Oralité et écriture   Oralité et écriture Icon_minitimeMar 11 Jan 2022, 16:52

Article très intéressant, qui concernerait presque autant ce fil où nous avions déjà noté la différence entre "le désert" et "la montagne dans le désert" (14.12.2021): il ne s'agit pas d'une simple opposition (qui ne serait d'ailleurs pas une opposition simple) entre écriture et parole, mais d'un jeu plus complexe impliquant différents types de parole et d'écriture -- sur la montagne, écriture de Dieu (les tables, les premières du moins) et parole de Yahvé, de la proclamation publique et spectaculaire (théophanie) au dialogue secret, lui-même décrit et raconté dans l'écriture, entre Moïse et Yahvé; dans le désert hors montagne, écriture de Moïse mais aussi miracles et dialogues plus discrets, utilitaires et circonstanciés, questions-réponses, casuistique...

Il me paraît tout à fait juste de dire que Derrida, bien que juif et marqué par le judaïsme maghrébin de son enfance, connaissait mal au départ le judaïsme rabbinique (sans doute encore plus mal que la Bible chrétienne), et qu'il s'en est rapproché (tout comme de Levinas et de l'"éthique" en général, mais également du christianisme paulinien et augustinien) dans la seconde partie de son parcours (disons à partir des années 1980); ce qu'en revanche cet article ne dit pas du tout mais qui me paraît sous-jacent à ce débat, c'est qu'il (Derrida) n'avait guère de sympathie "sioniste" ou "pro-israélienne", c'est le moins qu'on puisse dire (contrairement à d'autre penseurs juifs français comme Levinas ou Jankélévitch, ceux-ci se distinguant au demeurant par une judaïté "rabbinique" ou "talmudique", sinon "religieuse", pour le premier, "laïque" voire "athée" pour le second): ce n'est pas sans importance dans l'évaluation du "désert" (par opposition à la montagne de la Torah, mais davantage encore à la Terre promise de la conquête). Sous ce rapport Derrida (même dans sa "première période") aurait été plus proche du judaïsme rabbinique d'avant l'Etat d'Israël, judaïsme qui était plutôt "antisioniste", tenant l'exil ou la diaspora (sinon le désert) pour une condition essentielle de sa "religion" ("l'an prochain à Jérusalem" comme horizon eschatologique repoussé sine die, surtout pas comme programme politique et national à réaliser), que du judaïsme d'après 1948, amené bon gré mal gré à soutenir de plus en plus largement, et souvent inconditionnellement, l'Etat d'Israël (problèmes épineux dont nous avons beaucoup parlé dans ce fil-là).

Cela change aussi pas mal de choses quant au rapport à l'écriture (avec ou sans majuscule), et entre l'écriture et la parole: poème avec Jabès, universel et singulier dans un rapport à la lettre et à l'idiome distinct de celui du logos-pensée-sens idéalement traduisible sans reste et à l'infini dans toutes les langues, et par là "loi" ou programme rationnel, juridique, éthique, politique, technoscientifique, voire cadastre dans les interprétations "sionistes" (sans préjudice des profondes différences entre ces dernières). Non que Derrida ait été un penseur apolitique, bien au contraire, mais sa politique passait par un rapport bien plus différencié à l'écriture et à la langue d'une part, au logos-langage-pensée-programme comme arkhè-origine-principe-autorité-commencement-commandement-loi d'autre part.
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MessageSujet: Re: Oralité et écriture   Oralité et écriture Icon_minitimeLun 24 Jan 2022, 17:46

De la transmission orale aux textes sacrés — Les premiers chrétiens et l’écrit

Un usage quotidien de l’écriture

Au Ier siècle, des gens de toutes catégories savaient lire et écrire. À ce propos, Alan Millard, professeur d’hébreu et de langues sémitiques anciennes, fait la remarque suivante : “ Il était courant d’écrire en grec, en araméen et en hébreu, et ce, dans toutes les couches de la société. ” Et il conclut : “ Tel était l’environnement dans lequel Jésus œuvra. ”

Concernant l’affirmation selon laquelle les textes des Évangiles auraient “ vu le jour au sein d’une société d’analphabètes ”, ce même spécialiste écrit : “ C’est là une idée peu vraisemblable, [car] l’écriture était connue à peu près partout [...]. Par conséquent, il y avait généralement sur place des personnes susceptibles d’écrire ce qu’elles entendaient, que ce soit pour leur propre compte ou pour le communiquer à d’autres. ”

Apparemment, il était facile de se procurer des tablettes enduites de cire pour y inscrire tout ce qu’on voulait. Le premier chapitre de Luc en témoigne. À Zekaria, qui avait perdu temporairement l’usage de la parole, on a  demandé quel nom il voulait donner à son fils. Le verset 63 relate : “ Il demanda [très certainement par gestes] une tablette et écrivit : ‘ Jean est son nom. ’ ” Des dictionnaires bibliques expliquent que le mot “ tablette ” désignait sans doute une planchette de bois, recouverte de cire. Sans doute y avait-​il parmi les personnes présentes quelqu’un qui avait avec lui une tablette prête à l’emploi.

Il ressort d’un autre événement que les tablettes à écrire devaient être couramment utilisées à l’époque. Dans le livre des Actes, on lit que Pierre, s’adressant à une foule de gens à proximité du temple, les a exhortés en ces termes : “ Repentez-​vous [...] que vos péchés soient effacés. ” (Actes 3:11, 19). Le terme “ effacés ” vient d’un verbe grec signifiant “ ôter en frottant, effacer ”. Un dictionnaire de théologie (The New International Dictionary of New Testament Theology) explique : “ Ce verbe évoque très probablement ici, et peut-être ailleurs, l’idée d’une tablette pour l’écriture, recouverte de cire, qu’on lissait avant réutilisation. ”

Les Évangiles montrent en outre que, parmi les disciples et les auditeurs de Jésus, se trouvaient des gens qui employaient certainement l’écriture dans le cadre de leur travail quotidien. Citons les collecteurs d’impôts Matthieu et Zachée (Matthieu 9:9 ; Luc 19:2) ; un président de synagogue (Marc 5:22) ; un officier (Matthieu 8:5) ; Jeanne, femme d’un haut fonctionnaire d’Hérode Antipas (Luc 8:3) ; enfin, des scribes, des Pharisiens, des Sadducéens et des membres du Sanhédrin (Matthieu 21:23, 45 ; 22:23 ; 26:59). Indéniablement, la plupart des apôtres et des disciples de Jésus — sinon tous — savaient écrire.

https://www.jw.org/fr/biblioth%C3%A8que/revues/wp20080901/De-la-transmission-orale-aux-textes-sacr%C3%A9s-Les-premiers-chr%C3%A9tiens-et-l%C3%A9crit/
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MessageSujet: Re: Oralité et écriture   Oralité et écriture Icon_minitimeLun 24 Jan 2022, 21:24

La Watch pompe (sur) les "évangéliques" quand ça l'arrange (je me rappelle avoir entendu Millard à Vaux-sur-Seine, je le connaissais déjà de nom et par écrit, il m'avait frappé par ses positions archi-"conservatrices": l'économie britannique des "sciences bibliques", entre autres, est passablement différente de la nôtre, puisque des opinions extrêmement variées se côtoient poliment dans les mêmes institutions, académiques et ecclésiastiques, du fait que celles-ci sont aussi royales).

Que l'écriture soit relativement répandue au Ier siècle, ça ne fait aucun doute, mais elle reste le fait d'une certaine classe sociale (instruite, sinon riche ou même libre: un esclave peut être plus savant que son maître, cf. Epictète, ou les "esclaves pédagogues" bien connus par l'épître aux Galates), sinon d'une corporation au sens strict (scribes) comme aux époques antérieures: l'écriture est pratiquée dans de nombreuses "professions" différentes, mais non dans toutes et surtout pas au même niveau: s'il y a des scribes professionnels ou semi-professionnels, si la lecture est toujours à haute voix, c'est bien que la pratique de la lecture et de l'écriture n'est pas "universelle", tant s'en faut. Il ne faut pas non plus s'imaginer (comme le suggère Millard, si du moins il est bien cité) que les langues soient égales devant l'écriture: en Palestine comme dans une grande partie de l'empire romain oriental, c'est surtout le grec (koinè) qui est parlé et écrit dans les villes, les dialectes araméens étant plutôt parlés et peu écrits dans les campagnes; l'araméen écrit (qui va devenir le syriaque) se rencontre surtout plus à l'est (Syrie et au-delà); quant à l'hébreu, il n'est plus guère pratiqué que par écrit et par des "spécialistes" (cf. Qoumrân), avant d'être réimposé par la reprise en mains pharisienne des synagogues, après 70 (et encore: les textes rabbiniques combinent un hébreu transformé et beaucoup d'araméen, cf. les Targoums).

Pour les curieux, le pinakidion (tablette) de Luc 1,63 est un diminutif de la pinax qui désigne un "plat" ou un "plateau" (cf. 11,39, notamment celui qui porte la tête de Jean-Baptiste, Marc 6//); quant au verbe ex-aleiphô pour "effacer" en Actes 3,19, il se rapporte régulièrement à l'écriture, mais sans préjuger d'une technique et d'un support particuliers (cf. Colossiens 2,14; Apocalypse 3,5; voir aussi 7,17; 21,4, "effacer les larmes"); cf. aleiphô, quasi-synonyme de khriô = "oindre", pour "enduire", d'huile ou de larmes par exemple (Marc 6,13; 16,1; Matthieu 6,17; Luc 7,38.46; Jean 11,2; 12,3; Jacques 5,14).

Je ne reviens pas sur l'idée (en partie traditionnelle, depuis le Papias d'Eusèbe, mais largement abandonnée en l'état par les études bibliques modernes) du Matthieu "premier évangile", écrit en hébreu et traduit en grec, à laquelle la Watch s'accroche toujours (parce que ça lui permet d'y introduire quelques "Jéhovah", d'après des versions hébraïques médiévales comme Shem-Tov ou Du Tillet): on en a parlé assez souvent par le passé (p. ex. ici ou ).
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