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| De l'amour. | |
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Anagnoste
Nombre de messages : 368 Age : 68 Date d'inscription : 12/02/2011
| Sujet: De l'amour. Jeu 07 Avr 2011, 12:09 | |
| On ne tape sur l'ordinateur le mot "amour" qu'avec crainte et tremblement. Essayons pourtant.
"Ce qui est difficile, dans l'amour, c'est de continuer". Par exemple, faire à manger et faire la vaisselle promptement tous les jours pour sa petite famille. Des milliers de fois, donc.
Mon bout de Dostoïevski du jour, à propos de notre prochain et de notre "lointain" :
" - C'est exactement ce que me disait un médecin, il y a fort longtemps d'ailleurs, observa le staretz. C'était un homme déjà âgé et d'une intelligence incontestable. Il parlait avec autant de sincérité que vous, bien qu'en plaisantant, mais la tristesse se devinait dans sa plaisanterie. "J'aime l'humanité, disait-il, et pourtant il y a une chose qui m'étonne en moi : plus je me sens d'amour pour l'humanité prise en bloc, et moins j'aime les hommes pris isolément, en tant qu'individus avec leur existence propre. Il m'arrive fréquemment, me confiait-il, d'être emporté, dans l'élan de mes rêves, par le désir ardent et passionné de servir l'humanité, et j'aurais peut-être accepté pour de bon de me faire crucifier, si ce sacrifice s'était avéré nécessaire à un moment donné. Et cependant, je ne supporterais pas de vivre deux jours dans une même chambre avec qui que ce fût, je le sais par expérience. Dès que je me trouve en contact étroit avec un autre être, je sens que sa personnalité heurte mon amour-propre et qu'il empiète sur ma liberté. Je serais capable, en l'espace de vingt-quatre heures, de prendre en grippe le meilleur des hommes : l'un me deviendrait insupportable parce qu'il mange trop lentement à table, l'autre parce qu'il est enrhumé et se mouche continuellement. Je deviens l'ennemi des hommes dès que je m'approche d'eux. Mais j'ai constaté chaque fois, affirmait ce médecin, que plus je haïssais les hommes pris individuellement, plus ardent devenait mon amour pour l'humanité considérée en bloc"". ------------------------ "Les frères Karamazov", livre deux, 4° partie, traduction Marc Chapiro.
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| | | le chapelier toqué
Nombre de messages : 2607 Age : 77 Date d'inscription : 31/08/2010
| Sujet: Re: De l'amour. Jeu 07 Avr 2011, 12:24 | |
| L'amour, du moins le mot, est galvaudé à notre époque plus qu'à n'importe quelle autre époque, car pour la plupart des personnes il a un rapport étroit (et ce n'est pas un mauvais jeu de mots) avec les relations sexuelles. Pour d'autres humains un peu fanatisé il emporte la signification de sentiments puissants pour son Dieu pour sa Patrie.
Les discours prononcés par des religieux ou des politiques clament avec force la beauté d'un tel amour signifiant le sacrifice de nombreux hommes ou femmes pour une divinité ou un pays qui tous deux n'en demandaient pas tant.
Et ce mot amour me fait penser au dévelopement actuel du fil sur les contradictions de la bible, puisque nous évoquions le mépris affiché par la société occidentale pour le monde animal; pourtant c'est un sentiment très profond que nous pouvons manifester pour nos compagnons les animaux qu'ils soient nos compagnons journaliers ou que nous les croisions lors de balades.
Merci Anagnoste d'évoquer ce thème de l'amour.
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| | | Narkissos
Nombre de messages : 12460 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: De l'amour. Jeu 07 Avr 2011, 13:05 | |
| Ce passage de Dostoïevski m'en a rappelé un autre, de Teilhard de Chardin, que je retrouve finalement ici: jffp.pitt.edu/ojs/index.php/jffp/article/download/367/362 (Je signale le document non seulement parce que ça se fait mais parce qu'il est intéressant).
Mon Dieu, je vous l'avoue, j'ai bien longtemps été, et je suis encore hélas, réfractaire à l'amour du prochain. Autant j'ai ardemment goûté la joie surhumaine de me rompre et de me perdre dans les âmes auxquelles me destinait l'affinité bien mystérieuse de la dilection humaine -- autant je me sens nativement hostile et fermé en face du commun de ceux que vous me dites d'aimer. Ce qui, dans l'Univers, est au-dessus ou dessous de moi (...), je l'intègre facilement dans ma vie intérieure: la matière, les plantes, les animaux, et puis les Puissances, les Dominations, les Anges, je les accepte sans peine, et je jouis de me sentir soutenu dans leur hiérarchie. Mais 'l'autre,' mon Dieu, --non seulement 'le pauvre, le boiteux, le tordu, l'hébété,' mais l'autre simplement, l'autre tout court,--celui, qui par son Univers en apparence fermé au mien semble vivre indépendamment de moi, et briser pour moi I'unité du silence du Monde, -- serais-je sincère si je disais que ma réaction instinctive n'est pas de le repousser? et que la simple idée d'entrer en communication spirituelle avec lui ne m'est pas un degoût? (37, 184-185). |
| | | Anagnoste
Nombre de messages : 368 Age : 68 Date d'inscription : 12/02/2011
| Sujet: Re: De l'amour. Jeu 07 Avr 2011, 19:26 | |
| Cher Chapelier toqué, chers tous, je cite LCT : "L' amour, du moins le mot, est galvaudé". Je le pense aussi. Il paraît qu'il y a une vieille formule des gens de loi qui dit à peu près ceci : "il est dangereux de définir". Et Rivarol écrit : " Métaphysique. C'est une grande sottise de vouloir définir ce qu'il ne faut que sentir, comme matière, existence, mouvement, repos, etc." Ainsi de l' amour peut-être : personne ne sait ce que sait, et tout le monde sait bien ce que c'est. A bientôt. |
| | | Patoune
Nombre de messages : 356 Age : 62 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: De l'amour. Jeu 07 Avr 2011, 20:50 | |
| Décidément, je ne sais plus sur quel topic poster. Désolée.
La promiscuité tirée des réflexions de Dostoïevski me fait penser à ce verset : Proverbes 25:17 < Fais que ton pied soit rare dans la maison de ton semblable, de peur qu’il n’en ait assez de toi et qu’il ne te haïsse bel et bien.
Bonne soirée à vous.
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| Sujet: Re: De l'amour. | |
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| | | | De l'amour. | |
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