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 Le Salut et le Christianisme

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MessageSujet: Re: Le Salut et le Christianisme   Le Salut et le Christianisme - Page 4 Icon_minitimeMer 24 Avr 2019, 13:29

Ils viennent à Jéricho. Et comme il sortait de Jéricho, avec ses disciples et une foule importante, un mendiant aveugle, Bartimée, fils de Timée, était assis au bord du chemin. Il entendit que c'était Jésus le Nazaréen et se mit à crier : Fils de David, Jésus, aie compassion de moi ! Beaucoup le rabrouaient pour le faire taire ; mais il criait d'autant plus : Fils de David, aie compassion de moi ! Jésus s'arrêta et dit : Appelez-le. Ils appelèrent l'aveugle en lui disant : Courage ! Lève-toi, il t'appelle !Il jeta son vêtement, se leva d'un bond et vint vers Jésus. Jésus lui demanda : Que veux-tu que je fasse pour toi ? — Rabbouni, lui dit l'aveugle, que je retrouve la vue ! Jésus lui dit : Va, ta foi t'a sauvé. Aussitôt il retrouva la vue et se mit à le suivre sur le chemin." Mc 10, 46 ss) 


L'évangile de Marc contient de nombreux miracles ponctués par la formule, "Va, ta foi t'a sauvé", apparemment  cette expression ne limite pas au simple fait de maintenir en bonne santé ou de permettre de conserver une vie, Jésus investit la valeur d'un homme tout entier,dans le cas de l'aveugle, Bartimée (Mc 10, 46 ss), celui-ci n'est pas uniquement guéri dans sa faculté de voir, il est sauvé dans tout son être.
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MessageSujet: Re: Le Salut et le Christianisme   Le Salut et le Christianisme - Page 4 Icon_minitimeMer 24 Avr 2019, 13:47

Le texte est en tout cas écrit de telle façon que le "salut" (religieux, spirituel, éternel) soit évoqué par la "guérison" (physique, narrative, miraculeuse) qui en retour l'illustre; tous les "sens" du même mot résonnent ensemble (harmonique, sympathie). Et cela ne vaut pas que pour le verbe sôzô (sauver), mais aussi, p. ex., pour anistèmi ou egeirô qui rappellent plus ou moins discrètement la "résurrection" chaque fois qu'il est question de "se lever", "s'éveiller", "susciter", etc...

(Incroyable bêtise à cet égard des traductions dites "dynamiques" qui se font un devoir de varier les équivalences en fonction du contexte, de sorte qu'on n'entend plus du tout "sauver" dans "guérir", ni l'inverse, ni "se lever" ou "s'éveiller" dans "ressusciter", ni l'inverse...)
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MessageSujet: Re: Le Salut et le Christianisme   Le Salut et le Christianisme - Page 4 Icon_minitimeJeu 25 Avr 2019, 16:16

Une histoire du salut universel

Le cantique de Syméon fonctionne comme une annonce anticipée du salut offert à tous les peuples, tout en englobant Israël dans la formule « tous les peuples ». S’il est accordé aussi aux païens, le salut n’est jamais retiré à Israël. Un peu plus loin dans le récit, la citation d’Ésaïe 40, 3-5 en Lc 3 confirme l’intention de l’auteur d’indiquer en filigrane la portée universelle du salut. Alors que dans la présentation du ministère du Baptiste, Matthieu et Marc ne citent que le verset 3 d’Ésaïe 40 (Mt 3, 3 ; Mc 1, 3), Luc choisit de poursuivre la citation jusqu’au verset 5 : « et tous verront le salut de Dieu » (Lc 3, 6).

L’expression « le salut de Dieu » ne se rencontre qu’à deux reprises en Lc-Ac : ici (Lc 3, 6) et à la fin du livre des Actes (28, 28). Entre ces deux bornes du récit, Luc a donc ménagé un arc narratif, manifestant que son œuvre est à lire comme l’histoire du salut déployé en faveur de tous. Prédit par Jean le Baptiste, et avant lui par les prophètes, ce salut est incarné par Jésus mais refusé par la majorité des juifs, pour être en finale offert aux païens, qui, « eux, écouteront » (Ac 28, 28). Le dernier mot n’est cependant pas prononcé sur le sort d’Israël, comme nous le verrons plus loin  : l’universalisme n’exclut pas pour autant du salut le peuple choisi. https://www.cairn.info/revue-etudes-theologiques-et-religieuses-2012-1-page-35.htm
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MessageSujet: Re: Le Salut et le Christianisme   Le Salut et le Christianisme - Page 4 Icon_minitimeVen 26 Avr 2019, 12:24

Presque tous les textes du NT sont antijudaïques, à des degrés et sur des modes divers. Luc-Actes l'est sans doute de façon moins hargneuse que Matthieu et moins "métaphysique" que Jean, mais son antijudaïsme, historico-politique comme sa "théologie", est probablement beaucoup plus lourd de conséquences. Insister sur un "salut" longtemps offert en priorité à Israël, c'est aussi construire l'image d'un "refus" persistant, qui n'est plus l'affaire d'une décision ponctuelle de quelque sanhédrin mais l'attitude constante et dominante de tout un "peuple", dans toute l'extension de l'empire et toute la durée de l'histoire, malgré toutes les exceptions individuelles ou familiales (conversions) qui confirment la règle "ethnique" de l'endurcissement délibéré. "Tout a été fait pour le prévenu, hélas! il n'en a pas voulu", ce discours d'allure débonnaire, charitable, compatissante et condescendante est précisément l'argument d'une plaidoirie à charge, il faut être très naïf ou très malhonnête pour ne pas le reconnaître.

Evidemment on peut se dire que "c'était de bonne guerre", surtout à une époque où le statut de l'ethnos "juif" était moins précaire dans le droit romain que celui de la superstitio "chrétienne". L'accusation politique (fauteurs de trouble, etc.) vise d'ailleurs particulièrement les "Juifs d'Asie" (Mineure), région où le problème du culte impérial (dont les Juifs étaient exemptés d'office) semble avoir été plus sensible qu'ailleurs (cf. aussi l'Apocalypse). Reste que les textes survivent à leur contexte, aussi pour le pire...

Que le "salut" (sôtèria) et le "sauveur" (sôtèr) deviennent des "concepts abstraits" et quasiment "techniques" du christianisme (comme de bien d'autres "mystères"), c'est ce que reflète précisément la part croissante de tels substantifs (par opposition à l'usage beaucoup plus souple du verbe sôzô, qui oscille comme on l'a vu du "sauvetage" ordinaire au "salut" religieux en passant par la "guérison" miraculeuse); cela trahit aussi le caractère tardif des textes dits "lucaniens" (Luc-Actes); idem pour les Pastorales: on n'a jamais tant parlé de "sauveur" et de "salut",  universel de surcroît (cf. 1 Timothée 2,3ss etc.), que dans une "Eglise" en passe de devenir "catholique" (= "universelle").
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MessageSujet: Re: Le Salut et le Christianisme   Le Salut et le Christianisme - Page 4 Icon_minitimeVen 06 Aoû 2021, 16:24

"Qui vous accueille m'accueille, et qui m'accueille accueille celui qui m'a envoyé. Qui accueille un prophète en sa qualité de prophète obtiendra une récompense de prophète, et qui accueille un juste en sa qualité de juste obtiendra une récompense de juste. Quiconque donnera à boire ne serait-ce qu'une coupe d'eau fraîche à l'un de ces petits en sa qualité de disciple, amen, je vous le dis, il ne perdra jamais sa récompense" (Mt 10,40-42).


Celui qui accueille l’envoyé recevra la même récompense que lui. L'accueil est la critère qui octroie la récompense, cela n'impose pas l'obligation de devenir un disciple. Le "disciple" est assimilé soit à un "prophète", soit à  et "juste" mais le disciple est aussi qualifié de " petit". Le verre d’eau est la plus petite manifestation de l’accueil, qui justifiera une récompense. Alors que le v 33 envisage le cas de celui qui n’accueille pas Jésus et que les v (34-36) insistent sur la division qu’il apporte, le texte qui nous intéresse est entièrement positive, ne considérant que le bon accueil fait aux disciples. Il y a un lien entre "accueil" et "récompense" ... A quoi correspond "une récompense de prophète" ? Existe-t-il une différence entre le "salut" et la (ou une) "récompense" ?
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MessageSujet: Re: Le Salut et le Christianisme   Le Salut et le Christianisme - Page 4 Icon_minitimeVen 06 Aoû 2021, 17:41

D'abord, au risque de paraître chipoter, "recevoir une récompense/salaire de prophète/juste/disciple" parce qu'on a "accueilli (ou offert une coupe d'eau à) un prophète/juste/petit au nom d'un prophète/juste/disciple" (je traduis à peu près mot-à-mot), ce n'est pas forcément recevoir la même récompense/salaire que lui (à supposer que tous les prophètes/justes/disciples reçoivent la même récompense/salaire). C'est une interprétation possible du texte, non la seule possible (on peut comprendre une récompense/salaire de même genre, de même nature, etc., mais pas forcément du même niveau, puisque la récompense/salaire se prête exemplairement à la variation quantitative et qualitative).

Ensuite, la principale différence que je vois entre le "salut" (le substantif sôtèria n'apparaît jamais chez Matthieu, mais le verbe sôzô, "sauver", y est fréquent, 1,21; 8,25; 9,21s; 10,22; 14,30; 16,25; 18,11; 19,25; 24,13.22; 27,40.42.49) et la "récompense/salaire" (misthos, traduit tantôt par "récompense" et tantôt par "salaire", pour des raisons qui tiennent plus à l'usage du français et à la tradition qu'à une véritable polysémie du grec, cf. 5,12.46; 6,1s 5.16; 10.41s; 20,8 ), c'est que ces deux mots sont inégalement intégrés dans la terminologie et la doctrine chrétiennes en général, et matthéennes en particulier: "salut" et "sauver" (surtout au passif, être "sauvé") sont des "mots-clés" du christianisme, qui y occupent une place centrale, au coeur de la (confession de) "foi", et constituent par là même ce que j'appelle des blocs signifiant-signifié-référent: quand on entend "salut" ou "sauvé" en contexte chrétien on ne se demande généralement pas ce que ça veut dire, parce qu'on croit le savoir, cela fait partie intégrante de la croyance qui détermine l'identité "chrétienne" et la reconnaissance mutuelle à l'intérieur de l'Eglise; c'est beaucoup moins vrai de la "récompense/salaire", qui demeure un signifiant ordinaire, à la limite de la métaphore, dont le signifié et le référent restent en partie indéterminés ou à déterminer; d'autant qu'il apparaît dans toute sorte de contextes, notamment des paraboles plus ou moins allégorisées qui appellent une interprétation (la récompense/salaire signifie autre chose qu'une récompense ou un salaire ordinaires). Quand il entend "récompense-salaire", le lecteur (chrétien) peut donc se demander ce que ça veut dire: il pourra penser que "la récompense/salaire" signifie "le salut" (ou éventuellement autre chose); il ne dira jamais que "le salut" signifie "la récompense/salaire", parce que la fonction même de "signification" va du moins connu au plus connu, et non l'inverse; pour le dire autrement, la "récompense/salaire" pose question, c'est une inconnue "x" à déterminer, tandis que "le salut" est une réponse, une "solution" présumée connue qui met fin à toute question et à tout problème. (A l'inverse, quand le verbe "sauver" intervient dans des récits de miracle avec le sens de "guérir" au degré zéro de la narration, le lecteur chrétien entend comme par écho son "salut" religieux de référence, à la condition du moins que la traduction ne l'en empêche pas en rendant sôzô autrement que par "sauver").

Comme j'avais tenté de l'expliquer plus haut (cf. notamment la discussion de mi-décembre 2016, sur Matthieu 25), il demeure dans le christianisme en général (tout autant dans le judaïsme et l'islam) et dans Matthieu en particulier une tension, une contradiction logique qui relève plus de l'aporie que du paradoxe, entre l'idée commune d'un jugement binaire des individus, qui ne connaît que deux issues possibles (on est ou "sauvé" ou "perdu", il n'y a pas de moyen terme ni de troisième possibilité), et celle d'un jugement différencié et proportionné des oeuvres (chaque "bonne action" doit être récompensée, chaque "faute" doit être punie, peu importe qui l'a commise). Le problème paraît d'autant plus insoluble que le NT ne recourt pas (sauf oubli de ma part) à la solution classique (égyptienne, grecque ou rabbinique p. ex.), pondératrice ou comptable, de la "pesée", de la "balance" ou du "bilan", de la somme et de la différence des bonnes et des mauvaises actions qui détermineraient le jugement global de la personne. Pour concilier sans cette médiation l'idée d'un jugement binaire des individus et d'un jugement infiniment différencié des actes il faudrait, à la limite, qu'il y ait de la "punition" jusque dans le "salut" et de la "récompense" jusque dans la "perdition", ce qui n'est certes pas inintéressant mais défie l'imagination dogmatique. Bien sûr celle-ci ne manque pas de ressources, on peut penser au purgatoire catholique qui fournit une solution partielle à ce problème; partielle seulement, parce qu'il ne résout pas le problème symétrique de la récompense des damnés (réprouvés, perdus, etc.), ne serait-ce que pour une seule "bonne action" dans un océan de crimes (cf. le midrash rabbinique de la femme "sauvée" en étant transportée par un ange au-dessus du feu de la géhenne, accrochée à la tige de l'oignon qu'elle a, une seule fois dans sa vie, donné à un mendiant; ou la hiérarchie des cieux et des enfers illustrée par la Divine comédie de Dante, qui réintroduit de la différence dans les deux sens). On pourrait en rapprocher une autre idée particulièrement matthéenne, celle du jugement plus ou moins sévère qui elle aussi s'accorde mal avec la perspective d'un jugement à (seulement) deux issues (10,15; 11,22.24; 12,41s; cf. déjà Marc 12,40 et encore Luc 10,14; 11,31s; 20,47); ou la gradation des productivités, rendements et récompenses/salaires, parfois même des châtiments (Luc 12,47) dans de nombreuses paraboles (semeur, talents, mines, etc.); ou encore l'image paulinienne d'un salut "à travers le feu" (1 Corinthiens 3), qui évoque à son tour d'autres images évangéliques (baptême de feu, salé par le feu etc.).

Il ne faut pas oublier que le logion de Matthieu 10,42 (non son contexte) provient de Marc 9,41, qui se situe dans un tout autre contexte (de l'épisode de l'"exorciste indépendant" à la série des "scandales" et des "amputations", qui aboutit justement au "salé par le feu", v. 49; cf. Matthieu 18,6ss; Luc 17,1s etc.). La formulation habituellement retenue dans Marc est plutôt embarrassée, mot-à-mot: "car qui vous fait boire une coupe d'eau au nom que vous êtes de Christ (sic, c'est en tout cas aussi mal dit en grec qu'en français), amen je vous dis qu'il ne perdra pas sa récompense/salaire." Dans cette lectio difficilior il semble y avoir confusion ou télescopage de plusieurs expressions, p. ex. "en mon nom" (variante fréquente des manuscrits) et "être de Christ". En tout cas c'est bien une référence au "Christ" seul que Matthieu généralise en parlant de prophète, de juste et de petit/disciple, et c'est encore lui qui la fait contraster ostensiblement, comme expression de la "récompense-salaire" assurée a minima pour le moindre geste d'hospitalité, avec l'exigence maximale énoncée à l'adresse des disciples aux v. 37-39 (// Luc 14,26ss; Jean 12,25; Thomas 55; 101) -- Marc a bien ailleurs l'exigence du reniement de soi et de la prise de croix (8,34ss // Matthieu 16,24ss; Luc 9,23ss), mais non du mépris ou du rejet relatif ou absolu des siens (aimer moins ou haïr).
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MessageSujet: Re: Le Salut et le Christianisme   Le Salut et le Christianisme - Page 4 Icon_minitimeLun 09 Aoû 2021, 11:32

Mt 6,2


Quand donc tu fais une aumône, ne claironne pas devant toi, tout comme (hôsper) font les hypocrites (hoi hupokritai) dans les synagogues et dans les rues, en vue qu’ils soient glorifiés par les humains. Amen, je vous dis : ils reçoivent leur récompense (misthon).
La formulation emprunte un verbe conjugué à la deuxième personne du singulier, comme dans les deux versets suivants. Au v. 5 on retrouve le pluriel, comme au v.


1. Cette alternance fait écho à de nombreux passages législatifs de l’Ancien Testament.




Comme en Mt 5,20 on peut remarquer qu’en Mt 6,1 la séquence s’ouvre par une indication générale concernant la justice (dikaiosunè) : « Gardez-vous de pratiquer votre justice devant les humains en vue d’être remarqués par eux ; sinon, certes, vous n’avez pas de récompense auprès de votre Père qui est dans les cieux. » Cette mise en garde sert de point de repère pour les différents domaines qui vont être examinés successivement : l’aumône, la prière, le jeûne. En 6,2-4 c’est l’aumône qui est prise en considération, l’une des prescriptions de la pratique juive. Ce cadre est précisé par l’évocation des synagogues.


Le contre-exemple est désigné par le terme : « hypocrites ». Il s’agit du premier emploi de ce mot dans Mt (le seul évangéliste à l’employer, avec Mc qui ne l’utilise qu’une fois : en Mc 7,6, texte parallèle à Mt 15,7). Ce vocable, en grec, désigne un acteur. Les nuances de son utilisation, chez Mt, sont à déterminer chaque fois en fonction du contexte, car, suivant les cas, il met en relief différents trait. Ici, ce qui fait l’objet du reproche exprimé, ce n’est pas d’agir en contradiction avec ce que l’on professe, mais de se comporter de manière ostentatoire pour rechercher la considération des autres. La fin du verset sonne de façon ironique, dans sa formulation positive, faisant contraste avec l’énoncé négatif de 6,2b évoquant la figure du Père céleste : « ils reçoivent leur récompense », car cette récompense reste au niveau terrestre, humain, temporel. La même formule reviendra comme un refrain en 6,5 (au sujet de la prière) et en 6,16 (à propos du jeûne). Le choix du terme misthos permet à Mt d’évoquer la thématique de la rétribution.


Les v. 3-4 décrivent, en positif, la pratique que Jésus demande à ses disciples : s’acquitter de l’aumône dans le secret. On se trouve donc ici devant une opposition entre deux comportements, pas une simple gradation. C’est devant Dieu et non pas devant les hommes que l’aumône prend sa valeur. La dimension théologique déjà exprimée au v. 1 est explicitée en conclusion au v. 4 : « ton Père qui voit dans le secret te le rendra. »


https://www.cairn.info/revue-transversalites-2014-1-page-61.htm
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MessageSujet: Re: Le Salut et le Christianisme   Le Salut et le Christianisme - Page 4 Icon_minitimeLun 09 Aoû 2021, 12:06

Cet article (je crois que nous l'avions déjà vu, mais où ?) me semble surtout intéressant par son critère opératoire de sélection, la "démarcation" (soit les énoncés "ne pas être/faire comme X").

En ce qui concerne misthos (la "récompense-salaire" dont je parlais précédemment), je soulignerais que la distinction essentielle pour Matthieu est exprimée à la fois (ou alternativement) sur un mode spatial (au ciel / sur terre) et temporel (futur / présent), qui rejoint l'usage du "trésor" (thesauros, thesaurizô etc., 6,19ss; 19,21 // Marc 10,21): ou bien la récompense-salaire-trésor est (présentement) "au ciel" (avec le "coeur" correspondant le cas échéant) et peut donc s'escompter au futur -- c'est parce qu'elle est ailleurs-maintenant qu'elle constitue l'espoir d'une possession à venir; ou bien elle est ici-maintenant et il n'y a plus rien à attendre de l'avenir.

Il y a là une opposition ou une résistance de fond à tout ce qu'on appelle "actualisation de l'eschatologie", sur un mode "myst(ér)ique" ou "gnostique", où le "déjà-là" l'emporte sur le "pas encore", notamment dans le paulinisme (surtout à partir de l'épître aux Romains, a fortiori dans les deutéro-pauliniennes, Colossiens-Ephésiens; par contraste, la correspondance corinthienne qui reste dominée par une eschatologie futuriste paraît encore assez "matthéo-compatible", cf. notamment 1 Corinthiens 15,19) et plus encore dans le johannisme. Cette tendance principale de Matthieu n'est toutefois pas dépourvue de contre-courants, comme en 19,29 hérité bon gré mal gré de Marc 10,29 (il y a des compensations immédiates avant la "vie éternelle").
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MessageSujet: Re: Le Salut et le Christianisme   Le Salut et le Christianisme - Page 4 Icon_minitimeMar 10 Aoû 2021, 11:09

L’emploi du terme Salaire/récompense chez Matthieu n'est-il pas un "pavé dans la mare" de l'apôtre Paul ?


"Or, à celui qui fait œuvre, le salaire est compté non comme une grâce, mais comme un dû" (Rm 4,4)


Un travailleur, celui qui accomplit des œuvres (ergazomenô), perçoit un salaire (misthos) correspondant au travail qu’il a effectué par sa propre capacité à le réaliser. Ce salaire est la récompense méritée, portée au compte (logizetai) du travailleur comme ce qui lui est dû (opheilèma). Le verset 4 ne fait qu’évoquer l’échange résultant des clauses d’un contrat de travail déterminé dans le cadre de la législation sociale. Le salaire est donc un dû résultant d’un travail accompli, mais en aucun cas il n’est le résultat d’un acte gratuit. Il ne s’agit pas d’un cadeau (kata charin), mais d’un droit acquis. La signification du verbe logizomai résulte ici de la comptabilité commerciale et financière : « compter, porter au compte de » quelqu’un quelque chose qui ne lui appartient pas en propre mais qu’il a acquis par son effort personnel. Le croyant est fondamentalement différent du travailleur. Déjà, il n’est pas à l’ouvrage (mè ergazomenô), donc il n’a pas d’œuvre à faire valoir pour obtenir un « salaire ». Il est celui qui attend, oisif, qu’il lui tombe du ciel ! En d’autres termes, il est celui qui reçoit parce qu’il dépose sa confiance en quelqu’un d’autre. Or, c’est bien celui-ci, le croyant (pisteuonti), que Dieu récompense. C’est cette « polarité »37 entre le travailleur et le croyant qui illustre la signification du verbe logizomai qui parcourt Romains 438. Pour le « travailleur », le salaire lui est compté sur la base de son mérite, de son dû. Pour le « croyant », il l’obtient « selon la grâce » (kata charin), sur la base de sa confiance déposée en quelqu’un d’autre, c’est-à-dire par sa foi. Paul a effectué ici, tout en utilisant la même terminologie, plus qu’une transposition sémantique : il est passé du langage financier à une application d’ordre théologique qui a une tout autre signification. Dieu est celui qui justifie, non pas celui qui travaille, mais celui qui « refuse de travailler », c’est-à-dire, l’impie (asebè). ». C’est ainsi que Paul définit Dieu : Celui qui justifie l’impie. La formule est, comme le souligne S. Légasse, « surprenante, voire scandaleuse à double titre ». D’abord, dans la tradition biblique, Dieu ne justifie pas l’impie, comme le montrent les textes tels que Ex 23, 7 ; Pr 17, 15 et Is 5, 23. Un texte comme Gn 18, 23-25 indique clairement l’opposition d’Abraham à l’idée que Dieu puisse traiter de la même manière « l’impie » (o asebès) et le « juste, croyant » (o dikaios). Ensuite, le contexte immédiat41 et celui déduit de l’interprétation de Genèse 15, 6 montrent que Paul exprime la réalité de la situation d’Abraham. C’est bien Abraham, qui n’était pas à l’ouvrage, qui a été reconnu juste parce que « croyant » en la promesse divine. Cette interprétation d’un Dieu qui justifie l’impie apparaît nettement comme argument polémique et provocateur vis-à-vis de la tradition juive : la justice de Dieu n’est pas déterminée par la référence au respect de l’alliance. Si, pour certains auteurs, la justification de l’impie est le point central de l’argumentation de Paul, pour d’autres, Abraham ne saurait être l’impie.

https://journals.openedition.org/rsr/1942?lang=en#tocto1n2
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MessageSujet: Re: Le Salut et le Christianisme   Le Salut et le Christianisme - Page 4 Icon_minitimeMar 10 Aoû 2021, 11:36

Joyeux anniversaire ! (?)

free a écrit:
L’emploi du terme Salaire/récompense chez Matthieu n'est-il pas un "pavé dans la mare" de l'apôtre Paul ?

Ou une pierre dans son jardin ? Certainement, mais là-dessus encore (cf. mon dernier post, dernier paragraphe) l'antagonisme ne fonctionne que par rapport au paulinisme de l'épître aux Romains (ou aux Galates si on la croit antérieure, ce qui n'est pas mon cas) et au-delà: dans 1 Corinthiens "Paul" utilisait le mot misthos (récompense/salaire) sans la moindre réserve (3,8.14; 9,17s), dans un sens tout à fait "matthéo-compatible" (qualification anachronique, puisque de toute évidence l'évangile selon Matthieu n'était pas encore écrit). Il n'y a rien là que de très logique, puisqu'il ("Paul") n'avait pas encore élaboré sa théorie de la "justification par la foi", qui seule impliquerait une doctrine de la "grâce" rigoureusement contraire à celle de la "récompense/salaire". (Le mot misthos ne reviendra sous la signature de "Paul" que dans les très tardives Pastorales, 1 Timothée 5,18; et encore, dans une citation qui, si elle n'était pas simplement proverbiale, se référerait à l'évangile selon Luc, 10,7, ou du moins à une "tradition" sous-jacente.)
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MessageSujet: Re: Le Salut et le Christianisme   Le Salut et le Christianisme - Page 4 Icon_minitimeMar 10 Aoû 2021, 11:53

Citation :
Joyeux anniversaire ! (?)

Merci Infiniment Narkissos.
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MessageSujet: Re: Le Salut et le Christianisme   Le Salut et le Christianisme - Page 4 Icon_minitimeMer 22 Sep 2021, 12:13

Narkissos : ou encore l'image paulinienne d'un salut "à travers le feu" (1 Corinthiens 3), qui évoque à son tour d'autres images évangéliques (baptême de feu, salé par le feu etc.).


Le « feu purificateur » au Jugement dernier

Selon une exégèse de I Cor. 3-15, l'on a considéré que certains pécheurs peuvent être sauvés après la mort, à travers un passage plus ou moins long dans un feu qui châtie et purifie ceux qui en ont encore besoin. Ce feu, qui est généralement placé à la fin des temps, est identifié avec le feu du Jugement dernier. Dans la perspective de cette exégèse, qui postule que le dernier « jour » aura une certaine durée, le temps de la purgation, identifié plus tard avec le Purgatoire, est situé à l'intérieur même du Jugement dernier.

Les fresques commanditées par la communauté des Ermites de Saint-Augustin et réalisées dans les premières années de 1400 par Ottaviano Nelli pour l'église Saint-Augustin de Gubbio (Courcelle J. et P. 1969) présentent un Purgatoire inséré dans la composition d'un Jugement dernier. Une fois sortis des tombeaux, les ressuscités se dirigent vers leurs demeures éternelles : les damnés sont tout de suite entraînés en Enfer et ceux qui sont destinés à être sauvés passent à travers une fosse en feu avant d'entrer au Paradis. Se trouvant ainsi coincé entre la résurrection et la porte du Paradis, le Purgatoire est présenté comme un passage obligatoire des justes à travers un feu purificateur.

Puisqu'elle est située dans une église des Ermites de Saint-Augustin, cette image du Purgatoire, identifiée avec le feu de la fin des temps, n'est peut-être pas sans rapport avec l'exégèse d'Augustin sur la première épître de Paul aux Corinthiens, dans la première phase de sa réflexion eschatologique (Ntedika 1966). Mais il faut dire aussi qu'Augustin n'apporte ici rien de bien original, puisqu'il reprend l'enseignement des Pères des iiie et ive siècles sur la purification à travers le feu du jugement, à la fin des temps (Ntedika 1966 : 67).

Mais Augustin est aussi le premier à avoir énoncé, dans le cadre de l'exégèse de I Cor. 3, 10-15, l'existence d'un feu purgatoire entre la mort et la résurrection (Ntedika 1966 : 68). En le plaçant immédiatement après la mort, Augustin a ébauché un des principaux aspects de la future doctrine du Purgatoire (Le Goff 1981 : 115-116). La durée de cette purgation ne peut être conçue au-delà du Jugement dernier ; pourtant, si, à ce stade, certaines âmes ont encore besoin de purification, elles seront purifiées complètement par le feu du Jugement dernier (Augustin, De Civit. Dei, 1, XX, c. XXVI).

https://journals.openedition.org/terrain/3048
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MessageSujet: Re: Le Salut et le Christianisme   Le Salut et le Christianisme - Page 4 Icon_minitimeMer 22 Sep 2021, 13:40

Très intéressante étude -- les images en disent souvent plus long que les textes -- et utile rappel, entre autres, que le "purgatoire" est d'abord un adjectif (le feu purgatoire, c.-à-d. purificateur).

Naturellement, l'exégèse (protestante ou autre) aura tôt fait de rétorquer que le contexte de 1 Corinthiens 3 ne parle nullement de l'"après-mort" en général, mais du jugement (a priori eschatologique) des "apôtres" (au sens paulinien) ou des "maîtres-enseignants", dont l'"oeuvre" subsistera ou périra indépendamment de leur "salut" personnel. Cela ne change cependant rien aux questions de fond qui se posent, non à partir de tel ou tel texte, mais de l'ensemble de la "doctrine" chrétienne, du "salut" et de la "perdition" d'une part, de la "théo-christologie" d'autre part. Dès lors que l'ensemble du jeu "salut-perdition" se joue "en Christ" comme en "Dieu", et que ce Christ-Dieu embrasse la totalité de l'histoire et du monde pensables, du "commencement" à la "fin" (alpha et oméga, etc.), ce qui devient rigoureusement impensable c'est que quoi ou qui que ce soit y échappe (l'horizon ultime c'est "Dieu-tout-en-tout/s", comme l'origine c'est "Dieu et rien d'autre"). Toute la "logique" d'une telle théo-logie englobante tend à l'universalisme de l'"apocatastase" (cf. Origène ou Grégoire de Nysse), parce que tout le "négatif" (péché, mal, diable, châtiment, etc.) ne peut y être conçu que comme un moment nécessairement "dépassé" par l'ensemble du mouvement (cf. Maître Eckhart: c'est le non qui brûle en enfer). Ce qui devient insoutenable dans cette perspective, c'est la différence entre un "enfer" (définitif) et un "purgatoire" (provisoire), et même entre tout cela et un "salut" qui passe aussi par le péché, le châtiment conçu comme correction ou purification, voire la perdition même selon les paradoxes évangéliques (perdre / sauver son âme / sa vie, prendre sa croix, premiers / derniers, etc.). Au fond toutes ces distinctions ne tiennent, pour le peu qu'elles tiennent encore, que par la nécessité "politique" ou "pastorale" de maintenir une distance fonctionnelle, fût-elle provisoire jusque dans son allure "définitive", entre la carotte et le bâton...
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