- pimprenelle a écrit:
- Faut-il prendre la Genèse au sens littéral?
La Bible n'est pas un livre de science mais de foi .
Il faut noter qu'il y a deux récits de la création.
Le mythe d'origine rapporté en Gen. 1, 1-2, 4a (
texte n°1) est habituellement désigné comme le " récit sacerdotal " de la création. Ce qualificatif résulte d'observations qui rattachent ce récit à un ensemble de textes présents dans les livres de Genèse à Lévitique (Pentateuque sauf le Deutéronome) et manifestant des caractéristiques communes de vocabulaire, de style et de théologie. L'attention que ces textes portent aux questions de calendrier, de généalogies, de pureté rituelle, ainsi que l'ensemble des lois cultuelles qu'ils rassemblent les rattachent sans conteste au milieu sacerdotal de Jérusalem.
Le récit de la création lui-même est caractérisé par l'utilisation du schéma de la semaine et la mise en valeur du septième jour. D'un point de vue narratif, ce récit est donc d'abord la légitimation d'un calendrier fondé sur le septénaire et l'observance du Sabbat ; en déployant ainsi l'acte créateur sur une semaine, il l'assimile implicitement à une œuvre liturgique. La création est présentée comme un processus en plusieurs étapes : organisation du temps et de l'espace (vv. 3-10), ornementation du cadre terrestre et céleste (vv. 11-19), création des êtres vivants, animaux et humains (vv. 20-31). Image du Créateur, l'homme apparaît en dernier, dans un monde qui semble avoir été fait pour lui et qu'il doit dominer ; il y apparaît revêtu d'un caractère royal. On remarque en outre le soin apporté à " séculariser " le
cosmos en insistant sur la création des astres (1,14-19), et à éliminer le plus possible les anthropomorphismes dans la manière de parler de Dieu : l'acte créateur est réduit à la parole, parole qui crée et qui nomme (c'est-à-dire fixe le destin). En dehors de la première personne du pluriel utilisée au v. 26 (" faisons l'homme à notre image ") qui fit l'objet d'innombrables commentaires, le texte souligne donc l'unité absolue et la transcendance du Créateur.
Dans le long récit de Gen. 2-3 (
texte n°2), il est possible de distinguer deux récits distincts : un récit de création et un récit de chute 4, le second ayant vraisemblablement été composé postérieurement pour compléter le premier. Nous ne nous intéresserons ici qu'au récit de création qui représente notre deuxième modèle. On le qualifie habituellement de " récit yahviste " pour le distinguer du récit sacerdotal.
Sans pouvoir le dater avec plus de précision, on remarque qu'il comporte tous les traits caractéristiques d'un véritable mythe de création : il débute par une énumération de tout ce qui n'existait pas encore au moment où l'action commence (vv. 4-5), il ne craint pas une représentation anthropomorphique de Yahvé, il reprend le
topos mythologique de la création de l'homme à partir de l'argile du sol, il raconte la création des animaux comme une création manquée, et celle de la femme comme la solution à un problème : la solitude de l'homme. Il a une valeur étiologique très forte et sur plusieurs plans : il définit la relation des êtres vivants - et de l'homme (
adam) en particulier - avec le sol (
adamah) dont ils sont formés. Il fonde la position respectives des êtres vivants dans le monde : position centrale pour l'homme, car le jardin a été planté pour lui, les animaux ont été faits pour lui être une aide, ainsi que la femme. Le fait qu'il soit laissé à l'homme le soin de nommer les animaux (fixer leur destin) signifie sa position de souveraineté à leur égard, et cela est également vrai par rapport à la femme. Sans que cela soit explicité, on comprend que l'enthousiasme juvénile de l'homme en découvrant sa nouvelle compagne l'éloignera du monde animal sur lequel il régnait jusque là pour fonder avec elle la famille humaine.
Enfin, ce mythe raconte non seulement le comment de la création de l'humanité et des animaux, mais aussi le pourquoi, dans une perspective tout à fait conforme à la vulgate mythologique du Proche-Orient ancien : l'humanité a été créée pour travailler le sol. Le point de départ de l'intrigue est donné dans le manque initial exprimé au v. 5b : " et il n'y avait pas d'humain (
adam) pour travail l'humus (
adamah) ", et la courbe narrative trouve son aboutissement en 3,23b (où il s'agit d'un envoi en mission et non d'une expulsion). On note bien sûr, qu'à la différence des mythes mésopotamiens, il n'est pas question de travailler pour assurer l'entretien des dieux ; le travail du sol n'est pas un servage, mais comme une activité libre de mise en valeur du jardin divin dont l'homme est l'intendant.
http://eduscol.education.fr/cid46348/la-genese-et-les-mythes-d-origine.html