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 changements de stratégie

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Narkissos

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MessageSujet: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeSam 16 Oct 2021, 15:23

Il leur dit: Quand je vous ai envoyés sans bourse, ni besace, ni sandales (cf. 10,4; 9,1s // Matthieu 10,1ss // Marc 6,7ss), avez-vous manqué de quoi que ce soit ? -- Ils dirent: De rien. -- Il  leur dit: Maintenant, par contre, que celui qui a une bourse la prenne, de même sa besace, et que celui qui n'a pas d'épée vende son manteau pour s'en acheter une... (Luc 22,35s).

J'interromps délibérément à mi-parcours la citation de ce passage que la suite "éclaire" (et/ou obscurcit) dans la perspective apologétique de Luc-Actes: il s'agirait en effet d'expliquer, de façon à dissiper tout soupçon romain sur le christianisme, des éléments embarrassants de la tradition évangélique (au premier chef la crucifixion qui fait a priori de "Jésus" un hors-la-loi, un criminel politique ou de droit commun; accessoirement la présence d'épées du côté du groupe de Jésus, depuis Marc, dans le récit de l'arrestation), comme une mise en scène purement "symbolique", requise par la nécessité interne d'un drame divin (d'où la citation d'Isaïe 53,12LXX au v. 37, cf. v. 52, et les deux épées du v. 38, pluriel minimal; voir éventuellement ici). De ce point de vue, cependant, le scénario n'est guère vraisemblable: difficile d'aller faire des emplettes en pleine nuit, surtout cette nuit-là; de fait, la séquence ultérieure des événements du récit de la Passion n'en laisserait pas le loisir. Cela appellerait donc une tout autre explication, en partie compatible aussi avec le schéma chronologique de Luc-Actes, mais beaucoup moins avec son projet apologétique: la prescription ne vaudrait pas pour cette nuit-là mais à l'avenir (désormais et à partir de dorénavant), ce serait un "changement de stratégie" correspondant à un changement de situation ou d'"époque" (pour Luc-Actes, le passage du temps de Jésus à celui de l'Eglise, ou du moins l'interlude entre "Pâque" et "Pentecôte"). L'idée a naturellement séduit ceux qui, contrairement à Luc-Actes, cherchaient à construire un "Jésus historique" en "partisan" ou "révolutionnaire" de tel ou tel type (on n'a que l'embarras du choix), et qui trouvaient dans les évangiles de quoi étayer leur hypothèse (p. ex. Matthieu 10,34: le parallèle de Luc 12,51 évite "l'épée") -- bien entendu, ceux qui se le figuraient en prophète thaumaturge, en sage apolitique et/ou pacifique,  en prêtre déchu de genre qoumranien ou en rabbi pharisien original en trouvaient tout autant à l'appui de leurs thèses respectives.

Quoi qu'il en soit, il en ressortirait une idée à la fois banale et digne de réflexion: même dans "la Bible" ou dans les évangiles (dans le même évangile en l'occurrence), les prescriptions (commandements, règles, principes, instructions, consignes), fussent-elles divines, peuvent et doivent changer en fonction des situations et des circonstances -- on peut penser, sur un registre très proche, à 1 Maccabées 2, qui marque en quelque sorte le tournant de la guerre, quand les Judéens hostiles aux réformes hellénistiques se décident à se battre le jour du sabbat. Mais déjà dans la Torah Moïse ou Yahvé changent la loi à l'occasion d'un cas particulier (cf. p. ex. Lévitique 24,10ss; Nombres 15,32ss; 27).

On verra tout de suite venir l'application d'une telle réflexion aux religions traditionnelles, conservatrices par définition et réfractaires en principe à tout changement; elle n'en concernerait pourtant pas moins les "morales" laïques ou profanes, dont l'inertie foncière n'est globalement pas moindre: si celles-ci ne se réfèrent pas à une "autorité" divine ou sacrée, antique ou immémoriale, pour justifier le statu quo, elles ne disposent pas non plus au présent d'une telle "autorité" pour changer les règles du jeu en cours de partie, même quand le besoin ou l'urgence s'en fait sentir.

Quand ça change, ça change...


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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeLun 18 Oct 2021, 11:20

Citation :
Mais déjà dans la Torah Moïse ou Yahvé changent la loi à l'occasion d'un cas particulier (cf. p. ex. Lévitique 24,10ss; Nombres 15,32ss; 27).

Narkissos,

Je ne perçois pas le changement de la loi dans les textes que tu nous as donné en référence.  Shocked
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeLun 18 Oct 2021, 11:56

Dans les deux premiers cas (Lévitique 24 et Nombres 15), il s'agit d'un développement de la législation à partir d'une situation concrète (un événement du récit) qui n'avait pas été prévue par la loi antérieure -- on pourrait parler de jurisprudence si les rôles du législateur et du juge ne se confondaient pas en Yahvé qui, par l'oracle circonstanciel, modifie durablement sa propre loi. En Nombres 27,1-8 et au chapitre 36 (j'avais oublié cette "réplique"), la loi de succession par la lignée mâle (avec droit d'aînesse) est "corrigée" par deux fois, à mesure que des problèmes imprévus se posent -- ou que le rédacteur songe à des complications juridiques que n'avaient pas envisagées ses prédécesseurs, mais il le fait quand même par l'introduction narrative d'un cas concret, celui des filles de Z/çelophhad: 1) il faut que les filles héritent s'il n'y a pas de fils, 2) il faut qu'elles se marient dans leur tribu ou dans leur clan pour ne pas perturber la répartition "tribale" et/ou "clanique" des terres. Bien sûr, c'est encore différent du cas de 1 Maccabées 2 où la situation militaire impose la transgression de la loi (du sabbat) à ceux-là même qui en défendent l'observance, mais c'est tout de même comparable (je n'ai pas prétendu davantage).
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeLun 18 Oct 2021, 12:23

Citation :
Dans les deux premiers cas, il s'agit d'un développement de la législation à partir d'une situation concrète (un événement du récit) qui n'avait pas été prévue par la loi antérieure -- on pourrait parler de jurisprudence si les rôles du législateur et du juge ne se confondaient pas en Yahvé qui, par l'oracle circonstanciel, modifie durablement sa propre loi. 

Merci pour ces éclaircissements.

Effectivement, Lév 24,12 précise : "On le plaça sous bonne garde, jusqu'à ce qu'une décision soit prise sur l'ordre du SEIGNEUR" et Nb 15,34 : "On le plaça sous bonne garde, car aucune décision n'avait été prise sur ce qu'on devait lui faire". On retrouve une application de la loi empirique qui ne s'appuie que sur l'expérience. En Nombres 27, il faut que Moïse plaide la cause des filles de Tselophhad qui désiraient conserver de leur héritage suite à la mort de leur père : "Moïse présenta leur cause devant le SEIGNEUR" (27,5).


Si nous assistons à un cycle de révoltes, notamment contre Yahvé mais aussi contre Moïse et Aaron - figures d'autorité - nous découvrons également comment certains passages du Livre des Nombres, sont construits comme des compléments de la Loi, nous dit Thomas Römer. La demande des filles de Celofehad, qui font valoir auprès de Moïse et de Yahvé leur droit à hériter à la mort du père, suscite un premier texte, une première loi soutenue par Yahvé et Moise. Cette première loi sera presque aussitôt assortie d’un deuxième texte, une « actualisation », qui met une réserve à cet héritage en le soumettant à la condition du mariage avec l’un des membres du clan pour ne pas disperser les terres et les garder au sein d’une même tribus. Nous avons affaire à une sorte d’avenant souligne Thomas Römer, avec ce deuxième texte. 

https://www.franceculture.fr/emissions/les-cours-du-college-de-france/israel-dans-le-desert-le-livre-des-nombres-et-lachevement-6
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeLun 18 Oct 2021, 13:18

En fait, tous les codes législatifs modernes (p. ex. nos codes civil, pénal, administratif, du travail ou de la route) fonctionnent comme ça, ce sont des textes hétérogènes, juxtaposant des bribes de lois de toutes origines, de toutes dates et de toutes circonstances dans un ensemble fonctionnel en constante évolution, à mesure qu'il intègre de nouvelles lois du législateur qui modifient ou annulent et remplacent les précédentes, et en périphérie de nouvelles décisions de justice (jurisprudence) qui tranchent les questions d'interprétation et les conflits entre une loi et une autre à mesure qu'ils se présentent. Ce qui distingue un "code sacré", bien qu'il se constitue au départ selon le même genre de processus à la fois rédactionnel et "événementiel", c'est qu'à un moment donné le processus rédactionnel s'arrête (canonisation et standardisation du texte) et que les nécessaires changements ne peuvent plus se produire dans le texte, mais autour (interprétation, tradition, commentaire, jurisprudence, casuistique). Pourtant tous ces "suppléments" finissent à leur tour par s'écrire et se fixer dans un statut plus ou moins "sacré" et dans un rapport variable avec le "sacré" qui les précède (Prophètes, Ecrits, Nouveau Testament, apocryphes, commentaires, Mishna, Guemara, Talmud, Coran, Hadith): l'écriture et l'interprétation ne cessent de croître, l'une avec l'autre et l'une contre l'autre, de se clore et de transgresser leur clôture, tout en la déplaçant.

Bien sûr, mon texte de départ (Luc 22) n'était pas exactement "législatif" (plutôt un "changement de consigne" dans un ensemble essentiellement narratif et supposé "événementiel") et il faut tenir compte de cette différence, autant que de l'analogie. Mais dès lors qu'une "lecture chrétienne" va naturellement chercher dans les évangiles quelque chose de "normatif", par exemple un "ordre de mission" que le lecteur-auditeur peut prendre pour lui, le problème de deux ordres contradictoires, le second annulant expressément le premier sans être annulé à son tour, va forcément se poser dans un sens quasi "juridique". Et là encore ce sont les situations, événements, circonstances, qui dicteront l'interprétation des textes, bien plus que les textes eux-mêmes.
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeLun 18 Oct 2021, 13:47

Un commentaire concernant Nombres 27 :

Cette succession de règles confirme que l’héritage des filles restait exceptionnel et exclusivement limité au cas où il n’y avait pas de fils. Bien plus, dans ce dernier cas, l’héritage des filles était encore restreint par des règles précises mentionnées en Nb 36, à propos du cas d’école des « filles de Zelophehad » établissant la jurisprudence en la matière :

« Toute fille héritant/appelée à hériter (yorèshèt) d’entre les clans des Israélites, deviendra la femme de quelqu’un de la famille du clan de son père, en sorte que les Israélites héritent/possèdent chacun l’héritage de ses pères. » (Nb 36, Cool

De fait, le verset 11 précise que, de façon concrète :

« Mahlah, Tirzah, Hoglah, Milkah et Noah, filles de Zelophehad, devinrent les femmes des fils de leurs oncles (libenê dodêhèn lenâshîm). »

En clair, la fille doit alors se marier suivant la tradition du mariage préférentiel avec le cousin parallèle patrilatéral, usage attesté aussi bien dans les légendes patriarcales que dans les romans tardifs de Judit (8, 2) et de Tobit (1, 9 ; 4, 12 ; 6, 11-13 ; 7, 10). Ce type de mariage présente l’immense avantage d’empêcher l’héritage de sortir du clan paternel. Dans de telles conditions et en l’absence de fils, l’héritage des filles devenait acceptable, même dans une société patriarcale, car, au lieu de briser les liens du clan, il les renforçait. De fait, les biens passaient du contrôle du père à celui du gendre, qui était aussi son neveu. Dans ce cadre bien précis, l’héritage des filles ne devient plus qu’une sorte de fiction juridique car la transmission des propriétés se fait au sein du clan paternel.

Peut-on préciser la date de cette codification de l’héritage des filles en l’absence de fils ? Il est difficile de donner une réponse assurée sur ce point. La tradition juridique des « filles de Zelophehad » semble refléter une exploitation, en quelque sorte « halakhique », d’une très ancienne tradition biblique concernant les origines Israélites qui se rattachent au groupe des Benê Jacob. Pourtant l’interprétation juridique en faveur de l’héritage des filles de cette antique tradition, en Nb 27 et 36, semble assez clairement se rattacher à la rédaction sacerdotale, ce qui signifie qu’il s’agit probablement d’une relecture/réinterprétation exilique ou postexilique. De fait, l’héritage des filles ne semble pas attesté en Israël avant l’Exil. Cependant, pour la période royale, notre documentation est si pauvre et si lacunaire qu’il faut se méfier de l’argument a silentio.   

https://books.openedition.org/psorbonne/74999?lang=fr
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeLun 18 Oct 2021, 15:06

Je n'imaginais pas, en ouvrant ce fil, qu'il prendrait cette tournure "archéo-juridique", mais je dois bien reconnaître que mes comparaisons "bibliques" s'y prêtaient...

Le texte de Lemaire est fort intéressant, surtout par les contradictions qu'il met en évidence entre le fait (épigraphique) des testaments particuliers en faveur des femmes, épouses ou filles, et l'idée même de "règle générale" qu'on pourrait (à tort) déduire des textes "bibliques". Quand on "dispose" par voie testamentaire, cela implique que la disposition ne soit ni supposée ni interdite par une quelconque loi générale, autrement dit que la succession reste de part en part une affaire privée, à la discrétion "patriarcale" du "chef de famille" (époux ou père) -- en quoi les "législations bibliques", même celle de Deutéronome 21 qui prescrit une succession exclusivement masculine (et qui serait donc modifiée par Nombres 27 et 36), se comprennent bien plutôt comme des textes "religieux" (ou "idéologiques") sans véritable portée "juridique" (à l'époque perse, hellénistique ou romaine, tout se passe comme s'ils ne faisaient nullement "loi"), et sur une absence de fond juridique existant et reconnu en la matière (hormis la coutume, par nature souple et variable d'un lieu et d'un milieu à l'autre).

Pour revenir à Luc 22,35s qui n'a rien de vraiment "juridique" -- encore que dans le contexte il soit aussi question d'"alliance" ou de "testament", diatithèmi < diathèkè, v. 29 -- sa caractéristique serait plutôt de n'instaurer aucune "loi", sinon celle du changement selon les situations et les circonstances. Cela me rappelle deux choses (et m'en rappellerait sûrement beaucoup d'autres si j'en avais lu davantage): d'une part la méditation tautologique de Heidegger sur "l'ê(s)tre-événement" (Seyn-Ereignis) qui n'est au fond régi ni surplombé par rien (ce qui arrive arrive, que sera sera, 'ehyeh 'asher 'ehyeh, etc., en-deçà et au-delà de toute "loi"); d'autre part la réflexion de Deleuze sur l'opposition des "lois" et des "institutions", et accessoirement des "contrats" en politique moderne (cf. saint-Just ou Sade vs. Sacher-Masoch): ou bien beaucoup d'institutions et de contrats et peu de lois, ou bien beaucoup de lois et peu d'institutions et de contrats, dilemme qui favoriserait soit une réactivité (ou une capacité de décision et d'initiative, Deleuze n'aimerait pas le mot de réactivité), mais dépourvue de "garde-fous", soit une stabilité sécurisante, mais aussi potentiellement paralysante. Pour le dire plus simplement, plus on a de "lois" ou de "principes", moins on est en mesure de décider et de changer, et inversement.


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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeLun 18 Oct 2021, 15:40

Citation :
on peut penser, sur un registre très proche, à 1 Maccabées 2, qui marque en quelque sorte le tournant de la guerre, quand les Judéens hostiles aux réformes hellénistiques se décident à se battre le jour du sabbat.


Le Sabbat dans la Bible
André WÉNIN

Plus tard, au IIe siècle, les livres des Maccabées attestent l’importance que la pratique du sabbat a acquise chez les juifs pieux. Certains d’entre eux préfèrent se laisser tuer plutôt que de violer le sabbat (1 M 2,32-38) :

32 Une forte troupe courut à leur poursuite [de gens justes réfugiés au désert] et, les ayant rattrapés, dressa le camp en face d’eux, et se disposa à les attaquer le jour du sabbat. 33 On leur dit : « En voilà assez ! sortez, obéissez à l’ordre du roi [impie] et vous aurez la vie sauve. » – 34 « Nous ne sortirons pas, dirent-ils, et nous n’observerons pas l’ordre, donné par le roi, d’enfreindre le jour du sabbat. » 35 Aussitôt assaillis, 36 ils s’abstinrent de riposter, de lancer des pierres, de barricader leurs retraites. 37 « Mourons tous dans notre droiture, disaient-ils ; le ciel et la terre nous sont témoins que vous nous faites périr injustement. » 38 On leur donna l’assaut en plein sabbat, et ils périrent, eux, leurs femmes, leurs enfants et leur bétail, en tout un millier de personnes. (Traduction TOB)

Le même épisode est rapporté par Flavius Josèphe qui précise que ces gens furent brûlés vifs dans leurs repaires.

Toujours dans les livres des Maccabées, on relate l’histoire de ces juifs qui, le jour du sabbat, renoncent à prolonger la poursuite d’ennemis à leur merci et à profiter sans retard de leur victoire en s’emparant du butin (2 M 8,24-29). Dans ces textes et dans d’autres (2 M 12,38 ; 15,1-5), s’expriment à la fois une volonté apologétique et un attachement plus que scrupuleux à la pratique du sabbat. On retrouvera ce même respect recommandé avec rigueur chez les Esséniens. Ainsi, l’Écrit de Damas prévoit une excommunication de sept années pour qui ne garderait pas le sabbat (CD XII, 3-6) :

Et quiconque errera en profanant le sabbat ou les fêtes ne sera pas mis à mort, mais aux hommes incombera sa garde ; et, s’il guérit de ce péché, on le gardera pour une période de sept ans, et ensuite, il entrera (à nouveau) dans l’Assemblée.
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeLun 18 Oct 2021, 15:54

Lien (de téléchargement).

Le "changement de stratégie", à l'initiative de Mattathias, est lisible dans la suite de 1 Maccabées 2 (v. 39ss). Mais il est en effet significatif que 2 Maccabées, texte moins "historique" et plus "religieux", évite la mention de la transgression du sabbat (pourtant décisive sur le plan militaire) pour insister au contraire sur son observance, même en contexte militaire.


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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeLun 18 Oct 2021, 16:50

Le récit de la décision de permettre la riposte armée le sabbat le met en scène ... des victimes du massacre le sabbat et Mattathias lui-même (1 M 2,39-41) ...

Lien (réduit).
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeLun 18 Oct 2021, 17:06

Traduction (de 1 Maccabées 2,39ss) lisible ici (TOB) par exemple. Voir aussi 9,43ss, avec au v. 44 un probable hébraïsme dans le texte grec pour illustrer notre propos, "aujourd'hui ce n'est pas comme hier et avant-hier" (à moins qu'il ne faille prendre "le troisième jour" dans l'autre sens, ni comme la veille ni comme le surlendemain)...
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeMar 19 Oct 2021, 11:43

Demain ne sera pas comme hier. Il sera nouveau et il dépendra de nous. Il est moins à découvrir qu'à inventer.”
 De Gaston Berger / Phénoménologie du temps et prospective


"David se rendit à Nob, chez Ahimélek, le prêtre, qui vint en tremblant à sa rencontre et lui dit : Pourquoi es-tu seul ? Pourquoi n'y a-t-il personne avec toi ? David répondit à Ahimélek, le prêtre : Le roi m'a donné un ordre ; il m'a dit : « Que personne ne sache rien de l'affaire pour laquelle je t'envoie et de l'ordre que je t'ai donné ! » J'ai donné rendez-vous à mes jeunes gens à tel et tel endroit. Maintenant qu'as-tu sous la main ? Donne-moi cinq pains ou ce que tu pourras. Le prêtre répondit à David : Je n'ai pas de pain profane sous la main, mais il y a du pain sacré, à condition du moins que tes jeunes gens se soient gardés des femmes ! David répondit au prêtre : La femme nous est interdite, comme d'habitude quand je pars en campagne. Si les armes des jeunes gens sont consacrées pour une expédition profane, à plus forte raison y aura-t-il aujourd'hui consécration en ce qui concerne les armes. Alors le prêtre lui donna du pain sacré, car il n'y avait pas là d'autre pain que le pain offert, celui qu'on retire de devant le SEIGNEUR pour le remplacer par du pain chaud le jour où on le reprend" (1 Sam 21,2-7). 

Il est question de "pain sacré" que seuls, les prêtres avaient le droit de les manger (Le 24:5,9,1Ch 9:32), pourtant en une circonstance particulière, David proscrit par Saül, affamé avec ses hommes, s'en fit donner par le prêtre exemple d'indépendance envers la loi rituelle en cas de nécessité, que Jésus cite avec approbation (Mt 12:3ss).
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeMar 19 Oct 2021, 12:29

L'"invention" est aussi une "découverte", une "trouvaille" ou une "rencontre", et pas seulement par l'étymologie latine (invenio < inventio, cf. l'"invention de la sainte Croix") -- il y va également du rapport complexe de la "science" (qui en principe n'"invente" rien, au sens moderne et restreint du mot) et de la "technique", même dans des domaines qui ne paraissent ni "scientifiques" ni "techniques" (politique, religion, morale p. ex.).

Cet autre exemple "biblique" est tout à fait pertinent (du moins autant que les précédents). On remarquera que la rédaction (deutéronomiste ?) de 1 Samuel atténue au maximum l'infraction rituelle (par rapport à une Torah que ne présupposent pas, en général, les traditions davidiques): les consommateurs sont rituellement purs (la guerre est "sacrée" à sa façon), les pains sont ceux qui ont déjà été retirés de devant Yahvé... Les Chroniques omettent l'épisode, et rattachent Ahimélek à la lignée secondaire d'Ithamar (on n'est jamais trop prudent). La référence de Marc (2,23ss) s'éloigne en revanche de toute précaution de ce genre (c'est bien la loi qui est transgressée, David entre dans la "maison de Dieu" et se sert sans rien demander à personne; accessoirement on confond Ahimélek et A/Ebiathar, omis par les parallèles); Matthieu (12,1ss) par contre en réintroduit, conformément à son respect principiel de la loi, en ajoutant notamment la référence à la "transgression" de la loi par les prêtres mêmes (v. 5; comparer l'argument similaire de Jean 7,22s), ce qui ramène la "transgression" à une affaire d'interprétation de la loi, du conflit entre plusieurs commandements et de la priorité d'un commandement sur un autre (d'où la citation d'Osée, la compassion-miséricorde plutôt que le sacrifice, Matthieu 12,7, cf. 9,13), et ne remet pas en cause la validité de la loi même (le renouvellement des pains est associé au sabbat dans les Chroniques, 1 Chroniques 9,32 etc.).
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeMar 19 Oct 2021, 13:03

Les versets de Matthieu (5,21-22)  établissent un contraste entre "Vous avez entendu qu’il a été dit" et "Mais moi je vous dis" à travers une série d’exemples qui soulignent un changement dans la compréhension de la loi, dans un sens d'une plus grande exigence, voir d'un extrémisme.
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeMar 19 Oct 2021, 15:49

Très juste, mais il me semble que dans la perspective de Matthieu l'argument "herméneutique" (question d'interprétation, hermeneia) s'appuie sur un motif "eschatologique": la nouvelle interprétation n'est pas simplement la plus récente, susceptible d'être remplacée par une autre plus tard et en d'autres circonstances; c'est la dernière, l'ultime et la "parfaite", qui doit demeurer, comme la "loi" même ainsi comprise, jusqu'à la fin du monde (5,17ss; cf. 23,35; 28,18ss). D'où aussi l'ajout d'une référence au temple en 12,6 ("il y a ici plus que le temple", cf. v. 41s): dans le "grand récit biblique" la loi précède le temple, chronologiquement et logiquement, elle peut aussi lui survivre (concrètement depuis 70), soit par le développement de la tradition orale dans les synagogues pharisiennes, soit par la figure ultime du Christ-enseignant et de son interprétation définitive de la Torah. Du point de vue de notre sujet, le changement dernier, si l'on peut dire, impliquerait aussi l'interdiction de tout changement futur.

Quant à l'"extrémisme" ou à la "radicalité" de l'interprétation du Jésus matthéen, ils ne sont évidemment pas n'importe lesquels et ne peuvent pas justifier, en principe, n'importe quel "extrémisme" ou "radicalité": c'est dans un sens clairement orienté vers la compassion et l'amour, l'accueil des pauvres et des "pécheurs", le non-jugement et la dépossession, etc., qu'ils sont "radicaux", pas du tout dans le sens d'une surenchère "rituelle" (cf. 23,23s), "légaliste" ou "moraliste" selon l'acception péjorative de ces mots -- à cet égard le développement de l'"épouvantail pharisien" sert aussi de "garde-fous".
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeJeu 21 Oct 2021, 11:14

ACTUALISER L’ÉVANGILE : DANGEREUX, LÉGITIME, POSSIBLE ?

Cette thématique soulève plusieurs questions sujettes à controverses. L’Évangile est immuable. Avons-nous le droit de l’« actualiser » ? N’est-ce pas le travail du Saint-Esprit de le rendre actuel dans le cœur de ceux que Dieu appelle ? Comment actualiser ce qui est une annonce de la vérité divine pour ce monde ? Et puis, en cherchant à actualiser l’Évangile, ne courons-nous pas le danger de trop l’adapter à notre époque et d’en trahir la signification éternelle ?

EST-CE DANGEREUX D’ACTUALISER L’ÉVANGILE ?

Au fil de l’Histoire, les préoccupations des individus évoluent. À moins d’être vigilants, nous risquons d’accorder plus d’importance aux valeurs changeantes des êtres humains qu’aux valeurs immuables de Dieu.

Notre époque est tiraillée entre diverses valeurs qui sont parfois contradictoires (égoïsme et solidarité, indifférence et engagement, etc.). Mais en Occident, du moins, une des principales valeurs est l’individualisme. Notre façon d’exprimer la foi chrétienne reflète cette préoccupation. Nous articulons l’annonce de l’Évangile autour de la relation personnelle avec Dieu et des avantages qu’il apporte à l’individu. Or, même si Dieu nous aime personnellement et individuellement, l’Évangile est une histoire communautaire. Jésus est venu instaurer le royaume de Dieu. Il n’est pas venu principalement pour notre bien-être individuel. Aucune actualisation de l’Évangile ne doit tomber dans le piège d’une adaptation du message du salut pour le rendre plus acceptable. Notre évangélisation ne doit jamais perdre de vue la primauté de ce que Paul appelle « la folie » de la croix (1Co 1).

AVONS-NOUS LE DROIT D’ACTUALISER l’ÉVANGILE ?

La réalité centrale de l’Évangile est immuable. Ce sont nos manières de le communiquer que nous devons actualiser. Nous savons que le terme « Évangile » signifie « bonne nouvelle ». Mais quelle que soit notre façon de dire l’Évangile, si nos auditeurs ne l’entendent pas comme une bonne nouvelle, nous faisons fausse route. Non seulement nous avons donc le droit d’actualiser notre annonce de l’Évangile, mais nous en avons le devoir.

Dès qu’il s’agit de changer notre façon de dire l’Évangile, certains hésitent, car nous rechignons souvent à assumer l’inconfort de la nouveauté. Mais deux vérités peuvent être affirmées. Premièrement, la durée dans le temps n’a jamais fondé la légitimité d’une façon d’annoncer l’Évangile. Le changement dans ce domaine est toujours permis, parfois nécessaire. Deuxièmement, l’évolution des modes de communication puise sa légitimité dans le précédent biblique : Dieu n’a pas toujours communiqué de la même façon, mais a adapté son propos en fonction de l’époque et de la culture (Mt 5.21-22,26-28, etc., Mt 19.changements de stratégie Icon_cool. Dieu agit et communique dans l’Histoire et avec l’Histoire, et non pas en dépit de l’Histoire.

https://www.editions-mennonites.fr/2019/02/actualiser-levangile-dangereux-legitime-possible/
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeJeu 21 Oct 2021, 12:00

Bien qu'aujourd'hui largement noyée dans la mouvance "évangélique", la vieille tradition "mennonite" (à peu près la seule qui reste de la Réforme "anabaptiste" ou "radicale" en France, dans l'Est surtout) ne manque pas d'intérêt, en particulier dans la ligne de l'héritage matthéen (accent pratique ou poïétique, éthique, socio-économique) plutôt occulté par le protestantisme majoritaire, hyper-paulinien; mais il n'en paraît pas grand-chose dans cet article -- par ailleurs, l'auteur semble avoir fort peu réfléchi au concept ou à la métaphore de "valeur" qu'il emploie à tour de phrase.

Toute pensée du changement s'enlise dans la distinction et l'opposition archi-classiques du "fond" et de la "forme", en termes plus modernes de la "communication" -- comme si un "fond", vérité, sens, essence ou substance immuable, pouvait rester intact et identique à lui-même sous des changements de "forme", d'emballage, de conditionnement, de présentation, de décoration ou de publicité. Il en va de même du discours politique: quand quelque chose ne "passe" pas on incrimine toujours un défaut de pédagogie, d'explication, de communication, plutôt (plus tôt, avant) que de questionner le "fond" qui reste ainsi quelque temps à l'abri derrière des "problèmes" de forme (pro-blèma signifie aussi "bouclier", protection) -- derrière les changements de forme ou d'apparence, stratégiques ou tactiques, c'est encore un refus de penser le "fond" qui s'abrite, provisoirement et mal; un refus de voir que le "fond" change aussi, irrésistiblement, avec ou sans la "forme" (car on peut aussi bien réciter exactement les mêmes "formules" et les comprendre tout autrement, d'une époque, d'un lieu, d'un milieu et d'un moment à l'autre). C'est d'une grande banalité, certes, depuis Héraclite au moins, mais c'est aussi le "fond" et la "forme" inséparables de tout "problème".
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeJeu 21 Oct 2021, 15:11

"Le lendemain, comme ils étaient en route et qu'ils approchaient de la ville, Pierre monta sur le toit en terrasse, vers la sixième heure, pour prier. Il eut faim et voulut manger. Pendant qu'on lui préparait quelque chose, il lui advint une extase. Il voit le ciel ouvert et un objet semblable à une grande toile tenue par les quatre coins, qui descend et s'abaisse jusqu'à la terre ; il y avait là tous les quadrupèdes et les reptiles de la terre, ainsi que les oiseaux du ciel. Une voix lui dit : Lève-toi, Pierre, abats et mange. Pierre répondit : En aucun cas, Seigneur ! Je n'ai jamais rien mangé de souillé ni d'impur ! Pour la deuxième fois la voix lui parle : Ce que Dieu a purifié, toi, ne le souille pas ! Cela se produisit trois fois ; et aussitôt après l'objet fut enlevé au ciel" (Act 10,9-16).


Ce texte témoigne d'un changement de stratégie avec un renversement de situation, Pierre en refusant de manger des animaux impurs mais purifiés par Dieu, il s'expose à souiller ce qui a été purifié.

À Joppé, sur la terrasse de la maison de son hôte, à midi, une sensation de faim trouble sa prière. Le ciel s’ouvre et une toile immense suspendue par ses quatre coins descend vers la terre. Sur cette toile, tous les animaux quadrupèdes, tous ceux qui se meuvent sur la terre et ceux qui volent dans le ciel. Une voix lui
dit : « Allons, Pierre, tue et mange ! » « Jamais, Seigneur, répond Pierre, car de ma vie je n’ai mangé quoi que ce soit d’interdit (litt. de « commun », de non conforme à la pureté rituelle) ni d’impur ! » La voix reprend : « Ce que Dieu a rendu pur, tu ne vas pas, toi, le déclarer interdit ! » (Ac 10,9-16);

Le scénario se répète trois fois. Pierre n’y comprend rien, mais des cris se font entendre au portail de la maison et l’esprit lui enjoint de suivre ces messagers à Césarée, chez Corneille le centurion romain. La vision s’éclaire : « à moi Dieu vient de m’apprendre qu’il ne fallait déclarer interdit ou impur aucun être humain » (v. 28). Des animaux aux humains, à la communauté de table, de vie et d’union à Dieu qui s’ensuit. Le don de l’Esprit suivi du baptême ratifie la compréhension de Pierre et son évangélisation de la maison de Corneille. 

https://www.erudit.org/fr/revues/theologi/2002-v10-n1-theologi714/008159ar.pdf
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MessageSujet: Re: changements de stratégie   changements de stratégie Icon_minitimeJeu 21 Oct 2021, 16:30

Nous avons déjà vu cet intéressant article ailleurs, mais je n'arrive pas (encore) à le localiser -- ce n'est pas , malgré la proximité du sujet.

Dans le contexte de Luc-Actes, le "changement" est clairement soumis à un schéma historico-chronologique (plan, programme, scénario): avec la conversion de Corneille, on entre de plain pied dans le temps de la grande Eglise ouverte aux "païens" (non-Juifs), soit dans la dernière étape de l'"histoire" qui correspond à la réalité et au présent de l'auteur et des destinataires, dont l'Eglise est essentiellement "pagano-chrétienne" (étape préparée par les élargissements successifs des chapitres précédents, Pentecôte avec des pèlerins et des prosélytes de tout l'empire, persécution à Jérusalem entraînant l'expansion en Samarie, conversion de l'eunuque éthiopien, etc.). Ce temps-là ne doit plus connaître de changement majeur jusqu'à la "parousie" ou "fin du monde", repoussées sine die. Il est donc ouvert en principe à toute "histoire" (de l'Eglise) à venir, et toutes les "Histoires de l'Eglise" comme celle d'Eusèbe au IVe siècle s'y grefferont sans peine; mais fermé par la même occasion à toutes les divergences ultérieures qui ne peuvent plus être qu'anecdotiques (atténuation des débats d'idées en querelles de personnes, cf. Paul et Barnabé) ou "hérétiques" (cf. 20,29ss); fermé aussi dans l'avenir (fini, non infini) par l'horizon eschatologique qui, pour n'être pas connu des hommes, reste fixé pour et par Dieu (1,6ss), et jamais démenti.

Plus généralement, tout changement de paradigme (on l'a vu aussi chez Matthieu, de façon moins "programmatique" que dans Luc-Actes) tend à se comprendre comme dernier et définitif; donc à verrouiller, volontairement ou non et plus ou moins efficacement, toutes les possibilités de changement futur (ce sera vrai aussi pour l'islam, quelques siècles plus tard, et aussi pour la plupart des Réformes protestantes et des "sectes" ultérieures); seule y échapperait l'instauration d'un "principe de changement", par exemple dans les courants "spirituels", "prophétiques", "pneumatiques", "charismatiques" ou "illuministes", qui laissent ouvertes ou même appellent des possibilités d'innovation, à tout le moins de réinterprétation de la tradition. Mais ceux-là se situent plutôt à la marge d'une "institution" qu'en son centre ou à sa tête.

Dans un sens, l'"amour" joue un rôle similaire dans les logiques néotestamentaires, surtout paulinienne et johannique, où il s'oppose à toute "loi" ou "règle" permanente -- Dilige et quod vis fac, "aime et fais ce que tu veux", dira saint Augustin, cela rejoint le "tout est permis" (mais pas "utile" ou "édifiant-constructif") de la Première aux Corinthiens. "Principe (arkhè) d'an-archie" jusque dans la contradiction des termes, dont l'histoire chrétienne et post-chrétienne illustrera les limites, mais aussi la vivacité.
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