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 Foi, courage et lâcheté

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Narkissos

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MessageSujet: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeSam 16 Avr 2011, 17:08

Ce sujet est pour moi l'expression d'une perplexité, personnelle autant que générale.
Il convoque trois termes, affrontant une "foi" (chrétienne, en l'occurrence) qui est peut-être le thème de prédilection de ce forum, diversement comprise et appréciée, à deux "contraires" moraux, dont l'un est a priori connoté positivement, comme une "qualité", et l'autre négativement, comme un "défaut". Bien qu'il ne fasse guère de doute qu'il y ait un courage imbécile (celui qu'on appelle témérité, par exemple) et aussi une intelligence, ou une sagesse, qui puisse à l'occasion paraître lâche (j'insiste sur le "paraître", car le mépris de la lâcheté est si profondément ancré en nous qu'il semble impossible d'en faire l'éloge, de penser qu'elle puisse être à la fois vraiment lâche et bonne).
Or il me semble (c'est tout le problème) que la foi a partie liée et avec un certain courage (Tillich a fourni une des plus belles redéfinitions de la foi avec sa formule "courage d'être") et avec une certaine lâcheté.
Il me semble: c'est une chose que j'ai cru, souvent, observer chez moi comme chez d'autres. La foi (ou la croyance religieuse, assez indépendamment de son "objet") engage parfois à des actions, des prises de parole ou de position qui peuvent passer pour courageuses, surtout aux yeux de ceux qui ne la comprennent pas; dans d'autres cas, elle peut induire une réserve, une hésitation, une réticence à l'action, à la parole, et peut-être plus encore à la pensée qui paraissent terriblement lâches -- surtout, mais pas seulement, aux yeux de ceux qui ne la partagent pas.
Comme on voit toujours mieux les "défauts" des autres, j'ai souvent vu (et quelquefois dénoncé) de la "lâcheté" chez les ecclésiastiques des diverses confessions qu'il m'a été donné de fréquenter. Plus encore en réunion (en collège, en comité, en concile, en synode) que pris individuellement. Il y a un effet de prudence (ou d'hypocrisie) collective qui peut être un véritable étouffoir de toute velléité d'audace.
Mais en même temps je ne peux pas les "juger" sans me juger moi-même, et tenter de comprendre ce qui dans la foi (me) porte à une certaine "lâcheté". En même temps qu'à un certain "courage".
J'y vois deux choses.
1. D'une part ce vieux thème de la crainte des dieux (ou de Dieu) qui fait l'essentiel de la "religion" antique; terreur originaire du sacré, du "numineux", de l'inconnu, du non-maîtrisable, intériorisé plus tard en crainte de se blesser, de se faire violence, d'attenter à l'intégrité de son "âme", de se perdre. Etrangement, c'est cette crainte qui donne du "courage": l'opposition de la crainte de Dieu et de la crainte des hommes, là où elle se produit, donne à ceux qui "craignent (vraiment) Dieu" le courage apparent des martyrs. Paradoxe qui m'avait marqué dès mon époque TdJ: "Dans la crainte de Yahvé il y a une forte confiance, pour ses fils il y a un abri. La crainte de Yahvé est une source de vie, pour détourner des pièges de la mort." (Proverbes 14,26s). "Ne craignez pas ceux qui tuent le corps et qui ne peuvent tuer l'âme; craignez plutôt celui qui peut faire disparaître et l'âme et le corps dans la géhenne." (Matthieu 10,28). Il y a toujours quelque chose à craindre, mais une crainte l'emporte sur l'autre, là où l'on perçoit un conflit.
2. D'autre part (mais non sans lien) la sacralisation des "faibles" (au sens paulinien de 1 Corinthiens 8; 10 et Romains 14: les plus scrupuleux, les plus timorés, les plus "légalistes", les plus "conservateurs" dans leur conception de la "foi"), qu'il ne faut en aucun cas et à aucun prix choquer ou "scandaliser". La (con-)fusion de la prudence paulinienne sur ce point avec les mises en garde des évangiles sur le risque de "scandaliser" les "petits" (Marc 9,42ss// -- "petits" qui, en contexte, sont pourtant ceux "du dehors", bien qu'ils "croient" aussi à leur manière, cf. v. 38ss!), reconvoquant à leur profit l'arsenal de la crainte de Dieu et de la géhenne (1), aboutit en pratique à ce refus de penser et surtout de s'exprimer qui joue pour une grande part dans ce que j'oserais appeler la "lâcheté de la foi".
Il y a bien sûr d'autres aspects à cette question (je repense à celui que j'ai déjà évoqué sur https://etrechretien.1fr1.net/t350-foi-et-fatalisme ). Mais ces quelques réflexions sont sans doute déjà largement suffisantes pour appeler les vôtres (si vous osez, bien sûr).

P.S.: Dans le NT, naturellement, la "lâcheté" (deilia) est un "défaut" opposé à la "foi": Marc 4,40; Matthieu 8,26; Jean 14,27; 2 Timothée 1,7; Apocalypse 21,8; cf. aussi la dénonciation encore plus courante de l'"hypocrisie" dans les évangiles.
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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeSam 16 Avr 2011, 19:24

Citation :
Plus encore en réunion (en collège, en comité, en concile, en synode) que pris individuellement. Il y a un effet de prudence (ou d'hypocrisie) collective qui peut être un véritable étouffoir de toute velléité d'audace.


Souvent lors de ces réunions, et je pense aux réunions du collège d'anciens de la congrégation, il y a toujours de la crainte mêlée au respect que certains plus âgés peuvent inspirer. Le nouvel ancien sait que son avis sera écouté, sa voix aura la même valeur si une décision doit être prise, mais il ne peut s'empêcher de se sentir en position d'infériorité (c'était mon cas) n'ayant pas l'expérience assez exercée pour juger du bienfait de telle prise de position. Il y a là une forme de lâcheté et j'avoue l'avoir manifestée à mes débuts au sein du collège des anciens alors que les anciens plus âgés n'avaient pas manifesté de mouvements, ni prononcé de paroles allant dans ce sens.

Le respect peut-il être pris ou compris comme une forme de lâcheté?

Par la suite, parfois, par commodité il m'est arrivé de m'associer à la majorité pour ne pas rentrer dans une discussion sans fin, approuvant ainsi une décision qui ne m'avait convaincu qu'à moitié. Lors de comités de discipline religieuse, je me suis opposé à certains au moment de la prise de décision, mais j'avoue que j'ai dû faire un effort pour lutter contre ma personnalité qui est plutôt encline à ne pas chercher voire même à ne pas entrer en conflit.
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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeSam 16 Avr 2011, 20:24

Bonjour lct,
Je crois en effet que la peur du conflit, voire du simple désaccord, est un ingrédient important de ce que j'essayais d'évoquer. Surtout que ceux qui y sont le plus sujets, en fonction de leur "personnalité", trouvent dans la foi chrétienne de multiples justifications "nobles" de leur tendance naturelle -- les commandements d'amour dont nous avons parlé récemment ailleurs, les appels à l'humilité et à l'unité, tout cela renforce les motifs moins avouables du conformisme ordinaire, sans les faire disparaître.
Cependant, quand un chrétien prend conscience qu'une certaine "crainte des hommes" est en cause, cela peut faire jouer le "conflit des craintes" dont je parlais plus haut, et générer le courage nécessaire pour différer. Encore faut-il être assez prêt à affronter ce conflit-là, et les autres qui vont en découler, pour arriver à en prendre conscience.
(Je repense -- tout à fait hors religion -- au film Douze hommes en colère, de Sydney Lumet, qui met remarquablement en lumière les mécanismes de l'unanimité au sein d'un groupe -- de jurés en l'occurrence.)


Dernière édition par spermologos le Sam 16 Avr 2011, 20:33, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeSam 16 Avr 2011, 20:30

Spermologos,

à te lire, je me suis tout d'abord demandé si ton deuxième point est "vraiment" attaché à la foi, où s'il n'est qu'une énième variation d'une lâcheté "sociale" très banale, qui s'exprime dans ce cadre-là comme elle s'exprime ailleurs.

Car s'il est vrai, à bien y réfléchir, qu'en "temps normal", c'est plutôt de froisser le "fort" qu'on tâche d'éviter, je me demande si le choix des termes ("forts", "faibles", "petits"...) n'est pas juste une façon de consoler les gens à peu près "raisonnables" face au plus "fanatisés", alors que ces derniers sont concrètement ceux qui terrorisent les premiers -ma lâcheté à moi consistant à employer ici, par facilité, des mots dont je me méfie pourtant infiniment....

Dans les faits -ou en tout cas dans mon expérience- ceux que l'on désigne comme des "faibles au sens biblique" le sont rarement. Je veux dire: le "faible", le VRAI faible, n'a-t-il pas tendance à plutôt fermer sa gueule, même quand quelque chose le heurte (et je sais de quoi je parle!). Quand on l'écrase, on ne s'en rend même pas compte: pas un mot plus haut que l'autre, il courbe le dos et s'écrase lui-même, encore un peu plus...
Les gens raisonnables...

Et si le "faible" qui se scandalise tout haut, pour tout et pour tous, ne me parait pas si faible que ça, donc, ou qu'il ne l'est que "dans un certain sens" (sa "conscience" sur-sensible), mais que dans les faits il est aussi celui qui sait imposer sa loi à tous par des artifices ultra-communs (jouer l'indignation, chantage affectif....), alors on retombe dans un schéma ultra-classique de lâcheté: les grandes gueules ferment celle des plus timorés, dans la foi comme ailleurs.


Dans un tout autre registre, dont j'ai déjà souvent parlé ici, la plus grande "lâcheté" que je trouve dans la foi, c'est celle de vouloir mélanger son champ avec celui d'une hypothétique "vérité objective", la lâcheté qui voudrait croire que la foi n'existe que par son objet, et pas comme chemin.

En même temps -quitte à radoter- à notre époque ou "vérité" n'est presque plus que le synonyme de "scientifiquement prouvé", je me demande quelle place il reste à la foi qui s'assume pleinement comme foi, avec tout ce que ça implique d'arbitraire, de subjectivité, et de responsabilité...

Pour un Anagnoste, combien de F.Franz ou de G.W.Bush?

PS: je vois qu'entre temps, tu as pour une bonne partie répondu --par avance et par chapelier interposé-- à ma première objection...
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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeDim 17 Avr 2011, 01:56

BB,
En écrivant le 2° de mon post n° 1 (à propos des "faibles" à la sauce saint-Paul) je n'avais pas tellement à l'esprit les "grandes gueules" de l'intransigeance (tout ce qu'on taxe habituellement de conservatisme, d'intégrisme ou de fondamentalisme). Il me semble d'ailleurs que Paul n'est pas du tout conciliant avec les adversaires déclarés de "son évangile" ("judaïsants" notamment); ce ne sont pas ceux-là en tout cas qu'il appelle les "faibles". Bien qu'il y ait (et c'est important de le noter) des similitudes entre les scrupules qu'il prête à ceux-ci et les revendications explicites et bruyantes de ceux-là.
Je pensais plutôt, moi, à ces "majorités silencieuses" qui croulent sous le nombre des porte-parole empressés d'interpréter leur silence. Les "extrêmes" qui les "prennent en otage" (pour rester sur le même registre) de leur propre cohérence et les "raisonnables" qui, paradoxalement, donnent raison aux extrêmes en s'auto-censurant.
Dans le domaine théologico-exégétique que je connais le mieux (mais auquel je n'entends pas du tout restreindre ce sujet), je me souviens de l'effet produit par la (première) série Corpus Christi sur Arte, qui avait pour la première fois relayé auprès du grand public (y compris celui des grandes Eglises, catholique et protestantes) des opinions d'exégètes et d'historiens (chrétiens!) sur les évangiles. La plupart des prêtres et des pasteurs n'y avaient pas appris grand-chose qu'ils ne savaient déjà, par contre leurs ouailles étaient tombées des nues. Pourquoi? Parce qu'en vertu de la sacro-sainte prudence (ou lâcheté) pastorale, pour ne pas "choquer" ou "troubler", les pasteurs avaient depuis des décennies gardé le savoir problématique pour eux, sans rien en laisser paraître dans leur enseignement. L'impact des études bibliques sur le catéchisme ou les homélies était resté quasiment nul, charge aux fidèles de base d'y croire en l'état ou pas. Aucun effort sérieux n'avait été fait pour les aider à intégrer l'approche critique des textes, ni à penser leur foi autrement que comme "vérité objective" (ce qui rejoint la deuxième partie de ton message). Et du coup, les ecclésiastiques qu'on a le plus entendus en réaction, ce sont justement les "extrémistes" qui contestaient la "science". Que pouvaient dire les "raisonnables": Bien sûr, on le savait, mais on ne voulait pas vous troubler?

Cela dit, le "courage de penser" (ou la lâcheté du refus de penser) n'est qu'un aspect de la question, même si c'est un aspect auquel je suis particulièrement sensible. Il y en a d'autres, éthiques (notamment dans l'Eglise catholique), politiques...

P.S.: Relisant ce post le lendemain matin, je tiens à préciser que je ne suis pas particulièrement intéressé par le genre "réquisitoire anticlérical", ni par une balance d'exemples "objectifs", historiques ou contemporains, de "lâcheté" ou de "courage" chrétiens. Ce qui m'intéresse davantage, c'est la façon dont ces deux "contraires" se rapportent l'un à l'autre dans l'expérience (et le témoignage) de la foi; c'est sous cet angle, surtout, que je trouve complexe et fascinant le jeu des "craintes" multiples et antagonistes -- crainte de Dieu, des hommes (ou des femmes!), de se perdre, de ne pas se perdre, du scandale au sens étymologique (pierre d'achoppement, faire trébucher, causer la perte de qqn) mais aussi au sens banal... -- qui détermine ici ce qui, vu de l'extérieur, passe tantôt pour du courage, tantôt pour de la lâcheté. L'association paradoxale de la force et de la faiblesse, surtout chez Paul encore (c'est quand je suis faible que je suis puissant, etc.), me semble ici très proche. Un courage de la lâcheté, qui se distinguerait d'un autre courage, celui qui fuit (lâchement?) devant la lâcheté?

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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeDim 17 Avr 2011, 17:36

Eh bien, je ne regrette pas de t'avoir amené à expliciter un petit plus ce que tu avais en "toile de fond" dans ce que tu entendais au chapitre des lâchetés, car en effet nous n'étions pas vraiment sur le même longueur d'onde.

(Remarque que je trouve malgré tout un lien entre l'angle sous lequel j'avais appréhendé la chose et ton postscriptum de ce matin, surtout dans ta citation de Paul à propos de ce que peut signifier être "faible" ou "puissant")

Ceci dit, c'est toujours aussi "drôle", chez moi en tout cas, de voir à quel point chaque fois qu'on "soulève le tapis", les si confortables -et sans doute nécessaires- dichotomies de notre quotidien, nos dualités conceptuelles, s'avèrent toujours reposer sur le plus artificiel des socles. Courage et lâcheté ne s'opposent guère que dans le discours -comme tout le reste- tandis que s'ils devaient "vraiment" être "quelque chose" dans la vie de de l'être humain, ces choses non seulement ne serait pas opposés mais seraient juste coexistantes, mais elles seraient en outre non seulement coexistantes, mais coextensives (tout en sachant que dire ça ne reste qu'un discours...).

Aller, par la foi qu'on place en lui, jusqu'au bout de son idéal, exige un courage certain... et la lâcheté tout aussi certaine de ne plus le remettre en question, cet idéal, et de ne jamais pouvoir le traiter avec le peu de ménagement que l'on a en général pour les idéaux des autres. Un joli nœud gordien, qui ne se tranche d'ailleurs que par un bien lâche courage (ou le contraire, on a le choix).

Et, pour poursuivre mon idée, et puisqu'on est dans le sujet, je disais que je trouve "drôle" que ce constat (les dualités sont artificielles et se déconstruisent avec une facilité dérisoire) cohabite chez moi avec l'impossibilité de m'en passer, de ces dualités (ce qui me ramène à ma parenthèse d'hier, sur la lâcheté de continuer à les utiliser "comme si"...).

"Ne jugez point" (à quoi les "dualités" serviraient-elles d'autres?), ça aussi mêle inextricablement le courage et la lâcheté -tout comme le fait de juger d'ailleurs, fort logiquement!
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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeDim 17 Avr 2011, 23:53

BB,
Le croiras-tu? J'y ai pensé, au noeud gordien... et, dans le même genre, à la réponse silencieuse de Diogène aux paradoxes de Zénon d'Elée. Pourtant ça ne m'a pas empêché de "problématiser", en vain bien sûr.
Il n'y a sans doute pas de problème insoluble, de dilemme indécidable, d'aporie infranchissable, d'énigme inextricable ni de mystère insondable qui ne se laisse trancher, aussi brutalement que définitivement -- il suffit d'un peu d'innocence barbare, de légèreté enfantine ou de rire incendiaire, d'un mépris bienheureux des règles du jeu. D'un coup de grâce, en somme.
Hélas! n'a pas cela qui en aurait besoin. Et pour cause.
"Comment un homme peut-il naître, quand il est vieux? Peut-il entrer une seconde fois dans le ventre de sa mère pour naître?"
Qui a goûté le fruit de la connaissance (d'où découlent, avec le "bon" et le "mauvais", toutes les "dualités conceptuelles") ne peut plus revenir en arrière. Heureusement, il se sait aussi mortel. Pour celui-là, c'est le seul (prot-)évangile, mais c'en est un.
Inutile en effet de le crier sur les toits. Qui en aura l'usage le trouvera bien assez tôt.
Merci.
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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeLun 18 Avr 2011, 15:34

Le NT recèle de nombreux cas de defection et de lacheté, Pierre qui renie Jésus ("Cette nuit même, avant que le coq chante, tu m’auras renié trois fois."),
Pierre pleure amèrement, son reniement est facteur de honte, surtout si on se souvient de sa protestation d’allégeance. Les pleurs de Pierre disent la honte de celui qui, pour sauver sa vie, renie le lien d’allégeance.
Le reniement de Pierre, se situe dans les pas de Jésus qui associent toute-puissance et impuissance.
Jean accentue cette opposition (toute-puissance et impuissance), lors du troisième reniement, un parent du serviteur blessé par Pierre l'interpelle, pour mieux souligner la simultanéité du courage et de la lâcheté chez le même homme (Jean, 18, 26-27"Un des serviteurs du grand prêtre, un parent de celui à qui Pierre avait tranché l'oreille, dit : " Ne t'ai-je pas vu dans le jardin avec lui ? " ).
Le récits de l’arrestation de Jésus souligne la defection, tous les disciples prennent la fuite et abandonne Jésus (""Cette nuit même, vous allez tous tomber à cause de moi."). Les évangiles procède à un déplacement de la responsabilité, Judas finira par représenter la trahison de tous, tout comme le[size=9] jeune homme qui suivait Jésus juste avec un drap sur le corps qui aprés son arrestation, s’enfuit tout nu en abandonnant son drap, le récit veut attribuer à un seul, de l’attitude de tous.
Les disciples oscillent entre toute-puissance et impuissance (courage et lacheté), comme s'ils devaient s’humaniser avant d'atteindre le divin, comme s'ils devaient tomber pour connaitre l'élévation, être faible pour devenir fort.
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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeJeu 21 Avr 2011, 11:18

Chers tous, cher free,

je te cite : "Les disciples oscillent entre toute-puissance et impuissance (courage et lacheté), comme s'ils devaient s’humaniser avant d'atteindre le divin, comme s'ils devaient tomber pour connaitre l'élévation, être faible pour devenir fort."

Je le crois. Même d'un point de vue très agnostique, n'importe qui nous dira que les épreuves rendent plus fort.

Puis YHWH dit : "ma toute puissance se déploie dans la faiblesse", ou quelque chose comme ça. Si l'un d'entre nous pouvait éclairer un peu plus cette dernière phrase, j'en serais heureux.

A bientôt.
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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeVen 22 Avr 2011, 18:55

J'ai évoqué plus haut 2 Corinthiens 12, qu'Anagnoste complète (v. 9s). Ce texte me rappelle invariablement un souvenir personnel (plus d'un, à vrai dire, mais c'est celui-là qui me vient en premier parce que c'est sans doute lui qui m'a le plus marqué):
C'était le jour de ma convocation devant un "comité judiciaire" des Témoins de Jéhovah, il y a 25 ans. Ce n'était pas une surprise -- j'avais fait ce qu'il fallait pour en arriver là -- et je ne me faisais pas d'illusion sur l'issue. Peu à peu je m'y étais fait. Pourtant, dans l'après-midi qui précédait ce rendez-vous attendu, j'ai été saisi d'une violente crise d'angoisse, où j'ai eu la sensation de perdre toute certitude sur ce que j'étais en train de faire. De ne plus rien savoir. De douter, avant tout, de mon propre jugement. Et c'est, du coup, pas du tout sûr de moi comme j'avais pu l'être en d'autres circonstances, y compris face aux mêmes interlocuteurs, mais au contraire assez défait et "vidé", que je m'y suis rendu.
Au cours de "l'audience" je me suis rendu compte que cette "liquéfaction" préalable m'avait été extrêmement bénéfique. Elle n'était pourtant pas calculée, ou alors de manière profondément inconsciente. J'ai répondu beaucoup plus "humblement" aux questions qui m'ont été posées que je ne l'aurais fait dans mon état "normal", et c'était infiniment plus efficace. Il m'est arrivé de dire à mes inquisiteurs qui m'interrogeaient sur tel ou tel point de doctrine (ce qui ne me serait pas venu à l'esprit quelques heures plus tôt): "peut-être que d'ici quinze jours je vous donnerai raison, mais pour le moment, non, je ne peux honnêtement pas dire que j'y croie." Mes "raisons" revenaient d'elles-mêmes au fil de la discussion, beaucoup plus fortes ainsi que comme des arguments tout préparés. J'ai repensé à cette parole évangélique si rarement prise au sérieux par les "apologètes" du christianisme: "Quand on vous emmènera pour vous livrer, ne vous inquiétez pas à l'avance de ce que vous direz, mais dites ce qui vous sera donné à ce moment même; car ce n'est pas vous qui parlerez, c'est l'Esprit saint." (Marc 13,11//.) Il faut être bien "vidé" pour que ce soit possible, et ça n'arrive en fait qu'exceptionnellement.
P.S.: cela s'associait aussi dans mon esprit au fameux mot de la légende luthérienne dont les Témoins de Jéhovah sont également nourris, sans s'imaginer en général que la même scène pourrait bien se jouer à l'intérieur de leur propre "Eglise": Ich kann nicht anders: Gott helfe mir! (Je ne puis autrement. Dieu me soit en aide!) Eh bien oui, je crois qu'on n'est jamais si fort, ET si faible, que quand on a -- à tort ou à raison, peu importe -- la sensation de ne pouvoir autrement. C'est à peu près ça que j'avais à l'esprit en parlant plus haut du "courage de la lâcheté", qui n'a rien d'une "vertu" mais peut s'avérer étonnamment "puissant" quand même.
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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeVen 22 Avr 2011, 20:38

Merci Spermologos de nous donner par petits extraits ce qui constitue tes derniers moments au sein des Témoins. J'ai senti toute l'émotion que tu as retrouvé pour nous les raconter et cela me prend à la gorge.
Pourrais-tu m'en dire plus au sujet de ce que tu appelle la légende luthérienne. Merci d'avance
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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeVen 22 Avr 2011, 20:50

C'est le discours de Luther à la Diète de Worms en 1521 (je dis légende parce que le contenu exact est, naturellement, débattu par les historiens):
"Votre Majesté sérénissime et Vos Seigneuries m'ont demandé une réponse simple. La voici sans détour et sans artifice. À moins qu'on ne me convainque de mon erreur par des attestations de l'Écriture ou par des raisons évidentes - car je ne crois ni au pape ni aux conciles seuls puisqu'il est évident qu'ils se sont souvent trompés et contredits - je suis lié par les textes de l'Écriture que j'ai cités, et ma conscience est captive de la Parole de Dieu ; je ne peux ni ne veux me rétracter en rien, car il n'est ni sûr, ni honnête d'agir contre sa propre conscience. Me voici donc en ce jour. Je ne puis faire autrement. Que Dieu me soit en aide."

Les publications de la Watchtower ont souvent relaté cette histoire (comme celles de "pré-réformateurs" comme Wycliff ou Jan Hus): c'était pour elle une façon de revendiquer des "pères" (tout en se dissociant par ailleurs des Eglises issues de la Réforme). C'est en tout cas une page de l'histoire de l'Eglise mieux connue du TdJ moyen (surtout dans les pays catholiques) que beaucoup d'autres.
En ce qui me concerne, le personnage de Luther -- que je ne connaissais que par là -- m'avait marqué, et j'en étais venu à me demander si j'aurais, moi, un tel "courage" dans une situation analogue, c.-à-d. si je devais faire face à MON "Eglise". Et, franchement, j'en doutais fort.
Curieusement, il a fallu que je me retrouve dans une situation analogue, quoique dépourvue du moindre enjeu historique, pour comprendre "de l'intérieur" que ce n'était pas du tout de courage qu'il s'agissait, ou alors d'un courage très paradoxal, lié à un état de faiblesse (ou de lâcheté) extrême. Aller contre sa "conscience", au moment même où elle est vive, ça c'est une forme de courage que je ne connais pas -- mais que je respecte.
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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeSam 23 Avr 2011, 20:22

Chers tous, cher spermologos,

merci pour ce témoignage émouvant et courageux.

Le "ne vous préoccupez pas de ce que vous direz devant le tribunal", je l'étends à beaucoup de choses. Dans mon ancien métier, l'enseignement, j'ai souvent constaté les bienfaits de la sainte improvisation qui sonne juste (après longue préparation toutefois). N'improvise bien que celui qui est préparé, dans la prière en particulier.

A bientôt.
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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeVen 04 Nov 2016, 13:40

J'aimerais partager avec la découverte d'un texte :



"Quant aux onze disciples, ils se rendirent en Galilée, à la montagne où Jésus leur avait ordonné de se rendre. Quand ils le virent, ils se prosternèrent, mais ils eurent des doutes."(Mt 28,17)

Il est surprenant que les onze disciples eurent doutes alors qu'ils viennent d'avoir une apparition de Jésus. Nous pouvons constater que ces doutes ne sont pas du tout dissipés dans le textes. Pourquoi le groupe des onze disciples venus à la rencontre du ressuscité  doutent-ils ?
On peut faire un rapprochement entre l'attitude des onze disciples et  celle des femmes qui en (28, Cool éprouvèrent à la fois "crainte et grande joie".
En Jn 20, 24-29, on retrouve cettte attitude d'un disciple qui doute mais  le doute est dissipé. Thomas finit par confesser : « Mon Seigneur et mon Dieu. »
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Narkissos

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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeVen 04 Nov 2016, 15:25

Je ne suis pas sûr de bien saisir le rapport entre ce texte et le sujet du présent fil; en attendant un éventuel éclaircissement je me contenterai de deux remarques sur celui-là:

1) La construction de la phrase grecque est bancale: on ne sait pas si ce sont les "onze disciples" (sujet du v. 16) qui "doutent", quelques-uns d'entre eux ou d'autres encore (qui ne sont pourtant pas censés être présents). La formule hoi de (edistasan) opposerait un groupe sujet à un autre si la phrase l'opposait à hoi men (prosekunèsan) -- les uns se prosternèrent, les autres doutèrent -- mais ce n'est justement pas le cas. Et il n'est pas dit non plus "quelques-uns (d'entre eux)" (tines [autôn]), qui désignerait un sous-groupe dans le groupe des onze, ni "d'autres" (alloi, heteroi).

On rappellera que les fins de livre sont particulièrement propices aux ajouts successifs : ici le motif du doute peut fort bien avoir été importé après coup (et très maladroitement) d'autres récits d'apparitions (non seulement Thomas, mais aussi les Douze -- ou Onze -- avant l'apparition).

2) Je me suis souvent dit (et j'ai probablement déjà dit ici) que la fin de "Matthieu" semble prendre un malin plaisir à provoquer une certaine forme de "doute"; en accumulant les invraisemblances (notamment une "résurrection générale" précédant celle de Jésus !), en suggérant lui-même des explications "alternatives" (le corps de Jésus dérobé), etc. Je ne dis pas que ce soit l'intention de quiconque (auteur, rédacteur, glossateur), mais c'est un effet incontestable du texte tel qu'il est -- en tout cas sur le lecteur que je suis.

Du coup cela rend la bizarrerie de 28,16s extrêmement significative, même si c'est par un pur hasard qui n'est plus, strictement, du ressort de l'"exégèse", pour autant que celle-ci se concentre sur ce qu'un "auteur" veut dire. "On" (qui ?) se prosterne (ou adore) et/ou "on" (qui ?) doute, c'est l'expérience même du lecteur "croyant" devant un tel récit.
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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitimeVen 04 Nov 2016, 16:43

Citation :
Je ne suis pas sûr de bien saisir le rapport entre ce texte et le sujet du présent fil; en attendant un éventuel éclaircissement je me contenterai de deux remarques sur celui-là:

Je cherchais un fi lpour intégrer la découverte de ce texte et je l'ai d'une manière maladroite. Merci Narkissos pour ton explication.
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MessageSujet: Re: Foi, courage et lâcheté   Foi, courage et lâcheté Icon_minitime

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