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| cardiologie biblique | |
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Auteur | Message |
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free
Nombre de messages : 10102 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: cardiologie biblique Mar 28 Juin 2022, 12:49 | |
| Mystique du Cœur et Vocation de la Personne
Mentionnée 853 fois dans l’Ancien Testament pour signifier principalement le cœur humain, la mention du cœur est moins fréquente dans le Nouveau testament. À l’exception du Cœur du Christ mentionné une fois (« Mettez-vous à mon école car je suis doux et humble de cœur » – Mt, 11, 29), il renvoie, le plus fréquemment, à l’intériorité de l’homme et au centre où s’unissent ses différentes facultés. En effet, le cœur ne renvoie pas uniquement aux dimensions affectives et aux états de l’âme mais également à l’intelligence – sous la forme de l’intuition – et à la mémoire. Il est le « centre le plus intime», car il est précisément le lieu où s’opèrent la transformation et la conversion de l’affect en décision, sous l’impulsion de l’Esprit. La mystique du Cœur propose un sens renouvelé de l’intériorité – non pas une intériorité close sur elle-même – mais tout au contraire, une intériorité ouverte qui révèle à la fois la profondeur de l’âme et le sens de son incarnation. Dans la mystique de Saint François de Sales, par exemple, le cœur désigne « l’intériorité de l’homme en son fond le plus intime, sorte d’en-deçà de la distinction des facultés : Il est très vrai que ce “fond du cœur est réservé à Dieu seul et qu’il n’y a que lui qui le puisse pénétrer” (EA IX 358, sermon XXX, 5, “pour une vêture”, 17 octobre 1620) ». Le cœur est ainsi le sceau de la singularité. Mais cette intériorité est précisément ouverte sur le monde et à l’altérité puisqu’il revient à l’homme d’aimer, c’est-à-dire de faire de son cœur le lieu d’une déprise et d’un accueil qui lui permettent de se donner. La contemplation du Cœur du Christ « doux et humble » montre la voie d’une telle vocation. S’il n’est d’autre chemin que l’humanité du Christ, alors, la mystique du Cœur – spirituel, charnel et divin –, loin d’être ésotérique, déploie de manière féconde une conception de l’individuation qui refonde les rapports de passivité et d’activité entretenus par l’âme unie au corps, et qui donne à l’intériorité le sens d’une intimité qui se trouve à équidistance de la promiscuité et de la clôture sur soi. L’échange des cœurs vécu notamment par Sainte Gertrude, Sainte Catherine de Sienne ou Sainte Marguerite-Marie Alacoque indique alors moins une substitution qu’une transformation et une imprégnation, leur révélant le sens profondément oblatif de leur vie et la voie sotériologique ouverte par la conversion de l’« amour affectif en un amour effectif» qui leur permet de consentir à être ce qu’elles sont, en Lui.
La contemplation du Cœur transpercé, annoncée par la prophétie d’Isaïe et accomplie par le mystère pascal invite l’homme, à la suite de Saint Jean, disciple bien aimé, à se pencher sur le Cœur désormais ouvert de Dieu, pour y puiser les ressources de sa sanctification et pour apprendre à aimer le prochain, en « actes et en vérité » (1 Jean 3, 18). Le disciple, penché sur la poitrine, pénètre le cœur de Dieu pour y entendre sa parole et accueillir l’Amour qui lui donnera ce « cœur bon et généreux » à même de la rendre féconde (Lc, 8, 15). Autrement dit, la réalité du sentiment affectif s’unit, aux pieds de la Croix, à la volonté du Cœur divin offert, transformant ainsi le désir de Dieu en désir en Dieu, c’est-à-dire en désir apostolique, au service du prochain. L’anthropologie du cœur révélée par la mystique est ici décisive pour comprendre le sens de la théologie symbolique qu’elle déploie. Le cœur est tout à la fois « signe naturel », « image », « symbole expressif » et « participation» au mystère, sans pour autant en réduire la portée ou en pénétrer l’essence. Cette expressivité et cette analogicité se donnent dans l’accomplissement de la visée oblative de la personne humaine qui montrent ainsi par l’amour qu’elle déploie la dimension opérante de l’Amour qui la porte et la fait être. Ce recours au symbolique est permis par la polysémie du « cœur » et par l’unité possible de ses dimensions, spirituelles, physiques et affectives. L’imago Dei se pense alors à partir de l’Incarnation du Christ – vrai Dieu et vrai Homme selon la formule conciliaire – qui est alors l’unique « Médiateur » entre Dieu et les hommes. La mystique du Cœur prend donc profondément le sens d’une mystique de la relation effective entre Dieu et les hommes, qui loin de signifier son éloignement, révèle plutôt sa proximité et son amitié, dès lors que les hommes entreprennent de le chercher (quaerere deum). L’image du cœur n’est donc pas « représentative ». Elle est plutôt iconique , au sens où elle s’anime dans la réciprocité d’un regard qui relève et invite à se mettre en mouvement. Elle ouvre à une profondeur qui enracine l’homme dans la réalité de son existence, plutôt qu’elle ne le transporte dans un monde imaginaire qui enfermerait le sujet en lui-même.
https://www.cairn.info/revue-le-philosophoire-2018-1-page-151.htm |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12460 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: cardiologie biblique Mar 28 Juin 2022, 16:12 | |
| Malgré un préjugé favorable, un intérêt pour le sujet et la meilleure volonté dont je fusse capable, je ne suis pas sûr d'avoir réussi à lire cet article, bien que j'en aie parcouru consciencieusement chaque paragraphe, souvent plus d'une fois et dans plusieurs sens... Excès de citations, défaut de concepts, de problèmes ou de raisonnements, ou bien fatigue, paresse ou autre insuffisance de ma part, toujours est-il que l'ensemble m'a paru assommant et l'enchaînement interminable, quoique chaque phrase, prise à part, semblât intéressante...
Je me demande d'ailleurs si le "mystère" ou la "magie" du "cœur" ne tient pas précisément à son indéfinition fondamentale, autrement dit à une confusion sémantique qui s'aggrave, s'épaissit ou s'obscurcit à mesure que s'y mêlent les langues et les corpus, tandis que le "référent" éventuel, ce dont on parle, se volatilise au contraire dans l'insaisissable et l'inconsistant. Des lb(b)-kardia strictement "bibliques" on passe au cor latin, mais aussi au pectum (poitrine, cf. petto, pecho, peito) qui n'est déjà plus un "organe", au Gemüt allemand qui n'est pas non plus Herz et n'a plus rien d'anatomique, et on rejoint toutes les (autres ?) figures de l'intériorité plus ou moins affectives ou émotives (âme, esprit, animus, anima, spiritus, psukhè, pneuma, rouah, thumos, etc.). Le passage est d'autant plus facile de l'"anthropologie" à la "théologie" et inversement que même en ce qui concerne "l'homme" ou "l'animal", on ne sait plus très bien de quoi on parle quand on dit cœur, "organe concret" ou "faculté abstraite", "attitude", "tempérament", "caractère", et ainsi de suite...
Parmi les "métaphores" incontrôlables (où est l'"image concrète" ou le "sens propre", où est le "sens abstrait" ou "figuré" ?), on pourrait mentionner le "cœur brisé" (Isaïe 61,1; Psaume 34,19; 51,19; 69,20s; 147,3) dont il n'est guère question dans cet article, bien qu'il rejoigne le motif, surexploité au contraire, du "cœur transpercé" (p. ex. Psaume 109,22; dans toute la tradition, notamment johannique, dérivée de Zacharie 12 il n'est pourtant pas question de "cœur", ni lb(b) ni kardia). Dans cette perspective ce ne serait pas le "cœur" mais sa brisure, son abîme, sa destruction, sa destitution, sa dégradation ou sa mise hors service, qui ouvrirai(en)t la voie à tous les passages et communications de "sens" (de l'homme au dieu, de la chair à l'esprit, etc., et inversement; outre que l'"esprit" ou "souffle" peut aussi être "brisé", ce qui complique encore un peu l'imagination ou la représentation, Psaume 51,19; Proverbes 15,4). |
| | | free
Nombre de messages : 10102 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: cardiologie biblique Mer 29 Juin 2022, 13:06 | |
| Ton cœur est-il droit ? 2 R 10, 15 Joie pour ceux qui ont le cœur droit. Ps 97, 11 Tu n’as pas de mépris pour un cœur brisé ou pour un cœur broyé. Ps 51, 19 Lord, I believe, help thou mine unbelief. Mc 9, 24 (Bible anglaise de 1611)
Conciliation et communication des ordres
Trois ordres doivent donc être distingués, mais il faut bien qu’à un moment donné ils puissent communiquer. Sans quoi nous deviendrions vite schizophrènes. On peut avoir à la fois le sens de la distinction et le sens de la conciliation. Mt 13, 19 : « Quand un homme entend la parole du Royaume sans la comprendre, le Mauvais survient et s’empare de ce qui est semé dans son cœur. » Ainsi c’est l’Esprit, par une approche éclairée et éclairante, qui met en activité la foi. Un verset affirme très nettement le lien entre l’amour et l’Esprit. C’est Rm 5, 5 : « L’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit-Saint qui nous a été donné. »
Il faudra prévoir une dialectique des ordres afin de parvenir à une certaine conciliation des contraires. Une tension, cela se résout au plan supérieur. En même temps nul besoin de conciliation définitive du type de la synthèse hégélienne.
De même qu’il y a trois ordres de choses : la chair, l’esprit, le cœur, de même il y a trois ordres de discours : un discours philosophique adressé à l’intelligence des principes, un discours théologique adressé à l’intelligence éclairée par la foi, un discours mystique adressé au cœur.
Trois sortes de savoirs correspondent à ces trois ordres de discours : celui du philosophe consiste à avoir une chose dans son fond, à la considérer dans sa source et à la connaître par son principe. Celui du théologien se prend par la connaissance d’une chose, non par son principe naturel comme celle des philosophes, mais par l’Écriture Sainte et par les principes de la foi dont les théologiens se servent pour valider les vérités de la religion à ceux qui les ignorent. Reste le discours mystique, qui s’adresse au cœur et en procède. On va y revenir.
https://journals.openedition.org/rsr/4130 |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12460 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: cardiologie biblique Mer 29 Juin 2022, 14:56 | |
| L'auteur, tard venu de la philosophie à la théologie (catholique), semble n'avoir été guère effleuré par l'interrogation exégétique, linguistique, lexicale, sémantique: il peut citer tranquillement l'AT, le NT, Pascal, Péguy ou Simone Weil, nonobstant les langues, les traductions et les époques impliquées, comme si par les mots "cœur" ou "esprit" il était toujours question de la même chose -- ce qui n'est justement pas le cas, comme on l'a montré depuis le début de ce fil.
Il donne toutefois à penser quelque chose de fort intéressant: là où se forme ne serait-ce qu'une ébauche d'"anthropologie" systématique, qui se réduit généralement à un dualisme (p. ex. "esprit" / "âme"-"chair" chez Paul, "âme" / "corps" ailleurs), le "cœur" échappe pour ainsi dire à la division par son ambivalence même, comme un joker, n'étant rangé ni d'un côté ni de l'autre parce qu'il peut être de l'un ou de l'autre (susceptible de traîtrise et de corruption, mais aussi d'amour, de foi, de fidélité, etc.). On ne sait toujours pas plus de quoi on parle en parlant du "cœur", on se doute que ce n'est pas exactement la même chose quand on cite l'AT hébreu, le NT grec, le français de Pascal ou celui de Péguy, mais on y recourt quand même avec une certaine efficacité qui ne dépend justement pas de la "chose" visée. C'est peu pour faire un "ordre", assez peut-être pour un "contr'ordre", ou une structure d'appel: quelle que soit la logique ou la métaphysique régnante, on peut toujours en appeler à quelque chose comme le "cœur" (ou de nouveau l'"âme") pour se mettre en travers de sa mécanique; même si l'on entend jamais exactement par là la même chose, ce sera toujours autre chose que ce qu'entend l'"ordre" de référence. |
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