On passe du panoramique au gros plan, sur UNE interprétation hassidique (Rav Tzaddoq haCohen) de la fin du XIXe siècle parmi beaucoup d'autres, dont je n'avais jamais entendu parler... assez complexe d'ailleurs en elle-même pour recéler beaucoup de différence(s), variations, tensions, ambiguïtés ou contradictions. En tout cas c'est instructif, et c'est une bonne illustration des potentialités infinies de "sens" ouvertes par les textes "bibliques", qui se démultiplient au fil des lectures et des commentaires, de génération en génération, de situation en situation -- on est là à une époque déjà contemporaine du premier sionisme, mais encore hostile ou indifférente à celui-ci pour ce qui concerne la quasi-totalité du judaïsme "religieux"; ce n'est visiblement déjà plus le point de vue du commentateur (Alcoloumbre, 2013, cf. p. ex. la note 36).
En tout cas il est clair que dans cette "eschatologie"-là il n'est pas question d'un Israël combattant -- dans Ezéchiel 38s non plus d'ailleurs.
S'il y a un point commun entre toutes les interprétations, de ce texte, de la Bible en général et d'à peu près n'importe quoi, c'est bien la tendance irrépressible de tout "sujet", individuel ou collectif, à se situer au centre de tout -- tendance fort naturelle d'ailleurs puisque c'est la condition même d'un "point de vue", nécessaire illusion de perspective comme dirait Nietzsche. Egocentrisme, ethnocentrisme, je suis, nous sommes par définition et par défaut au centre de tout, objet(s) de toutes les haines, cerné(s), traqué(s), assiégé(s) de toutes parts, selon une logique obsessionnelle et obsidionale (même si on n'entend plus le siège dans l'obsession), paranoïaque ou complotiste si l'on veut, qui à des degrés divers est aussi bien celle des "judaïsmes" successifs que du christianisme ou de l'islam, de chaque Etat-nation, parti, religion ou secte, machin quelconque qui peut dire "nous" -- fût-il aussi artificiel que le jéhovisme: "nous" sommes au centre du monde qui "nous" hait, rien n'illustrerait mieux ce fantasme que "Gog-Magog" (dans Ezéchiel comme dans l'Apocalypse ou leurs suites).