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 L'esclave dans la Bible

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MessageSujet: L'esclave dans la Bible   L'esclave dans la Bible Icon_minitimeMer 25 Mar 2015, 13:36

On retrouve dans la Torah deux catégories d'esclaves, l'esclave hébreu et l'esclave étranger.

"Si ton frère devient pauvre chez toi et qu'il se vende à toi, tu ne lui imposeras pas le travail d'un esclave. Il sera chez toi comme un salarié, comme un résident temporaire ; il sera à ton service jusqu'à l'année du jubilé. Il sortira alors de chez toi, lui et ses fils avec lui, et il reviendra dans son clan, dans la propriété de ses pères. — Car ce sont mes serviteurs, je les ai fait sortir d'Egypte ; on ne les vendra pas comme on vend des esclaves." Lv 25,39 ss

"Si un voleur est surpris en flagrant délit d'effraction, qu'il soit frappé et meure, on ne sera pas coupable de meurtre pour lui ; si le soleil est levé, on sera coupable de meurtre pour lui. — Il donnera une compensation ; s'il n'a rien, il sera vendu pour son vol." Ex 22,2-3


Deux causes justifient l'esclavage, la misère et le vol (l'insolvabilité). L'esclavage reste avant tout  une situation temporaire.
L'esclave hébreu pouvait racheter sa liberté, "s'il a les ressources nécessaires, il pourra assurer lui-même sa rédemption" (Lv 25,49) et "Lorsque tu achètes un esclave hébreu, il servira six années ; la septième, il sortira libre, sans rien payer" (Ex 21,2)


L'esclave étranger

"Ton esclave et ta servante, ceux qui t'appartiennent, c'est aux nations qui vous entourent que vous pourrez les acheter, l'esclave et la servante. Vous pourrez aussi les acheter aux fils des résidents temporaires qui séjournent en immigrés chez vous, et à leurs clans qui sont chez vous, les clans qu'ils ont engendrés dans votre pays ; ceux-là seront votre propriété. Vous les laisserez comme patrimoine à vos fils après vous, comme une propriété dont ils hériteront ; vous les garderez comme esclaves à perpétuité. Mais pour ce qui est de vos frères, les Israélites, aucun de vous ne dominera avec rudesse sur son frère." (Lv 25, 44 ss)

L'esclave étranger est un bien inaliénable.


L'avis de la Watchtower :

Citation :
D’après la Bible Dieu cautionne-t-il l’esclavage ?
 
L’AMOUR du prochain est un des enseignements fondamentaux de la Bible. Or cette notion est diamétralement opposée à celle d’un esclavage oppressif. Certains ne comprennent donc pas qu’il soit question d’esclavage dans la Bible.
Dans l’Antiquité, Dieu a autorisé ses adorateurs à avoir des esclaves (Genèse 14:14, 15). Aux jours des apôtres également, certains chrétiens en possédaient et d’autres étaient eux-mêmes esclaves (Philémon 15, 16). Faut-il en déduire que la Bible cautionne l’esclavage tyrannique ?
 
Structures sociales en conflit avec les principes bibliques
 
À l’époque de la rédaction des premiers livres de la Bible, les humains avaient déjà instauré des systèmes économiques et sociaux reposant sur des pratiques contraires aux principes divins. Dieu a condamné certaines de ces pratiques dans sa loi écrite, mais il a décidé d’en tolérer d’autres, comme l’esclavage.
À propos de l’organisation sociale de l’Israël antique, l’International Standard Bible Encyclopedia déclare : “ Elle était censée fonctionner à la manière d’une communauté fraternelle dans laquelle, en principe, il n’y avait pas de pauvres [...], et où veuves, sans-abri et orphelins n’étaient pas exploités. ” Ainsi, la loi de Dieu ne se bornait pas à tolérer une pratique économique et sociale déjà établie : elle la réglementait afin que, si on y recourait, les esclaves soient traités avec humanité et bienveillance.

http://m.wol.jw.org/fr/wol/d/r30/lp-f/102011251
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Narkissos

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MessageSujet: Re: L'esclave dans la Bible   L'esclave dans la Bible Icon_minitimeMer 25 Mar 2015, 15:48

D'un point de vue "historico-critique", il n'y a pas à attendre de la Torah une "doctrine" cohérente sur ce genre de sujet, puisqu'elle est composée de textes disparates, d'époques, de lieux et de milieux divers, et même de nature différente (aux législations et autres droits coutumiers correspondant à une pratique locale effective, comme une bonne partie du "Code de l'Alliance" d'Exode 21--23, se mêlent des "législations idéales" comme celles de Lévitique 25 qui n'ont probablement jamais été appliquées nulle part, autrement dit des textes plus "idéologiques" que proprement "législatifs"). L'hébreu (contrairement au grec) n'a même pas de mot spécifique pour désigner "l'esclave" et son "statut" (seul le contexte renseigne au cas par cas sur la condition du "serviteur", `bd, qui peut aller -- en traduction -- de l'"esclave" au "ministre"); le qualificatif "hébreu" (`bry) lui-même, surtout là où il est question de servitude ou d'esclavage, n'avait probablement rien à voir dans les textes les plus anciens (comme le Code de l'Alliance) avec son sens "ethnico-géographico-linguistique" ultérieur et désignait plutôt, comme les `ap/birou des textes égyptiens, une catégorie sociale de "travailleurs" sans attache terrienne fixe (penser aux distinctions fluctuantes entre manants, vilains et serfs au moyen-âge).
Soit dit en passant, la Watch, qui peut être "politiquement correcte" comme tout le monde quand ça l'arrange, se garde bien de citer parmi ses "exemples" Exode 21,21 (qui m'avait tant scandalisé, adolescent, la première fois que j'avais lu la Bible).
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MessageSujet: Re: L'esclave dans la Bible   L'esclave dans la Bible Icon_minitimeJeu 26 Mar 2015, 16:33

Citation :
Soit dit en passant, la Watch, qui peut être "politiquement correcte" comme tout le monde quand ça l'arrange, se garde bien de citer parmi ses "exemples" Exode 21,21 (qui m'avait tant scandalisé, adolescent, la première fois que j'avais lu la Bible).

"Lorsqu'un homme frappe son esclave ou sa servante avec un bâton, si l'esclave ou la servante meurt sous sa main, celui-ci sera vengé. Mais s'il survit un jour ou deux, il ne sera pas vengé, car c'est son argent." Ex 21,20-21 

Effectivement, il est étonnant de constater que la vengeance du sang ne s'exerce pas si l'exclave, considéré comme un bien, décède suite à ses blessures, hors délai.

N'est-pas anachronique de poser la question, "D’après la Bible Dieu cautionne-t-il l’esclavage ?"
Les auteurs de l'Exode se posaient-ils ce genre de question ?
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MessageSujet: Re: L'esclave dans la Bible   L'esclave dans la Bible Icon_minitimeJeu 26 Mar 2015, 16:47

free a écrit:
N'est-pas anachronique de poser la question, "D’après la Bible Dieu cautionne-t-il l’esclavage ?"
Ben si, mais il n'y a guère de question adressée à un texte qui ne soit anachronique (et quand il s'agit d'une question morale adressée par un lecteur moderne à un texte ancien, l'anachronisme n'en est que plus manifeste).
Cf. https://etrechretien.1fr1.net/t288-religion-morale-histoire-et-ecriture
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MessageSujet: Re: L'esclave dans la Bible   L'esclave dans la Bible Icon_minitimeJeu 26 Mar 2015, 18:16

Paul (ou assimilé) ne prône pas l'affranchissement des esclaves et conseille aux esclaves d'obéir à leurs maîtres.

"Esclaves, obéissez à vos maîtres selon la chair avec crainte et tremblement, dans la simplicité de votre cœur, comme au Christ" Eph 6,5

"Que les esclaves soient soumis en tout à leurs maîtres, qu'ils s'efforcent de leur être agréables, qu'ils ne les contredisent pas" Ti 2,9

Idem pour Pierre, "Domestiques, soyez, en toute crainte, soumis à vos maîtres ; non pas seulement à ceux qui sont bons et conciliants, mais aussi à ceux qui sont difficiles(2,9)
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MessageSujet: Re: L'esclave dans la Bible   L'esclave dans la Bible Icon_minitimeJeu 26 Mar 2015, 19:38

A titre d'exception (qui confirme la règle !), l'épître à Philémon plaide quand même à demi-mot pour l'affranchissement dans un cas particulier (celui d'Onésime, v. 8ss).

Parmi les épîtres plus anciennes, on peut rappeler 1 Corinthiens 7,21s où Paul déconseille à l'esclave qui pourrait s'affranchir de le faire (il est vrai que la formulation grecque est assez lâche pour que certains l'interprètent en sens contraire, mais alors ce serait aussi contraire à tout le contexte où Paul recommande de ne rien changer à sa "condition" dans le "monde").

[Je repense au film Manderlay de Lars von Trier qui offre, à partir d'une (ou deux) autre(s) "situation(s)" historique(s) (l'abolition de l'esclavage dans les Etats américains du Sud, avant et après), une réflexion peu ordinaire sur la question des avantages comparés de l'esclavage et de la "liberté", et une critique féroce de la morale "moderne" et "progressiste", aveugle non seulement aux conséquences réelles de ses idéaux sur les premiers intéressés, mais aussi aux ressorts inconscients de sa bonne-mauvaise conscience.]
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MessageSujet: Re: L'esclave dans la Bible   L'esclave dans la Bible Icon_minitimeVen 27 Mar 2015, 11:42

Citation :
[Je repense au film Manderlay de Lars von Trier qui offre, à partir d'une (ou deux) autre(s) "situation(s)" historique(s) (l'abolition de l'esclavage dans les Etats américains du Sud, avant et après), une réflexion peu ordinaire sur la question des avantages comparés de l'esclavage et de la "liberté", et une critique féroce de la morale "moderne" et "progressiste", aveugle non seulement aux conséquences réelles de ses idéaux sur les premiers intéressés, mais aussi aux ressorts inconscients de sa bonne-mauvaise conscience.]

Grace arrive dans un village où l'esclavage n'est pas aboli, une famille blanche exploite des Noirs et leur fait subir des humiliations (Timothy va être battu). Tout l'effort de Grace au cours du film vise à rétablir l'égalité. Elle est outrée du mode de vie des Noirs et de la loi qu'elle trouve atroce écrite dans « The mam'law ». Cependant, c'est tout de même la fin du film et le générique qui expose le mieux le point du vue du réalisateur : des images d'exactions sur des Noirs américains datant du XXe siècle (donc postérieure à l'abolition de l'esclavage) sur fond d'une musique de David Bowie. Il commence par les images classiques des réunions du Ku Klux Klan ou des pendaisons des années 50 pour finir par un gros plan sur le World Trade Center encore debout suivi d'image de soldats noirs américains en Irak.

En outre, les esclaves ne sont pas anti-esclavagistes. On apprend en effet à la fin du film que c'est le vieil esclave lui-même qui a écrit « The Mam's Law ». Ce qui semble à Grace une loi humiliante et oppressante est pour lui la règle idéale pour Manderlay. Elle est faite pour eux, en fonction de leur caractère (ils sont classés par catégories), leur assure un toit et les protège de la misère et de la famine. Elle leur ôte un des plus gros poids de la vie, le choix. Ils ne sont pas responsables de leurs problèmes, tout leur malheur vient de la loi. Seul quelques-uns sont, en effet, au courant que c'est le vieil esclave qui a l'a écrite. Mais c'est en toute connaissance de cause que les esclaves votent, eux-mêmes, le retour à la « Mam's Law » à la fin du film. Leur explication : l'Amérique blanche n'est pas prête à accueillir les noirs affranchis ; la liberté qui les attend ne leur offre pas le même confort que leur esclavage.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Manderlay
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MessageSujet: Re: L'esclave dans la Bible   L'esclave dans la Bible Icon_minitimeVen 27 Mar 2015, 12:02

A Voir et à écouter :

Préjugés raciaux et instrumentalisations religieuses : l'exemple du mythe de la malédiction de Cham

Provenance : Université des Antilles et de la Guyane. Service commun de la documentation
Permalien : http://www.manioc.org/fichiers/HASH3ffca59bbd2b411176c548



De la malédiction de Cham à la malédiction des Noirs

Le mot chamitique ou hamitique vient du nom Cham, l’un des trois fils de Noé. Dans la Bible, Ancien Testament, le livre de la Genèse dit au chapitre 9 versets 18-27 que Cham ayant vu son père ivre et nu, il en avait averti ses frères, Sem et Japhet. Le père une fois sorti de son ivresse apprit « ce que lui avait fait » son jeune fils, et maudit Canaan, fils de Cham en le condamnant à être l’esclave de ses frères. Au chapitre 10, la Genèse présente comme fils de Cham, Kouch, Misraïm , Put et Canaan. Et comme fils de Kuch, Séba, Havila, Sabta, Ragma, et Sabteka. Comme fils de Ragma, Saba et Dédan. A ce niveau, tous les peuples de la terre sont présentés comme issus d’un même père. Mais certaines traditions juives vont exploiter l’histoire de la malédiction de Cham pour la transformer en celle des Noirs. Une confusion, peut-être intéressée et délibérée, a été faite entre Cham et trois racines de l’égyptien ancien : ham qui signifie être chaud, brûler ; hm,hmw qui veut dire esclave, disciple et km, kam qui signifie être noir, brunir. Kmt est à la fois une chose noire, la terre noire fertile par opposition à deseret, terre rougeâtre et stérile, l’appellation de l’Egypte, du roi et des habitants de l’Egypte. Kami désigne le dieu Osiris etc.

 L’auteur de la Genèse « aurait identifié les contenus sémantiques des trois points ou de deux seulement comme le fera plus tard Philon d’Alexandrie qui , commentant ce passage(Gen. 9, 18-27), identifiera km et la chaleur(hm) d’autant plus facilement que ham en hébreux a le même sens que dans l’égyptien ancien. (Cool» Dans une étude sur l’hypothèse hamitique , son origine et sa fonction diachronique, Edith R . Sanders montre que la malédiction passa des noms de Cham, de Canaan, d’Egypte etc à la couleur noire de la peau et même à la physiologie et à la conduite morale des Noirs « comme le montrent clairement les traditions rabbiniques du Talmud babylonien dans lequel les descendants de Canaan deviennent des Noirs et des dégénérés.(9) »

 En fait la Genèse escamote le vrai motif de la malédiction et les traditions sur l’ivresse de Noé varient : l’une dit que Noé a été castré par Canaan, l’autre qu’il a été émasculé par Cham, tandis qu’une troisième raconte qu’il l’a été par un lion. Dans la mythologie (grecque et hittite par exemple), le mythe de la castration du père est fréquent : Chez les Grecs, Ouranos est émasculé par Kronos, qui a son tour est émasculé par Zeus. Les Hébreux ont récupéré ce thème mythique pour l’exploiter contre les peuples du sud et les Noirs. « Tout cela provient du fait qu’à un moment donné de l’histoire réelle des peuples, les Hébreux qui avaient des prétentions sur la terre des Cananéens ou des Philistins alors alliés des Egyptiens vers l’époque de Ramsès III(1182-1151), avaient besoin d’une puissante idéologie de caractère cosmique pour légitimer leurs prétentions politiques. (10)» Cette idéologie de la malédiction des Noirs restera désormais latente au long de l’histoire. Au XIVème siècle Ibn Khaldun essaye même de la combattre et d’expliquer que la couleur noire n’est pas la suite de la malédiction de Noé mais plutôt l’effet de l’air sous une très grande chaleur. Il constate dans son Muqaddimah ou Introduction à l’histoire universelle qu’il est dit dans la Torah que Noah a maudit son fils Ham mais qu’aucune référence n’y est faite à la couleur noire .

http://www.associationarchive.com/?page=dossiers&ID_art=97
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MessageSujet: Re: L'esclave dans la Bible   L'esclave dans la Bible Icon_minitimeVen 27 Mar 2015, 20:46

@ free: mes excuses pour la faute (maintenant corrigée) sur le titre du film: c'est bien à celui-là que je pensais.
Au passage, les résonances théologiques de l'œuvre se perçoivent mieux quand on voit Manderlay à la suite du premier volet, Dogville. J'en avais écrit quelques mots ici : http://oudenologia.over-blog.com/article-miettes-de-la-liberte-116930923.html (2° b).

Sur Cham-Canaan, cf. https://etrechretien.1fr1.net/t538p15-christianisme-mariage-procreation-et-sexualite

Pour revenir à "Paul" tout en élargissant un peu le sujet de l'esclavage aux rapports de classes en général, il paraît évident qu'un "christianisme" qui s'appuie concrètement sur une certaine structure sociale (en l'occurrence le "clientélisme" de la société gréco-romaine) ne peut guère en même temps la combattre ni même vraiment la "subvertir" de l'intérieur. Tout le système des "Eglises" pagano-chrétiennes (destinataires de la "mission" et des épîtres pauliniennes), dès lors qu'il ne relève plus de l'organisation intra-communautaire de l'ethnos juif, n'existe et ne subsiste que grâce au bon vouloir de ses membres les plus aisés, les "patrons" (notables) qui ont des (grandes) maisons pour y accueillir l'ekklèsia et lui fournir ainsi la protection d'un espace "privé" et même d'un quasi-statut juridique: l'Eglise-qui-est-dans-leur-maison se confond commodément avec leur "famille" ou leur "maisonnée" (déjà entendue au sens large, avec esclaves, affranchis et autres "clients" ou "obligés"). Ce n'est qu'en renforçant au fil des siècles sa propre structure hiérarchique (épiscopes-évêques progressivement distingués des "patrons" et prenant même l'ascendant sur ces derniers) et en consolidant son "réseau" inter-ecclésial (inter-urbain, inter-régional), avec une croissance numérique importante et l'utilisation de lieux de culte autonomes, et finalement grâce à la protection du pouvoir impérial, que "l'Eglise" échappera dans une certaine mesure à l'emprise de ce clientélisme local et privé.

En s'en prenant violemment aux riches et aux discriminations sociales dans l'Eglise, l'épître de Jacques vise directement les travers de ce système (cf. https://etrechretien.1fr1.net/t198-la-lettre-de-jacques ). Et bien qu'elle ne parle pas spécifiquement de l'esclavage, elle constitue peut-être dans le NT la seule critique radicale de l'ordre social dont il fait partie intégrante. (Cf. 5,1ss, notamment sur le thème du déni de salaire des travailleurs.)
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MessageSujet: Re: L'esclave dans la Bible   L'esclave dans la Bible Icon_minitimeLun 30 Mar 2015, 13:53

Citation :
Pour revenir à "Paul" tout en élargissant un peu le sujet de l'esclavage aux rapports de classes en général, il paraît évident qu'un "christianisme" qui s'appuie concrètement sur une certaine structure sociale (en l'occurrence le "clientélisme" de la société gréco-romaine) ne peut guère en même temps la combattre ni même vraiment la "subvertir" de l'intérieur. Tout le système des "Eglises" pagano-chrétiennes (destinataires de la "mission" et des épîtres pauliniennes), dès lors qu'il ne relève plus de l'organisation intra-communautaire de l'ethnos juif, n'existe et ne subsiste que grâce au bon vouloir de ses membres les plus aisés, les "patrons" (notables) qui ont des (grandes) maisons pour y accueillir l'ekklèsia et lui fournir ainsi la protection d'un espace "privé" et même d'un quasi-statut juridique: l'Eglise-qui-est-dans-leur-maison se confond commodément avec leur "famille" ou leur "maisonnée" (déjà entendue au sens large, avec esclaves, affranchis et autres "clients" ou "obligés"). Ce n'est qu'en renforçant au fil des siècles sa propre structure hiérarchique (épiscopes-évêques progressivement distingués des "patrons" et prenant même l'ascendant sur ces derniers) et en consolidant son "réseau" inter-ecclésial (inter-urbain, inter-régional), avec une croissance numérique importante et l'utilisation de lieux de culte autonomes, et finalement grâce à la protection du pouvoir impérial, que "l'Eglise" échappera dans une certaine mesure à l'emprise de ce clientélisme local et privé.

C'est donc pour des raisons d’ordre pragmatique que Paul ne s'élève pas contre l'esclavage, la peur d’ébranler l’ordre social a peut-être joué un rôle.

 Ne considère-t-il pas également que la liberté se situe ailleurs que dans la libération physique et sociale : "Mes frères, vous avez été appelés à la liberté ; seulement, que cette liberté ne devienne pas un prétexte pour la chair ; par amour, faites-vous plutôt esclaves les uns des autres" (Gal 5,13).

Pour lui cette "liberté" doit se vivre dans le rapport maître-esclave là où ; il existe.  Il importe peu de changer le statut social des croyants :

"Que chacun demeure dans la condition où il était lorsqu'il a été appelé. Tu étais esclave quand tu as été appelé ? Ne t'en soucie pas ; même si tu peux devenir libre, mets plutôt à profit ta condition. En effet, l'esclave qui a été appelé, dans le Seigneur, est un affranchi du Seigneur ; de même, l'homme libre qui a été appelé est un esclave du Christ."(1 Cor 7,20 ss)
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MessageSujet: Re: L'esclave dans la Bible   L'esclave dans la Bible Icon_minitimeLun 30 Mar 2015, 14:33

Pour moi les deux choses -- le christianisme de type "paulinien" (entre autres) 1°) dépend pratiquement d'une structure sociale qu'il ne peut pas mettre en cause et 2°) place théoriquement son "idéal" sur un autre "plan" que cette structure sociale -- ne sont ni incompatibles (la preuve !), ni nécessairement liées par des liens "pervers" (lâcheté, hypocrisie, opportunisme). Une époque à l'imaginaire aplati comme la nôtre, qui ne veut ou ne peut voir qu'un seul "plan" de "réalité", ne peut guère concevoir le recours à une autre "dimension" (spirituelle, céleste, eschatologique) que comme une échappatoire honteuse. A quoi bon proclamer qu'en Christ il n'y a ni riche ni pauvre, ni esclave ni homme libre, ni juif ni grec, ni homme ni femme, si ces distinctions demeurent intactes au plan "phénoménal", "concret" ou "pragmatique", qui est en dernière analyse le seul qui vaille à nos yeux ?
Cela dit, cette critique n'est pas seulement "moderne", puisqu'elle est déjà en grande partie celle de l'épître de Jacques -- et aussi de l'évangile selon Matthieu, notamment dans ses appels à la pauvreté réelle, au moins pour les "parfaits" : là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur (et non l'inverse !), c'est aussi une protestation de fond contre la dualité des "plans" du christianisme paulinien (entre autres) et le principe de séparation des "domaines" (spirituel et temporel-matériel) qu'il implique (et dont la théorie luthérienne des "deux règnes" sera un aboutissement particulièrement remarquable).
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MessageSujet: Re: L'esclave dans la Bible   L'esclave dans la Bible Icon_minitime

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