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 jeux interdits

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Narkissos

Narkissos


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MessageSujet: jeux interdits   jeux interdits Icon_minitimeMar 22 Sep 2015, 13:30

Malheur,
pour ceux qui disent le mauvais bon et le bon mauvais,
qui mettent les ténèbres à la place de la lumière et la lumière à la place des ténèbres,
qui rendent amer le doux et doux l'amer !

Isaïe 5,20.

Quiconque a tant soit peu le goût du paradoxe, de la dialectique, de la coïncidence des opposés, ou seulement celui de la nuance et de la complexité, quiconque répugne au dualisme ("manichéen" ou pas), à la dichotomie, à l'antagonisme, à l'alternative, au tiers exclu, aux oppositions symétriques tranchées une fois pour toutes, au tout noir ou tout blanc qui ignore le gris et la couleur, ne manquerait pas de se sentir visé par ce "malheur". A peine serait-on rassuré de savoir qu'en hébreu celui-ci exprime moins la malédiction que la lamentation (hoï, ouaï, vae, interjection pan-méditerranéenne qui a passé beaucoup de frontières linguistiques et correspondrait plutôt à notre "hélas !" qu'à sa traduction usuelle "malheur à"). D'autant que ce "malheur", le quatrième d'une série de six (5,8.11.18.20.21.22; ou sept si l'on compte 10,1 qui aurait été déplacé au fil des ajouts). est aussitôt suivi (contrairement aux trois premiers, séparés par des oracles intercalés) de deux autres qui semblent viser, d'abord une prétention "intellectuelle" ou sapientiale (littéralement, les sages à leurs propres yeux et intelligents devant leur propre face, v. 21), puis, en écho au deuxième (v. 11), une ivresse qui pervertit le jugement, associée explicitement à la corruption des juges (v. 22s; bien que le "pot-de-vin" franco-français n'ait pas littéralement d'équivalent hébreu, ici il tombe à pic).

C'est dans un sens judiciaire en effet que ce texte s'entendrait le plus naturellement, et dans ce sens il en rejoindrait beaucoup d'autres, prophétiques ou sapientiaux (p. ex. Amos 5,7; Michée 3,2; Proverbes 17,15): déclarer juste le méchant (= acquitter le coupable) et déclarer méchant le juste (= condamner l'innocent), comme dit le proverbe, telle serait effectivement, selon la même symétrie, l'abomination forensique par excellence. Mais les termes de notre verset sont plus larges que le champ judiciaire proprement dit, et la frontière entre sens "propre" et "figurés" du "jugement" est elle-même poreuse: il y va toujours du judiciaire dans le "jugement" dit moral ou intellectuel, quand celui-ci ne s'exercerait que dans le "for intérieur". Et, réciproquement, il n'y a pas de jugement judiciaire qui ne reflète, outre la loi proprement dite, un "système de valeurs", une "logique" et une "vision du monde".

De là à penser que "Dieu" tient (en plus d'un sens peut-être) à un dualisme stable (le bien d'un côté, le mal de l'autre, séparés une fois pour toutes comme la lumière et les ténèbres dans le premier chapitre de la Genèse), et à soupçonner tout jeu frontalier de perversion diabolique, il n'y aurait qu'un pas. Qu'il s'agisse d'effacer ou de brouiller la ligne de démarcation, de sauter d'un "côté" à l'autre, de les intervertir ou même de les mettre en relation d'échange et d'utilité réciproque, de complicité en somme, tout cela ne pourrait être dès lors qu'artifice plus ou moins pervers et subversif du "diable" pour confondre ce que "Dieu" a séparé.

Et pourtant ce genre de jeu occupe aussi une place considérable dans la Bible, et -- il faut bien l'avouer au risque du "malheur" susdit -- dans ses pages les plus fortes et les plus intéressantes: ainsi dans le même "livre", on verra le "monothéisme pur" d'un "deutéro-Isaïe" rapporter ensemble le bon (plus exactement la "paix", shalom) et le mauvais, la lumière et les ténèbres au même Yahvé (45,7). C'est aussi, par exemple, la leçon du prologue de Job (2,10), ou celle du roman de Joseph (Genèse 45,20, ou comment Dieu fait du bon avec du mauvais). Mais le jeu du "renversement", même s'il n'est pas strictement des "valeurs", est surtout essentiel au Nouveau Testament, sous des formes très diverses. Quand les premiers sont les derniers et réciproquement, et qu'il ne s'agit plus seulement (comme c'est déjà souvent le cas dans l'AT) de l'élévation des humbles et de l'abaissement des orgueilleux mais bel et bien d'une préférence pour les "pécheurs" et les "injustes", assortie d'un certain mépris pour les "justes-selon-la-loi"; quand les coupables sont non seulement pardonnés mais (chez Paul) déclarés justes en vertu d'une seule "foi" qui n'a plus rien de "moral"; quand le sauveur lui-même sauve parce qu'il est maudit-selon-la-loi et que sa malédiction renverse la loi (Galates 3; cf. aussi l'assimilation du Christ au serpent en Jean 3), il y a vraiment du jeu, du passage, de l'échange, du trafic et de la contrebande sur la "frontière" (du bien et du mal, de la lumière et des ténèbres, du doux et de l'amer, de la vie et de la mort); et une certaine "intelligence avec l'ennemi".

Il serait cependant imprudent d'en déduire que cela annule l'avertissement d'Isaïe -- à moins peut-être d'entendre "annuler" dans le sens de l'anneau autant que dans celui de la nullité. Dans l'écriture avec ou sans majuscule, rien n'annule rien, ou tout annule tout: que le jeu sur les oppositions qui sous-tend la théologie chrétienne et toute la pensée occidentale qui en dépend, même à son insu, soit et reste un jeu dangereux, il n'est sans doute pas inutile que cela soit également dit.
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MessageSujet: Re: jeux interdits   jeux interdits Icon_minitimeMer 23 Sep 2015, 17:29

"Malheur ...  qui mettent les ténèbres à la place de la lumière et la lumière à la place des ténèbres"

Je comprends qu'une malédiction soit adressée à celui qui met "les ténèbres à la place de la lumière", mais il m'apparaît louable de substituer  "la lumière à la place des ténèbres".

c'est l'obscurité qui est venue" (Job 30,26) ; "Puis il regardera vers la terre :
L'obscurité semble revetir un caractère négatif dans l'AT, "J'espérais le bonheur, c'est le malheur qui est venu ; j'attendais la lumière, c'est l'obscurité qui est venue" (Job 30,26) ;
 "Puis il regardera vers la terre :ce sera la détresse, l'obscurité et de sombres angoisses ; il sera repoussé dans d'épaisses ténèbres"( Isiae 8,22).
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MessageSujet: Re: jeux interdits   jeux interdits Icon_minitimeMer 23 Sep 2015, 23:14

Je m'aperçois à te lire que ma traduction ad hoc était peut-être un peu trop ambiguë.
En soi la formulation de l'hébreu (plus littéralement "qui mettent ténèbre pour lumière et lumière pour ténèbre") s'y prête, mais elle est aussi déterminée, en contexte, par le verbe de parole ("qui disent") du premier vers, lequel incline la lecture de l'ensemble vers le sens d'un discours trompeur ou plus généralement d'une illusion (ceux qui font passer la lumière pour ténèbres et les ténèbres pour lumière), plutôt que vers celui d'un changement réel (ceux qui changent effectivement la lumière en ténèbres et les ténèbres en lumière; ce serait formellement possible mais le contexte n'y engage pas). L'idée (d'Isaïe 5,20) est davantage celle de la fausse lumière, de ténèbres déguisées en lumière (cf. Matthieu 6,23b), en l'occurrence par un discours et un raisonnement pervers (ce qu'on appellerait ailleurs sophisme), que celle d'une illumination bienfaisante des ténèbres (comme dans Ephésiens 5,13s que nous commentions il y a peu).
Hors de ce contexte précis, ces idées ne sont toutefois pas si faciles à distinguer: c'est aussi (surtout) ce que je voulais souligner.

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MessageSujet: Re: jeux interdits   jeux interdits Icon_minitimeVen 28 Avr 2017, 23:43

Narkissos a écrit:
Malheur,
pour ceux qui disent le mauvais bon et le bon mauvais,
qui mettent les ténèbres à la place de la lumière et la lumière à la place des ténèbres,
qui rendent amer le doux et doux l'amer !

Isaïe 5,20.

Quiconque a tant soit peu le goût du paradoxe, de la dialectique, de la coïncidence des opposés, ou seulement celui de la nuance et de la complexité, quiconque répugne au dualisme ("manichéen" ou pas), à la dichotomie, à l'antagonisme, à l'alternative, au tiers exclu, aux oppositions symétriques tranchées une fois pour toutes, au tout noir ou tout blanc qui ignore le gris et la couleur, ne manquerait pas de se sentir visé par ce "malheur".

En lisant ta réflexion me vient à "l'esprit" le terme de condensation. Ce terme psychanalytique (on ne se refait pas, ou en tout cas pas complètement) évoque le fait qu'un acte, une attitude, une posture, des propos peuvent avoir simultanément plusieurs motifs. Ce terme peut aussi se combiner utilement au probabilisme.

En somme, il me semble que dans bon nombre de situations on peut probablement estimer que dans tel acte monstrueux ou sadique, il y a tel niveau de probabilité pour que tel ou tel motif puissent apparaître, et que si des motifs éminemment haineux et meurtriers peuvent en être à l'origine, il y a aussi des efforts largement inconscients ou semi conscientisés, de vouloir le bien de l'autre. Mais la personnalité du "sadique" est tellement peu "intégré", fragmentée, désarticulée, son estime de soi est tellement mauvaise, sa haine de lui-même est tellement forte que son seul recours pour manifester un amour n'est que de le manifester de façon extrêmement pervertie, c'est-à-dire en cherchant à détruire l'autre qui nous contredit, nous dérange.

Ces derniers mois qui ont été pour moi l'occasion de véritables révolutions intrapsychiques et inscrites dans une forme d'accélération toujours plus forte vers un sentiment d'accomplissement personnel, par l'abandon de défenses narcissiques immatures, ont été marquées par une intense régression de la pensée vers ce que j'estimais être les fondamentaux de mon être, le fond de la cale d'un bateau échoué, mais échoué en réalité sur une terre accueillante, et permettant de voir qu'il faisait beau et chaud sur cette plage d'une île "paradisiaque".

J'ai envie d'évoquer ce moment où je me suis dit que la réalité ultime de notre existence est le fait que nous sommes des êtres biologiques "respirants", et que toutes mes projections partaient irrémédiablement de moi. En somme, j'en venais à mieux percevoir les frontières de mon Moi, et accepter pleinement mon état de séparation irréductible d'avec tout autre être vivant. Et c'est à partir de ce moment où je me suis senti plus pleinement libéré de figures introjectées sadiques, que j'ai pu plus pleinement accepter la condensation des significations des comportements humains, et en particulier celles des miens.

Mon propos est probablement très perfectible pour qu'il puisse être communicable et pleinement pertinent et intelligible, mais il me semble que si l'oxygène est l'élément primordial pour vivre physiologiquement, c'est d'un point de vue psychologique l'amour qui est l'oxygène de la vie psychique.

Et d'une certaine façon tels les fumeurs qui s'intoxiquent tout en respirant, l'on peut tomber dans une forme d'expression pervertie de l'amour ou dans une réception de l'amour largement déconnectée d'un effort constructif et sain. Je pense qu'à partir du moment où on a suffisamment entrevu sa propre valeur humaine (être "quelqu'un de bien") on parvient à assouplir ses propres résistances internes, en comprenant que si nous avons fait une erreur d'appréciation, cela ne remet nullement en cause la majeure partie ou l'intégralité de notre personnalité.

Enfin, pour ne pas s'enfermer dans le manichéisme, ou la réversibilité spéculaire qui fait écho à l'hypocrisie dénoncée par Jésus dans sa petite parabole de la paille et de la poutre, je pense qu'il est important de ne pas s'enfermer de façon rigide et angoissée dans des "commandements", des "normes", mais de se référer à tel propos comme étant un indicateur permettant d'éclairer telle ou telle situation, mais qui devrait être combinable avec d'autres indications, d'autres éclairages, ou alors réfutables pour son aspect insuffisamment précis pour permettre de prendre une décision en connaissance de cause.

Cela me fait penser à ce que Raymond Franz disait quand il indiquait que la Bible ne répondait pas à toutes les questions pratiques qui pouvaient se poser dans "la vie" des congrégations, et qu'il fallait donc bien produire une nouvelle "casuistique".

Les termes bien et mal peuvent se décliner ou plutôt se combiner utilement avec d'autres dyptiques comme amour/haine, constructif/destructif, intégrateur/ désintégrateur.

On n'épuisera jamais le sujet, surtout que faire un Moi ça prend du temps Very Happy
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Narkissos

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MessageSujet: Re: jeux interdits   jeux interdits Icon_minitimeSam 29 Avr 2017, 01:24

... le défaire, c'est dans un sens beaucoup plus rapide; et, dans un autre, exactement aussi long. Wink

Je me suis rappelé en te lisant cette remarque d'Edmond Jabès, que j'ai sûrement déjà citée ici (et sans doute tout aussi approximativement): tout ce qui respire a l'âge de l'air. A première vue, elle dit le contraire de ce que tu dis: "nous" ne sommes, "je" ne suis l'origine ni la fin de rien du tout; "nous" ne sommes, "je" ne suis "séparé(s)" qu'en apparence, superficiellement et provisoirement. Mais toute notre "existence", notre "histoire", nos "amours" et nos "haines" notamment, tiennent et se tendent à cette polarité entre confusion et séparation, indifférence et différence également absolues qui ne cessent de se renvoyer l'une à l'autre -- comme, et autrement que, le bien et le mal, la lumière et les ténèbres, et ainsi de suite. A la manière, encore, d'une respiration.

οὐ ξυνιᾶσιν ὅκως διαφερόμενον ἑωυτῷ ὁμολογέει· παλίντροπος ἁρμονίη ὅκωσπερ τόξου καὶ λύρης : ils ne comprennent pas comment le différent s'accorde: de l'opposition l'harmonie, de l'arc comme de la lyre (Héraclite, 51).

Voir aussi ici.
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MessageSujet: Re: jeux interdits   jeux interdits Icon_minitimeSam 29 Avr 2017, 17:22

Merci Free de ce beau partage. Je te sens libéré d'un grand poids et prêt à poser le regard sur un horizon plus apaisé.
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Narkissos

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MessageSujet: Re: jeux interdits   jeux interdits Icon_minitimeSam 29 Avr 2017, 21:08

Le chapelier toqué a écrit:
Merci Free de ce beau partage

Ne serait-ce point le gaffeur distancié ? :)
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MessageSujet: Re: jeux interdits   jeux interdits Icon_minitime

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