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| La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament | |
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Auteur | Message |
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free
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| Sujet: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 13.03.19 10:10 | |
| Ga 4,21-31, introduit cette notion qu’il y aurait une Jérusalem actuelle et une Jérusalem d'en haut "libre, qui est notre mère", l’Epître aux Hébreux traite du thème "de la cité du Dieu vivant, la Jérusalem céleste" (12, 22) et l'Apocalypse (21,2) décrit "la ville sainte, la Jérusalem nouvelle".
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| | | Narkissos
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| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 13.03.19 11:31 | |
| L'opposition ciel / terre est une constante (dans "la Bible", dès la première phrase !), et les effets de miroir, de symétrie et de contraste entre ces deux "opposés" sont innombrables. Depuis les plus anciennes mythologies connues le "ciel" se comporte comme un "double" de la terre, avec des personnages, des décors et des accessoires qui correspondent de multiples manières aux choses et aux événements terrestres. Mais cette généralité n'autorise pas à tout mélanger, et même dans des textes relativement proches les uns des autres (par l'époque, la langue et une certaine "culture") comme ceux du NT il y a des façons extrêmement différentes de se représenter, de comprendre et d'utiliser cette "double scène". L'usage rhétorique de l'"allégorie" sauvage (typologie, midrash: Agar / Sara) dans l'épître aux Galates n'a qu'un très lointain rapport avec le dualisme beaucoup plus systématique et teinté de "platonisme" de l'épître aux Hébreux (terre des "ombres" sensibles, temporelles et transitoires vs. ciel des réalités éternelles semblables aux "idées" platoniciennes); et ces deux-là sont encore plus éloignés de la mise en scène "apocalyptique" où la "révélation" (apokalupsis), par la vision et l'interprétation, est à la fois du "ciel" et de "l'avenir" (dans la vision finale, d'ailleurs, tout se rejoint puisque la "Jérusalem nouvelle" descend du ciel, avec "Dieu" et "l'Agneau" mêmes: la "double scène" s'annule). Il y a là assurément un "thème" commun dont on peut retracer la provenance dans une abondante littérature (Jérusalem/Sion élevée, ex-altée au-dessus de toute hauteur "terrestre", Isaïe 2 etc.) aussi bien que dans les circonstances historiques (choc à répétition des multiples "prises" de Jérusalem, celle de 70 ap. J.-C. n'étant que la plus marquante par la destruction du temple; tout dépend évidemment comment on date les textes, reste que globalement l'événement est à la lettre décisif pour le "christianisme" comme pour le "judaïsme"). On peut s'attacher à chaque texte pour tenter de préciser comment il comprend sa "Jérusalem céleste" (exégèse), on n'en tirera pas pour autant une doctrine commune (pas même contradictoire) de "la Jérusalem céleste". |
| | | free
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| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 13.03.19 11:53 | |
| Jérusalem céleste dans la tradition juive
Il y a quelques allusions dans le Talmud au sujet de la Jérusalem céleste ou Jérusalem d’en haut (en hébreu Yeroushalayim milema’ala) qui serait en lien avec la Jérusalem terrestre ou Jérusalem d’en bas (Yeroushalayim milema’ata). En particulier ce texte dans le traité Taanit 5a du Talmud de Babylone qui relate un échange entre des maîtres talmudiques :
Rabbi Nahman demanda à Rabbi Isaac : Que signifie « Je suis le Saint au milieu de toi ; je ne viendrai pas dans la ville » (Os 11,9) […] Rabbi Isaac lui répondit : « Selon Rabbi Johanan, le Saint Béni Soit-Il a dit : « Je ne viendrai pas dans la Jérusalem céleste tant que je ne pourrai venir dans la Jérusalem terrestre. Et y a-t-il une Jérusalem céleste ? Oui parce qu’il est écrit : “Jérusalem bâtie comme une ville liée à elle” [Psaumes 122,3] ».
Ainsi le Talmud trouve, dans un verset des Psaumes, trace de l’interprétation de Rabbi Johanan. Il y aurait deux Jérusalem, intimement liées l’une à l’autre, en miroir l’une de l’autre. « Et où se situerait cette autre Jérusalem, sinon aux cieux ? ! » commente Rachi sur ce folio talmudique. Un autre passage, dans le traité Hagiga 12b du Talmud de Babylone, situe même cette Jérusalem céleste dans le quatrième des sept firmaments, celui que l’on appelle Résidence (zvoul) : « Dans la Résidence s’élèvent Jérusalem, le Temple et l’autel, près duquel se tient l’Archange Michaël qui offre des sacrifices quotidiens […]22 ». C’est pourquoi, enseigne la tradition juive, Jérusalem — Yeroushalayim en hébreu — se dit au pluriel. En effet, nous avons relevé que la combinaison des deux sources étymologiques donnerait JéruSalem et non JeruShalayim, or, le im, en hébreu, est le signe du masculin pluriel. Ce qui veut dire qu’il y a deux JéruSalem et qu’à la Jérusalem terrestre correspond la Jérusalem céleste. https://www.erudit.org/fr/revues/theologi/2010-v18-n2-theologi1829862/1007486ar.pdf |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 13.03.19 13:28 | |
| N.B. La vocalisation massorétique de yeroushalayim suggère en fait, non un pluriel indéterminé, mais un "duel", qui s'utilise habituellement pour les choses qui "vont par deux", comme les yeux, les oreilles, les mains ou les pieds (mais sans exclusivité puisqu'on retrouve aussi des "duels par défaut" comme pour le "ciel", l'"eau", qui n'ont ni "singulier" ni "pluriel" proprement dit).
La "tradition juive" (= phariséo-rabbinique) est très intéressante en soi, mais elle ne se laisse guère articuler à une approche "occidentale-moderne" de l'exégèse et de l'histoire qui s'intéresse plutôt aux "données" topographiques des textes, "bibliques" (Moriya, Salem, Sion, mais aussi Jébus) et autres (Urusalim, etc.). Et dans "Shalem" ou "Çédeq" (Melchiçédeq, Adoniçédeq, Çadoq etc.) chercherait plutôt des théonymes (noms de divinités). Elle ignore aussi une "tradition juive" plus ancienne, celle qu'elle a elle-même enterrée et qui ressort par hasard et par bribes, par exemple à Qoumrân. |
| | | free
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| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 13.03.19 14:27 | |
| Le mythe biblique de la nouvelle Jérusalem (Ap 21,1-22,5)
En conclusion de son ouvrage, Jean décrit, de façon étendue (au regard de la brièveté de la scène du jugement dernier en Ap 20,11-15) la nouvelle création, sous forme de trois tableaux successifs (21,1-8 ; 9-27 ; 22,1-5). La thématique d’ensemble est profondément homogène. L’unité du passage se laisse en particulier sentir dans l’accumulation de négations pour représenter la nouvelle création : plus de mer (21,1), plus de mort, de deuil, de cri et de souffrance (21,4), plus de Temple (21,22), ni de soleil ou de lune (21,23), les portes de la cité ne se ferment plus, plus de nuit (21,25), nulle souillure (21,27), plus de malédiction (22,3), plus de nuit, nul besoin de la lumière du soleil ou du flambeau (22,5) : le visionnaire fait ici l’expérience des limites du langage pour exprimer l’indicible, à savoir pour exprimer la conviction d’une nouveauté totale sans aucune commune mesure, sans aucun point commun avec quoi que ce soit d’existant. Il ne peut fonctionner que par une comparaison, en creux, avec la réalité de ce monde. Mais cette description, purement « analogique », est parfaitement structurée.
Pour Jean la nouvelle Jérusalem existe déjà, elle vient d’auprès de Dieu, elle est prête ; la vision est de l’ordre de la certitude, Jean a vu ce qui existe déjà auprès de Dieu. En tant que résidence des hommes il s’agit cependant encore d’une espérance. On pourrait dire alors que lorsque la cité est présentée dans son aspect actuel, elle est statique (Jean la décrit), lorsqu’il est question de ce que les hommes font dans la cité (cité animée) Jean emploie le futur.
Il y a donc une relecture chrétienne des symboles juifs, mais il y a, bien entendu, des différences
majeures. Elles sont au nombre de trois :
• La plus importante c’est la relecture christologique : la nouvelle Jérusalem est la demeure de Dieu, avec l’agneau, cf. 21,9, 14, 22, 23, 27; 22,1 et 3 : sept emplois de ce terme sur 28 dans l’ensemble du livre (voir tout ce que nous avons déjà dit sur cette figure christologique). Cette insistance est capitale : l’agneau reçoit les prérogatives de Dieu ; il règne avec lui sur le trône, comme lui il est adoré et, avec lui, il est le temple de la nouvelle création.
• On note également une absence de référence au peuple d’Israël comme entité nationale. Les symboles subissent un changement : on passe d’une attente basée sur une réalité nationale (quoique déjà avec une composante universaliste) à une attente universaliste non plus basée sur la nation mais sur une expérience chrétienne. Ainsi le terme même de Jérusalem désignet-il dans l’Ap 3,9 ; 21,1 uniquement la nouvelle Jérusalem.
La Jérusalem historique n’est pas désignée comme telle : en tant qu’ennemie de Dieu, elle est nommée Sodome et l’Égypte (11,9). Sur la question de l’universalisme, il convient de faire les remarques suivantes : il est clair que de manière globale, il est question de ce que l’on pourrait appeler un universalisme « sélectif » : Dieu, dit ailleurs Jean, a racheté des hommes de toutes tribus, langues ou nations (5,9 et 7,9) et non pas toutes les tribus, langues ou nations. Il reste qu’à lire 21,1-22,5 on a bien l’impression que deux conceptions s’affrontent, deux types de citoyenneté. D’un côté et d’une manière restrictive, les serviteurs de Dieu par opposition aux impies et autres réprouvés (cf. 21,7 et 8 ; 21,27 et 21,3 et 5). D’autre part et d’une manière plus globale, les « hommes » qui seront les « peuples » de Dieu (21,3), les « nations » qui marcheront à sa lumière (21,24) et les rois de la terre qui apporteront leur gloire (même référence ; cf aussi 21,26 et 22,2 : la guérison des nations) : la perspective universaliste, au fur et à mesure que progresse le récit, semble faire éclater les réserves strictes que Jean a pourtant soin de rappeler (cf. 21,8 et 27). Il ne s’agit donc pas de parler ici de salut universel, ce qui serait une mécompréhension de la pensée de l’apocalypticien, mais de constater que sa perspective universaliste beaucoup plus présente que dans l’Ancien Testament, rend moins logique et impeccable la distinctiontraditionnelle entre élus et réprouvés.
• Enfin, troisième différence : la désacralisation complète de la nouvelle Jérusalem. Il n’y aura plus de Temple, il est remplacé par Dieu et par l’agneau. Du coup, la cité elle-même est décrite en des termes utilisés dans l’Ancien Testament pour désigner le Nouveau Temple : cf. 22,2 // Ez 40,2 ; 21,15 // Ez 40,3 ; 22,1-2 // Ez 47,1 et 12. http://www.erf-auteuil.org/conferences/cycle-2012-2013-6-cuvillier.pdf
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| | | Narkissos
Nombre de messages : 12457 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 13.03.19 14:59 | |
| Intéressant, mais à mon avis le mot de "désacralisation" produit un contresens quasi total. Il y a bien, si l'on veut, "désacralisation" par abolition de la différence "sacré/profane" (quand tout est "sacré", il n'y a plus de "sacré"), mais elle ne passe par par une désacralisation du sacré, c'est au contraire une sacralisation du profane: c'est le profane et non le sacré qui a disparu du tableau (et "par conséquent" le sacré aussi, en tant que distinct, répliquera la logique; mais cette logique n'est justement pas celle du texte, pour lequel TOUT est désormais "saint", [même] en l'absence de "profane"; jusqu'au bout la ville est dite "sainte", même si elle ne s'oppose plus à rien de "profane"; peut-être "l'enfer", le "lac de feu", ne subsiste-t-il là que pour maintenir au moins en principe la distinction fondamentale). Cf. la conclusion de Zacharie (14,20ss).
De mon lien précédent (García Martínez, en anglais), je me risque à résumer l'idée qui me semble principale, tout au moins par rapport à cette discussion: jusque dans les textes "sectaires" de Qoumrân il y aurait une distinction assez nette entre ceux qui n'attendent plus rien de Jérusalem (terrestre) et du temple (concret), et pour lesquels la "communauté" (qu'on pourrait dire spi-rituelle !) des fidèles débouche directement sur une eschatologie cosmique; et ceux pour lesquels la restauration de Jérusalem (terrestre) et du temple (concret) restent au cœur de l'eschatologie. Ce sont évidemment les premiers qui ont le plus de points communs avec ceux du NT pour lesquels la restauration de Jérusalem (terrestre) et du temple (concret) ne jouent plus aucun rôle -- nonobstant leurs autres différences (la spi-ritualité qoumranienne étant très éloignée des christianismes directement représentés dans le NT, même si l'on peut deviner des points de contacts ici et là -- Jean-Baptiste, Jésus, Jacques).
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| | | free
Nombre de messages : 10100 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 13.03.19 15:31 | |
| Es 2, 2-5 et Mi 4, 1-5 ; développèrent l'idée d'une Jérusalem "mère" de tous les peuples, lieu de pèlerinages des nations, Jérusalem étant la cité-temple qui abrité la présence de Dieu. L'idée d'une Jérusalem nouvelle prend forme avec Es 54, 11-12 :
"Humiliée, ballottée, privée de réconfort, voici que moi je mettrai un cerne de fard autour de tes pierres, je te fonderai sur des saphirs, je ferai tes créneaux en rubis, tes portes en pierres étincelantes et tout ton pourtour en pierres ornementales."
et Es 60, 17 : "Au lieu du bronze je ferai venir de l'or, au lieu du fer je ferai venir de l'argent ; au lieu du bois, du bronze ; au lieu des pierres, du fer ; pour te surveiller, je mettrai la paix, et pour te presser, la justice."
Yhwh construit cette ville avec des pierres précieuses et des matériaux précieux.
La “Jérusalem d’en haut” 8, 9. a) De qui ou de quoi la “Jérusalem d’en haut” est-elle constituée? b) Comment, en citant Ésaïe 54, Paul montre-t-il qu’elle est comparable à une femme? 8 En Galates 4:26, il est encore question d’une autre “Jérusalem”, la “Jérusalem d’en haut”. De quoi s’agit-il? L’apôtre Paul dit: “La Jérusalem d’en haut est libre, et elle est notre mère.” — Voir Ésaïe 54:13. 9 Cette “Jérusalem d’en haut” est l’organisation céleste de Jéhovah comparée à une femme. Elle se compose des armées d’anges fidèles, parmi lesquels il faut aussi ranger l’archange qui a été glorifié, Jésus Christ (Révélation 12:7). Ces anges servent leur Souverain Seigneur comme une “femme”. Au sujet de cette “femme”, Paul ajoute: “Il est écrit [en Ésaïe 54:1]: ‘Réjouis-toi, femme stérile, qui n’enfante pas; éclate et pousse des cris, toi, celle qui n’a pas les douleurs de l’enfantement; car les enfants de celle qui est désolée sont plus nombreux que les enfants de celle qui a le mari.’” — Galates 4:27. https://wol.jw.org/fr/wol/d/r30/lp-f/1983207#h=7:595-18:412
Dernière édition par free le 07.02.22 9:07, édité 1 fois |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12457 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 13.03.19 15:52 | |
| Cf. aussi Psaume 87 (au v. 5 Sion est appelée "mère" dans la Septante [86,5], comme en Galates 4,26).
Pour rappel, l'"allégorie" de Galates 4 est une charge antijudaïque d'une extrême violence, puisqu'elle retourne contre Israël le récit même de ses origines (Genèse): il n'est pas la descendance élue de la promesse, mais celle de l'esclave rejetée et à rejeter. Jamais le "paulinisme" n'a été aussi près du "marcionisme" que dans cette épître.
Ironie grinçante de la chose: ce sont les textes les plus "ouverts" (inclusifs, universalistes) du judaïsme qui vont produire le (pagano-)christianisme le plus "fermé" à son égard...
[Côté Watch et sur ce sujet, je n'oublierai pas La Tour de Garde du 15.3.1985, qui m'a valu d'être viré de la traduction de La Tour de Garde, en attendant mieux (j'ai déjà raconté l'anecdote à plusieurs reprises). Dans ma grande naïveté je n'imaginais pas que l'insistance de cet article (de F.W. Franz, comme je l'ai compris après coup) à contredire formellement le v. 24 sans jamais le citer puisse être dû à autre chose qu'à une erreur... (Je constate aujourd'hui que la Watch a bien dû se fendre d'un semblant d'explication six mois plus tard.)] |
| | | free
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| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 14.03.19 9:35 | |
| - Citation :
- [Côté Watch et sur ce sujet, je n'oublierai pas La Tour de Garde du 15.3.1985, qui m'a valu d'être viré de la traduction de La Tour de Garde, en attendant mieux (j'ai déjà raconté l'anecdote à plusieurs reprises). Dans ma grande naïveté je n'imaginais pas que l'insistance de cet article (de F.W. Franz, comme je l'ai compris après coup) à contredire formellement le v. 24 sans jamais le citer puisse être dû à autre chose qu'à une erreur... (Je constate aujourd'hui que la Watch a bien dû se fendre d'un semblant d'explication six mois plus tard.)]
Narkissos,Aurais-tu l'amabilité de nous rappeler cette anecdote (je ne m'en souviens plus) et cela pour notre plus grand plaisir.Je suppose que tu fais référence aux paragraphes 9 à 11 : - Citation :
- "9 Au temps où ce passage a été écrit, Jéhovah ne s’adressait pas à une alliance. Il parlait plutôt à une nation, au peuple élu avec lequel il avait conclu l’alliance de la loi mosaïque. Symboliquement parlant, cette nation était pour lui une “femme”, une épouse. Or, selon la lettre de Paul aux Galates, cette “femme” était un type prophétique. Cependant, l’apôtre ne dit pas qu’elle est une alliance ou un pacte. Une alliance, en effet, ne saurait être réconfortée ni consolée. En revanche, Paul montre que la “femme” antitypique est vivante comme une “mère”, de même que Jéhovah, son “propriétaire et époux”, est un Être vivant et intelligent qui est capable de réconforter. Au sujet de deux femmes de l’Antiquité, l’apôtre écrivait: “Or cette Agar [la servante qui a remplacé sa maîtresse, Sara, pour donner Ismaël à Abraham] représente le Sinaï, une montagne en Arabie, et elle [Agar] correspond à la Jérusalem de maintenant [à l’époque où Paul écrit ces lignes], car celle-ci est en esclavage [esclave de l’alliance de la loi mosaïque] avec ses enfants. Mais la Jérusalem d’en haut est libre, et elle est notre mère.” — Galates 4:25, 26.
10 Agar ne figurait pas l’alliance de la loi mosaïque. Cette alliance, qui comprenait les Dix Commandements au nombre de ses clauses, n’était pas non plus figurée par le mont Sinaï, auquel Agar correspondait. Évidemment, Dieu n’a jamais conclu d’alliance avec le mont Sinaï. Toutefois, c’est là qu’il a amené les Israélites après les avoir libérés de l’esclavage en Égypte, et qu’il a noué des relations d’alliance avec eux, en les traitant comme une nation libre. Cela s’est produit des siècles après que Dieu eut contracté une alliance unilatérale à l’égard d’Abraham en lui promettant un descendant mâle.
11 Quand Moïse, le médiateur de l’alliance de la Loi, est descendu du mont Sinaï, son visage rayonnait d’un tel éclat qu’il a dû le voiler pour que les Israélites puissent le regarder (II Corinthiens 3:12-16). Cependant, lorsqu’il était sur le mont Sinaï, Moïse n’était pas en contact direct avec Jéhovah, car c’est par l’intermédiaire d’un ange que celui-ci a conclu son alliance avec les Israélites (Actes 7:37, 38; Hébreux 2:2). C’est ainsi que la nation d’Israël s’est trouvée assujettie à l’alliance de la Loi. Des siècles plus tard, en l’an 33, cette alliance a néanmoins été ôtée, clouée au poteau de supplice de Jésus." Effectivement F.W. Franz expose une affirmation qui contredit le v 24 : "car ces femmes sont deux alliances" , or il dit exactement le contraire : "Cependant, l’apôtre ne dit pas qu’elle est une alliance ou un pacte".Il y a quelque chose de délirant dans cet article qui ne tient pas compte du texte, on y perd son latin, en effet lorsque Paul indique que "car ces femmes sont deux alliances. L'une, celle du mont Sinaï, fait naître pour l'esclavage : c'est Hagar", on pense tout de suite et spontanément, à l’alliance de la loi mosaïque, or F.W. Franz se donne beaucoup de mal a prouver le contraire, avec une argumentation alambiquée et incompréhensible (en ce qui me concerne), d'un côté l'article affirme qu' "Agar ne figurait pas l’alliance de la loi mosaïque" (mais plutôt l'alliance unilatérale à l’égard d’Abraham) et d'un autre côté il conclut "C’est ainsi que la nation d’Israël s’est trouvée assujettie à l’alliance de la Loi." (ou alors que je n'ai rien compris au raisonnement).
Dernière édition par free le 07.02.22 14:22, édité 1 fois |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12457 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 14.03.19 11:22 | |
| C'est en traduisant cet article (d'anglais en français, comme je le faisais pour La Tour de Garde notamment depuis plusieurs années) que j'ai éprouvé une sorte d'impossibilité -- qui tenait moins au "fond" (sujet somme toute accessoire par rapport à "la Bible" comme à la doctrine jéhoviste) qu'à la "forme": ce qui me gênait, ce n'était même pas qu'une explication contredise le texte biblique (nous y étions habitués) mais qu'elle le fasse sans le dire (p. ex. sous la forme usuelle, le texte dit ça mais il ne peut pas vouloir dire ça, il doit donc vouloir dire autre chose). Alors que n'importe qui pouvait lire en Galates 4,24 "elles (les deux femmes) sont (ou "représentent", TMN) deux alliances", l'article niait formellement ce que "Paul" affirmait sans jamais établir de relation entre les deux.
J'ai donc cru, sincèrement, à une erreur (plus précisément un oubli) de la rédaction. Comme nous étions entrés dans un système de parution simultanée (nous recevions les textes anglais dans un état provisoire plusieurs semaines avant leur publication) j'ai suggéré que nous posions la question à "Brooklyn" (le siège à l'époque), qui avait encore le temps de "corriger" (il aurait suffi de deux phrases). J'en ai donc référé à mon "chef" direct, qui était de mon avis mais a voulu demander l'accord du Comité de filiale. Panique à bord quand celui-ci s'est avisé (par les sigles du document auquel nous n'avions pas prêté attention) que l'article en question était de F.W. Franz. Pas question de poser la moindre question (même purement formelle) sur un article de F.W. Franz...
Sur le coup, c'est surtout la bêtise de cette réaction de peur qui nous a frappés (rien ne dit que FWF l'aurait mal pris). Un membre (anglais) du Comité de filiale s'est chargé de "finaliser" la traduction à sa manière (je ne crois pas qu'il y ait changé grand-chose). Mais quelques semaines plus tard j'ai été convoqué par ledit Comité qui avait réuni entre-temps un certain nombre de griefs contre mes traductions (dont jusque-là il se félicitait) et me retirait La Tour de Garde pour me confier Réveillez-vous !...
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Pour revenir au fond de l'affaire, je pense que c'est la "typologie générale" de F.W. Franz qui l'empêchait de lire simplement les textes, d'autant que ceux-ci utilisaient des procédés typologiques à certains égards semblables aux siens mais différents (des siens bien sûr, mais déjà et surtout entre eux). Les textes de Galates, d'Hébreux et de l'Apocalypse présentent des difficultés de nature différente, mais la difficulté devient insurmontable quand on présuppose qu'ils doivent tous être d'accord et surtout se référer à un "signifié" commun sous les signifiants de "Jérusalem d'en haut / céleste / nouvelle". On ne peut les "mettre d'accord" (très superficiellement) qu'en les rapportant à un autre signifiant, arbitraire, extra-"biblique" et ainsi "neutre", en l'occurrence l'"organisation" (effectivement "commun" à tous les textes en tant qu'absent de tous).
En ce qui concerne Galates, je crois que F.W. Franz soi-même ne pouvait pas "comprendre" jusqu'au bout sa propre "explication", car s'il l'avait menée à son terme il serait forcément retombé sur la problématique (paulino-marcionite) du texte: Que "représente" Agar, si ce n'est pas l'"alliance" mosaïque ? "Israël" ou "le judaïsme", peut-être, mais un Israël ou un judaïsme rejetés d'emblée, avant même d'"exister". Plus question de leur ménager un "temps de validité divine", même "avant l'an 33" (selon la chronologie jéhoviste). Et alors on est devant la contradiction fondamentale et abyssale du paulinisme, qui consiste à tirer du "judaïsme" (sous sa forme littéraire, vétéro-testamentaire) une condamnation globale du "judaïsme" (religieux) -- rendant inéluctable à terme quelque chose comme le "marcionisme", qui, lui, ne reculera pas devant ses dernières conséquences (rejet de l'AT comme tel, comme révélation du même "Dieu" que celui de Jésus-Christ). |
| | | free
Nombre de messages : 10100 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 14.03.19 12:52 | |
| Merci Narkissos d'avoir partagé avec nous cet épisode de ta vie.
Le temple nouveau dont Ézéchiel a la vision (43,1-7; 44,4), lieu de la gloire de Dieu, au point que le nom de Jérusalem changera pour devenir, "Adonaï-Shamma" (« YHWH est là » - 48,35 ) a dû inspiré l'idée d'une nouvelle Jérusalem.
Lorsque le temple sera effectivement reconstruit après le retour d'exil, il acquiert une sorte de statut cosmique; le lieu du culte d'Israël est vu moins comme le lieu de la présence de Dieu, comme le centre du monde et un accès au ciel :
"Ainsi parle le SEIGNEUR : Je reviens à Sion et je demeurerai au milieu de Jérusalem. Jérusalem sera appelée « Ville de la loyauté », et la montagne du SEIGNEUR (YHWH) des Armées, « Montagne sacrée ». (...) Une multitude de peuples, des nations fortes viendront à Jérusalem pour chercher le SEIGNEUR (YHWH) des Armées, pour essayer d'apaiser le SEIGNEUR." Za 8, 3 et 22 |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12457 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 14.03.19 14:06 | |
| Le thème du "temple" (terrestre / céleste) est distinct et paradoxalement plus vaste que celui de la "ville" (même dans la doctrine de la Watch je ne suis pas sûr qu'il y ait une connexion très claire entre "Jérusalem céleste" et "temple céleste"). Un temple (sanctuaire, tabernacle, etc.) c'est une "maison de dieu", soit la demeure terrestre d'une divinité qui a aussi d'autres demeures (ciel ou montagne sacrée où se rejoignent le ciel et la terre, enfers ou océans dans d'autres cas), à moins qu'il ne s'agisse d'une seule demeure à plusieurs étages. Autrement dit, la correspondance cosmique (ciel-terre etc.) fait partie du concept même de "temple" -- ce n'est évidemment pas le cas de la ville, si ce n'est comme extension du temple.
D'où une littérature beaucoup plus riche à cet égard, depuis Sumer et en passant notamment par Ougarit où la question du temple de Baal est centrale. Dans les textes "bibliques", depuis l'Exode (25,9.40; cf. 1 Chroniques 28,11ss), il y a un modèle (tabnith/paradeigma-tupos, "paradigme" ou "type") céleste du temple terrestre, et celui-ci ne vaut que comme copie conforme de celui-là; même chose pour le "temple" des visions finales d'Ezéchiel ou du "Rouleau du Temple" de Qoumrân. Bien sûr, ce "temple double" ou "à deux étages" va être interprété très différemment, par les relectures platonisantes et allégorisantes de Philon ou de l'épître aux Hébreux ou "apocalyptiques" par exemple; reste que la dualité fondamentale du "temple" est beaucoup plus ancienne et profondément enracinée que celle de la "ville" (séparée du temple chez Ezéchiel, sans temple parce que toute temple dans l'Apocalypse). Il y a toujours un rapport entre le thème (rare) de la ville céleste et celui (fréquent, sinon permanent) du temple céleste, mais ce rapport est variable et à l'occasion contradictoire.
Pour ce qui est des "noms nouveaux" de Jérusalem, on peut aussi comparer Ezéchiel 48,35 et Zacharie 8,3 à Isaïe 62,2ss; et à l'Apocalypse (3,12 etc.). |
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Nombre de messages : 10100 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 19.03.19 9:42 | |
| En définitive, le thème de la Jérusalem nouvelle confirme que, par la symbolique des fléaux, l’auteur signifiait la destruction du mal pour que germe un monde neuf, dans ces villes asiates de la fin du ier siècle en pleine décomposition. L’Église est le Sacrement du renouvellement de l’histoire du monde. La Jérusalem nouvelle, c’est essentiellement la cité de Dieu à construire sur terre, ici-bas, en complicité avec Dieu et l’Agneau;
Comme le suggère P. Poucouta, cette nouveauté dont parle Jean dans l’Apocalypse 21 signifie créativité. Il ne s’agit pas d’un retour à l’Éden, mais d’une construction inédite, tournée vers l’avenir. L’homme est ainsi appelé à épouser la créativité permanente de Dieu. Cette cité est sans cesse à polir, à parfaire, La symbolique de la construction le montre bien. « Elle resplendit telle une pierre très précieuse, comme une pierre de jaspe cristallin » (21, 11b). La ville doit donc être faite de pierres précieuses étincelantes (21, 9-23). Il ne peut s’agir d’un retour à un état initial, ni d’une restauration, ni d’un replâtrage. Le perfectionnement de la cité est progressif. Il tend sans cesse vers le point oméga, même si le chemin est chaotique, la marche zigzagante. Pour Jean, il faut réinventer un chemin, créer une nouvelle dynamique qui propulse la société et l’Église de l’avant, qui transforme le quotidien. Telle est la tâche de la mission poétique. https://www.cairn.info/revue-transversalites-2009-3-page-135.htm |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12457 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 19.03.19 11:10 | |
| A contrario...Pour que le scénario de l'Apocalypse (ou du moins la partie de l'Apocalypse qui ressemble le plus à un scénario, chap. 20ss: millénium, fin des cieux et de la terre, résurrection générale et jugement dernier, nouveaux cieux et nouvelle terre, nouvelle Jérusalem descendant du ciel toute prête) se retourne en un éloge ou une bénédiction de la créativité historique des hommes, ou même d'une entreprise de création divino-humaine et transhistorique, il faut que l'interprétation lui donne beaucoup d'élan... A mi-chemin peut-être, saint Augustin: Fecerunt itaque ciuitates duas amores duo, terrenam scilicet amor sui usque ad contemptum dei, caelestem uero amor dei usque ad contemptum sui. denique illa in se ipsa, haec in domino gloriatur. illa enim quaerit ab hominibus gloriam; huic autem deus conscientiae testis maxima est gloria... ("Deux amours ont donc bâti deux cités : l'amour de soi jusqu'au mépris de Dieu, la cité de la terre, l'amour de Dieu jusqu'au mépris de soi, la cité de Dieu. L'une se glorifie en soi, et l'autre dans le Seigneur. L'une demande sa gloire aux hommes, l'autre met sa gloire la plus chère en Dieu, témoin de la conscience..." La Cité de Dieu, XIV, 28.) Avec les meilleures intentions de son temps, une théologie "progressiste" ou "évolutionniste" ignore toujours le moment négatif (qu'on le lise comme magique, mystique, sacramentel, symbolique, paradoxal, dialectique, etc., c'est secondaire) qui crée une rupture absolue entre le "présent" et l'"à-venir" eschatologique; que ce soit sous la forme apocalyptique d'une "fin du monde" et d'un "monde nouveau", sous la forme myst(ér)ique de la croix et de la résurrection, ou sous la forme (anti-)sapientiale d'un "qui perd gagne" (les premiers derniers, etc.) il y a un "hiatus" (in-)essentiel, une "solution de continuité" dont il est tentant de faire l'économie, mais qui résiste au cœur du christianisme: le "salut" n'est pas un résultat ni un aboutissement de l'histoire; tout se retrouve peut-être à la fin, mais à condition de s'être d'abord perdu sans reste. |
| | | free
Nombre de messages : 10100 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 20.03.19 11:56 | |
| - Citation :
- En ce qui concerne Galates, je crois que F.W. Franz soi-même ne pouvait pas "comprendre" jusqu'au bout sa propre "explication", car s'il l'avait menée à son terme il serait forcément retombé sur la problématique (paulino-marcionite) du texte: Que "représente" Agar, si ce n'est pas l'"alliance" mosaïque ? "Israël" ou "le judaïsme", peut-être, mais un Israël ou un judaïsme rejetés d'emblée, avant même d'"exister". Plus question de leur ménager un "temps de validité divine", même "avant l'an 33" (selon la chronologie jéhoviste). Et alors on est devant la contradiction fondamentale et abyssale du paulinisme, qui consiste à tirer du "judaïsme" (sous sa forme littéraire, vétéro-testamentaire) une condamnation globale du "judaïsme" (religieux) -- rendant inéluctable à terme quelque chose comme le "marcionisme", qui, lui, ne reculera pas devant ses dernières conséquences (rejet de l'AT comme tel, comme révélation du même "Dieu" que celui de Jésus-Christ).
"Il y a là une allégorie ; car ces femmes sont deux alliances. L'une, celle du mont Sinaï, fait naître pour l'esclavage : c'est Hagar" Ga 4,24Effectivement, selon le texte de Paul, la loi mosaïque "fait naître pour l'esclavage", cette loi ne donnant pas la force nécessaire pour l’observer, rendait par nature, les Israélites, esclaves. C'est une attaque frontale contre la loi, qui suscite une double compréhension, 1) C'est Dieu, qui dès l'origine, a donné une loi qui rend esclave, OU, 2) Dieu n'est pas l'origine de la loi. - Citation :
- L'opposition ciel / terre est une constante (dans "la Bible", dès la première phrase !), et les effets de miroir, de symétrie et de contraste entre ces deux "opposés" sont innombrables. Depuis les plus anciennes mythologies connues le "ciel" se comporte comme un "double" de la terre, avec des personnages, des décors et des accessoires qui correspondent de multiples manières aux choses et aux événements terrestres.
Les Juifs postérieurs pensaient qu’il y avait dans le ciel des images infiniment sublimes de toutes les choses qui sont sur la terre et surtout de celles qu’ils tenaient ici-bas pour sacrées, comme le temple et la ville elle-même de Jérusalem. Sohar (Gen. f. 91) : Quodcumque est in terra, id etiam in cælo. Il semble qu’ils ont été conduits à ces inventions soit par quelques passages torturés comme Esaïe 6.6, où il est parlé d’un autel céleste ; surtout par Ex. 25.9,40, où il est dit que Dieu avait montré à Moïse des images des choses qu’il devait construire ; soit par des traditions nées après l’exil, ou peut-être encore par l’opinion que les idées ou types de tout ce qui a été fait par le logos étaient dans le sein de Dieu. (Ewald. Apoc. p. 11, 307, . Ils distinguaient donc deux Jérusalem, l’une présente, terrestre, l’autre neuve, céleste, future, à l’image de laquelle la première avait été fondée et qui était plus spacieuse, plus splendide ; on l’appelait la ville parfaite, pleine de félicité ; elle devait descendre du ciel avec une splendeur incroyable quant au temple, avec une dignité incomparable de sacerdoce et avec un roi revêtu d’une majesté et d’une puissance sans égales, à l’époque de la palingénésie de la terre, au temps du Messie. https://www.koina.org/page-7/page299/files/sardinoux_galates.pdf |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12457 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 20.03.19 13:29 | |
| Par rapport à l'alternative que tu poses [(1)/(2)], l'épître aux Galates est sans aucun doute le texte du "corpus paulinien" qui se rapproche le plus de la seconde option -- (2), celle du marcionisme. Il faut la relire attentivement (au moins depuis le chapitre 3) et noter toutes les distances qui s'interposent entre "Dieu" et "la loi", beaucoup plus grandes que dans l'épître aux Romains: - l'alliance (de la promesse à Abraham, fondée sur la seule "foi") est un TESTAMENT (dia-thèkè) qui ne peut plus être annulé (sous-entendu: par un AUTRE que le testateur), 3,15ss. Or le Dieu d'Abraham ne l'annule pas, ce qu'il ferait si LUI ajoutait à sa promesse une loi efficace, qui fasse vraiment ce qu'elle dit, sauver par les œuvres et non par la seule foi. Il n'en est rien puisque la loi ne fait que condamner et maudire. - la loi "vient" plus tard, est "ajoutée", sans qu'on dise d'où ni par qui (v. 17,19), mais par opposition à la promesse de DIEU à Abraham. - elle vient par l'intermédiaire d'"anges" et d'un "médiateur" dont Dieu précisément n'a nul besoin (v. 19s). - elle est prison et garde, "pédagogue" (c.-à-d. esclave et non libre, déjà ! -- même thème que pour Agar-Sara) de "fils" qui lui sont par nature supérieurs (parce que libres, eux, de naissance, quoique provisoirement soumis à des esclaves de rang inférieur) -- tous fils de Dieu dans l'unique postérité-Christ (3,23--4,7) - elle relève des "éléments" (stoikheia) du monde (matériel), étranger par nature à l'"esprit". (4,8ss). Etc.
Dans cette perspective "radicale", l'"allégorie" d'Agar-Sara (qui retourne au texte de la Genèse, Torah-livre ou Torah-récit contre Torah-loi, et à Abraham, 4,21ss) se comprend beaucoup mieux (même si elle reste passablement obscure dans le détail, notamment pour le rapprochement "Agar Sina[ï]" où la tradition textuelle même est très embrouillée, et où l'on se perd en conjectures sur le "jeu de mots" éventuellement sous-jacent; on a certes multiplié les hypothèses depuis Sardinoux en 1837, mais ce n'est pas franchement plus convaincant). Le "fil rouge" ou le "fil d'Ariane" qui permet de s'y retrouver, c'est l'opposition "esclave-libre" qui commande toute l'opposition de la loi et des œuvres d'une part, de la promesse (epaggelia), de l'évangile, d'Abraham, du Christ, de l'esprit et de la foi d'autre part. |
| | | free
Nombre de messages : 10100 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 21.03.19 13:41 | |
| La cité de Dieu
L'auteur de l’Epître aux Hébreux prolonge le travail accompli dans l'Épître aux Galates, en fondant le thème de la Jérusalem nouvelle sur le fait que Jésus est mort “ hors de la porte ”. “ Par conséquent, dit-il, pour aller à lui sortons en dehors du camp... Car nous n’avons pas ici-bas de cité permanente, mais nous recherchons celle de l'avenir ” (He 13,13-14). Au moment de la Guerre juive (66-70), en effet, les chrétiens ont quitté Jérusalem; ils pensaient ne plus rien avoir à y faire. https://www.bible-service.net/extranet/pages/1586.html |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12457 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 21.03.19 14:43 | |
| Pour le thème de la ville céleste dans l'épître aux Hébreux (où, pour rappel, "céleste" signifie avant tout "éternel", dans un sens analogue aux "idées" de Platon et tout autrement que dans l'épître aux Galates; la ville du reste n'est pas dite "nouvelle") il aurait mieux valu commencer par les chapitres 11 (v. 10, 16) et 12 (v. 22) que par l'addition simili-paulinienne du chapitre 13. Celle-ci contient néanmoins un joli jeu de mots grecs (avec ou sans contrepet) entre "permanente" ( menousa, demeurante) et "à venir" ( mellousa), bien qu'il ne corresponde pas vraiment au rapport temps-éternité sous-jacent au corps de l'épître (ou du traité). D'autre part, la tradition de la fuite de "chrétiens" (nazôréens ?) hors de Jérusalem au début de la Guerre juive n'est pas attestée avant le IVe siècle (Eusèbe puis Epiphane): il est donc pour le moins douteux -- mais naturellement pas impossible -- que l'épître aux Hébreux s'y réfère. (Le "Service biblique catholique", souvent excellent, est inégal, comme tant d'autres choses...) |
| | | free
Nombre de messages : 10100 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 05.07.19 10:25 | |
| Toute cette description est largement inspirée d’Ézéchiel 37-48, avec toutefois une différence capitale. En effet, dans la vision du prêtre prophète Ézéchiel, le Temple domine la cité rebâtie, dont un mur le sépare, définissant ainsi un espace sacré distinct du profane. En Ézéchiel 44,5, on trouve des directives pour distinguer ceux qui peuvent entrer dans le Temple ; en 44,7, Israël est condamné pour avoir laissé des étrangers pénétrer dans le sanctuaire. En 44,23, l’oracle stipule qu’« ils apprendront […] à distinguer le sacré du profane et […] [à] connaître la différence entre le pur et l’impur[6] ». Tout le chapitre 44 d’Ézéchiel, en fait, s’attache à bien distinguer l’espace sacré du profane, le Temple de la Cité.
Pour Jean, en revanche, il n’y a plus de Temple. En effet, c’est toute la cité qui est sainte et devient Temple. Alors que pour Ézéchiel, il y a encore place dans la cité pour le profane qui est exclu du Temple seul, la nouvelle Jérusalem est pour le visionnaire de Patmos un camp de sainteté[7]. Le symbolisme des pierres précieuses est clair à cet égard, la Jérusalem nouvelle est à la fois le temple et le Grand Prêtre lui-même ; leur énumération reprend en effet, grosso modo, celle des pierres qui ornent le pectoral du Grand Prêtre en Ex 28,17-20 et 39,10-12 (voir aussi Ez 28,13). Cela est parfaitement cohérent avec l’absence de Temple dans la cité : la cité tout entière est le Temple.
Ces trois sections sont entrecoupées, ont l’a vu, de deux énumérations d’êtres ou de réalités exclues de la cité eschatologique. En 21,8 sont exclus les lâches, les infidèles, les dépravés, les meurtriers, les impudiques, les magiciens, les idolâtres, les menteurs. En 21,27, la liste des exclusions est réduite à la souillure, à l’abomination et au mensonge, déjà présent dans la première énumération. La troisième enfin, mentionne les chiens et les magiciens, les prostitués, les meurtriers, les idolâtres et les menteurs (Ap 22,15). https://www.erudit.org/fr/revues/ltp/2006-v62-n2-ltp1452/014285ar/ |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12457 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 05.07.19 12:52 | |
| Très bon article.
L'opposition de fond entre l'Apocalypse (dite) de Jean et la quasi-totalité du reste du NT (tout ce qui découle, directement ou indirectement, de la tradition "paulinienne" ou "johannique" au sens du quatrième évangile et des épîtres) est d'autant plus sensible si l'on remarque que le koinon, "commun" pris péjorativement au sens d'"impur" (<=> akatharton), est au contraire valorisé comme koinônia, "communion" (participation, partage, solidarité etc.), dans la tradition dominante, et spécialement comme "commensalité" (communion de table) eucharistique des juifs et des "païens" dont la nouvelle sacralité passe par-dessus bord toute considération de pureté rituelle (exemplairement Galates). Le rapport aux "idolothytes" ("viandes sacrifiées aux idoles") témoigne autrement du même clivage: foncièrement indifférent pour 1 Corinthiens ou Romains où ce n'est qu'une affaire de "conscience" individuelle et de respect de la "conscience" d'autrui, "ligne rouge" en revanche pour l'Apocalypse. Par là l'Apocalypse se distingue aussi des autres "antipaulinismes" néotestamentaires (Matthieu et Jacques), dont l'antagonisme à "Paul", y compris sur le mot de la "loi" (nomos <=> torah), n'est pas (ou plus) d'ordre "rituel".
Par rapport à notre sujet, ou du moins à son titre, et contrairement à la "Jérusalem céleste" de l'épître aux Hébreux qui n'est pas "nouvelle" (cf. mon post précédent), il faut rappeler que la "nouvelle Jérusalem" de l'Apocalypse n'est "céleste" que d'origine, puisqu'elle descend du ciel, sc. sur la (nouvelle) terre (cf. supra 13.3.2019)...
Il faudrait par ailleurs rapprocher ces remarques (pertinentes) de celles que nous avons souvent faites sur la structure "cyclique" ou "spirale" de l'Apocalypse, où chaque "cycle" débouche sur un autre et la fin est sans cesse retardée au moment même où elle paraît imminente. Même dans les "tableaux finals" (ou finaux), si immobiles ou cycliques, éternels, limpides et transparents qu'ils paraissent -- un "monde nouveau" où il ne peut plus rien arriver et surtout pas d'"histoire", autrement dit le contraire d'un monde -- le "mal" ne parvient pas à être totalement évacué; toute la ville est "sainte" dans la mesure où elle a encore un extérieur qui au moins potentiellement ne l'est pas (ne fût-ce en définitive que le lac de feu et de soufre, fantôme de la mer Morte, de Sodome et Gomorrhe, de la Géhenne; au temps totalement "passé" il faudrait encore une place dans un espace intemporel)... |
| | | free
Nombre de messages : 10100 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 04.11.19 15:47 | |
| La troisième (22,1-5) représente cette nouvelle Jérusalem comme un paradis nouveau dont sort un fleuve (Ap 22,1, cf. Gn 2,10 ; Éz 47,1). Comme en Gn 2,9, l’arbre de la vie est planté en son milieu (22,2). L’abolition de la malédiction (κατάθεμα) et de la nuit (νύξ) (Ap 22,3-5) renvoie évidemment au récit de Genèse. La malédiction abolie est celle du sol (Gn 3,17), qui oblige Adam à manger son pain à la sueur de son visage jusqu’à ce que la mort le prenne. C’est donc la condition laborieuse et mortelle de l’humanité qui est abolie : désormais, les habitants de la Cité sainte se nourriront de l’arbre de la vie qui est en son milieu et qui produira du fruit douze fois par année. L’alternance du jour et de la nuit marquée par les luminaires est également abolie. Pour Jean de Patmos, Jérusalem céleste, paradis et nouvelle création sont une seule et même réalité. C’est un retour aux origines, l’entrée dans la Jérusalem céleste est un retour au Paradis dont Adam et Ève ont été chassés ; les eaux qui, chez Ézéchiel (47), coulent du Temple, jaillissent ici du Trône de Dieu et de l’Agneau. C’est le fleuve du premier Paradis, où se trouve également l’arbre de vie. Les élus ont accès directement à Dieu. Sur la Cité sainte enfin resplendit la pure lumière du premier jour de la création. Ainsi, le dernier livre de la Bible des chrétiens rejoint le récit des origines. https://www.erudit.org/fr/revues/ltp/2006-v62-n2-ltp1452/014285ar/ |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12457 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 05.11.19 1:07 | |
| N.B.: c'est l'article dont nous parlions ci-dessus en juillet dernier (je ne m'en suis pas souvenu tout de suite).
Comme la quasi-totalité des lectures, commentaires, interprétations, allusions et réminiscences de la Genèse à l'époque du NT (et longtemps avant et après), l'Apocalypse mixe les deux "récits de création" (1,1--2,4a; 2,4b--3) et en retient ce qui l'intéresse: ainsi la malédiction vient du second récit où elle est consécutive à la transgression; la nuit et la mer, en revanche, viennent du premier récit qui ne comporte ni faute, ni châtiment, ni malédiction -- ce sont les reliquats, respectivement, des "ténèbres" et de l'"abîme" (océan primordial) incréés, antérieurs à la "création", mais qui séparés par celle-ci de leurs contraires (la lumière-jour et le sec-terre, comme écrivait Segond), deviennent, en leur temps et à leur place, "bons". De ce point de vue, le tableau final de l'Apocalypse ne revient pas seulement en-deçà d'une "chute", ni même d'une "création originelle", il fait tout autre chose (nouveaux cieux, nouvelle terre, nouvelle création). On peut aussi noter, au passage, que dans le second récit de la Genèse "l'arbre au milieu du jardin" est tantôt celui de la vie et tantôt celui de la connaissance interdite (ce qui s'explique aisément par les rédactions successives du texte, mais n'en constitue pas moins pour les lectures subséquentes un riche sujet de méditation). |
| | | free
Nombre de messages : 10100 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 12.05.20 11:47 | |
| Dans l'Apocalypse la Cité céleste correspond à l’épouse de l’agneau :
"Alors je vis un ciel nouveau et une terre nouvelle ; car le premier ciel et la première terre avaient disparu, et la mer n'était plus. Et je vis descendre du ciel, d'auprès de Dieu, la ville sainte, la Jérusalem nouvelle, prête comme une mariée qui s'est parée pour son mari. J'entendis du trône une voix forte qui disait : La demeure de Dieu est avec les humains ! Il aura sa demeure avec eux, ils seront ses peuples, et lui-même, qui est Dieu avec eux, sera leur Dieu. Il essuiera toute larme de leurs yeux, la mort ne sera plus, et il n'y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car les premières choses ont disparu (...) Puis un des sept anges qui tenaient les sept coupes pleines des sept derniers fléaux vint parler avec moi. Il me dit : Viens, je te montrerai la mariée, l'épouse de l'agneau. Il me transporta, par l'Esprit, sur une grande et haute montagne, et il me montra la ville sainte, Jérusalem, qui descendait du ciel, d'auprès de Dieu" (21,1-4 et 9-10).
Dans le cadre thème la nouveauté ("un ciel nouveau et une terre nouvelle") bâtit à partir d'Isaïe (65,17,20) mais aussi du Lévitique (26,11 : "Je placerai ma demeure au milieu de vous, et je n'aurai pas d'aversion pour vous"). A quoi correspond la descente de "la ville sainte, la Jérusalem nouvelle" sur terre ? Comment doit-on comprendre l'idée que "La demeure de Dieu est avec les humains" ? La formule "ils seront ses peuples" (et non son peuple) est aussi énigmatique ? |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12457 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 12.05.20 12:25 | |
| Je ne vois pas trop quoi rajouter à ce qui a été dit depuis le début de ce fil (qu'il vaut peut-être la peine de relire attentivement, il n'est pas si long): j'imagine, je me trompe peut-être, qu'au fond ce qui cause ta perplexité persistante c'est moins tel ou tel détail du texte (dont on a certainement déjà parlé ici et ailleurs) qu'un effet d'ensemble: que dans les "tableaux finals (ou finaux)" de l'Apocalypse (que nous avons déjà décrits comme immobiles ou cycliques, à l'image de la fin des contes: "ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants", c'est la fin de l'histoire qui en fait s'arrête là et n'annonce aucune "suite", sauf à Hollywood), dans ce "monde nouveau" sans histoire, dans tous les sens du terme, il y ait encore tant de choses du "monde ancien", presque tout à vrai dire (si du moins le soleil, la lune, la mer, le temple disparus, comptent pour différences négligeables, alors qu'évidemment ce sont ces différences qui sont significatives): une terre, des hommes, des peuples, des rois, des arbres, un fleuve, etc. Qu'en dire sinon que c'est comme ça, que c'est le langage de la vision, et que tout langage, même le plus négatif ou le plus abstrait, ne pourrait décrire un "monde" aussi différent soit-il qu'à partir de son "monde" de référence ? Mais peut-être suis-je tout à fait à côté de la plaque et je compte sur toi pour m'expliquer ce qui te pose problème. |
| | | free
Nombre de messages : 10100 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La Jérusalem céleste dans le Nouveau Testament 12.05.20 13:15 | |
| Narkissos, tu vises juste ... merci pour ta réponse. |
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