Nouvelle lumière : tant qu'il y aura des oints

Je ne sais pas trop ce qui est censé être "nouveau" dans cette compilation de textes datés de 1993 et de 2019 (et de toute façon largement postérieurs à "mon époque"). Je crois qu'il y avait déjà eu par le passé des tergiversations scénaristiques sur la présence (ou non) de "oints" sur terre pendant la "grande tribulation", par contre je n'ai pas le souvenir d'avoir jamais vu affirmer aussi clairement la participation des "oints-au-ciel" à la "guerre d'Armaguédon" (c'est apparemment la nouvelle orthographe) -- ce qui reviendrait au moins à dire que les papys-gâte(a)ux du Collège central que les TdJ écoutent et regardent religieusement chaque semaine débiter des discours mielleux en vidéo sont tous des serial killers, ou plutôt des mass murderers, en puissance; tout ça n'a pas l'air très réfléchi...

Par ailleurs, je me demande comment cela se goupille avec le distinguo récent entre les "oints" de la "génération" à rallonge (ceux qui auraient connu ceux d'avant 1935, par exemple exemplaire F.W. Franz mort en 1992; soit désormais les oints d'avant 1992) et les "oints" d'après (d'après 1992 dans cette hypothèse, néanmoins "officielle") qui ne feraient pas partie de "cette génération". Si j'ai bien suivi, la "grande tribulation" devrait arriver avant que les premiers meurent (tout au moins de vieillesse), mais les seconds aussi devraient être morts (et a priori pas de "mort naturelle") avant "Armaguédon"...

Il me semble assez clair, au point où on en est, qu'aucun de ceux qui participent au rafistolage continuel de ce scénario ne peut croire sérieusement à sa "réalisation", s'il leur reste un brin de lucidité. Ce qui m'étonne davantage c'est que dans ces conditions ils ne parviennent pas à le détacher une bonne fois de ses repères chronologiques, se condamnant ainsi à le bricoler sans fin, au moins une fois tous les dix ans. Ils y avaient réussi en 1995, en dégageant la notion de "génération" de toute implication temporelle, ils se sont eux-mêmes remis dans la panade sans aucune nécessité théorique quelques années plus tard avec cette idée de "génération à tiroir" ou "télescopique", mais à nouveau temporelle; ils peuvent, certes, prolonger indéfiniment ce modèle (ceux qui ont connu ceux d'avant 1992 qui ont connu ceux d'avant 1935, et ainsi de suite, comme l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'homme... qui a vu l'ours), mais ils se compliquent inutilement la vie en jurant aujourd'hui qu'ils ne le feront pas (une seule rallonge, un seul tiroir... quand on sait pertinemment qu''il va falloir en rajouter encore et toujours).

J'ai cité la TDG de 1993 car je suis toujours aussi étonné de constater que la Watch occulte et élude totalement le scénario "enlèvement de l'Eglise" et que pour elle, la phrase : "tous les 144 000 seront au ciel", implique le passage par la case "mort". Dans ce scénario, il est clairement indiqué que les élus ne mourront pas et il est question  d'un enlèvement des vivants :

 "Je vais vous dire un mystère : nous ne nous endormirons pas tous ; mais tous, nous serons changés, en un instant, en un clin d'œil, à la dernière trompette. Car elle sonnera, et les morts se réveilleront impérissables, et nous, nous serons changés" (1 Cor 15,51-52, voir également 1 Thessaloniciens 4:15-17)

Les TJ ne parlent jamais de cet enlèvement des saints, pourtant clairement décrit dans la Bible.

C'est exact, mais ce n'est pas nouveau (cf. "nouvelle lumière").

Ce qui est tout aussi "clair", en 1 Corinthiens comme en 1 Thessaloniciens, c'est que l'auteur et les destinataires ("nous") s'identifient (au moins globalement) aux "vivants-qui-ne-mourront-pas", donc se situent dans la "dernière génération" (cf. aussi Marc 13 et parallèles, qui associent autrement "rassemblement des élus" et "dernière génération"). A cet égard, on ne peut pas dire non plus que les résurgences ultérieures d'une doctrine de "l'enlèvement de l'Eglise", notamment depuis le XIXe siècle, soient conformes aux textes.

Ce qui me paraît "nouveau", par rapport au souvenir que j'ai gardé d'il y a quarante ans, mais peut bien être plus ancien que 2019, ce sont deux affirmations: 1) qu'il n'y aura plus de "oints" sur terre à "Armaguédon" (mais peut-être au début de la "grande tribulation", ce n'est pas dit expressément ici); 2) que les "oints-au-ciel" participent à "Armaguédon". La première proposition, soit dit en passant, réintroduit bien implicitement quelque chose d'analogue à l'"enlèvement" classique, à savoir une "mort surnaturelle", ou "non naturelle", des "derniers oints" (même si, tu as raison, c'est toujours une "mort" et non un "changement" distinct de la "mort").

P.S. Je constate, en y regardant d'un peu plus près (voir ici), que le scénario en vigueur (1. marquage définitif des "oints" avant la "grande tribulation", 2. présence des "oints" sur terre pendant la première partie de la "grande tribulation" = destruction de "Babylone la grande", 3. rassemblement des "oints" au ciel toujours compris comme mort et résurrection instantanée, plus ou moins concomitante à l'"attaque de Gog de Magog", et 4. Armaguédon) est substantiellement le même depuis au moins 20 ans (2000) -- il y avait encore un petit flottement sur la présence des "oints" sur terre à Armaguédon en 2007 ("nous ne savons pas"; maintenant on "sait" !). Mais quant à la participation des "oints" à "Armaguédon", qui est à mon sens l'idée la plus choquante, je n'en vois pas trace avant 2019 (même en cherchant les deux orthographes, avec et sans H). Voir notamment ici §§ 22ss, dans un livre daté de 2020, Le culte pur de Jéhovah enfin rétabli, chap. 18, p. 198s (sans que ce soit présenté comme une "nouvelle lumière").

Ce dernier point, qui est au moins "nouveau" pour moi, m'apparaît doublement grotesque: non seulement il faudrait que chaque "oint" se considère comme un futur exterminateur (y compris les membres du Collège central qui répètent comme tout le monde, en temps de crise sanitaire, il faut sauver des vies), mais encore c'est un argument quasi mafieux qui consiste à dire aux "non-oints": ne vous en faites pas pour Armaguédon, c'est nous qu'on sera aux manettes et puisque vous nous avez obéi, on vous protégera personnellement... Tout cela a beau être totalement imaginaire, ça n'en est pas moins psychologiquement et moralement désastreux.

Citation :

Ce dernier point, qui est au moins "nouveau" pour moi, m'apparaît doublement grotesque: non seulement il faudrait que chaque "oint" se considère comme un futur exterminateur (y compris les membres du Collège central qui répètent comme tout le monde, en temps de crise sanitaire, il faut sauver des vies), mais encore c'est un argument quasiment mafieux qui consiste à dire aux "non-oints": ne vous inquiétez pas pour Armaguédon, c'est nous qu'on sera aux manettes et puisque vous nous avez obéi, on vous protégera personnellement... Tout cela a beau être totalement imaginaire, ça n'en est pas moins psychologiquement et moralement désastreux

En effet, j'ai perçu dans cette interprétation, un moyen pour le CC d'assoir et de renforcer son autorité sur les "non-oints" ("Quel honneur la grande foule aura eu d’avoir pu les soutenir quand ils étaient encore sur la terre !") en suscitant une certaine crainte chez les TdJ de base et en s'attirant des honneurs (démesurés) car Dieu leur accordera l'honneur d'intégrer les armées célestes. La mégalomanie (la surestimation de ses capacités, qui se traduit par un désir immodéré de puissance et un amour exclusif de soi) semble caractériser les membres du CC.

Je doute que tout cela ait été soigneusement pesé et calculé, car à mon sens l'effet global de la communication est catastrophique -- sauf peut-être pour les jeunes générations qui ne distinguent plus très bien la guerre ou la fin du monde d'un jeu vidéo (cf. aussi le retour des images ultra-violentes dans ce chapitre qui mérite, une fois n'est pas coutume, d'être lu). S'il reste dans ce petit monde des "consciences" capables de "crise", ça devrait les faire réagir.

Selon moi, ce serait plutôt le signe que les auteurs ne croient plus un mot de ce qu'ils racontent, du moins pas assez pour se le représenter et s'y figurer eux-mêmes, sans quoi ils en seraient (peut-être) les premiers choqués.