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 Les manuscrits anciens de la LXX

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Narkissos
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Sherlock

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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeLun 28 Juin 2010, 16:39

Il y a quelque chose d'anachronique dans la démarche des TJ. Ils attachent au nom Jéhovah une défense comme s'il s'agissait du prénom de Dieu que l'on aurait caché Or avant le XVe siècle, c'est absurde, le prénom n'avait pas le même statut qu'aujourd'hui (le nom et le prénom étant la même chose). Il ne s'agit pas d'un nom patronymique non plus car Dieu n'a pas de père....

Jehovah veut juste dire l'Eternel dans une autre forme. Comme je l'ai exprimé dans un commentaire des excellents articles de BB, nous sommes loin d'un plan Marshall qui emporte dans le nom un programme idéologique ou même des 99 noms qualitatifs d'Allah.

Bref, se battre pour qu'on remplace Seigneur par l'Eternel est de la même teneur que de se battre sur le sexe des anges. Au lieu de se faire appeler Bob, on appelle Dieu, Robert.

P'tain !!! Que c'est important ! Heureusement qu'il y a 7 000 000 de TJ sur Terre pour une telle défense !!! Que ferions-nous sans eux ??? Rolling Eyes

@ Sperm0logos : merci pour la précision.
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeLun 28 Juin 2010, 18:28

En dépit de tout ce qui est répété ad nauseam sur le sujet, un nom propre, par définitition, ne veut rien dire -- et pas plus en hébreu que dans n'importe quelle autre langue. Du point de vue sémantique, sa fonction n'est pas de signifier quelque chose mais de désigner quelqu'un. Quand bien même il est formellement identique à un autre élément lexical usité (ce qui n'est pas le cas de yhwh en hébreu classique), il ne peut jouer son rôle de nom propre que dans la mesure où celui-ci occulte le sens du vocable commun correspondant (substantif, adjectif, verbe) -- sauf dans les cas exceptionnels où le discours rappelle explicitement la correspondance (jeu de mots).
Dans la phrase "Rose arrive toujours en retard au boulot", on ne pense pas du tout à une rose. Par contre, dans "Rose arrive comme une fleur", l'allusion au nom commun formellement identique au nom propre fait jeu de sens.
Et c'est pareil dans la Bible. Fonctionnellement, "Isaac" n'évoque le "rire" que dans les rares passages qui jouent effectivement sur l'identité de forme entre nom propre et nom commun. Et Yhwh n'évoque une "signification" que là où le texte joue de manière analogue sur des correspondances verbales (approximatives en l'occurrence, cf. Exode 3,14ss).
Je suis donc 100 % d'accord sur le fait que Yhwh devrait être transcrit et non traduit ni remplacé par un nom commun dans une traduction de la bible hébraïque. Cela présente en outre le grand avantage de resituer ce "nom divin" dans son contexte originel, qui est celui du polythéisme. Car si "Dieu" s'est trouvé porter un nom, c'est bien parce que celui-ci était plus ancien que "Dieu", qu'il nous vient d'une (autre) mythologie où il n'y avait pas de "Dieu" mais des dieux, Yhwh, Haddad, Dagan, Kamosh, Tammouz, Mardouk et ainsi de suite. Et si d'aventure l'un de ceux-là devient "Dieu" (l'unique), son nom personnel perd sa fonction distinctive initiale et devient un objet... singulier.
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeLun 28 Juin 2010, 19:30

Didier, ta description de la "distribution des rôles" dans le "débat" (qui ne peut en fait jamais avoir vraiment lieu) est tout à fait pertinente.
Entre autres choses, ce que je découvre (ou plutôt formalise), c'est que cette théorie est une théorie conspirationniste comme toutes les autres, ni plus ni moins.

Elle obéit exactement aux mêmes règles, notamment la circularité, que j'ai essayé de mettre en évidence dans mes articles. Et par conséquent s'y attaquer nous expose exactement aux mêmes difficultés que pour toutes les thèses construites sur une structure conspirationniste: le simple fait de ne pas l'accepter, et même de la contredire, devient pour le tenant de la théorie un indice supplémentaire de sa validité ("ils se font les complices du complot contre le Nom", "ça prouve bien combien le Diable est puissant pour aveugler", etc.)

Je crois que ce qui est si irritant (ou nauséeux) dans ce dossier (ou d'autres) c'est surtout le constat de sa propre impuissance face à la force de l'idéologie, de l'inutilité de la défense de son point de vue, tué dans l'œuf.

Il n'y a tout simplement RIEN à faire...

Au sujet de ce que tu écris ci-dessus, je comprends bien que Yhwh est avant tout un nom propre, et que rien n'est moins sûr que son étymologie depuis hyh.

Néanmoins, c'est bien le texte lui-même qui donne cette étymologie, et c'est, sauf erreur de ma part, la seule tentative d'explication du Nom (en tout cas, c'est la seule qui soit retenue, par à peu près tout le monde).
Que cette étymologie soit une construction a posteriori ne change peut-être pas grand chose au fait que, dans une approche "synchronique" du texte, le sens d' "Éternel" est bien celui que "le texte" cherche à "se" donner (c'est très limite comme formulation, mais j'imagine que tu comprendras ce que ça veut dire dans la logique d'une certaine approche du texte, même si ce n'est pas la mienne).

Pour essayer de le dire autrement: même si elle est fautive dans l'absolu (puisqu'on ne traduit aucun nom propre: Bertrand ne devient pas un "corbeau radieux"), il me semble qu'elle n'en est pas moins logique dans une certaine approche du texte, puisque c'est dans le texte lui-même que se trouve la fin de l'usage du Nom... comme nom.

Traduire par "l'Eternel", n'est-ce pas une façon de continuer l'aventure du Nom dans le sens que lui a donnée l'histoire?

L'abandon du Nom dans sa fonction première de nom est corrélée au "basculement" de statut de Yhwh de dieu vers Dieu (même si le "vrai" rapport de cause à conséquence est sans doute impossible à retrouver). Et puisque "labible" ne se met à exister (comme telle) que lorsque ce basculement est définitivement accompli...
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeLun 28 Juin 2010, 23:53

Le texte de "labible" (et il faudrait encore ici demander: laquelle?) se superpose sans doute aux textes qui (ne) composent (pas encore) la Bible, mais il ne les efface pas pour autant. Et quoi qu'on en dise il ne sera jamais lui-même qu'un texte parmi d'autres, en jeu avec les autres, parce qu'il s'agit justement d'écriture et non de parole, donc d'un lieu où l'on peut certes récrire, ajouter, commenter, biffer et raturer à l'envi, mais jamais remplacer ni faire table rase. Le logos peut bien décréter le bon et le mauvais, une fois écrit le "bon" sens ne sera jamais exclusif, et les "mauvais" ne seront jamais tout à fait exclus.
Tu me diras que dans l'Ecriture la différance (c'est le moment ou jamais de l'écrire ainsi) se défend très bien toute seule contre toutes les prétendues destinées manifestes du sens. Et qu'il n'y aura jamais de traduction assez claire, assez idéologiquement cohérente pour faire de "labible" un message univoque; l'intention héroïque du traducteur, si limpide soit-elle, achoppera toujours sur l'ambivalence de la lettre, ne serait-ce que parce que lui aussi est bien obligé d'écrire. Mais il serait quand même bien triste, je trouve, qu'il ne soit que vaincu sans être jamais séduit par elle, sans être un tout petit peu son complice consentant.

P.S. D'un point de vue plus pratique, le traducteur est bien obligé de tenir compte de la multiplicité des cadrages (depuis le micro-contexte du fragment jusqu'au macro-contexte de"labible", en passant par beaucoup de perspectives intermédiaires) qui tous déterminent des sens différents. Et de trouver des compromis, au moins pour le texte principal, même s'il peut se consoler des pertes par les notes.
Je reprends le parallélisme de Juges 11,24: kmwsh 'lhyk // yhwh 'lhynw.
Le contexte de la phrase (et même du petit récit) exige le respect du parallélisme: "Kamosh ton dieu // Yahweh (ou autre transcription) notre dieu." Il n'y a strictement aucune raison pour que l'un des deux dieux soit affublé d'une majuscule, et pas l'autre. Et encore moins pour que son nom propre soit remplacé par un titre comme Eternel ou Seigneur, tandis que l'autre resterait un nom propre. Jephté plaide de bonne foi en invoquant la compétence territoriale des dieux, son argument n'implique aucune supériorité qualitative de l'un par rapport à l'autre.
MAIS les contextes plus larges du livre des Juges et de la Bible hébraïque surimposent à ce sens une lecture monolâtrique, puis monothéiste, dans laquelle il n'est plus question que Kamosh et Yahweh soient sur un pied d'égalité. Et le traducteur doit bien tenir compte de ces autres contextes en octroyant une majuscule à l'un des dieux, même si cela est en tension avec la lettre et la structure du (micro-)texte, désormais tiraillées entre leur contexte de production et leur(s) contexte(s) d'adoption. Cette tension idéologique produit d'ailleurs à son tour un tiers sens, qui ne correspond strictement à l'intention d'aucun "auteur": Jephté en l'espèce devient un monothéiste qui à des fins diplomatiques s'exprime comme un polythéiste. Il n'est ni le polythéiste sincère faisant valoir honnêtement son droit, ni le monothéiste exclusif qui ne s'abaisserait jamais à une tel subterfuge pour négocier avec des idolâtres. Dans le processus de réécriture, celui qui écrit en dernier n'a jamais tout à fait le dernier mot, la lettre qui le précède résiste à son intention et la détourne.
Le traducteur, lui, passe encore sur tout cela une couche d'écriture supplémentaire. Comme il écrit dans une autre langue on pourrait espérer, ou craindre, qu'il recouvre tout cet édifice de sens superposés et le réduise à un sens unique pour ses lecteurs qui n'ont pas accès à l'original. Mais quand même il le voudrait il n'y parviendrait pas, parce que son action est trop superficielle; elle ne peut pas faire disparaître les hiatus logiques, rhétoriques, narratifs, qui sont pris dans le "fond" autant que dans la "forme". Et plus elle voudra les masquer plus elle produira, sans le vouloir, de nouveaux sens étrangers aux "originaux".
Il me semble qu'à cet égard le traducteur devrait plutôt être conservateur de la complexité et résister aux positivismes idéologiques simplifiants (ceux qui croient avoir compris "le sens" et se font un devoir de voler à son secours). On n'évitera pas les décalages (comme ceux qui résultent de la différence entre "Dieu" et "dieu" en français), mais il est inutile à mon sens d'en rajouter. Quand on remplace Yhwh par Eternel ou Seigneur, on dit quelque chose que le texte ne dit pas. Dans la plupart des cas ça n'a que peu d'importance parce que la fonction du nom propre reprend le dessus (dans "l'Eternel se promenait dans le jardin" on ne pense plus beaucoup à l'éternité), mais dans quelques-uns ça change complètement le sens: "Je suis Yahweh", "je suis l'Eternel" et "je suis le Seigneur" disent trois choses très différentes ("c'est moi qui parle", "je ne suis pas mortel" et "c'est moi le patron").
Pour revenir au midrash (d'ailleurs génial) d'Exode 3 sur le nom Yhwh, je pense 1) que la rareté de ses échos dans les autres textes de la Bible hébraïque n'invite pas à en faire une clé de lecture universelle, et 2) que la notion d'"éternel" manque d'assez loin sa pointe.
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeMar 29 Juin 2010, 19:11

Si j'ai bien compris, en tentant une traduction de YHWH il devrait traduire par l'Eternel-Seigneur-Immortel-Patron-Unique-etc..., c'est à dire tous les sens qui emporte ce nom intraduisible, c'est cela ?

Désolé, j'essaie de synthétiser à mon niveau. Embarassed
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeMar 29 Juin 2010, 19:51

Hum! À mon avis, le propos, depuis le début, c'est plutôt qu'il n'y a pas de bonne raison de traduire Yhwh, qui ne devrait rester dans le texte que sous la forme: Yhwh (ou Yahweh, ou Jéhovah...), tout comme on ne traduit pas Jésus, Emmanuel, Matthieu ou Josué, ou Abraham... (qu'on se contente de "françiser", ou d' "angliciser", ou de "germaniser", etc.).

Ceci dit, ça a commencé avec la Septante, nos traducteurs modernes ne se font jamais que les héritiers d'une loooongue tradition; on pourrait légitimement se dire que l'approche d'un texte ancien au XX ou XXIème siècle devrait logiquement se faire avec des outils plus rigoureux qu'il y a 2000 ans et plus, mais voilà, le texte de la Bible n'est pas qu'un texte ancien pour (nombre de) ses traducteurs.


Citation :
2) que la notion d'"éternel" manque d'assez loin sa pointe.

Sur le point 1), j'avoue ne pas m'être fait jusqu'ici la réflexion, tant cette étymologie a pris de l'importance à l'extérieur du texte...
Mais pourrais-tu développer un peu ton point 2.


Dernière édition par BB le Mer 30 Juin 2010, 07:56, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeMer 30 Juin 2010, 01:09

L'habitude d'adapter (de franciser, etc.) les noms propres étrangers s'est largement perdue. Ne subsistent guère que les adaptations entrées dans l'usage il y a longtemps (surtout d'ailleurs pour les toponymes, noms de pays, de régions ou de villes, comme Londres, Lisbonne, Pékin). Pour ce qui ne relève pas de cette catégorie la pratique actuelle est plutôt de garder systématiquement les formes écrites d'une langue à l'autre, par translittération au besoin, quitte à les prononcer très différemment. Mais aujourd'hui on n'appellerait plus Chopin "Frédéric", et les Anglais n'appelleraient plus Calvin "John".

Sur le point 1), j'en reviens à mes exemples d'Isaac et de Rose (et encore là il s'agit de vraies étymologies et/ou de formes identiques): pour que le sens du nom commun (ou de l'adjectif ou du verbe) associé au nom propre accède à la conscience de l'auditeur ou du lecteur et fasse ainsi jeu de mots ou de sens, il faut que le texte (ou le discours) l'évoque explicitement. Or le "sens" développé en Exode 3 (avec le verbe hyh) n'est quasiment évoqué nulle part ailleurs. Peut-être Osée 1,9, w'nky l' 'hyh lkm ("et moi je ne serai pas pour eux") et Zacharie 2,9, w'ny 'hyh lh... ("et moi je serai pour elle"), mais le lien au nom Yhwh est ténu et discutable. Les fameux 'ny hw' (= egô eimi) du Deutéro-Isaïe s'en rapprochent peut-être thématiquement mais on n'est plus dans le registre du jeu de mots ni de l'étymologie populaire; en tout cas l'allusion à Yhwh, si elle existe, ne passe plus par le verbe hyh. C'est maigre sur près de 7000 occurrences du nom propre.

Sur le point 2), il faut relire Exode 3: la révélation du nom Yhwh est introduite par la promesse à Moïse, 'hyh `mk, "je serai avec toi", qui emploie exceptionnellement, donc ostensiblement, le verbe hyh (d'habitude, en hébreu, le verbe être est sous-entendu, on dit simplement "moi avec toi", 'n[k]y `mk). C'est à partir de cette promesse que Moïse pose la question du nom, à laquelle Yhwh répond (en prononçant son nom) tout en n'y répondant pas (c.-à-d. en refusant de dire qui il est vraiment). Car l'"explication" 'hyh 'shr 'hyh (je serai qui/ce que/que je serai) est aussi une fin de non-recevoir, un refus d'explication (dans la ligne d'autres théophanies devenues angélophanies, cf. Genèse 32,30; Juges 13,18). A peu près: "tout ce que tu as besoin de savoir, c'est que je serai avec toi, et tu n'en sauras pas plus". La pointe de "l'explication", paradoxale, c'est justement que Yhwh, tout en étant là, avec les siens, ne s'explique pas (du moins pas en dehors de cette relation). Si son nom-mémorial doit rappeler quelque chose, c'est ça. Si l'on veut à tout prix y voir une affirmation thématique, ce serait plutôt celle de sa liberté souveraine en toile de fond de sa promesse. Comme en 33,19 avec la construction similaire, wHnty 't-'shr 'Hn wrHmty 't-'shr 'rHm, "je ferai grâce à qui je ferai grâce et j'aurai compassion de qui j'aurai compassion", aussi dans un contexte ironique de révélation paradoxale, "tu ne peux voir ma face mais tu verras mon dos (litt. mon derrière)". On est donc très loin, il me semble, de la notion d'"éternité" (peu importe comment on la comprend), et on n'y arrivera que par la médiation de la Septante, qui perd le côté négatif de l'hébreu pour le transformer en une affirmation ontologique positive: egô eimi ho ôn, "je suis l'Etant / celui qui est". Et encore il y a un grand pas supplémentaire à faire, en termes de sens, pour passer du concept d'être à celui d'éternité. Autrement dit, la "traduction" d'Olivétan ("l'Eternel") doit beaucoup plus à la théologie du moyen-âge qu'au texte hébreu d'Exode 3, et a fortiori à l'AT en général. Par contre on peut relever un pas dans cette direction dans l'Apocalypse, où la formule ho ôn kai ho èn kai ho erkhomenos ("celui qui est, qui était et qui vient", litt. "l'étant, l'était et le venant") semble bien, à l'instar de développements rabbiniques semblables, prolonger la forme grecque d'Exode 3 dans un sens (supra-)temporel, qui la rapproche un peu de l'idée d'"éternité". La même remarque vaudrait peut-être aussi, quoique la chose soit moins évidente, pour la formule conjointe "l'alpha et l'oméga" qui pourrait bien être une réminiscence de la transcription IAÔ (iota-alpha-oméga).

:silent:
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeMer 03 Juin 2015, 11:25

Une question pour Narkissos et ceux qui pourrons m'aider a trouver une réponse :

Existe-t-il des manuscrits pré-chrétien de la LXX avec kurios ?
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeMer 03 Juin 2015, 13:31

free a écrit:
Existe-t-il des manuscrits pré-chrétien de la LXX avec kurios ?

Pas à ma connaissance, mais ce n'est pas un sujet que je suis de très près. On découvre (ou déchiffre) de nouveaux documents continuellement, et il suffit d'un seul pour que la réponse à cette question s'inverse du jour au lendemain. Cela dit, si ça arrive les "réseaux ex-TdJ" seront vraisemblablement parmi les premiers informés.

Pour remettre la question et la réponse en perspective:
- on ne parle que des manuscrits pré-chrétiens qui nous sont parvenus, c.-à-d. 1) qui se sont conservés et 2) qui ont été découverts (et déchiffrés). Il y en a de toute façon très peu, presque tous de la même origine géographique (Egypte / désert de Juda) et à l'état fragmentaire;
- les manuscrits en question attestent, hors de la traduction "classique" kurios, une pratique graphique extrêmement diversifiée selon les périodes, les lieux et les milieux (tétragramme en paléo-hébreu ou en graphie "araméenne", abréviations diverses, transcription grecque): aucune forme "dominante" ne s'en dégage qu'on puisse faire remonter à coup sûr à une édition de la Septante "originale" ou même à une recension largement répandue au tournant de l'ère chrétienne;
- l'"absence" empirique de kurios dans cette poignée de documents pèse scientifiquement très peu face au faisceau d'indices convergents (citations et commentaires) qui témoigne massivement de l'utilisation de kurios dans la Septante bien avant le christianisme.
(Relire éventuellement les deux premières pages de ce fil.)
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeMer 03 Juin 2015, 16:33

Merci Narkissos pour cette explication.

Ce lien me semble interessant : [url=https://books.google.fr/books?id=kCZcMGE3I34C&pg=PA387&lpg=PA387&dq=juda%C3%AFsme+alexandrin+nom+de+dieu+kurios&source=bl&ots=TB2lYAznOs&sig=eOYb3gsmBUwrEg_g6yC1k39-v9Y&hl=fr&sa=X&ei=oA9vVZWBIIXwUIzSgdAB&ved=0CCkQ6AEwAQ#v=onepage&q=juda%C3%AFsme alexandrin nom de dieu kurios&f=false]https://books.google.fr/books?id=kCZcMGE3I34C&pg=PA387&lpg=PA387&dq=juda%C3%AFsme+alexandrin+nom+de+dieu+kurios&source=bl&ots=TB2lYAznOs&sig=eOYb3gsmBUwrEg_g6yC1k39-v9Y&hl=fr&sa=X&ei=oA9vVZWBIIXwUIzSgdAB&ved=0CCkQ6AEwAQ#v=onepage&q=juda%C3%AFsme%20alexandrin%20nom%20de%20dieu%20kurios&f=false[/url]
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeMer 03 Juin 2015, 17:59

En effet, pour l'article de P.M. Bogaert p. 387ss (je précise parce que ton lien renvoie au début du livre -- que je connaissais pour l'avoir pas mal utilisé sur son sujet principal, la "littérature de sagesse", mais je n'avais pas du tout retenu cette partie).

De mon côté j'ai trouvé ceci, qui est tout récent (2015) mais en anglais -- et confirme en tout cas que ma réponse négative à ta question était toujours valable cette année, sinon "à ce jour". (A première vue, l'ouvrage n'est pas très "original" dans sa partie strictement biblique: R.J. Wilkinson est plus historien qu'exégète, et tard venu à la discipline à ce niveau; mais il paraît très bien documenté.)

En quelques années l'hypothèse IAÔ [leçon attestée une seule fois à Qoumrân dans un fragment grec du Lévitique (LXX) -- mais celui-ci ne porte pas trace de révision hébraïsante de la traduction, contrairement aux mss qui portent un tétragramme en hébreu, "paléo-" ou non, ce qui est plutôt un "bon point" en faveur de son "authenticité septuagintique"] semble avoir nettement gagné du terrain parmi les spécialistes, en ce qui concerne du moins la "Septante originale" -- par quoi il faut bien entendre le seul "Pentateuque" alexandrin du début du IIe s. av. J-C. Kurios pourrait cependant être "original" dans d'autres textes traduits plus tardivement (notamment les Prophètes), et avoir été intégré au Pentateuque même par une révision pré-chrétienne -- c'est l'option (prudemment exprimée) de Wilkinson. Quoi qu'il en soit, ça ne change pas grand-chose pour les textes du N.T. Cf. son paragraphe de conclusion du chapitre I (p. 88):
"We may be uncertain what the New Testament writers read in Scripture on any particular occasion (and how they pronounced what they read), but there is no question, as we shall see, of what they wrote."
(Nous pouvons toujours douter de ce que les auteurs du Nouveau Testament ont lu dans tel ou tel texte biblique (et de la façon dont ils prononçaient ce qu'ils y lisaient), mais il n'y a aucun doute, comme nous l'allons voir, sur ce qu'ils ont écrit.)
P.S. J'ai pu aujourd'hui (4.6), grâce à une autre connexion qui me donnait accès à un plus grand nombre de pages (mystères de GoogleBooks !), jeter un coup d'œil au chapitre 2, qui fait un sort aux théories de Howard sur le NT et évoque même dans d'assez longues notes nos "amis", la NWT, Furuli, Gertoux, Fontaine... ça fera certainement couler de l'encre virtuelle dans les mois à venir.
Extrait p. 91-2:
"While it may seem merely possible that some of the Jewish Greek Scriptures of which the early Christians read had kurios for the Tetragrammaton, there can be no question about the total absence of the Hebrew Tetragrammaton from all recovered early Christian Greek New Testament manuscripts and their texts. The clarity of the situation -- which is incompatible with certain contemporary sectarian positions -- has perhaps been somewhat obscured by the enthusiastic response of those same dominational [sic, prb denominational !] interests to an influential article of George Howard."
(On peut juger seulement possible que kurios ait figuré à la place du Tétragramme dans certains des textes bibliques juifs de langue grecque que les premiers chrétiens auraient lus, mais il ne saurait y avoir aucun doute sur l'absence totale du Tétragramme hébreu dans l'ensemble des manuscrits et des textes grecs et chrétiens du Nouveau Testament qui ont été retrouvés et établis. La clarté de cette situation -- qui est incompatible avec certaines affirmations sectaires de notre temps -- a pu être quelque peu obscurcie par une réaction enthousiaste, portée par les mêmes intérêts [confessionnels], à un article remarqué de George Howard.)
[Sur l'extrême fragilité de l'enchaînement critique "nom divin lu dans des copies de la LXX => nom divin écrit dans les textes du NT", qui restait chez Howard une hypothèse et prenait pour la Watch un caractère de dogme (il ne pouvait d'ailleurs guère en être autrement, puisqu'elle avait décidé d'insérer "Jéhovah" dans le NT bien avant de lire Howard), je n'ai rien vu chez Wilkinson (mais je ne l'ai lu qu'en partie et trop rapidement) de bien nouveau par rapport à ce qui en a été montré au début de ce fil et dans les différents textes auxquels il renvoie (je viens de relire la série de 6 articles d'Ivan K référencée p. 3, qui est décidément une merveille de pédagogie sur l'ensemble du sujet).]
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeLun 08 Juin 2015, 10:40

La WT invoqe Origène et Jérôme qui connaissent des versions de la LXX qui contiennent le tétragramme afin de fonder son insersion de l'occurence "Jéhovah" dans le NT. Comment doit-on apprécier cette approche ?

J'ai lu que des sources juives talmudiques disaient que les livres des chrétiens contenaient le Nom  ...  Shocked

Est-li vrai que le talmud interdit concernant les juifs d'effacer le Nom et peut-on en tirer une conclusion ?
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeLun 08 Juin 2015, 13:22

free a écrit:
La WT invoqe Origène et Jérôme qui connaissent des versions de la LXX qui contiennent le tétragramme afin de fonder son insersion de l'occurence "Jéhovah" dans le NT. Comment doit-on apprécier cette approche ?

Ça n'ajoute strictement rien à ce qui a été discuté précédemment: Origène et Jérôme sont simplement ici des témoins (preuve "indirecte" par définition) secondaires d'un fait dont on a maintenant la preuve matérielle et directe, à savoir que certains manuscrits de différentes "recensions" de la Septante (autrement et un peu plus prudemment dit, de différentes traductions grecques de textes hébreux de la "Bible juive" = "Ancien Testament chrétien", ouf !) ont d'autres équivalents graphiques du "nom divin" que la traduction-substitution kurios: tétragramme en hébreu "carré" ou en paléo-hébreu, assimilation aux lettres grecques ressemblantes qui aboutit malencontreusement à la prononciation PIPI, abréviations diverses, une fois (attestée, donc une fois au moins) vraie transcription en IAÔ.

On ne parle toujours que de l'écriture (pas de la prononciation, SAUF pour IAÔ -- et PIPI !) des textes grecs de l'ANCIEN TESTAMENT. Pour passer de là au NOUVEAU TESTAMENT qui est une toute autre collection de tout autres textes, produits (les textes, puis la collection) par de tout autres "milieux", il faut sauter par-dessus plusieurs abîmes successifs. ("Même pas peur !" répond, en substance, la Watch.)

Citation :
J'ai lu que des sources juives talmudiques disaient que les livres des chrétiens contenaient le Nom  ...  

Plus exactement, il y a débat (non tranché, ou tranché dans les deux sens possibles) dans le Talmud pour savoir s'il faut ou non détruire les textes des "hérétiques" (minim; c.-à-d. des textes ni "bibliques", au sens de la Bible juive évidemment, ni "pharisiens" ou "phariséo-compatibles": c'est une catégorie très vaste, et ça ne veut pas forcément dire "chrétiens" et encore moins "du Nouveau Testament" !) qui contiennent le Tétragramme. (C'est un exemple typique de casuistique rabbinique fondée sur le conflit de deux "principes": oui parce qu'ils sont "hérétiques", non parce qu'on n'efface pas le Nom.)

Maintenant, que des textes "chrétiens" au sens très large (des "judéo-christianismes" aux "gnosticismes" les plus divers, souvent d'ailleurs combinés entre eux, où les spéculations sur les noms de Dieu sont extrêmement fréquentes) aient contenu le Tétragramme, ça n'a rien d'étonnant puisqu'on le retrouve aussi chez les Pères de l'Eglise (voir supra).

Citation :
Est-li vrai que le talmud interdit concernant les juifs d'effacer le Nom et peut-on en tirer une conclusion ?

Comme indiqué ci-dessus, c'est un "principe" en effet, mais qui peut entrer en conflit avec d'autres principes -- y compris dans la Torah, cf. l'ordalie de Nombres 5 où une malédiction contenant le Nom est effacée, d'où un débat rabbinique qui a inspiré le philosophe Emmanuel Levinas: la règle est transgressée, le Nom même de Dieu s'efface pour faire la paix... On peut (donc) en tirer beaucoup de "conclusions" intéressantes, mais en rapport avec le présent sujet, je ne vois pas trop !
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeLun 08 Juin 2015, 16:11

Citation :
Comme indiqué ci-dessus, c'est un "principe" en effet, mais qui peut entrer en conflit avec d'autres principes (y compris dans la Torah, cf. l'ordalie de Nombres 5 où une malédiction contenant le Nom est effacée, d'où un débat rabbinique qui a inspiré Emmanuel Levinas: la règle est transgressée, le Nom même de Dieu s'efface pour faire la paix)... On peut en tirer beaucoup de "conclusions" intéressantes, mais en rapport avec le présent sujet, je ne vois pas trop !

Narkissos, merci pour cette explication instructive.

Enfin, cette pratique de ne pas hésiter à effacer le nom de Dieu dans l’eau pour rasséréner un mari ( !) a servi de prétexte à au moins l’un des rabbins du Talmud pour approuver que l’on brûlât des livres censés être hérétiques : Talmud Traité Chabbath 116a : « Rabbi Ichmael dit qu’il est permis de brûler et de détruire les mentions du Nom. Cette autorisation se déduit logiquement par un raisonnement a fortiori : si déjà, pour rétablir la paix entre un homme et sa femme, la Torah dit que mon Nom écrit dans la sainteté soit effacé dans l’eau, à plus forte raison pourra-t-on effacer les noms de ces livres qui provoquent la haine, la dissension et l’inimitié entre les enfants d’Israël et leur Père dans les cieux. » Ainsi se voient rejetés du droit à être aimés des livres classés comme hérétiques, souvent par des jaloux. Pour nous au XXe et au XXIe siècle brûler des livres est devenu un signe particulier de barbarie et de haine. En particulier si une possibilité existe que ce soit des livres saints.

http://coirault-neuburger.blog.lemonde.fr/2012/06/01/paracha-nasso-et-lordalie-sotahlinexplicable-de-la-jalousie-et-de-lamour/



 
Citation :
(je viens de relire la série de 6 articles d'Ivan K référencée p. 3, qui est décidément une merveille de pédagogie sur l'ensemble du sujet).]

Une série d'articles intéréssante et instructive.


Dernière édition par free le Mar 09 Juin 2015, 14:50, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeLun 08 Juin 2015, 23:08

A propos du NT, je me demande si la Watchtower s'est jamais prononcée clairement sur la (ou les) FORME(S) du "nom divin" qu'elle suppose avoir été employée(s) dans les "manuscrits originaux". La question est d'importance pour sa théorie -- à l'exception peut-être de Matthieu qu'elle présume hébreu à l'origine -- car OU BIEN 1) il s'agit d'une forme illisible et imprononçable pour un lecteur grec, ce qui ruine sa doctrine d'un nom effectivement lu et prononcé, OU BIEN 2) il s'agit d'une transcription lisible et prononçable en grec, et Iaô (forme égyptienne du nom correspondant au trigramme yhw d'Eléphantine plutôt qu'au tétragramme palestinien) est alors l'unique candidat documenté à ce stade -- SI du moins on prend au mot son argumentation qui veut que ce soit par (les citations de, les allusions à ou les imitations de) la Septante (égyptienne également !) que le "nom divin" se serait retrouvé dans le NT. Dès lors, quitte à "transcrire" (sans texte réel), pourquoi ne pas transcrire Iaô ?

Dans tous les cas, "Jéhovah" donne une fausse image même des textes grecs imaginaires du NT -- je veux dire: des textes du NT tels que les TdJ pourraient les imaginer s'ils menaient la théorie de la Watch jusqu'à l'une ou l'autre de ses conclusions possibles. Non pas seulement parce que la transcription serait fausse en général, mais parce qu'elle donne l'illusion en l'occurrence (statistiques à part) que rien n'est changé par rapport à l'AT, avec le même nom tout aussi naturellement à sa place dans un texte grec que dans un tete hébreu; alors qu'ici on aurait, à suivre jusqu'au bout (et quel que soit ce bout) la théorie watchtowérienne, un texte beaucoup plus insolite.

Bien entendu, cette démonstration bougrétienne ne doit pas faire perdre de vue les preuves massives que la TMN est fausse, notamment lorsque la substitution de "Jéhovah" à kurios détruit le sens obvie du texte, Romains 10; 14; 2 Corinthiens 12 etc., mais cela a déjà été suffisamment exposé. C'est cette question d'exégèse et d'analyse littéraire du NT que Howard, en tant que spécialiste de la Septante, n'a pas assez prise en considération (on pourrait en dire autant sur d'autres sujets de Jason BeDuhn, théoricien généraliste de la traduction dont les éloges de la TMN, cités en boucle par la Watch, résultent souvent d'une incompréhension des textes). En ce qui concerne Howard, je rappelle (parce que je l'avais oublié) qu'il s'est tout de même fendu en 1988 d'un bref désaveu des thèses de la Watch (courrier à Rud Persson reproduit p. 720 du livre In Search of Christian Freedom, de Raymond Franz: "P.S. The Jehovah's Witnesses have made too much out of my articles. I do not support their theories." -- Les Témoins de Jéhovah ont tiré des conclusions abusives de mes articles. Je ne cautionne pas leurs théories.).

[Sur la question distincte des (abréviations des) nomina sacra, qui a une certaine pertinence pour la présente discussion dans la mesure où il y en a dans les copies chrétiennes des textes de la Septante, et par influence de celles-ci dans quelques copies juives tardives, voir ici mon post du 9.6.15.]
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeJeu 11 Juin 2015, 17:12

Citation :
Plus exactement, il y a débat (non tranché, ou tranché dans les deux sens possibles) dans le Talmud pour savoir s'il faut ou non détruire les textes des "hérétiques" (minim; c.-à-d. des textes ni "bibliques", au sens de la Bible juive évidemment, ni "pharisiens" ou "phariséo-compatibles": c'est une catégorie très vaste, et ça ne veut pas forcément dire "chrétiens" et encore moins "du Nouveau Testament" !) qui contiennent le Tétragramme. (C'est un exemple typique de casuistique rabbinique fondée sur le conflit de deux "principes": oui parce qu'ils sont "hérétiques", non parce qu'on n'efface pas le Nom.)

Narkissos, concernant les minim, voici ce qu'écrit D .Fontaine :

On sait que les écrits des minim (hérétiques) y sont appelés « blancs » ou « marges » (גיליונים), voire « rouleau de mensonge » et « rouleau de transgression », אוון גליון(aven guilayon) et עוון גליון (avon guilayon) – ces minim que l’on peut identifier aux judéo-chrétiens.

Plusieurs passages invitent à ne pas épargner des flammes les écrits des minim en cas d’incendie (ou éboulement, ou autre), ces écrits ainsi que les mentions du Nom divin qu’ils contiennent.
Si les écrits des minim (סיפרי מינים) sont bien des évangiles, comme le montrent Jaffé ou Mimouni, alors la thèse de la présence du nom divin sous forme de tétragramme dans le NT (du moins dans les portions écrites, semble-t-il, en hébreu plutôt qu’en araméen) est grandement confortée.

Dans son article, Jaffé soutient que le passage de Sabbath 116a-b contient un référence, sous forme de dérision et de jeu de mot, à Matthieu 5.17. Cette thèse me paraît d’autant plus recevable que les autres mentions des évangiles se font toujours pas dérision (« blancs ») et jeu de mot (ex. aven gilyon/évangélionn).

En l’occurrence, Matthieu 5.17 fait état d’un boisseau (hébreu homer, חומר), or le passage de Sabbath reprend ce mot en y introduisant le mot âne (hébreu hamor חמור, araméen חמרא).
Tout cela me semble parfaitement cohérent : conformément au témoignage unanime des Pères, Matthieu fut rédigé en hébreu et contenait le tétragramme.

http://areopage.net/blog/2013/08/01/d-jaffe-et-matthieu-hebreu/
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeJeu 11 Juin 2015, 21:40

Oh la la la la laaaaa! Rolling Eyes

Y'aurait pas un verset pour dire un truc du genre : "Tu ne coucheras pas avec les mouches comme un homme couche avec un homme, cela devra être pour toi encore plus une abomination que ceci" ?

Résumé de l'épisode:
Comme des exégètes pensent qu'un passage du Talmud pourrait faire un jeu de mot avec un terme grec, Fontaine postule que le même passage fait aussi un jeu de mot avec un terme hébreu, jeux de mots qui feraient l'un et l'autre plus ou moins référence aux mêmes ouvrages. Evidemment, Didier Fontaine ne sait pas quel mot hébreu on était censé trouver en Mat 5.15 (et pour cause), c'est donc le plus gratuitement du monde qu'il décrète que c'est le mot homer qu'on trouvait dans le texte hébreu (supposément original). Ce mot homer –qui désigne une capacité qui varie de 200 à 300 l selon les qqs sources que je consulte– aurait par la suite été traduit par modios en grec –qui équivaut, lui, à une dizaine de litres environ. Dans les quelques passages de la LXX que j'ai consultés (pas exhaustivement, je l'avoue), homer n'est pas traduit par modios.
Conclusion:
Citation :
Tout cela me semble parfaitement cohérent
Et là, on ne parle même pas des problèmes que pose l'idée du Matthieu hébreu originel, si on le considère dans son rapport avec les synoptiques.

(Edit : à la réflexion, je me demande si ce ne pourrait pas être parmi les  fa/fumeuses "sources J" que DF a trouvé sa correspondance homer/modios. Mais là, je n'ai aucun moyen de vérifier... Et ça ne changerait évidemment rien au problème, du reste.)
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeJeu 11 Juin 2015, 23:01

Tout est (presque) toujours "parfaitement cohérent" pour D. Fontaine parce qu'il lit tout ce qu'il lit (et il lit assurément beaucoup) avec en tête une seule question dont il connaît d'avance la (bonne) réponse, et qu'il ne retient que ce qui lui semble aller dans le sens de cette question et de cette réponse (et certes, on lit beaucoup plus vite et donc beaucoup plus comme ça, si on peut encore appeler ça lire [salir ?]).

Le raisonnement, bien sûr, "fuit" de toutes parts: déjà, un peu, dans l'article de Jaffé que D. Fontaine a la bonne grâce de donner en lien, beaucoup plus encore dans la déduction que ce dernier en tire. Mais pour voir et comment ça "fuit" il faut considérer deux énormes problèmes partiellement symétriques, la composition du Talmud rabbinique et celle du NT chrétien (et plus particulièrement des Evangiles synoptiques). Et entre ces deux-là près de deux millénaires de polémique, non pas neutralisée mais compliquée à l'époque moderne par des politesses savantes et diplomatiques. Avec notamment cet effet pervers, mais courant: un savant appuyant une exégèse critique de sa propre tradition sur une réception non critique de la tradition d'en face aboutit à des résultats aberrants.

Bien sûr, dans les morceaux, strates, rédactions et (re-)lectures les plus tardifs du Talmud (dont la datation varie entre le Ve et le IXe siècle !) les minim de référence sont presque exclusivement "chrétiens" (et seulement judéo-chrétiens dans la mesure où ceux-ci sont présumés offrir une certaine "surface de contact", réelle au début, imaginaire ensuite, avec le judaïsme rabbinique, alors qu'entre celui-ci et la "grande Eglise" l'ignorance réciproque est de mise, si ce n'est par l'intermédiaire de ces "judéo-chrétiens" réels ou fantasmés, mais officiellement rejetés de part et d'autre).

Jaffé n'offre aucun argument pour dater les traditions (sinon les textes) talmudiques qu'il commente du IIe siècle (de l'époque "tannaïte") -- si ce n'est précisément une référence non critique à la tradition chrétienne et à son "Matthieu hébreu" (mais au moins il le dit, et très clairement). Et Fontaine, parce que ça l'arrange, ne songe pas un instant à mettre en question cette datation qui ne repose sur rien sinon précisément sur ce qu'il espère "prouver", à savoir un Matthieu hébreu avec le Tétragramme dedans.

Moi qui ne connais quasiment rien au Talmud, mais qui ai une certaine pratique des évangiles chrétiens et grecs, j'ai une toute autre approche de la tradition du "Matthieu hébreu". Je sais que le Matthieu grec qui est traduit dans toutes les bibles chrétiennes (y compris la TMN !) n'est certainement pas une traduction d'un "original" hébreu ou araméen, puis qu'il dépend verbalement (en grec !), tout au long de sa trame narrative, d'un (proto-)Marc tout à fait grec; je sais aussi qu'il n'est pas le simple produit d'une communauté "judéo-chrétienne", puisqu'il s'y trouve aussi les traits les plus anti-judaïques (pour ne pas dire antisémites) qui soient (le royaume de Dieu vous sera enlevé et donné à une nation qui en produira les fruits, que son sang soit sur nous et sur nos enfants, etc.). En revanche, je suis tout prêt à accepter l'idée que certains ajouts de "Matthieu" à "Marc" (ou à un proto-Marc) -- y compris les logia rassemblés dans le "Sermon sur la montagne", dont ceux de 5,14ss qui semblent faire l'objet des allusions du Talmud -- proviennent effectivement d'une "source" sémitique (hébraïque ou plutôt araméenne) ET "judéo-chrétienne". Mais, le cas échéant, que pourrait-on en conclure ? Qu'il y aurait eu un "proto-évangile" (plutôt un recueil de logia façon Thomas qu'un récit façon Marc) hébreu ou araméen ET "judéo-chrétien" associé au nom de Matthieu, mais que celui-ci N'EST PAS l'Evangile reçu dans le canon sous le nom de Matthieu, même s'il y est en partie préservé.

Il n'empêche que dans les strates les plus anciennes du Talmud, les minim ne se limitent pas aux (judéo-)chrétiens; que les Evangiles canoniques, y compris le Matthieu grec, même s'ils intègrent du matériau "judéo-chrétien", sont essentiellement pagano-chrétiens. En un mot le tuyau est percé, et pas qu'un peu...

@VANVDA: le lien homer - modios est chez Jaffé, § 45 (qui renvoie à Güdemann, 1876 !).


Dernière édition par Narkissos le Jeu 11 Juin 2015, 23:45, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeJeu 11 Juin 2015, 23:26

(Et il y a encore un autre "petit" détail que l'autre DF tient pour acquis, et qui mériterait d'être soigneusement vérifié, c'est que les "mentions du Nom" évoquées par le Talmud fassent systématiquement référence au Tetragramme, et à lui seul. Que ses substituts usuels fassent l'objet des mêmes débats, et la démonstration savante est coulée...)
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeVen 12 Juin 2015, 09:44

Voir ici (et à la page suivante) le texte de référence et sa traduction en anglais (il faut remonter à 115a, début du chapitre xvi, pour se faire une idée de l'ensemble de la discussion).

Où l'on voit que la portion de texte discutée par Jaffé s'enchaîne sans transition sur une autre (?) où les gilionim sont bel et bien compris et traités en tant que "blancs", c.-à-d. marges et autres espacements des rouleaux (a priori juifs), sans aucune référence aux minim; puis (à la faveur sans doute du double sens de gilionim) on saute de là aux livres des minim; puis de là (tourner la page) à la controverse de r. Gamaliel et ses allusions (probables mais approximatives) à des logia évangéliques.

@ VANVDA: le terme "mentions", h'zkrwt (de zkr se souvenir, d'où "évocation", "rappel", cf. l'équivalence šm = zkr, "nom" = "souvenir, mémorial" en hébreu biblique) est a priori très vague.  Jastrow ad loc. ('zkrh, p. 37, colonne de droite, 4e entrée; voir aussi, pendant qu'on y est, les p. 248-9 pour glywn = gilaion) distingue un sens général (évocation, mention, référence) et un sens restreint désignant spécialement le Tétragramme. A comparer, au début du chapitre, au traitement des amulettes et autres bénédictions/malédictions plus ou moins "magiques" comportant de telles "mentions".
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeVen 12 Juin 2015, 10:50

Il me semble que l'argumentation des apologistes de la WT repose sur le fait que le NT a été élaboré dans un contexte judéo-chrétien, donc très attaché au tétragramme. or le christianisme puise, entre autre, ses origines dans le judaïsme palestinien mais aussi héllénistique. (Act 6). Pour eux, les responsables de la substitution du tétragramme sont les chrétiens héllenistes du 2eme siècle.


Dernière édition par free le Ven 12 Juin 2015, 14:03, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeVen 12 Juin 2015, 13:59

La fortune de l'adjectif "judéo-chrétien", c'est qu'il veut tout dire et qu'il ne veut rien dire, ce qui permet, en glissant subrepticement d'une de ses acceptions à une autre, tous les tours de passe-passe rhétoriques. Il peut se référer à la parenté générale du "judaïsme" et du "christianisme", à la composante juive (au sens "ethnique") du christianisme primitif, à des composantes du judaïsme du Second Temple qui s'éloignent du pharisaïsme et vont se rattacher ou non à la "grande Eglise", à des mouvements chrétiens (ethniquement juifs, mixtes ou pas juifs du tout) opposés au paulinisme puis aux synthèses deutéro-pauliniennes et "ecclésiastiques", et ainsi de suite. Toutes ces lignes de partage étant encore compliquées par d'autres, géographiques et linguistiques, qui ne s'y superposent jamais exactement ("juif" ethniquement ou pas, de n'importe quelle "école" ou d'aucune, "chrétien" de n'importe quelle tendance, on peut être de Judée, de Galilée, de Syrie, d'Egypte, d'Asie Mineure, de Grèce ou d'Italie, et parler araméen ou grec; puis latin, copte, arménien etc.).

Fétichisme jéhoviste mis à part, et toute cette polysémie en revanche incluse, le "judéo-christianisme" de Matthieu est un sujet passionnant: parce que l'Evangile grec et canonique connu sous ce nom rassemble en une synthèse assez harmonieuse des textes issus des tendances les plus contradictoires (anti-paulinisme et anti-judaïsme, rejet et acceptation des "païens", anti-pharisaïsme tantôt pour et tantôt contre la halakha pharisienne, affirmation de la validité de la Torah et rejet d'Israël, eschatologie imminente et lointaine, affirmation de l'institution ecclésiastique et critique des hiérarchies, etc.), ce qui peut donner une idée des conflits et des négociations nécessaires à l'émergence d'une "Eglise de synthèse" -- à Antioche par exemple où pouvaient se rencontrer, au plan linguistique, le grec et l'araméen. Que cet Evangile devienne la "porte d'entrée" du NT, rappel constant à l'Eglise "universelle" de ses "origines juives" partielles, contradictoires et ambiguës, que son nom soit également rattaché au souvenir d'une ou plusieurs "sources" sémitiques de "paroles de Jésus", que son histoire littéraire se poursuive aussi dans des groupes "judéo-chrétiens" indépendants (ébionites, nazaréens) qui ne se rattachent ni à la grande Eglise ni à la Synagogue pharisienne, et même un peu à l'intérieur de celle-ci qui tout au long du moyen-âge "connaît" surtout le christianisme par des versions plus ou moins divergentes de "Matthieu", cela marque effectivement le lieu d'une "marge", d'une "frontière", d'une "porte" où un dialogue certes conflictuel et plein de malentendus se poursuit en dépit des anathèmes officiels et réciproques des "institutions".

@free: sans l'apport "hellénistique" (de Marc, de la LXX y compris dans les citations exclusivement matthéennes, etc.), l'Evangile selon Matthieu tel que les TdJ le lisent dans la Traduction du monde nouveau n'existerait tout simplement pas. Je pense d'ailleurs que la Watchtower n'a jamais imaginé ni même prétendu restaurer un "Matthieu hébreu" en saupoudrant d'une poignée de "Jéhovah" le texte grec (qu'elle traduit à la lettre, à part ça, en surtraduisant même jusqu'à récemment les moindres nuances réelles ou imaginaires de la grammaire et du lexique grecs). Du "Matthieu hébreu", elle n'en a au fond rien à cirer, sinon pour le prétexte qu'elle en tire à justifier sa monomanie distinctive.
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeVen 12 Juin 2015, 14:27

Citation :
La fortune de l'adjectif "judéo-chrétien", c'est qu'il veut tout dire et qu'il ne veut rien dire, ce qui permet, en glissant subrepticement d'une de ses acceptions à l'autre, tous les tours de passe-passe rhétoriques. Il peut se référer à la parenté générale du "judaïsme" et du "christianisme", à la composante juive (au sens "ethnique") du christianisme primitif, à des composantes du judaïsme du Second Temple qui tout en s'éloignant du pharisaïsme vont se rattacher ou non à la "grande Eglise", à des mouvements chrétiens (ethniquement juifs, mixtes ou pas juifs du tout) opposés au paulinisme puis à la synthèse deutéro-paulinienne, et ainsi de suite. Toutes ces lignes de partage étant encore compliquées par d'autres, géographiques et linguistiques, qui ne s'y superposent jamais exactement ("juif" ethniquement ou pas, de n'importe quelle "école" ou d'aucune, "chrétien" de n'importe quelle tendance, on peut être de Judée, de Galilée, de Syrie, d'Egypte, d'Asie Mineure, de Grèce ou d'Italie, et parler araméen ou grec).

Merci Narkissos pour précisions.

Comme souvent, la WT donne dans le simplisme et shématise des sujets souvent complexes. Par exemple Actes 15, 5 ( "Alors quelques membres du parti des pharisiens qui étaient devenus croyants se levèrent pour dire qu'il fallait circoncire les non-Juifs et leur enjoindre d'observer la loi de Moïse."), nous parle de Pharisiens devenus croyant, tout en continuant d'appartenir au parti des pharisiens?



Voici l'argumentation de la WT sur les "hérétiques" :

" Des écrits juifs des premiers siècles de notre ère indiquent que les chrétiens d’origine juive employaient le nom divin dans leurs propres écrits. Un recueil de lois orales, la Tossefta, dont la rédaction s’est terminée vers 300 de notre ère, affirme au sujet des écrits chrétiens qui brûlaient un jour de sabbat : “ Les livres des hérétiques [vraisemblablement des chrétiens d’origine juive] ne doivent [pas] être sauvés de l’incendie, mais il faut les laisser brûler sur place, eux et les noms ineffables [tétragrammes]*. ” Cette même source cite Rabbi Yosé le Galiléen, qui vécut au début du IIe siècle de notre ère, et qui aurait dit, pour ce qui est des écrits chrétiens, les autres jours de la semaine : “ On découpera les emplacements des noms ineffables, on les déposera en lieu sûr, et on brûlera le reste. ” Ainsi, tout porte à croire que, pour les Juifs du IIe siècle de notre ère, les chrétiens employaient le nom de Jéhovah dans leurs écrits."

http://m.wol.jw.org/fr/wol/d/r30/lp-f/2008567
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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeVen 12 Juin 2015, 16:49

Narkissos, l'histoire de la LXX est décidement bien complexe. Pourrais-tu m'aider à répobndre à une question :

Les manuscrits de la LXX  des 2eme et 3 eme siècles ont-ils subi une substitution du tétragramme par kurios ?
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Narkissos

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MessageSujet: Re: Les manuscrits anciens de la LXX   Les manuscrits anciens de la LXX - Page 3 Icon_minitimeVen 12 Juin 2015, 18:06

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1. En bref (et au risque de "simplifier" et "schématiser" aussi !), parce que ce n'est pas vraiment le sujet: les Actes dépeignent une "Eglise de Jérusalem" idéale qui, initialement persécutée par le Sanhédrin ("les grands prêtres et les anciens"), prend quasiment la relève de celui-ci au chapitre 15: sous la conduite de Jacques le Juste (figure juive consensuelle jusque chez Josèphe), qui joue pratiquement ici le rôle du grand prêtre, "les apôtres et les anciens" se réunissent pour trancher des questions concernant la diaspora, exactement comme le Sanhédrin -- avec un pouvoir encore plus large en un sens puisque son autorité s'étend à des non-juifs. Elle a tous les attributs de la fonction: elle est étroitement liée au Temple et à son culte (les offrandes qu'elle reçoit se confondent avec les offrandes de la diaspora au Temple et à la Nation, cf. le traitement de la collecte paulinienne, chap. 21), les prêtres y sont nombreux (6,7), les pharisiens même y sont représentés. On notera par ailleurs que lorsque le (vrai) Sanhédrin revient en scène, pour le (non-)jugement de Paul au chapitre 23, les pharisiens sont plutôt du bon côté. Il s'agit pour l'auteur de présenter, par la médiation de cette "Eglise de Jérusalem" plus juive que juive, l'Eglise chrétienne tout entière comme une héritière légitime du judaïsme du Second Temple, et la plus digne, sans trop taper cependant sur la concurrence pharisienne qui est plutôt bien vue par Rome depuis la fin de la Guerre juive (cf. Ben Zakkaï et Josèphe). Les "méchants juifs" dont l'Eglise se démarque aux yeux des officiels romains (généralement représentés de façon flatteuse: ce sont des hommes intelligents qui, s'ils ne sont pas corrompus, donnent toujours raison aux chrétiens) sont les grands-prêtres, les sadducéens, les sicaires, soit tous les acteurs de la révolte contre Rome, et les "Juifs d'Asie" au statut avantageux, qui passent pour jaloux de leurs privilèges communautaires (voir sur ce dernier point l'article de Schnabel, fort bien documenté [quoique] dans une perspective plutôt "fondamentaliste": il suffit d'inverser la relation chronologique -- et littéraire -- Josèphe-Actes pour en faire une lecture plus "critique")...
2. Tu remarqueras que la TdG est ici nettement plus prudente que D. Fontaine... "vraisemblablement", conditionnel, "écrits" non identifiés aux "évangiles".
Il y a un problème logique et chronologique: l'identification des minim aux seuls chrétiens est tributaire d'une datation tardive des traditions talmudiques: au IIIe siècle et au-delà, en effet, il n'y a pratiquement plus que deux "identités collectives" en lice, et il devient très probable que les minim de référence soient chrétiens; si en revanche on fait remonter ces traditions plus haut, au IIe siècle (comme le fait la Watchtower), cette belle certitude s'évanouit: en matière de minim on n'a que l'embarras du choix, et les "livres des minim" ne sont plus forcément des livres chrétiens. Et on ne peut pas compter sur les enchaînements "coq à l'âne" du Talmud pour les définir d'après un "contexte": s'il y a des allusions à des textes de type évangélique dans ce qui suit, il y a dans ce qui précède un tout autre sujet (les "blancs des rouleaux", au sens propre, qui ne concernent ni les minim, ni les chrétiens).
3. Il faudrait relire l'ensemble du fil (et suivre ses liens), mais pour résumer:
- On ne peut pas parler DES manuscrits de la LXX (même "des IIe et IIIe siècles") EN GÉNÉRAL. Il y a des recensions et des révisions dans tous les sens, y compris dans un sens hébraïsant, selon les lieux et les milieux (cf. la re-traduction d'Aquila qui, en milieu juif = pharisien, semble avoir au contraire remplacé kurios -- et pas toujours -- par le Tétragramme vers 130 apr. J.-C.). Si ta question concerne plus précisément les manuscrits chrétiens de la LXX, ceux-ci portent assurément kurios (généralement sous la forme abrégée des nomina sacra), mais on ne peut pas présumer qu'ils aient "remplacé" quoi que ce soit (sinon une écriture pleine par une abréviation) sans connaître précisément leurs textes sources. On ne les connaît certes pas, mais la réaction opposée d'Aquila donne plutôt à penser qu'ils avaient déjà kurios au début du IIe siècle.
- Le Tétragramme (hébreu, quelle que soit sa graphie) n'appartient certainement pas à la "Septante originale" (le Pentateuque du IIe s. av. J.-C.). Il est le fait de révisions hébraïsantes, souvent repérables à d'autres modifications textuelles (e.g. recension kaige, ou plus tard Aquila).
- Il se peut que la "Septante originale" (toujours pour le Pentateuque) ait employé la transcription égyptienne IAÔ -- malgré la faiblesse de son attestation matérielle, l'hypothèse est plausible parce que le judaïsme égyptien, surtout avant la crise maccabéenne, a de bien meilleurs rapports avec l'hellénisme en général (sans quoi, pas de "Septante" !) et beaucoup moins de préventions religieuses à l'égard de la prononciation et de la divulgation d'un nom divin (dans la continuité du Yahô d'Eléphantine; voir à ce sujet Joosten -- en français pour une fois !) que le judaïsme palestinien de l'époque séleucide, hasmonéenne ou romaine; kurios en revanche semble bien être original dans les textes traduits plus tard (notamment les Prophètes); le cas échéant, une révision générale de IAÔ en kurios a vraisemblablement précédé le christianisme, mais on ne peut pas être tout à fait affirmatif là-dessus. Ce qui est absolument clair, c'est que (p. ex.) Philon (comme Paul !) écrivait, comprenait, prononçait kurios; il est extrêmement probable qu'il le lisait aussi dans le texte grec qu'il commentait (une pareille différence entre le texte écrit et lu aurait à coup sûr mérité un commentaire, et il n'en dit rien), mais ce n'est pas à 100 % certain (pour Paul et les auteurs du NT, la question se complique -- ou s'annule -- du fait qu'en général ils ne travaillaient sans doute pas sur de vraies copies de la LXX, mais sur des testimonia [anthologies] de provenance diverse, quand ils ne citaient pas de mémoire).
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