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| Au sujet de l'amour et de la mort | |
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Auteur | Message |
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Le gaffeur distancié
Nombre de messages : 104 Age : 41 Date d'inscription : 27/02/2010
| Sujet: Au sujet de l'amour et de la mort Mer 21 Juin 2017, 01:47 | |
| Une réflexion que j'ai écrite suite à l'écoute d'une vidéo sur le dernier bouquin de Brezinski : Punaise avec le décès de Rockefeller, celui de Zbignougnou, il manque plus que Kissinger et Jacob Rothschild pour que le monde perde sa raison d'être Blagues à part, je pense que Brezinski nonobstant ses 180 de qi supposés n'avait rien d'un sociopathe prédestiné, et je ne suis même pas certain que c'en fut un. Je crois même que le loup peut aussi être un homme pour le loup hou hou. Je pense qu'il était juste un peu déconnecté d'une forme de vie réelle, en tout cas plus déconnecté que les homeless au pied des tours de Manhattan (forcément, ils ne montent pas dans les tours ), ou les mecs qui ont "raté" leur BEPC qui sont probablement tout aussi en mesure, voire peut-être même plus, de comprendre la réalité de ce qui permet d'exister à savoir l'amour agapé, et de comprendre que la mort n'est pas dramatique. En fait, à partir du moment où on aime et on travaille (à ne pas confondre avec emploi), on créé plus de valeur qu'on en consomme, et on contribue à la richesse du cosmos. L'angoisse de la mort est sans objet, puisque la mort c'est le non-être. Cette angoisse est en réalité une forme de déplacement qui s'actualise lorsqu'on a l'impression de ne pas être vivant dans nos actes de la vie quotidienne, et la "trouille" c'est en réalité le fait de passer l'arme à gauche sans avoir été capable de penser que la lutte n'est pas une finalité, c'est juste une modalité servant une fin supérieure, et que la lutte c'est en fait contre soi-même qu'on la mène avant de se sentir accompli. En fait, c'est pas la mort qui est un problème, c'est la peur de passer à côté de sa vie, ou plus exactement de ne pas s'accomplir à travers la forme la plus aboutie d'amour celle décrite en 1 Corinthiens 13 :4-8 (première phrase). Chaque être vivant, et chaque être humain a un potentiel de développement extraordinaire, a ce buisson ardent qui ne consume pas, cette capacité d'amour illimitée. Nous sommes tous des semblables avec ce privilège de décliner de façon personnelle cette capacité de développement. Freud a probablement fait l'erreur de réduire la pulsion de vie à Eros, et lorsqu'on suppose que l'orgasme est une petite mort, alors on se situe dans la confusion entre la pulsion de vie et la pulsion de mort (Eros et Thanatos). En fait, la pulsion de vie c'est Agapé, qui peut être étayée par Storge et Philia, et de façon en partie facultative par Eros. C'est probablement le christianisme qui a introduit plus clairement la notion d'amour agapé, mais on peut très bien le dépasser en intégrant son apport, c'est-à-dire en ne tombant pas dans le piège de l'annulation de l'amour agapé dans lequel il est tombé, à savoir l'affirmation de l'existence de Dieu (un autre non-être absolu), et que Dieu est amour, ce qui a plongé le monde dans les ténèbres jusqu'à la renaissance, en condamnant l'amour à n'être qu'une illusion, alors que c'est la réalité ultime.
Dernière édition par Le gaffeur distancié le Mer 21 Juin 2017, 01:52, édité 1 fois |
| | | Le gaffeur distancié
Nombre de messages : 104 Age : 41 Date d'inscription : 27/02/2010
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Mer 21 Juin 2017, 01:50 | |
| Quelques musiques de circonstances : https://www.youtube.com/watch?v=K9Q2VGYyIJU https://www.youtube.com/watch?v=LUF_3oKlX_U
Bonne nuit ! |
| | | le chapelier toqué
Nombre de messages : 2607 Age : 77 Date d'inscription : 31/08/2010
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Mer 21 Juin 2017, 11:06 | |
| Merci le gaffeur distancié d'avoir partagé ton ressenti. Peux-tu m'indiquer le titre du livre stp? Merci |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Mer 21 Juin 2017, 11:58 | |
| Bonjour ! Quelques notes en vrac, après décryptage de la première référence -- nous n'avons pas les mêmes lectures ! Moi, je lisais ces jours-ci les Canti de Leopardi, où se trouve parmi d'autres merveilles un superbe Amore e Morte, dépeints comme frère et sœur dont l'œuvre se complète en s'annulant -- le "pessimisme cosmique" s'y apaise, à défaut de se retourner en optimisme. Je repense, bien sûr, à l' incipit de Tristan et Yseult selon Bédier: "Seigneurs, vous plaît-il d’entendre un beau conte d’amour et de mort ? C’est de Tristan et d’Iseut la reine. Écoutez comment à grand’joie, à grand deuil ils s’aimèrent, puis en moururent un même jour, lui par elle, elle par lui." Dans La carte postale, Derrida dialogue (en différé, comme toujours) avec Au-delà du principe de plaisir de Freud (le texte où apparaît l'idée de "pulsion de mort", Todestrieb) et les Ecrits de Lacan sur ce texte. C'est un livre assez déroutant à première vue, qui entrelace une relation "privée", amoureuse et épistolaire, avec une analyse "déconstructive" de textes "philosophiques" et "psychanalytiques"; mais (pour moi) passionnant. Au moins deux "ex" en moi (le bibliste et le TdJ) en moi sourient à l'évocation de l' agapè; et plus généralement à la persistance et à la fécondité des schémas, même "faux", dès lors qu'ils offrent une (illusion d')intelligibilité. Plus partiellement, à la relecture de ton texte: Parménide, ouk esti mè einai, "le non-être n'est pas", "il n'y a pas de ne-pas-être". Kierkegaard et Heidegger, sur l'analyse de l'angoisse, précisément comme peur de rien; où l'on devine pourquoi les consolations rationnelles d'Epicure et de Lucrèce (où je suis, la mort n'est pas, où elle est je ne suis pas) sont aussi efficaces qu'un cataplasme sur une jambe de bois. Mon allergie (épidermique ou viscérale, déraisonnable en tout cas) à tout ce qui ressemble de près ou de loin à une téléologie (utilité, finalité, accomplissement, etc.; pour ne rien dire de l'idée de contribuer à la richesse du cosmos !). Je ne suis pas sûr qu'on fasse davantage justice à "l'amour" en le cosmicisant à la Dante ( L'amor che move il sole e l'altre stelle, Paradiso XXXIII, 135) qu'en le déifiant à la saint Jean ( ho theos agapè estin) -- et pourtant pour rien au monde je ne renierais aucun de ces moments de son dire. Mais je leur en adjoindrais d'autres, p. ex. "l'infini mis à la portée des caniches" (Céline). Etc. |
| | | le chapelier toqué
Nombre de messages : 2607 Age : 77 Date d'inscription : 31/08/2010
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Mer 21 Juin 2017, 13:09 | |
| Je te trouves d'humeur bien facétieuse, Narkissos.... |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Mer 21 Juin 2017, 13:54 | |
| Tu m'en vois ravi, car j'aurais plutôt craint (sans pouvoir y faire grand-chose, d'ailleurs) de donner l'impression contraire...
"L'amour et la mort", c'est à vrai dire LE topos, le lieu commun par excellence, dont l'unité et la duplicité structurent à peu près toute la "culture" humaine (de la mythologie antique au cinéma, et du chef-d'œuvre absolu au dernier navet). On voudrait penser à autre chose, on ne pourrait que faire semblant.
On ne pense qu'à ça, on ne parle que de ça, sous les masques contraires du même: Freud, Bataille, Gracq (pour ne citer que des auteurs qui ont explicité la chose aussi peu obliquement que possible).
Tout individu humain sait son origine dans "le sexe" et sa fin dans "la mort", mais ce savoir est aussi théorique et abstrait qu'il est certain: tant que je suis vivant, ma mort est pour moi un "fantasme" autant que ma conception (celle-là est aussi irrémédiablement à venir que celle-ci est irrémédiablement passée); je ne peux m'y référer, les rapporter l'une à l'autre de ce rapport que pourtant je suis, que sur le mode détourné de la fiction ou de la représentation. Fictive, "la mort" (dite, écrite, décrite, racontée, dépeinte, représentée) ne l'est pas moins par rapport à son "phénomène" que "l'amour" par rapport à toute sexualité phénoménale. Et la fiction révèle, tout en s'en distanciant, l'unité du réel qui ne saurait se dire ou se montrer "directement". Dans "l'amour" se reconnaît la "perte de soi" (de la "petite mort" porno-graphique aux grands sentiments romantiques à la Werther) qui qualifie aussi "la mort".
"L'amour est fort comme la mort", dit le Cantique des cantiques; non pas "plus fort que la mort", comme on le cite ordinairement de travers; mais même quand on a corrigé la citation erronée, on en garde souvent l'idée d'un antagonisme (deux puissances égales mais hostiles l'une à l'autre); ce n'est pas ce que dit le texte, qui se contente de les comparer sous l'aspect de la puissance irrésistible (cf. le parallélisme rigoureux: l'amour est fort comme la mort // la jalousie est dure comme le she'ôl); un pas de plus et ce serait la même puissance... |
| | | Le gaffeur distancié
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| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Mer 21 Juin 2017, 20:09 | |
| - Narkissos a écrit:
- Bonjour !
Au moins deux "ex" en moi (le bibliste et le TdJ) en moi sourient à l'évocation de l'agapè; et plus généralement à la persistance et à la fécondité des schémas, même "faux", dès lors qu'ils offrent une (illusion d')intelligibilité.
Mon allergie (épidermique ou viscérale, déraisonnable en tout cas) à tout ce qui ressemble de près ou de loin à une téléologie (utilité, finalité, accomplissement, etc.; pour ne rien dire de l'idée de contribuer à la richesse du cosmos !).
Je ne suis pas sûr qu'on fasse davantage justice à "l'amour" en le cosmicisant à la Dante (L'amor che move il sole e l'altre stelle, Paradiso XXXIII, 135) qu'en le déifiant à la saint Jean (ho theos agapè estin) -- et pourtant pour rien au monde je ne renierais aucun de ces moments de son dire. Mais je leur en adjoindrais d'autres, p. ex. "l'infini mis à la portée des caniches" (Céline).
Etc. Pourtant je t'assure que j'ai pas fait complètement exprès non plus Ceci étant, je pense en effet que même les caniches ont un certain accès à l'infini... nom d'un chien ! |
| | | Le gaffeur distancié
Nombre de messages : 104 Age : 41 Date d'inscription : 27/02/2010
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Mer 21 Juin 2017, 20:13 | |
| - le chapelier toqué a écrit:
- Merci le gaffeur distancié d'avoir partagé ton ressenti. Peux-tu m'indiquer le titre du livre stp? Merci
C'est celui-ci : https://www.amazon.com/Strategic-Vision-America-Crisis-Global/dp/0465061818 Et la vidéo c'est celle de Michel Drac qui a des affinités indiscutables avec le fascisme italien : https://www.youtube.com/watch?v=uV8wisgI08c&t=2136s |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Jeu 22 Juin 2017, 01:33 | |
| [Hors sujet, après avoir écouté la recension et sans avoir lu le livre: c'est Drac qui qualifie Brzeziński de sociopathe (avis d'expert ?). En tout état de cause, si sociopathes il y a -- je serais pour ma part porté à croire qu'il n'y a que ça, des sociopathes, que la "société" est pour l'"individu" une souffrance ( pathos) plus ou moins bien tolérée, et jamais tolérée sans une certaine "perversion", y compris dans la meilleure "éducation" -- je les préfère en littérature...] A propos des caniches, il faut noter que dans Au-delà du principe de plaisir la "pulsion de mort" est expliquée de façon biologique et organique; elle est, a priori, aussi "animale" qu'"humaine": désir ultime de l'organisme vivant, sexué, au-delà de tout instinct de survie ou de conservation, de mettre fin aux contraintes de son organisation (Nietzsche avait d'ailleurs dit, comme souvent, des choses très semblables, sur un mode plus synthétique qu'analytique: la "volonté de puissance", trans-individuelle, veut "la mort" comme elle a voulu "la vie"). Lacan, par contre, dans son souci de refonder le freudisme sur la stricte base post-structuraliste d'une analyse du sujet du langage (humain donc), récuse toute interprétation biologique de Freud: à Lacan (comme à Heidegger ou à Descartes) l'animal est radicalement étranger. (Voir éventuellement ceci.) Pour revenir de là à ta réflexion première: toute pensée tant soit peu profonde tend, par principe, à l'unité de principe, peu importe le nom qu'elle donne à son principe (Principe à majuscule, fût-elle inapparente: Dieu, Être, Bien, Amour, Volonté, Puissance, Justice, Logos, etc.; voire tout simplement Un, comme chez Plotin). Mais la seconde nécessité qu'elle trouve aussitôt à son principe, de quelque nom qu'elle l'appelle, c'est qu'il soit différenciant -- et, par la différence, à l'occasion antagoniste (cf. ici). |
| | | Le gaffeur distancié
Nombre de messages : 104 Age : 41 Date d'inscription : 27/02/2010
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Lun 26 Juin 2017, 01:13 | |
| Ce que je regrette dans la formulation de mon premier message, c'est qu'elle ait pu être comprise comme culpabilisante et moralisante.
Je reviendrai, je pense, sur le sujet de la morale, de l'éthique et de ce qu'elle peut avoir de repoussoir, en essayant, si possible de faire comprendre mon point de vue sur comment intégrer la référence à des valeurs tout en dépassant cet effet accablant, stigmatisant, inutile, contre-productif et auto annulant, ce qui suppose que je l’explicite de façon plus affinée et intelligente. |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Lun 26 Juin 2017, 11:24 | |
| - Le gaffeur distancié a écrit:
- Ce que je regrette dans la formulation de mon premier message, c'est qu'elle ait pu être comprise comme culpabilisante et moralisante.
Pour ma part, je ne l'ai pas ressentie ainsi -- et je suis pourtant plutôt hypersensible, d'ordinaire, à ce genre de chose. On n'échappe sans doute jamais complètement à la morale (l'ordre, le commandement ou l'interdiction sous toutes leurs formes et nuances, reste une des fonctions premières du langage), ni au contraste de ses effets: là où il y a "conscience" il y a "bonne conscience", de la modestie à l'obscénité du contentement de soi, et "mauvaise conscience", de l'inquiétude ou du scrupule utiles à la paralysie complète. - Pierre Desproges a écrit:
- Dieu a dit : "tu aimeras ton prochain comme toi-même", c'est vrai. Mais Dieu ou pas, j'ai horreur qu'on me tutoie, et puis je préfère moi-même, c'est pas de ma faute.
La légèreté ou la gravité des commandements d'amour en tout genre est peut-être proportionnelle à celle de leurs destinataires de fortune. Le problème, comme dans toute "morale", c'est qu'on ne sait jamais d'avance quel effet (libérateur, stimulant, accablant, destructeur) ça aura sur les autres (cf. Matthieu 23,4). A l'encontre de toute exégèse sérieuse, il me semble que j'ai toujours entendu dans le futur "tu aimeras" quelque chose qui déjouait discrètement son évidente fonction impérative (= "aime"): promesse, avertissement ou fatalité. L'amour, impérieux parce qu'inéluctable -- comme la mort, justement, selon le Cantique des cantiques. Qui se trouve assigné à "soi" se voit aussitôt mis en demeure de "se" quitter tôt ou tard -- et, au fond, ne demande pas mieux. De ce point de vue, il y a entre "amour" et "mort" une équivalence, qui hésite sans fin entre alternative et synonymie. |
| | | Le gaffeur distancié
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| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Ven 09 Fév 2018, 01:40 | |
| Une proposition de définition scientifique de l’amour pourrait être fondamentalement l’effort d’un système auto-poiétique pour contribuer à la régulation de l’homéostasie psychodynamique de l’autre système auto-poiétique ciblé par cet effort. La définition de la haine est traditionnellement un effort pour contribuer à l’entropie du système vivant qui en est la cible, avec pour objectif généralement non reconnu en tant que tel par le sujet haineux, l’entropie définitive du sujet-objet haï, à savoir sa mort. La haine et les conflits qu’elle génère ne sont, de mon point de vue, fondamentalement et en apparence paradoxalement que la conséquence de la souffrance venant de l’incapacité à voir chez le sujet ciblé par la haine, la confirmation de notre capacité à contribuer à son homéostasie. Et cette incapacité de voir devient parasitaire lorsque son support n’est pas un constat, mais une représentation désincarnée qui prétend à l’incarnation (ex le racisme ou le racialisme). La haine n’est fondamentalement jamais dirigée contre des sujets vivants, mais contre des représentations intériorisées de la catégorie dite sociale à laquelle on rattache le sujet vivant haï. Cela survient car on projette par anticipation sur le sujet visé, le fait qu’il se réduira empiriquement à cette représentation car on estime par préjugé qu’il nous sanctionnera de ne pas avoir été à la hauteur de l’exigence qu’on se fixe vis-à-vis de lui, à savoir être en mesure de contribuer à son homéostasie. Ce préjugé est lié en effet à ce qu’on appelle la mauvaise estime de soi couplé à un sentiment de culpabilité, c’est-à-dire un manque de confiance en son aptitude à contribuer à l’autorégulation homéostatique d’une personne aimée ou désignée comme devant recevoir un service par le cadre dans lequel l’interaction doit avoir lieu. La peur du re-proche est fondamentalement celle de la réactivation d’une blessure passée, d’un évènement traumatisant qui n’a pas pu être perlaboré, d’une incapacité à avoir pu garder l’être cher parti et par suite de l’impossibilité de liquider l’angoisse de séparation et le chagrin qui l’accompagne. Cela renvoie également à la négation du besoin de dépendance vis-à-vis de l’autre pour sa propre autorégulation homéostatique, en somme la négation d’une part nécessaire de contribution hétéro-régulatrice à notre homéostasie. La haine ne provoque la haine en retour que si le sujet haï se prend pour l’incarnation de la haine du sujet haineux au moment où il hait, tout simplement parce que le sujet haï n’aura pas vu qu’il était capable d’avoir une efficacité homéostatique envers le sujet dont il pense que ce dernier le hait en tant qu’incarnation, en dehors de cette représentation « sociale » et qui n’est sociale que parce qu’elle est répandue et « partagée ». Ce qui permet de sortir de l’enfermement dans le mode relationnel symbiotique avec ses gratifications potentielles mais surtout ses dangers terribles sur la santé mentale, avec un environnement synthétisé par une représentation prétendument unifiée de façon indifférenciée (la Nation, l’entreprise, l’Eglise, la Nature, la race, la famille, voire le couple etc.) à laquelle on est rattaché par un lien de nature contractuelle tacite ou explicite, c’est la capacité à conceptualiser cette figure représentationnelle figée car préétablie, comme étant une image mentale distincte intégrée à notre réalité physique et psychique c’est-à-dire à notre corps et à notre cerveau. En somme cela signifie ne pas fusionner conceptuellement, l’intégralité de sa réalité psychique et physique avec ladite représentation. La haine s’échoue lorsqu’on comprend qu’elle ne demande qu’à être médiatisée par des concepts afin que ne soit pas renvoyé au sujet haineux l’image qu’il ne peut se réduire qu’à ça. Il n’hait pas que ça et je n’hais pas que lui. C’est alors que la compulsion conduit à répéter un comportement visant à provoquer l’entropie par fermeture excessive à l’endroit du sujet visé, comme pour s’assurer dans une fuite en avant que l’on ne fait pas de mal en faisant du mal, en somme jusqu’à ce qu’on nous dise qu’on est capable de générer de l’homéostasie chez l’autre par un effort d’entropie. La compulsion est issue du fait que le sujet s’est oublié lui-même car il a trop peu confiance en sa capacité à être efficace thérapeutiquement, car on le lui a trop dénié cela de façon explicite. C’est pourquoi il pense ne pouvoir aimer sans jamais l’expliciter par la parole (cf « n’avoue jamais que tu aimes »), car il a peur de la négation totalitaire : non on ne se connaît pas, non je ne t’ai jamais aimé, tu te fais des films etc. La haine, ou l’effort de provocation de l’entropie ou de l’assujettissement chez l’autre, peut s’anéantir si on permet au sujet humain de comprendre que sa haine est dirigée contre la conditionnalité de l’existence, à la fois de son apparition et de sa perpétuation (parfois désignée sous la forme du « système », ou d’une catégorie : les Hommes, les Femmes par exemple). Le soulagement par rapport à une responsabilité qui n’est pas la nôtre ne peut venir que de la déconstruction de l’effort entropique pour y comprendre le fondement intentionnel homéostatique. Ce dont souffre le plus l’être humain et à un niveau particulièrement élevé le psychologue, c’est de la hantise d’avoir générer le suicide d’un proche et le cas échéant d’un patient. Les outils conceptuels développés au plus haut point par la psychologie sont tellement puissants pour parvenir à comprendre le fonctionnement d’un sujet, la capacité d’investigation de l’inconscient d’une personne est tellement forte que le psychologue en vient à éprouver une solitude quasi-autistique, car s’il exprime tout ce qu’il comprend on va finir par le prendre pour un fou (peur d’être accusé d’extra-lucidité, de pouvoir télépathique, de dérive psychotique etc.) La hantise du psychologue c’est d’être considéré comme un gourou avec une capacité de suggestion complète et télépathique. Il s’agit d’une crainte infondée car tout est explicable et décomposable par l’argumentation éprouvée par les faits, en somme par la démarche de l’analyse scientifique. Le développement chez l’adulte c’est la capacité d’expression explicite, et donc par le langage, de son effort et de son besoin de reconnaissance de sa capacité homéostatique. C’est ainsi qu’est confirmé la validité de son sentiment de justesse de son appréhension de la réalité extérieure. Or, il n’y a jamais de mort tant qu’elle n’est pas arrivée. Il n’y a pas de vie après la mort, mais il y en a une avant. Nous ne pouvons voir le Monde autrement que par nos yeux. Nous ne pouvons pas être à la place de l’autre et nous ne le serons jamais. Cela signifierait nous nier nous-même. Mais nous pouvons le comprendre par la médiatisation que permettent les concepts fondés sur des faits. Si Dieu n’existe pas, l’idée de Dieu existe. En revanche, si nous avons une idée de nous-même, il est certain que nous existons tant que nous existons. Et ce n’est pas parce que nous ne pouvons pas voir notre cerveau que cela accrédite l’existence de Dieu. Cela signifie que la conceptualisation ne doit pas être prise pour une conception, et par conséquent, comprendre que la conceptualisation n’est pas dépendante d’une incarnation. Pour que la compréhension de la différenciation du Monde ne soit pas génératrice d’une fragmentation de l’unité et de l’intégrité irréductible du sujet, il est indispensable que ce dernier explicite et conscientise de façon toujours plus précise les concepts qui médiatisent son rapport avec l’environnement humain ou non-humain. Car si nous sommes potentiellement en mesure de comprendre conceptuellement l’environnement cela ne signifie pas que nous sommes en mesure de le comprendre corporellement. En effet, cela conduirait à accréditer intrapsychiquement l’erreur selon laquelle nous sommes à l’origine de l’environnement alors qu’il nous préexiste, et nous conditionne et que nous sommes en interaction avec lui. Cela reviendrait à approuver l’idée de l’incarnation d’une représentation conceptuelle. En allant un peu plus loin cela en viendrait à accréditer que si nous pétons en public, cela risque de provoquer une crise diplomatique internationale, ou encore que nous pouvons légitimement croire que les baleines volantes existent tant qu’on n’aura pas prouver qu’elles n’existent pas. Il est d’ailleurs significatif que dans la langue française que le verbe péter soit familier et qu’il n’ait pas de déclinaison « sérieuse ». Il est vrai qu’observer Einstein en train de faire caca n’aurait rien appris sur la théorie de la relativité en physique théorique, vu que, ou étant donné que, chacun a ses propres besoins et doit les faire. C’est là que le concept de schème en tant que réflexe ayant une unité caractéristique reproductible, généralisatrice servant au développement par recombinaison en vue d’une adaptation à l’environnement, est remarquable particulièrement si on comprend que le transfert n’est pas ce qu’on feint de croire à savoir la substitution psychique intégrale d’une personne pour l’autre, mais la transposition d’éléments comportementaux ayant leur unité propre (des éléments transférentiels) dans un but homéostatique souvent détourné ou dérivé en effet entropique, observés chez une personne et retrouvés chez une autre. Certains ont cru s’y fier « crucifié » et ils ont eu des problèmes. C’est en ne prenant pas complétement au sérieux la folie des fous, et la normalité des êtres humains « intégrés et normaux » qu’on comprend la part de bluff de notre propre cerveau vis-à-vis de soi. La réversibilité des opérations c’est ainsi comprendre la part aussi pervertie puisse-t-elle être d’efforts homéostatiques d’un fou, ce qui permet de dire ouf. La perspective biologisante de Piaget était juste car elle nous inscrits dans la parenté avec les grands singes, et ce n’est pas aux grands singes qu’on apprend à faire la grimace.
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| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Ven 09 Fév 2018, 13:45 | |
| Comme disait Lacan: "Il n'y a pas de métalangage" !
Ce qui revient au moins à dire qu'il ne faut pas être trop dupe de l'imposture fondamentale de toute posture "intellectuelle" ou "scientifique" (ce qui inclut au moins un certain genre de "philosophie"), qui consiste à décrire un "phénomène", un "jeu", une "structure", un "fonctionnement" de l'extérieur, comme si on n'en faisait pas partie, par le tour de passe-passe de l'abstraction, de l'objectivation, de la modélisation, en un mot de la re-présentation imaginaire. Point de vue à la lettre méta-physique, c'est-à-dire à la fois impossible (il n'y a pas de méta-physique comme il n'y a pas de méta-langage, pour la bonne raison qu'on est toujours dans la physique et dans le langage quand on s'imagine "en" parler pour les décrire et les expliquer) et inévitable (on ne peut rien "comprendre" que par un tel artifice, par un jeu de miroirs qui nous donne l'illusion de "voir" d'un point de vue qui n'est précisément pas le nôtre ni celui de personne, même pas celui de "Dieu"). Si complexe que soit la construction, on y entendrait encore l'écho de la voix de Garance: "c'est tellement simple, l'amour".
Cette réserve faite qui concerne autant mes propos que les tiens, je crois avoir fini par comprendre, en partie, ce que tu écris: c'est intéressant et j'y adhère en partie, mais ça soulève un certain nombre de questions que je vais tâcher de formuler (plus tard). |
| | | Le gaffeur distancié
Nombre de messages : 104 Age : 41 Date d'inscription : 27/02/2010
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Ven 09 Fév 2018, 17:44 | |
| Salut Narkissos, merci pour ton commentaire
Le langage ne peut que tenter de synthétiser une expérience. En ce qui concerne le dernier commentaire que j'ai laissé, je suis relativement conscient de son potentiel aspect décousu pour le lecteur, mais je me dois de souligner que les abstractions auxquelles je suis arrivé sont une forme de synthèse de la compréhension de mes expériences personnelles.
Et si j'ai pu noter l'efficacité de ce principe de base selon lequel c'est surtout le fait de ne pas avoir trouvé la confirmation chez l'autre de sa propre capacité d'amour, qui conduit au préjugé agressif, particulièrement quand les cadres ou représentations "sociales" s'en mêlent, j'ai surtout pu expérimenté son aspect ponctuel en présence d'une personne médiatrice. Mais lorsque les personnes en conflit souterrain ou plus ou moins déclaré se retrouvent à nouveau seuls sans un médiateur régulateur, l'effet peut être parfois plus violent qu'avant l'intervention à but thérapeutique ou de réconciliation. |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Ven 09 Fév 2018, 19:18 | |
| Bonjour lgd,J'avais bien compris, en tout cas, que la "théorie" était la traduction d'une "expérience". Je ne suis pas sûr que ce soit le meilleur moyen de "traiter" la théorie comme l'expérience, mais personne n'y échappe. Questions promises: Deux "systèmes" peuvent-ils communiquer sans composer un tiers "système" qui n'est ni l'un, ni l'autre, ni la simple somme des deux ? C'est peut-être ce que tu appelles plus loin "hétéro-régulation", mais peut-on encore distinguer l'héréro- de l'homéo- (et Juliette ?) ? Retirer de "l'amour" son moment "fusionnel", si illusoire et dangereux soit-il, n'est-ce pas renier son essence et lui refuser d'avance toute puissance, toute chance en même temps que tout risque ? N'est-ce pas précisément ce qu'on fait quand on le réduit à l'asymétrie d'une "relation d'aide", d'une "thérapie", voire d'un "service" ( horribile dictu) qui aurait pour seule visée le bien-être ou le mieux-être de l'autre, et en préservant par là même deux "intégrités" closes de toute affection réciproque (y compris au sens pathologique du mot affection) ? Symétriquement, la "haine" est-elle seulement désir de destruction de l'autre, ou besoin (parfois impérieux) de s'en dégager ? La généralité (raciale, sociale, culturelle) s'interpose-t-elle seulement dans une relation inter-personnelle (comme on dit) ou bien en émane-t-elle aussi, comme une sorte d'extrapolation délirante mais auto-justificatrice (justement parce que c'est une généralité qu'elle rencontre) ? Ne fonctionne-t-elle pas toujours dans les deux sens, sans qu'on puisse distinguer l'action de la réaction, dire "qui a commencé" ? Même si l'autre est toujours fantasmé (dans "la haine" comme dans "l'amour"), l'est-il comme incarnation d'une généralité ou comme expression d'un désir ? "L'amour" (au sens fusionnel qu'à mon avis on aurait bien tort d'écarter) ne veut-il pas autant la perte de "l'autre" que de "soi" en tant que tels ? Ce qu'il veut s'il veut quelque chose, n'est-ce pas son "tiers système", qu'il parvienne ou non, et plus ou moins longtemps, à l'établir ? La "conceptualisation" ne reste-t-elle pas foncièrement étrangère au jeu des "âmes" et des "corps" -- pour autant qu'on ne se figure pas comprendre de quoi il s'agit quand on parle d'"âme" et de "corps", de telle sorte que quand on "conceptualise" on ne sait déjà plus de quoi on parle ? A moins peut-être qu'on conceptualise ensemble, mais c'est bien rare ("il n'y a pas de relation sexuelle", disait aussi Lacan...). Voilà pour commencer... |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Lun 26 Fév 2018, 14:24 | |
| Bonjour lgd,J'ai eu tout juste le temps d'apercevoir un post de toi ce week-end -- pas assez pour le lire attentivement et commencer à le comprendre, encore moins pour en retenir quelque chose. Je comptais y revenir aujourd'hui mais il a disparu, je suppose que tu l'as supprimé toi-même, en tout cas je n'y suis pour rien. Au plaisir de te lire -- qui n'exclut pas la difficulté, mais demande un minimum de temps ! |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Lun 26 Fév 2018, 15:50 | |
| La haine liée à l’autoconservation peut exister dans la réaction de rejet d’un sujet lorsqu’il s’estime à tort ou à raison envahi - et donc possiblement détruit - par un autre. Pourquoi une telle crainte? Elle fait suite le plus souvent à une incapacité primaire à entrer en contact avec l’autre autrement qu’en se donnant tout entier quitte à le regretter après. Mais alors, plus que de haine, on parlera d’une angoisse de se perdre dans un lien fusionnel aussi désiré que redouté. Le sujet ne manifestera pas une haine active mais plutôt un besoin de fuir ou à l’inverse une sollicitude exagérée propre à étouffer l’autre en prenant les devants auquel cas c’est celui-ci qui prendra la fuite. Dans la haine à l’inverse il est très difficile voire impossible de fuir. La haine reproche à l’autre de faire défaut alors même qu’il est reconnu comme indispensable. Je prendrai l’exemple de la jalousie pathologique. Le jaloux reproche à l’autre de rompre le contrat d’unicité du couple, d’attaquer la complétude narcissique qu’il constitue et dans laquelle chacun pouvait se mirer et s’auto-définir. La jalousie est normale mais en revanche il est pathologique de s’y accrocher une fois que la rupture est connue. Pour le jaloux devenu alors réservoir de haine, plus que d’amour, il s’agit de revendiquer la possession de l’autre. Et de fait, fantasmatiquement, il ne fait qu’un avec lui, si bien que les scènes imaginées ont nécessairement un caractère très érotique pour le jaloux qui littéralement «s’y voit» et occupe tous les rôles à la fois comme dans les fantasmes masturbatoires de l’hystérique. https://www.sfsc.fr/publi/puz3603.htm |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Lun 26 Fév 2018, 16:25 | |
| (En parodiant à peine Nietzsche): Hélas, l'homme (ou la femme) est trop profond(e) pour être fonctionnel(le) !
Une psychologie sans âme (psukhè-psyché), de l'amour sans fusion ni passion, ni souffrance ni violence, ni haine ni pulsion de mort, c'est tout ce qu'il faudrait pour que l'homme marche enfin aussi bien qu'une machine... |
| | | Le gaffeur distancié
Nombre de messages : 104 Age : 41 Date d'inscription : 27/02/2010
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Lun 05 Mar 2018, 01:46 | |
| Hello Narkissos, Je reposte le message que j’ai en effet supprimé en l’ayant légèrement modifié, puis en le complétant par une réflexion qui le prolonge.
J'ai pu pleinement exprimer l'usage d'un certain rapport de forces et d'une certaine haine argumentaire contre la focalisation sur le rapport de forces dans le forum lointainement cousin tjquestions en croisant le fer avec bérénice.
Je crois que l’on peut être amené à souffrir inutilement en pensant que le recours au rapport de forces établit une équivalence avec le système idéologique erroné de l’extrême droite. Le moins qu'on puisse dire c'est tu es quand même très loin de la position de la personne que j'ai évoquée, bien qu'elle-même ne soit pas le diable incarné pour autant, car tant qu'il y a de la vie il y a de l'espoir. C'est une question de degrés, voire de gré ou de force.
Je pense en effet que la haine est indispensable lorsque sa propre capacité auto-homéostatique semble être saturée par une intrusion intellectuelle, affective, argumentaire, "morale", physique etc. et que sur le point ultime et intense où cette intrusion introjectée nous affecte plus entropiquement que de raison, il est légitime de haïr dans une sorte de fusion, l'auteur du discours et son propos.
D’ailleurs, cette haine est davantage le signe que la personne visée nous a interpellé et qu’on lui accorde de la considération, et c’est précisément cette considération que l’on trouve incompatible avec le rejet qu’elle nous a inspirée sur un point donné. Je pense que c’est fondamentalement parce que nous n’avons pas pu faire entendre ou comprendre notre message comme nous le souhaitions avec l’apport homéostasiant pour l’autre et pour nous que cela pourrait générer si cela avait été le cas, qui fait que l’on hait.
C’est ainsi que, cette haine gagne, je le pense, à s'inscrire dans une psychodynamique qui réponde à ce principe fondamental dont je suis intimement persuadé de la réalité opératoire, à savoir que ce qui permet le plus grand épanouissement de l'être humain et qui corrélativement le fait le plus souffrir lorsqu'il a le sentiment que ce n'est pas le cas, c'est d'avoir pu éprouver la conviction qu'il apporte plus au Monde qu'il n'en retire, qu'il apporte une création de richesses à l'environnement. Car je crois que rien n'est plus source de souffrances que de penser qu'on se réduit à un déchet, à une erreur de la Nature.
En ce qui concerne la symbiose, pour être plus précis j’indiquais que c’était l'enfermement dans la symbiose qui aboutissait à une confusion entre violation et contribution homéostatique, ce qui e réalité rejoint ton point de vue en grande partie je pense. La symbiose est indispensable à l'amour, mais je pense qu'une certaine forme de maturation implique la capacité à user de son droit de retrait tout en perlaborant l'angoisse de séparation qui en est concomitante.
Ce que tu appelles tiers système me paraît également indispensable à un support représentationnel de la relation sur lequel on peut notamment adosser cette relation lorsqu'on se dégage de la symbiose, ou de la destructivité (cf "un cordon triple ne se rompt pas vite").
D'ailleurs même d'un point de vue utilitaire faire échouer une haine sur une représentation est ponctuellement utile car cela permet de s'en délester (notion d'exutoire).
Mais pour être simplement "hors du commun" il me paraît utile de distinguer représentation et ce que cela est censé désigner. Cela me paraît fondamental pour ne pas oublier les représentations qui peuvent être partagées, sans s'y réduire et s'y oublier. Et d'ailleurs, l'aspect idiographique de l'introspection quand elle est dans la visée de l'extension de sa compréhension du Monde, nous renvoie d'autant plus à l'aspect nomothétique de l'expérience humaine. Ou comment le recueillement dans la solitude permet de se connecter à la commune humanité, et même à la commune existence des "âmes vivantes", qui n'est pas simplement une fausse commune. Car ce qui nous relie à tous les êtres vivants quand nous le sommes aussi nous-mêmes, c’est justement la vie, cette force qui nous pousse à l’homéostasie, et à lier intimement cette homéostasie à la contribution à l’homéostasie des autres et de l’environnement.
La haine, le désir d’entropie à l’encontre d’une entité survient lorsque la personne visée se présente comme se fusionnant avec la représentation de l’image identitaire figée qui est censée désigner l’idéal-type, le portrait-robot, des individus qu’on rattache à cette catégorie. Et je crois que cet affichage fusionnel provient d’un manque de confiance de la personne visée par cette haine à agir en dehors des repères comportementaux donnés par cette figure identitaire souvent péjorative ou négative. Il vaut mieux se réfugier derrière une étiquette sociale plutôt que de se hasarder à une « individuation », une autonomisation qui est en effet très coûteuse et risquée, et pourtant extraordinairement riche et bénéfique.
En ce qui me concerne, j’ai toujours été frappé de voir la revendication au non-jugement dans tous les milieux que j’ai fréquentés (TJ y compris des « anciens » qui participaient à des « comités judiciaires », milieu professionnel, familial etc.), et simultanément des recours à des attitudes qui correspondaient en tous points à ce que les personnes qui soutenaient la condamnation du reproche, auraient elles-mêmes qualifier de jugements si elles en étaient les victimes.
C’est pourquoi j’avais beaucoup de haine à l’égard de cette revendication au non-jugement, à la dénonciation du reproche, tant elle me semblait une solution de facilité pour ne pas à avoir à réellement la mettre en œuvre. Et pourtant, il y avait là quelque chose qui m’interpellait, et ce n’est que récemment que j’ai compris la vérité fondamentale qu’il y a dans cette rhétorique du refus du jugement.
Mais pour que j’en fusse convaincu, j’ai dû aller jusqu’au bout de ce que je pouvais imaginer et comprendre. Et je ne pouvais pas me satisfaire du simple recours au rapport de force pour cela.
Il fallait que je comprenne en quoi on pouvait rattacher les partisans de l’extrême droite à l’Humanité, mais non pas dans le sens trop facile à mon sens selon lequel nous sommes tous des merdes et c’est le plus « fort » qui « gagne » (on se demande d’ailleurs quel est ce gain) et ainsi condamner tout à la vanité, et donc à une souffrance inextinguible, et qui ne permet pas de résoudre grand-chose.
Non je voulais m’attacher à comprendre quels éléments pouvaient être potentiellement éminemment riches même « au cœur des ténèbres ». Cela supposait donc voir sur quels éléments on peut rattacher même Adolf Hitler ou Ivan le Terrible à l’Humanité. Et c’est en n’excluant personne de l’échelle de l’Humanité qu’on ensuite comprendre que la capacité homéostatique est une question de degré ou de gré ou de force, soumise à conditions.
Car ce dont souffre l’humain c’est de la difficulté à ne pas incarner la conditionnalité de l’existence et de sa perpétuation, en indiquant que c’est la faute à une catégorie de personnes si nous ne sommes pas en sécurité.
Pour ce qui est de la revendication au non-jugement et au refus du reproche, je me suis aperçu que c’est lorsqu’on faisait accéder au stade de la conscience de la personne qui défendait ce propos, le fait qu’elle recourrait elle-même à ce qu’elle qualifierait de jugement si c’était destiné à son endroit, justement parce que la personne visée par ce jugement le percevait réellement en tant que tel, que ce qu’on appelle à mon avis en grande partie à tort le déni intervient. Car il me semble que ce n’est pas tant un déni, qu’un effroi de la prise de conscience de la potentielle destructivité de son propos dans son effectivité sur les sujets qui sont désignés comme étant l’incarnation de la re-présentation vouée aux gémonies.
La haine ne s’échoue que contre des représentations, mais elle devient meurtrière et effective dans la violence physique, la torture, le massacre, le génocide quand on fusionne la personne avec sa représentation, et si cette dernière ne pense avoir d’autre choix que cette fusion.
Je me souviens de cette rencontre réalisée il y a 16 ans alors que je « prêchais » avec un compagnon de route et que nous faisions du témoignage dans la rue un soir de novembre. Nous avions rencontré dans la rue une « nouvelle visite » de ce compagnon, et nous avons discuté avec lui. C’était un ancien de la guerre d’Algérie. Et au bout de quelques minutes son cœur s’est ouvert en quelque sorte et il nous a avoué un meurtre qu’il avait commis alors qu’il était le chef de son « équipe » : il nous indiquait que le FLN utilisait parfois des enfants pour lancer des grenades contre les soldats français, et un jour un gamin de cinq ans avait surgi, et ne savant pas s’il avait une grenade, il l’a abattu. Le compagnon exprima alors son sentiment d’horreur, et aussitôt cet homme manifestement brisé, s’exclama « Mais je n’avais pas le choix !!! ». Je me souviens encore de cette expression de désarroi et de souffrance qui avait hanté cet homme durant plus de 40 ans, car il s’était avéré que l’enfant n’avait pas de grenade avec lui.
En ce qui me concerne, quand j’étais TJ on me considérait comme trop spirituel ; quand j’en suis parti on m’a traité de fou, d’apostat ; après, on m’a notamment reproché d’être un jeune arrogant et donneur de leçon. Pourtant, je savais que, que ce soit moi ou mon interlocuteur, nous valions bien mieux que se réduire à ces anathèmes. https://www.youtube.com/watch?v=TDwB433i1DI Car quand on a été qualifié de fou, et finalement de tout et son contraire, et qu’on a compris que c’est l’amour qui pouvait en triompher alors on n’a plus besoin d’être exclusivement dépendant de la confirmation externe pour avoir compris. L’acte de connaissance est génétiquement lié avec la capacité à supporter l’accusation d’irréalité, non pas pour ensuite dire « viens, suis-moi » (bien que le Jésus historique devait avoir une envergure exceptionnelle pour être parvenu à incarner les attentes messianiques de nombreuses personnes de l’époque, ce qui l’a perdu à mon sens étant le fait qu’il n’avait pas rencontré d’équivalent pour le sauver lui-même de la projection d’omnipotence qu’on lui a fait porté et qu’il a supporté lui aussi à un point inimaginable, les autres personnes susceptibles d’équivalence n’ayant pas pu lui faire entendre raison en raison de cet enchaînement inarrêtable), mais plutôt, une invitation bien plus ouverte telle que « Et que celui qui a soif vienne; que celui qui veut, prenne de l'eau de la vie, gratuitement. » |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Lun 05 Mar 2018, 13:06 | |
| Merci lgd.Dans Cet obscur objet du désir (adaptation de La femme et le pantin de Pierre Louÿs), Buñuel (avec Jean-Claude Carrière) a eu l'idée géniale de faire jouer le rôle principal par deux actrices très différentes (Carole Bouquet et Angela Molina), indépendamment du caractère des scènes et de celui, changeant, du personnage (séduction / frustration, timidité / provocation, etc.). Non seulement c'est très efficace -- emporté par l'unité du nom (Conchita) et la continuité du récit en flashback par le protagoniste-narrateur masculin (Fernando Rey), le spectateur qui voit le film pour la première fois ne s'aperçoit pas forcément tout de suite de la substitution des visages et des corps, et même quand il s'en aperçoit il l'oublie -- mais c'est une illustration remarquable (et férocement humoristique) de la "danse des signifiants" autour d'une "sexualité" qui ne constitue jamais un signifié central, originaire ou ultime: même et autre, amour et haine, désir et jalousie, attraction et répulsion, plaisir et douleur, sublime et souillure, vie et mort, sujet et objet, soumission et domination, tout cela ne joue qu'à se déplacer constamment, au point de faire tout à fait oublier sa "fonction" et son "enjeu" biologiques, la reproduction de l'espèce (qui n'en reste pas moins dans un rapport constant aux "signifiants" de l'amour, si contradictoire ou pervers qu'il paraisse). Et bien sûr, si "spécifique" que soit la sexualité "humaine" avec son jeu formel de signifiants, elle prolonge aussi en cela la sexualité animale, ses jeux de rivalité et de parade, de poursuite et de fuite, de ruse et de feinte, de refus et de consentement, où la mimesis répétitive et créative opère dans tous les sens à la fois. J'écris ça parce que tu m'y as fait penser, mais ce n'est pas une réponse; d'ailleurs je n'ai pas grand-chose à répondre, parce que je me trouve plutôt d'accord avec ce que tu écris à mesure que je le relis et le comprends, à chaque lecture un peu différemment. Que le jugement se mette lui-même en abyme et en miroir, que le non-jugement passe par un jugement du jugement au prix d'un déplacement potentiellement infini de l'instance judiciaire, de la loi, du crime et du critère -- jugement du non-jugement = jugement du jugement du jugement, qui peut être jugé ou déjugé à son tour, et ainsi de suite -- ça me paraît une évidence, sur et dans laquelle nous retombons à peu près chaque fois que nous évoquons ce thème. Sur l'idée d'"enrichir le monde" qui m'avait fait réagir précédemment, j'ajouterais qu'elle se met d'elle-même en perspective dans la mesure où nous n'avons jamais de "monde" que celui que nous créons, à partir d'un "point de vue", "physique" d'abord mais aussitôt "subjectif" et "intersubjectif" -- mobile donc, mais sur une trajectoire limitée qui dessine une figure tantôt ouverte et tantôt fermée, avec des moments d'ouverture et de (re-)fermeture. Autant la prétention d'enrichir le monde peut paraître ridicule d'un point de vue "objectif" (qui n'est à la lettre celui de personne, auquel pourtant nous accédons comme par extrapolation théorique ou contemplative, avec toute l'im-posture que suppose ce déplacement), autant elle se résorbe à revenir au "monde" de ses "sujets", de leur subjectivité et de leur intersubjectivité -- non sans l'affecter de cet aller-retour. Nietzsche me semble avoir à peu près tout dit là-dessus: et sur l'absurdité d'un jugement "objectif", désintéressé ou détaché d'une perspective, comme le serait celui d'un certain "Dieu" ou d'une certaine "Raison", et sur la nécessité d'un jugement "subjectif" qui crée son monde et ses valeurs, son jugement, ses lois et ses critères, et à partir de là s'engage forcément dans un rapport (de force mais aussi d'intelligence et de sentiment, de concept et d'affect) avec d'autres points de vue, d'autres jugements, d'autres lois, d'autres mondes. Ce qui est peut-être le plus insupportable dans le jugement (y compris le jugement du jugement, etc.), c'est le clin d'œil entendu à la galerie (mettre le jury ou les rieurs de son côté) qui feint de la constituer en instance ultime, en l'identifiant à une loi ou à une raison transcendante, par le double bind d'un "je vous fais juges" ou "jugez-en vous-mêmes". Il y va toujours d'un tel geste dans l'idée d'"avoir raison", on n'a même pas besoin de "public" effectif pour ça (lever les yeux au ciel, un sourire entendu même dans un tête-à-tête, ça produit exactement le même effet). Soutenir sa "raison" comme telle, comme la sienne seulement, en l'affrontant directement à celle de l'autre, en l'y rendant par là-même vulnérable, sans se réfugier dans l'artifice d'une telle référence qui pourrait trancher d'ailleurs et de plus haut jusque dans la tête du partenaire-adversaire, c'est bien plus difficile et c'est pourtant ce que demanderait le moindre commencement de dialogue. Quant à la question de la valorisation ou de la dévalorisation de soi, elle est également corollaire de la présence ou de l'absence de référence ou d'instance ultime. LE "monde", s'il existe rien de tel, ne connaît à mon sens ni gain ni perte, ni réussite ni échec, ni vérité ni erreur, ni chef-d'œuvre ni déchet. C'est toujours dans un "monde" particulier, déterminé par un jugement de valeur, que ce soit celui de la majorité ou d'un individu, que de tels termes prennent un sens. Relatif et provisoire. |
| | | Le gaffeur distancié
Nombre de messages : 104 Age : 41 Date d'inscription : 27/02/2010
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Lun 05 Mar 2018, 22:35 | |
| Merci à toi Narkissos
Je tenais à souligner qu’en ce qui concerne mon point de vue j’accorde désormais pleinement du crédit au fait que le reproche et le jugement définitifs et bloquants n’ont pas de valeur, car ils excluent de l’Humanité des humains, ils excluent de la vie des êtres vivants, en dépit des horreurs épouvantables que des humains ont pu commettre.
Car pour ce qui est par exemple des TJ qui m’ont assez lâchement laissé tomber, s’il est bien clair que j’ai éprouvé une haine et un désir de vengeance profonds à leur encontre, j’ai fini par perlaboré et transformé ces sentiments entropiques, pour accéder à la compréhension que leur « manque d’amour » à ce moment-là reposait davantage sur leur manque de confiance en eux à pouvoir aimer de façon constructive en dehors du protocole comportemental prescrit de façon institutionnelle. Et que la menace d’excommunication ou de réprimandes (qui ne seraient toujours pas un jugement puisque seul Dieu serait juge…) reposait sur une représentation réductrice de l’autre dont les différentes personnes impliquées avaient mutuellement la trouille de sortir.
C’est donc l’incapacité, la faiblesse de la volonté par défaut d’un support permettant de la surmonter, qui a conduit à ce qu’ils fassent échouer leur amour contre une situation qui a submergé leur capacité.
Mais je ne leur en veux donc plus, et j’ai enfin pu renouer avec mes sentiments profonds et plus forts d’amour pour eux, même si les conditions dans lesquelles nous sommes situés empêchent cette expression libérée.
C’est donc une psychodynamique avec la conviction et la détermination à faire échouer la haine sur une représentation liée à un défaut d’ajustement des capacités homéostasiantes des personnes impliquées y compris soi-même, qui permet de parvenir à la jouissance et la sérénité d’un sentiment tendanciellement dominant d’amour.
|
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Mar 06 Mar 2018, 00:08 | |
| Chacun a son fonctionnement, sans doute.
En ce qui concerne ma sortie des TdJ, je ne crois pas exagérer en disant que je n'en ai jamais voulu à personne, bien que j'en aie souffert: j'avais trop intégré et anticipé la "logique" de ce "mécanisme" pour ne pas le comprendre, je n'ai eu que de "bonnes surprises", de signes amicaux que je n'attendais pas, le reste étant attendu. Des gens qui ont compté pour moi, je n'ai gardé, au-delà de la peine de la séparation, que de bons souvenirs.
Par contre, des "haines" personnelles, qui ne se rapportent pas à une généralité ni à un jugement "moral" (on peut appeler ça antipathie, animosité, répulsion, rejet, allergie, ça n'y change pas grand-chose), j'en ai connu quelques-unes, notamment dans ma propre famille, et je n'ai jamais eu le sentiment de pouvoir y faire grand-chose, même quand je croyais le devoir: elles sont intimement liées à une relation qui les a construites, il ne m'en reste rien quand la relation cesse, je les oublie et je n'y pense pas; mais elles reviennent, intactes, si par malheur j'ai de nouveau affaire aux personnes concernées, si du moins ni elles ni moi n'avons vraiment changé, ce qui est rarement le cas. Ce ne sont pas les souvenirs qui les ravivent, mais bien la présence et la proximité physiques, effectives (qui rappellent éventuellement les souvenirs de surcroît).
Par rapport à ça les "commandements d'amour" me paraissent absolument inefficaces, nuisibles même s'ils se traduisent par une obligation de prolonger des relations impossibles, voire de dissimuler ses sentiments (qui s'expriment forcément d'une manière ou d'une autre). Peut-être utiles quand même s'ils nous font prendre conscience du "problème" ou du "mal", sans prétention de le "résoudre" ou de le "guérir", car la seule "solution" ou le seul "remède" à mon sens consiste à s'en aller.
P.S.: ce que j'appelle "haine" est une réaction, superficielle ou profonde ("épidermique" ou "viscérale"), mais toujours assez "naturelle" (quoique "pathologique") à une relation personnelle qui tourne mal; elle n'a pas a priori d'autre "raison" que cette relation même mais elle peut toujours s'en inventer après coup (ce qu'en anglais on appelle "rationalisation") pour se justifier par un "jugement" de l'autre ou se déguiser en un tel jugement. Le mouvement de ce qu'on appelle "haines collectives" me paraît rigoureusement inverse, il commence dans l'artifice rationnel, logique ou rhétorique du discours pour éventuellement rencontrer des "personnes" (et dans ce cas de façon tout à fait superficielle: couleur de peau, langue ou accent, vêtement, coutume, marqueurs de classe, etc.). Ce qui n'exclut pas une synergie des deux mouvements, la "haine collective" rencontrant des "haines" particulières et leur offrant une aubaine inespérée de se justifier ou de se déguiser. |
| | | Le gaffeur distancié
Nombre de messages : 104 Age : 41 Date d'inscription : 27/02/2010
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Mar 06 Mar 2018, 22:34 | |
| Au cas où il serait nécessaire de le préciser (mais je n’en suis pas sûr), je ne parlais pas de commandements d’amour, expression qui me semble être une antinomie.
Il est bien évident qu’il y a des situations où sa capacité à aimer est saturée et submergée et qu’en dépit de toute la bonne volonté du monde, on ne pourra pas parvenir à maintenir une relation dans laquelle on ne pourra plus sublimer la haine d’une personne (cf le sage ayant vu le malheur s’est caché).
Ce que je souhaitais souligner, et je pense en fait qu’il y a un réel point de jonction entre ce que tu écris et ce que j’écris, c’est que ces haines peuvent se déconstruire en y décelant au plus profond les origines dans des souffrances adossées à des représentations erronées, artificielles. Cela ne pourra sans doute pas transformer l’attitude de la personne à la mesure de ce que l’on aurait voulu, mais au moins on aura pu déconstruire des représentations qui se prennent pour être la réalité exclusive de ce qu’elles prétendent désigner.
Et j’ajouterai que la haine qui s’échoue toujours sur une représentation est liée à un déficit de capacité d’autohoméostasie liée au fait que l’on a pas eu le secours d’une contribution décisive et nécessaire à sa propre homéostasie de la part d’un autre dont on avait besoin.
|
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Mar 06 Mar 2018, 23:49 | |
| Des "commandements d'amour", il est vrai que tu n'en parlais pas, mais il en avait été question plus haut, et d'une certaine façon il me semble qu'ils surplombent toute notre civilisation, notre façon de penser et surtout de parler (ou d'écrire). A tort ou à raison, je perçois aussi dans ton discours la détermination d'un devoir d'aimer qui me paraît d'autant plus problématique qu'au niveau du discours il n'a rien d'extraordinaire, il va quasiment de soi. Pourtant -- Dieu merci ? -- la plupart de nos relations quotidiennes sont quasiment dépourvues d'affectivité, les objets de nos "amours" et de nos "haines" sont en fait extrêmement rares, "privilégiés" dans un sens comme dans l'autre. Sauf circonstances exceptionnelles, on n'"aime" pas son charcutier et on ne "hait" même pas son percepteur.
(Ça me rappelle une prof de ma fille qui, voulant régler un différend dans sa classe, avait déclaré sur le ton de la plaisanterie "Je veux que tout le monde s'aime". J'avais rétorqué spontanément, sur le même ton, "Je n'en demanderais pas tant" et ça l'a en fait beaucoup choquée. C'est une évidence mais il ne faut pas le dire.)
Il est certain que nous sommes tentés d'attribuer arbitrairement un sens à des attitudes qui nous agacent, ne serait-ce que pour nous justifier de cet agacement. Il est sans doute honnête ou juste (fair) de renoncer à ce début de "rationalisation", mais cela fait-il pour autant disparaître l'agacement ? |
| | | Le gaffeur distancié
Nombre de messages : 104 Age : 41 Date d'inscription : 27/02/2010
| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort Mer 07 Mar 2018, 00:15 | |
| - Narkissos a écrit:
- A tort ou à raison, je perçois aussi dans ton discours la détermination d'un devoir d'aimer qui me paraît d'autant plus problématique qu'au niveau du discours il n'a rien d'extraordinaire, il va quasiment de soi.
Je suis navré de cette conclusion, mais pour autant je ne cherche pas à la changer, car je pense sincèrement avoir écrit tout ce qui me semblait important d'écrire à ce sujet. |
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| Sujet: Re: Au sujet de l'amour et de la mort | |
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| | | | Au sujet de l'amour et de la mort | |
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