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 L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores

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MessageSujet: Re: L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores    L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores  - Page 2 Icon_minitimeVen 21 Fév 2020, 11:47

Citation :
Cercle vicieux pour le lecteur de la Bible, surtout celui qui NE lit QUE la Bible, et de surcroît dans le canon protestant, sans les textes "alexandrins" (comme la Sagesse): pour apprécier le texte et sa différence, il faudrait pouvoir le comprendre, or pour le comprendre il faut des "clés" qui ne sont justement pas dans le "Livre" (p. ex. chez Platon, Philon, Aristée, la Sagesse ou les Maccabées). Résultat: on le lit tant bien que mal comme une épître paulinienne, puisque dans le détail ça y ressemble souvent, on peut en citer des "versets" et les combiner avec d'autres textes, mais on ne comprend rien à sa logique d'ensemble.

Il reste à examiner deux importants livres sapientiaux. Le premier, le livre de la Sagesse, est un écrit purement hellénique tant par la langue que par le milieu dans lequel il a été composé ; son attribution par les LXX à Salomon est une simple fiction. L'ouvrage comprend trois parties : 1-5, composée sur le mode de la poésie hébraïque, traite de la Sagesse, en elle-même d'abord (assimilée à l'Esprit Saint ou à l'Esprit du Seigneur) et de son action dans l'homme (dont elle est l'esprit qui l'anime) ; 6-9 s'adresse aux rois et met en scène Salomon, apôtre et exemple de la Sagesse ; 10-19 montre la Sagesse en action dans l'histoire du peuple juif, exactement comme la Foi au chapitre 10 de l'Épître aux Hébreux. Le livre apparaît comme l'œuvre d'un Juif alexandrin dont la philosophie religieuse veut se concilier avec les systèmes en vogue dans la capitale de l'hellénisme et adapter la religion d'Israël à la philosophie grecque, tout en réfutant les cultes païens ; il est un des mieux composés et des mieux écrits de la Bible grecque. https://www.persee.fr/doc/rhr_0035-1423_1959_num_156_2_8971

Narkissos, l'expression : "elle pénètre jusqu'à la division de l'âme et de l'esprit", m'intrigue quant au sens de l'"âme". Quand tu affirmes que  "l'"âme" est la correspondante directe de la réalité -- ou plutôt de l'idéalité dans un sens quasi ou simili-platonicien", que veux-tu dire ?

(En philosophie, le terme idéalisme définit toutes les théories philosophiques qui considèrent soit que la réalité est constituée par l'Idée ou les Idées (Platon, Hegel) ET l'idéalisme consiste encore à supposer la dérivation des êtres et de la réalité à partir d'un principe spirituel  : https://fr.wikipedia.org/wiki/Id%C3%A9alisme_(philosophie)
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MessageSujet: Re: L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores    L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores  - Page 2 Icon_minitimeVen 21 Fév 2020, 12:46

Il faudrait relire tranquillement le fil thématique sur l'"âme" dont tu as extrait ma phrase.

Pour en rester ici à l'épître aux Hébreux: puisque 4,12 discerne "âme" et "esprit" (mais pas seulement ça ! lire la suite), le lecteur-de-la-Bible qui fonctionne à l'intertextualité exclusivement "biblique" a tendance à y projeter l'opposition, ou du moins la distinction hiérarchisante, de 1 Corinthiens (chap. 2 et 15) et des textes qui en dépendent: la psukhè (anima, âme) et le psukhikos ("animal"), comme la "chair" (sarx) à laquelle ils sont liés, sont inférieurs au pneuma ("esprit") et au pneumatikos ("spirituel"). Je dis que cette opposition ou cette hiérarchie (d'influence plutôt stoïcienne) ne fonctionnent pas dans l'épître aux Hébreux (plutôt platonicienne), où la psukhè est au contraire capable de l'"éternel-céleste-spirituel" (cf. 6,19; 10,38s).

Certes, l'épître aux Hébreux ne parle pas d'"idée", mais toute sa représentation de l'éternel-céleste-spirituel est sous-tendue par l'"idéalité" platonicienne. Or chaque fois qu'on parle de "réalités" éternelles, célestes, spirituelles (ce qui est pratiquement inévitable en traduction), on commet un contresens au moins étymologique, au pire sémantique, dans la mesure où notre concept de "réalité" dérive de la "chose", res en latin, que la modernité n'entend quasiment plus qu'au sens de "chose matérielle". Mon incidente ne faisait qu'exprimer ce scrupule: parlons de "réalités" célestes, spirituelles, éternelles, mais ne perdons pas de vue que c'est d'"idéalité" (au sens platonicien et dérivé) qu'il est essentiellement question.
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MessageSujet: Re: L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores    L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores  - Page 2 Icon_minitimeVen 21 Fév 2020, 13:08

Merci Narkissos pour ces précisions. Si j'ai bien compris, l'"âme" est l’essence même des choses, sous-entendu céleste, c'est cette part céleste (l'identité réelle et profonde de l'être) de l'individu (un côté johannique ?).

"A ce sujet, nous avons beaucoup à dire, et des choses difficiles à expliquer, d'autant que vous êtes devenus lents à comprendre. Alors que vous devriez, depuis le temps, être des maîtres, vous avez de nouveau besoin qu'on vous enseigne les premiers éléments des paroles de Dieu : vous en êtes venus à avoir besoin, non pas de nourriture solide, mais de lait. Or quiconque en est au lait n'a pas l'expérience de la parole de justice : c'est un tout-petit. Mais la nourriture solide est pour les adultes, pour ceux qui, par l'usage, ont le sens exercé au discernement du bien et du mal. Aussi, laissant le commencement de la parole du Christ, tendons vers l'accomplissement, sans poser de nouveau les fondations : changement radical et abandon des œuvres mortes, foi en Dieu" (5,11-14 et 6,1)

L’auteur semble faire la promotion de la connaissance, de la formation et des progrès dans ces domaines. On retrouve dans ce texte le terme "maîtres", qui renvoi à la relation maître-disciple, les destinataires sont restés des débutants, alors qu'ils devraient des "maîtres". On retrouve la métaphore de la nourriture, , l’opposition entre  le lait pour les bébés et la nourriture solide pour les adultes. Le lait correspond à l'enseignement élémentaire et la nourriture solide au fait d'être capable de développer le"sens exercé au discernement du bien et du mal ", donc tendre vers "l'accomplissement".  
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MessageSujet: Re: L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores    L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores  - Page 2 Icon_minitimeVen 21 Fév 2020, 13:45

free a écrit:
Si j'ai bien compris, l'"âme" est l’essence même des choses, sous-entendu céleste, c'est cette part céleste (l'identité réelle et profonde de l'être) de l'individu (un côté johannique ?).

Je n'ai pas dit ça, et ce n'est au moins pas si clair que ça: pour ma part je n'ai parlé (en tout cas récemment, et dans la phrase que tu as extraite d'une vieille discussion) de la psukhè que comme "correspondante" et "capable" du "spirituel-céleste-éternel" (entendu précisément comme "idéalité"; chez Platon c'est la part "supérieure" de l'"âme", le noûs, qui est accessible aux "idées").

Le johannisme présente certainement beaucoup d'analogies générales, mais pas tellement sur la fonction de l'"âme": la psukhè c'est ce qu'il faut "déposer" pour la "reprendre" ou la "recevoir à nouveau".

En 5,11--6,1, il faut surtout noter la correspondance entre l'"adulte" (teleios) et l'"accomplissement" (teleiotès), qui est aussi la "perfection" qu'on atteint par la mort (y compris pour "Jésus"), et (d'après la terminologie de la Septante) la consécration du grand prêtre "parfait" -- en traduction française on en perd toujours un peu en route (avec "maturité" ce ne serait pas mieux).

Je reviens un instant sur le fonctionnement de l'"allégorie" qui est, comme la "dialectique" platonicienne, une dynamique du "dépassement" conceptuel (ce que tu appelles "progrès"), car c'est là, à mon avis, que la lecture ordinaire de l'épître aux Hébreux commet le pire contresens. Si on la lit comme on lit les épîtres de Paul ou l'Apocalypse par exemple, on ne peut pas éviter d'imaginer des tas de "choses", de "personnages" et d'"événements" au ciel (non seulement "Dieu" et des "anges", un "Fils", un "Adam", un "Melchisédek", un "prêtre", un "temple", du "sang", une "ville", un "trône", et j'en passe). D'où l'importance que le "ciel" même où l'allégorie a inscrit tellement de "choses", de "types" ou de "paradigmes", soit lui-même promis à la disparition. L'"accomplissement" est au-delà des noms et des images, il est proprement ineffable et non représentable. Même "Dieu", à la limite, est un nom de trop -- l'épître aux Hébreux contient aussi les énoncés les plus forts sur une certaine "mort de Dieu", dans la rhétorique du "testament". Il y a un pont évident entre ce texte (mais aussi, tout autrement, le johannisme) et la "théologie négative" à venir, depuis le pseudo-Denys qui s'y référera explicitement (c'est précisément le rôle du grand-prêtre que de conduire, pédagogiquement, mystagogiquement, par le travail de la négation, vers une connaissance au-delà de toute connaissance).
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MessageSujet: Re: L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores    L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores  - Page 2 Icon_minitimeVen 21 Fév 2020, 15:32

Citation :
Je reviens un instant sur le fonctionnement de l'"allégorie" qui est, comme la "dialectique" platonicienne, une dynamique du "dépassement" conceptuel (ce que tu appelles "progrès"), car c'est là, à mon avis, que la lecture ordinaire de l'épître aux Hébreux commet le pire contresens. Si on la lit comme on lit les épîtres de Paul ou l'Apocalypse par exemple, on ne peut pas éviter d'imaginer des tas de "choses", de "personnages" et d'"événements" au ciel (non seulement "Dieu" et des "anges", un "Fils", un "Adam", un "Melchisédek", un "prêtre", un "temple", du "sang", une "ville", un "trône", et j'en passe). D'où l'importance que le "ciel" même où l'allégorie a inscrit tellement de "choses", de "types" ou de "paradigmes", soit lui-même promis à la disparition. L'"accomplissement" est au-delà des noms et des images, il est proprement ineffable et non représentable. Même "Dieu", à la limite, est un nom de trop -- l'épître aux Hébreux contient aussi les énoncés les plus forts sur une certaine "mort de Dieu", dans la rhétorique du "testament". Il y a un pont évident entre ce texte (mais aussi, tout autrement, le johannisme) et la "théologie négative" à venir, depuis le pseudo-Denys qui s'y référera explicitement (c'est précisément le rôle du grand-prêtre que de conduire, pédagogiquement, mystagogiquement, par le travail de la négation, vers une connaissance au-delà de toute connaissance).


Daniélou prend appui sur He 9,12-26 et 10,14 : prise dans son ensemble, « l’Incarnation du Christ signifie donc que quelque chose commence qui prend possession de tout l’avenir » (189). Au-delà de l’union hypostatique, « il n’y a rien » comme action divine ni comme réponse humaine : par elle, l’humanité est menée à son terme et pose l’action sacerdotale parfaite. Le telos des actions divines est identique à la teleiôsis de la créature. « En ce sens … le Christ constitue “les prémices” de l’humanité divinisée » (190-191). L’Incarnation a donc aussi un caractère eschatologique. « L’histoire, par là, garde à jamais sa consistance dans la réalité dans laquelle elle a réellement atteint sa fin » (193).
5C’est pourquoi, si « l’union hypostatique nous est apparue comme le terme (telos) absolu de l’histoire », « elle n’en marque pas la fin, le peras » (193). Penser l’accomplissement à partir de la double intégrité des natures et l’unité de la personne de Chalcédoine, permet de valoriser l’attente historique de la Parousie. De l’accomplissement à la consommation, « le retentissement de l’ œuvre accomplie par le Christ dans l’humanité tout entière » (193) ne peut se faire par une autre loi historique que celle qui a présidé à l’incarnation : par la synergie imprévisible de la liberté divine et de la liberté humaine. https://www.cairn.info/revue-nouvelle-revue-theologique-2006-2-page-240.htm

J'avoue que je n'ai pas compris cette démonstration. Embarassed Embarassed Embarassed
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MessageSujet: Re: L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores    L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores  - Page 2 Icon_minitimeVen 21 Fév 2020, 16:55

Il ne faut pas confondre théologie systématique ou apologétique (ce dont s'occupait surtout Daniélou -- peut-être pas jusqu'à son dernier souffle, encore que...) et exégèse (de l'épître aux Hébreux en l'occurrence, qui n'a jamais été son rayon). Son interlocuteur principal, ce n'est pas le texte "biblique" en général et encore moins l'épître aux Hébreux en particulier, mais la "dialectique matérialiste" du marxisme alors dominant, héritier d'une autre dialectique et d'un autre idéalisme, ceux de Hegel qui ne sont plus ceux de Platon. La différence majeure entre le platonisme ancien et les dialectiques hegelienne et marxiste, c'est précisément le rôle de "l'histoire" -- contingence accessoire pour la pensée ancienne (les "ombres" dont il faut précisément se dégager pour accéder aux "idées" éternelles dans le platonisme), horizon indépassable pour les systèmes modernes, si différents qu'ils soient par ailleurs (car Marx veut garder la dialectique de Hegel en rejetant son idéalisme). A ce compte il y a bien plus de "points de contact" entre le marxisme et une eschatologie juive ou chrétienne NON "platonisée", celle de Matthieu ou de l'Apocalypse, ou même du "premier Paul", qu'avec les deutéro-pauliniennes, le johannisme ou l'épître aux Hébreux (sans préjudice des différences entre ces derniers). La question critique étant de savoir si l'"histoire" ("création" et "fin du monde" éventuellement incluses) est ou non le premier et dernier mot de la "pensée".
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MessageSujet: Re: L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores    L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores  - Page 2 Icon_minitimeVen 21 Fév 2020, 17:14

Merci Narkissos pour ces précisions.

À ces sentences brutales il faut ajouter toute une série de comparaisons dépréciatives. L’Évangile, la parole du Fils, est exalté aux dépens de ce qui a été révélé à Israël. La Loi est dévaluée par rapport à une « meilleure espérance » par laquelle on s’approche enfin de Dieu (7.19). Le Sinaï, lieu de la révélation, est dépeint sous les sombres couleurs d’une montagne terrifiante (12.18-21), en contraste saisissant avec une Jérusalem céleste en fête. Le temple et ses cérémonies, vers lesquels affluaient la foule joyeuse des pèlerins, sont rabaissés au rang de « culte rendu à une image, à une esquisse des réalités célestes » (8.5). Le fait d’être établi sur un modèle divin, selon la parole d’Exode 25.40 rapportées en 8.5, était certainement compris jusqu’ici comme valorisant, alors que l’épître minimise leur rôle : Israël a un « sanctuaire fait de main d’homme » (9.24) et ses rites sont dépassés. Le sacerdoce lévitique est atteint de plein fouet par la proclamation d’un sacerdoce nouveau, d’un autre type, « à la manière de Melchisédek » (ch. 7). La première alliance, qui n’était pas « sans reproche » (8.7) doit laisser la place à une autre, « nouvelle » (8.13) et « meilleure » (8.6). Sans être déconsidérés, les noms les plus prestigieux de l’histoire d’Israël, tels qu’Abraham (7.4-10) et Moïse (3.1-6), souffrent de la proximité du Fils et de son excellence.
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MessageSujet: Re: L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores    L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores  - Page 2 Icon_minitimeVen 21 Fév 2020, 18:02

(S. Bénétreau s'efforçait de parler intelligemment en langue "évangélique", dans les limites d'un tel exercice -- je l'entends encore me dire, en substance et sur un ton étonnamment compréhensif: "J'ai fait mes choix, vous faites les vôtres; ni vous ni moi n'y pouvons rien.")

Si le "judaïsme non chrétien" est assurément hors champ de ladite "épître aux Hébreux" (on n'en dit ni bien ni mal, il n'en est pas question du tout), il faudrait peut-être souligner que les destinataires "chrétiens", qu'ils soient "pagano-" ou "judéo-chrétiens", de "culture hellénistique" en tout cas et assez familiers de la Septante pour avoir la moindre chance d'y comprendre quelque chose, ne doivent pas non plus se considérer comme "arrivés" à quoi que ce soit. Il y a effectivement dans ce sens un "progrès" à faire, qui n'a rien d'"historique" même s'il doit fatalement s'insérer dans une certaine "histoire", du moins jusqu'au point d'"accomplissement" qui débouche sur l'"éternel".

(Sur 10,38s, voir aussi ici les posts de ce jour, 21.2.2020.)
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MessageSujet: Re: L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores    L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores  - Page 2 Icon_minitimeLun 24 Fév 2020, 11:34

"C'est pourquoi nous devons prêter une attention d'autant plus vive à ce que nous avons entendu, de peur d'aller à la dérive" (2,1)

"Cette espérance, nous l'avons comme une ancre solide et ferme pour l'âme ; elle pénètre au-delà du voile" (6,19)

Nous retrouvons la métaphore de l'ancre et du bateau qui risque de partir à la dérive. Au chapitre 6, l'auteur s’efforce d’encourager les destinataires en les assurant de la solidité des fondements de leur foi en faisant allusion serments de Dieu : 

"En effet, comme Dieu, en faisant la promesse à Abraham, ne pouvait jurer par un plus grand que lui, il jura par lui-même, en disant : A coup sûr, je te comblerai de bénédictions et je te multiplierai." (6,13-14)

"En ce sens, Dieu, décidé à donner aux héritiers de la promesse une preuve supplémentaire du caractère immuable de ses décisions, intervint par un serment" (6,17)

 Les croyants peuvent s'attacher à l'espérance car elle est solidement ancrée ("pour saisir l’espérance proposée" - 6,18 TOB).  L’ancre est solidement fixée dans le ciel dans lequel elle "entre" ("elle pénètre au-delà du voile" 6,19). 


Citation :
En même temps, il faut noter que la psukhè n'est jamais connotée négativement dans l'épître aux Hébreux (ce qui est très conforme au "platonisme" de ce texte, dont nous avons déjà beaucoup parlé): on n'y retrouve pas la hiérarchie gnostique ou paulinienne (de 1 Corinthiens surtout) qui situe le "psychique-animal-naturel", associé à la "chair", au-dessous du "pneumatique-spirituel". L'"âme" dans l'épître aux Hébreux accède à "l'étage idéal", céleste-éternel, "ancrée" au-delà ou en-deçà du "voile" de la "chair" et du monde des "ombres" (6,19, cf. 10,20) -- peut-être parce qu'elle en provient en premier lieu.


C'est certainement "l'espérance" (elpis, v. 18) qui pénètre au-delà (litt. dans [= du côté] le plus-intérieur, eis to esôteron) du voile, mais précisément "comme ancre de l'âme" (hôs agkura tès psukhès).  https://etrechretien.1fr1.net/t694-qu-est-ce-que-l-ame
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MessageSujet: Re: L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores    L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores  - Page 2 Icon_minitimeLun 24 Fév 2020, 13:09

L'"image" de pararrheo (2,1) n'est pas forcément celle du bateau à la dérive, bien qu'il soit tentant, et possible, de la rapprocher de celle de l'ancre; ce peut être aussi celle de l'eau même qui coule et passe (ruisseau, rivière, fleuve, courant). En tout cas c'est encore de l'"impermanent" et du "transitoire" (comme les "ombres") opposable à l'"éternel" conçu comme "immobile" ou "immuable" (ametatheton, 6,17s; malgré le paradoxe d'une "volonté-décision", boulè = délibération de "conseil", "immuable"; qui serait un "événement", par définition temporel, sans en être un, parce qu'"éternel"; paradoxe de règle plutôt que d'exception, parce qu'il vaudrait pour tout ce que Dieu "dit" ou "fait").
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MessageSujet: Re: L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores    L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores  - Page 2 Icon_minitimeLun 24 Fév 2020, 15:48

Ce qui se trouve au centre du récit n’est pas différent de ce qui se trouve au centre de l’hymne aux Philippiens et du quatrième Évangile : la mort, comme l’écrit l’auteur d’Hébreux, que le Christ a « goûtée » (geusetai) pour tous. Nous devrons explorer plus avant le motif incarnationnel évident ici, mais avant cela il nous faut nous pencher sur une variante textuelle qui n’est pas sans conséquence pour notre thématique. Pour la plupart des manuscrits de He 2,9, il est écrit que Jésus a goûté la mort pour tous « par la grâce de Dieu » (kapiti Theou). Une variante, attestée par certains manuscrits, mise en valeur par Origène et privilégiée par quelques exégètes modernes , propose au contraire que le Christ a goûté la mort « sans Dieu » (kôris Theou).

Cette variante témoigne-t-elle d’une version de l’Épître aux Hébreux que l’on pourrait alors qualifier d’explicitement kénotique ? Il vaut la peine de citer largement le passage où Origène la mentionne. On le trouve dans son commentaire de Jean 1,1 :

Le Fils) donc, qui est tout ce que nous avons dit, intercesseur, propitiation, propitiatoire, « compatissant à nos infirmités parce que, pour nous ressembler, il a éprouvé toutes (les misères) humaines hormis le péché », est le « grand prêtre » qui s’offre lui-même en une unique offrande non seulement pour les hommes mais aussi pour tout être spirituel, car « il a goûté la mort pour tous sauf Dieu » ou, selon certains manuscrits de l’Épître aux Hébreux, « par la grâce de Dieu ». Si c’est « Sauf pour Dieu il a goûté la mort pour tous », il n’est pas mort seulement pour les hommes  mais aussi pour les autres êtres spirituels. Si c’est « Par la grâce de Dieu il a goûté la mort pour tous », il est mort pour tous, sauf Dieu, car « par la grâce de Dieu, il a goûté la mort pour tous ». Il serait en effet absurde de dire qu’il n’a enduré la mort que pour les péchés des hommes et non également pour d’autres que l’homme qui se seraient trouvés dans le péché, les astres, par exemple ; car les astres même ne sont pas sans souillure en face de Dieu, comme nous le lisons dans le livre de Job : « Les astres ne sont pas purs à ses yeux » – à moins que ce ne soit dit par hyberbole. C’est pour cela qu’il est grand-prêtre, parce qu’il rétablit toutes choses dans le royaume de son Père, veillant à combler les déficiences de chaque créature pour qu’elle devienne capable de recevoir en elle la gloire du Père.

La manière dont Origène s’exprime semble privilégier la variante « sans Dieu », même s’il est prêt à voir du sens dans les deux possibilités, qu’il intègre dans sa remarque sur Jésus comme grand prêtre. La variante « sans Dieu » lui est utile, non pas en lien avec une quelconque christologie kénotique, pas même celle, limitée, envisagée peut-être par l’Évangile de Marc ; elle lui permet plutôt de définir l’horizon des effets du sacrifice du Christ. Tout ce qui se trouve en dehors de Dieu, pas seulement les êtres humains, est sujet aux effets de la mort du Christ, qui effectue la réconciliation et la rémission du péché. Le point de vue d’Origène est proche de celui des interprètes modernes selon qui la variante « sans Dieu » est une glose marginale qui, plus tard, a été incorporée dans le texte. Cette glose fut peut-être inspirée par 1 Co 15,27, elle exclut « Dieu » de « tout » ce pour quoi Dieu est mort . https://www.cairn.info/revue-etudes-theologiques-et-religieuses-2014-3-page-293.htm
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MessageSujet: Re: L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores    L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores  - Page 2 Icon_minitimeLun 24 Fév 2020, 16:53

J'ai grand plaisir à lire de nouveau Attridge, dont j'ai naguère beaucoup utilisé le commentaire (dans la collection Hermeneia).

La variante "sans dieu" ou "hors dieu" (khôris theou, au lieu de "par grâce de dieu", khariti theou) est tout à fait fascinante, à cause ou en dépit de sa consonance avec les propositions de l'a-théisme moderne. D'autant qu'elle ferait vertigineusement écho au "sans/hors péché" (khôris hamartias) de 4,15 et 9,28, comme si on ne pouvait en finir avec l'un sans en finir avec l'autre (voire l'Autre). La lecture d'Origène (alexandrin par excellence, donc a priori familier de l'épître aux Hébreux) est évidemment à rapporter à sa notion d'"apocatastase", c'est-à-dire de rédemption et de restauration (vraiment) universelles (huper pantos, "pour tout" ou "pour tout un chacun" non réductible à "tout homme", puisqu'il n'exclurait que "Dieu", dans la ligne de 1 Corinthiens 15); mais cette idée, si géniale qu'elle soit, paraît hors champ de l'épître aux Hébreux. On peut en dire autant de la lecture "kénotique" rapprochée de la Passion selon Marc (l'abandon de/par Dieu sur la croix; mais chez Marc c'est plutôt "l'esprit" que "Jésus" qui est "d/Dieu"): tout aussi profonde, mais pas directement le "problème" du texte. Un lien me semble possible, quoique difficilement exprimable par définition, avec cette logique de "dépassement" du langage et des représentations que nous avons tenté de décrire, qui en dernier ressort n'épargne ni "le ciel" ni "Dieu", du moins toute nomination et figuration de "Dieu". A mettre en relation, peut-être, avec le jeu d'une certaine "mort de Dieu" impliquée dans la logique du "testament" (9,16ss) dont parle également Attridge, en la comparant à celle de Galates 3: en Hébreux 9 c'est justement elle qui conduit à la sortie du "péché". Il faudrait la mort d'un certain "Dieu" (le testateur) pour qu'il y ait vraiment "Dieu", ni nommable ni représentable, au plan de l'"éternité", au-delà de toute problématique de jugement et de péché. Le crucifié serait en somme la figure ou la révélation, paradoxale, du "Dieu" qui, à la lettre, n'ek-siste pas -- cela aussi pourrait s'appeler "kénôse", bien que ce ne soit pas exactement le propos de Philippiens 2. (Voir également ici.)
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MessageSujet: Re: L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores    L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores  - Page 2 Icon_minitimeMar 25 Fév 2020, 15:31

"Au contraire, encouragez-vous mutuellement chaque jour, aussi longtemps qu'on peut dire « Aujourd'hui », pour qu'aucun de vous ne s'obstine à cause de l'attrait trompeur du péché. Car nous avons part au Christ, si du moins nous restons fermement attachés, jusqu'à la fin, à la réalité du commencement, pendant qu'il est dit : Aujourd'hui, si vous entendez sa voix, ne vous obstinez pas, comme lors de la révolte." (3,13-15)

"il institue encore un jour — « aujourd'hui » — en disant bien longtemps après, par David, comme il a été dit plus haut : Aujourd'hui, si vous entendez sa voix, ne vous obstinez pas." (4,7)    

Le terme aujourd’hui (3.13, 15 ; 4.7) est un des termes principaux du passage. Sa fonction première, comme dans le Psaume 95, est d’actualiser l’événement historique du refus d’Israël d’entrer en Canaan. « Attention, prévient l’auteur, n’imitez pas aujourd’hui le comportement qui, hier, a valu à vos pères de connaître le châtiment divin ! » À ce premier sens, l’auteur de l’épître en ajoute un second. En mettant en exergue le mot aujourd’hui, il lui confère un statut particulier, celui de désigner le temps de la révélation10. « Aujourd’hui, Dieu parle. Écoutez et obéissez de peur de subir sa colère ! » Ce temps de la révélation semble faire écho aux premiers versets de l’épître où le Fils est la révélation finale dans ces temps qui sont les derniers (1.2). 


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MessageSujet: Re: L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores    L'épitre aux Hébreux, Les relations familiales et métaphores  - Page 2 Icon_minitimeMar 25 Fév 2020, 16:46

[A propos de l'article: expliquer un texte à partir des thèmes qui n'y sont pas, ou qui y sont le moins thématisés (le "royaume" en l'occurrence), il faut oser mais à partir de là c'est un filon inépuisable; et fort précieux pour les étudiants en théologie évangélique(s) qui doivent continuellement ruser avec les "sciences bibliques" pour trouver des sujets de mémoire ou de thèse académiquement et dogmatiquement acceptables.]

Sur le fond de l'affaire, voir le lien que j'ai indiqué à la fin de mon post précédent: à mon sens l'épître aux Hébreux ne cherche nullement à distinguer les "temps" (historiques ou narratifs, pour ne pas dire légendaires ou mythiques), mais au contraire à en montrer l'unité dans le même "aujourd'hui", contigu ou tangent à toute (l')histoire et qui est précisément son rapport possible et actuel à l'éternel.
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