La Bible est-elle, pour vous, un livre sacré?

Bonjour,

Que n'a-t-on pas dit à propos de la Bible, tout et son contraire.
Livre historique racontant le parcours chaotique de l'Israël pour les uns, livre mythique voire mystique pour les autres.

Depuis des siècles les érudits et les biblistes se battent pour déterminer ce qu'il en est réellement et pour trouver l'indice qui viendrait définitivement asseoir leur réputation. Mais cette quète ressemble à celle du graal, car il paraît parfois bien difficile de déterminer si tel verset a été rajouté par la suite pour donner un vernis de réalité à un évènement ou si l'épisode en question s'est effectivement bien déroulé à la période mentionnée.

Prenons un exemple bien connu que nous trouvons dans l'évangile de Luc:

1 La quinzième année du gouvernement de Tibère César –– alors que Ponce Pilate était gouverneur de la Judée, Hérode tétrarque de la Galilée, Philippe, son frère, tétrarque de l’Iturée et du territoire de la Trachonitide, Lysanias tétrarque de l’Abilène, 2 et du temps des grands prêtres Anne et Caïphe –– la parole de Dieu parvint à Jean, fils de Zacharie, dans le désert. 3 Il se rendit dans toute la région du Jourdain, proclamant un baptême de changement radical, pour le pardon des péchés, 4 selon ce qui est écrit dans le livre des paroles du prophète Esaïe : C’est celui qui crie dans le désert : préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers ! 5 Toute vallée sera comblée, toute montagne et toute colline seront abaissées, les passages tortueux deviendront droits, les chemins raboteux seront nivelés, 6 et tous verront le salut de Dieu. Luc 3:1-6

Voilà qui paraît presque trop beau pour être vrai, car en effet nous avons pas moins de
5 personnages politiques en cours de mandat
-Tibère César dans sa quinzième année
-Ponce Pilate gouverneur de la Judée
-Hérode trétrarque de la Galilée
-Philippe son frère de l'Iturée et du territoire de la Trachonitide
-Lysanias trétrarque de l'Abilène

et 2 personnages religieux Israélites
-les grand prêtres Anne et Caïphe

Je ne veux pas me lancer dans des datations historiques car je ne suis pas un historien.

Ce que l'on peut se demander par rapport à cet exemple, c'est de savoir si les noms des personnages politiques et religieux non pas été utilisés pour donner un fond d'historicité au ministère de Jean le Baptiste et au début du ministère de Jésus.
En faisant ainsi on est loin des légendes: "il était une fois.." qui pèchent par leur manque de précision et qui n'offrent pas la possibilité de les situer dans l'espace temps.

Donc pour résumer nous avons 2 possibilités:

1) Jean le Baptiste et Jésus ont bien commencé leur ministère à l'époque ou vivaient les peronnages cités, si tant est que tout ces personnages officiaient bien en même temps.

2) On a utilisé des personnes politiques et religieuses ayant vécu et exercé leur fonction à peu près à la même époque afin de donner un fond de crédibilité à l'histoire de Jean le Baptiste et de Jésus.

Je tiens à préciser que dans tous les cas cela ne me dérange en aucune façon, la foi étant une affaire personnelle, et qui n'a pas besoin de preuves temporelles pour vivre.

Avec mon amitié
Jean-Pierre

Bonjour Jean-Pierre,
Je perçois pour ma part un décalage énorme entre le titre et le contenu de ton message. D'un côté le caractère "sacré" de la Bible, de l'autre son "exactitude historique". Pour moi ces deux choses n'ont vraiment rien à voir.
Un livre d'histoire parfaitement exact, précis et documenté ne serait pas "sacré" pour autant.
Réciproquement, un mythe, une légende, un roman, un conte, une fable peuvent émouvoir, toucher, éclairer, inspirer, transformer leurs lecteurs au point que ceux-ci viendront à les regarder comme "sacrés", quel que soit le sens exact qu'ils attacheront à ce mot. Peut-être certains parmi eux voudront-ils en plus croire que ces histoires auxquelles ils sont si attachés sont "vraies" au sens historique du terme, comme si ça ajoutait quelque chose. Et pourtant à la base elles sont "vraies" pour eux dans un tout autre sens, qu'ils ont toutes les chances de perdre de vue à vouloir prouver leur "historicité" à tout prix.
Il y a certainement DE l'histoire (j'insiste sur ce partitif: UN PEU d'histoire) dans la Bible, mais ce n'est pas ça qui la rend "sacrée".
(Et pour répondre quand même à ta question sur le synchronisme de Luc: je le crois tout à fait artificiel.)
Bon week-end,
Didier

Bonsoir,

J'espérais lire une message de spermologos nous disant que pour lui le livre
-1) sacré

-2) pas du tout sacré (pour telle raison)

L'ennnui est que l'on se sait pas si pour Admi le livre sacré ou non.

Moi je suis dans l'expectative, et je me pose de nombreuses questions, particulièrement après la réponse de spermolos à propos du chapitre 3 de Luc.
Mais même si le synchronisme de Luc est tout à fait artificiel, je crois encore à l'histoire d'un Messie venu pour nous sauver.
Sans doute le rédacteur a-t-il voulu donner un peu plus de réalité à l'histoire racontée.

Avec mes fraternelles salutations
Xavier

Bonjour Xavier,
Navré de t'avoir déçu...
Je pense qu'objectivement, collectivement, culturellement, nous recevons bien la Bible comme un livre (ou plutôt un recueil de livres) "sacré" (ainsi que les Upanishads, la Gita, le Coran ailleurs), et qu'à titre personnel, compte tenu du rôle qu'il a eu dans ma vie, je le reçois aussi comme tel.
Seulement pour moi "sacré" ne veut pas (plus) nécessairement dire "historique", "infaillible" ou même "cohérent".
Je repense à ce que Simone Weil écrivait, dans sa Lettre à un religieux, au sujet des dogmes: on leur doit une attention respectueuse, mais en aucun cas une adhésion intellectuelle, qu'aucune autorité ne saurait commander. Je pense lire les textes bibliques avec une attention respectueuse, mais je ne me sens pas tenu d'y adhérer (et à plus forte raison de les croire historiques!) pour la seule raison qu'ils sont "bibliques".

Citation :

Sans doute le rédacteur a-t-il voulu donner un peu plus de réalité à l'histoire racontée.

C'est aussi mon avis.
Bon reste de dimanche,
Didier

Spermologos je ne prétends pas que la Bible soit un livre historique, ou un livre d'histoire au sens absolu, même si je l'ai cru pendant un certain temps.

Bien sûr comme toi je pense que la foi est une affaire personnelle, ce que je me demande cependant c'est comment j'ai pu pendant tant d'années croire que l'histoire avec un grand H était bien expliquée par la Bible.

Je suis persuadé que certains de nos lecteurs sont encore dans cette croyance, et je les prie de s'exprimer s'ils ne sont pas d'accord avec nous.

C'est par le dialoque que nous progressons, si nous sommes prêts a accepter l'idée qu'un autre n'ait pas forcément le même point de vue que nous-mêmes, il n'est pas dangereux de ne pas être d'accord et personne n'a le droit de penser qu'il est plus imporant que les autres.

Les dialogues échangés sur ce forum vous l'ont bien prouvé.

Avec mon amitié
Jean-Pierre

Bonsoir Jean-Pierre,
Ce qui ne laisse pas de m'étonner, c'est l'incapacité de la modernité occidentale (et surtout américaine, là où fleurit le fondamentalisme "évangélique" et ses variantes sectaires) à percevoir la valeur du mythe, de la légende, du conte, dès lors qu'il s'agit de religion. De là la réduction du "vrai" à l'"historique".
La distance culturelle se creuse entre nous et l'Antiquité proche-orientale qui a produit les textes dont nous parlons: les malentendus sont inévitables...

Réflexion :

Ce n'est pas parce-que Jules César a existé que Asterix est un personnage historique.

Autre reflexion :

Ce n'est pas parce-qu'on enlève la potion magique d'Asterix, qu'un Gaulois du nom d'Asterix a existé...

Bonsoir,

Je me pose la question de savoir si l'on peut mettre en doute la Bible et garder la foi malgré tout. Ne serait-on pas comme un communiste qui douterait de l'existence de Karl Marx, et pour qui le manifeste de Engels n'aurait pas de relation avec l'internationale socialiste.

Avec mes fraternelles salutations.
Xavier

Bonjour,

Karl Marx ne joue pas tout à fait le même rôle dans l'imaginaire communiste que Jésus dans l'imaginaire chrétien...

Même s'il y est un peu "prophète", c'est surtout au sens de découvreur d'une "vérité" dont il n'est que le porte-parole, qui pour ainsi dire resterait "vraie" sans lui (toujours selon l'imaginaire communiste populaire, ou ce qu'il en reste, bien sûr).

Jésus est bien un peu cela aussi (p. ex. dans Matthieu, la voie de salut qu'il prêche dans le Sermon sur la Montagne se suffit à elle-même, et fonctionne "sans lui"), mais il est, me semble-t-il, D'ABORD autre chose -- un Sauveur descendu du ciel pour défaire des puissances adverses et réaliser le salut des siens... (Paul, Marc, Jean, selon diverses modalités).

C'est-à-dire que dans un cas la "foi" s'attache à des paroles, dont l'efficacité dépend de l'obéissance de l'auditeur et non de l'identité du locuteur; dans l'autre elle s'attache à une figure moins historique que mythique (je veux dire, positivement: une figure divine, dont "l'histoire" est surtout "initiatique", son but véritable étant d'introduire le participant à une expérience spirituelle).

Bonne journée,
Didier

Bonsoir Spermologos,

Je te concède que je n'avais pas fait dans la dentelle en faisant la comparaison entre Jésus et Karl Marx, mais je ne regrette pas de l'avoir faîte car cela m'a permis de recevoir une réponse extrèmement précise de ta part. Ta réponse nous ouvre des horizons nouveaux.

Merci de ton honnêteté

Avec mes fraternelles salutations
Xavier

C'est ce qui explique la présence de nombreux anachronismes dans le récit, les plus connus étant les chameaux et les Philistins.

On sait que la Genèse mentionne de façon répétée les chameaux à l'époque des Patriarches, alors qu'il est solidement établi que le dromadaire ne fut domestiqué qu'à la fin du second millénaire et ne fut employé comme bête de somme que bien après -1000. La caravane des chameaux de Joseph transporte de la gomme adragante, du baume et du laudanum, marchandises effectivement caractéristiques du commerce arabe, mais à l'époque -700 et -600 (voir ci-après, Entre guerre et survie). Quant aux Philistins, il est solidement établi qu'ils ne viennent en Canaan qu'à partir de -1200 . De plus, la cité de Gérar, présentée comme leur capitale dans le récit d'Isaac, n'est qu'une minuscule bourgade au Fer I, qui ne devient une ville forte que vers -700 sous les Assyriens.