Bonjour Jean-Pierre,
il y a de vraies différences entre les modalités de connaissance proposées par la religion et celles de la science telle que pratiquée aujourd'hui. Elles sont telles que je ne vois même plus trop pourquoi les opposer l'une à l'autre: la seule raison est à mon avis que nous ayons connu un système religieux qui ne se contentait pas d'être religieux (attaché aux valeurs spirituelles) mais qui était "total", qui avait prétention à expliquer le monde tout entier à travers son seul dogme. En ce sens, oui, le religieux peut devenir anti-scientifique (et c'est réciproque): c'est le perpétuel retour de Galilée.
Mais la grande majorité du monde religieux (de la "vieille Europe", en tout cas) a su faire la peau à ses vieux démons, et aujourd'hui les conflits entre les univers religieux et scientifique ne portent plus tellement me semble-t-il sur la connaissance du monde, mais plutôt sur des problèmes éthiques (avortement, contraception, euthanasie, OGM, etc.)
Je ne pense pas vraiment que la Science, avec ou sans son "s" majuscule, ait vocation à "remplacer" la religion, même si il est évident qu'elle a dû faire sa place dans l'esprit de l'Homme dans des domaines que la religion a longtemps occupé et considéré comme son domaine réservé.
Et si, d'une manière générale, il est vrai qu'un certain nombre de nos contemporains ont tendance à voir dans la science, à son tour, une sorte de mode "total" de la connaissance du monde, c'est assez peu souvent le discours des scientifiques eux-mêmes. Auguste Comte a vécu: même s'il a mené un combat (peut-être) nécessaire en son temps, il n'est plus tellement d'actualité.
Concernant la crise de grippe, je suis loin d'être aussi choqué que toi par la façon dont les choses se sont passées: l'apparition d'un nouveau virus (très contagieux) dont on ne sait pas comment il peut évoluer est un sujet d'inquiétudes tout à fait légitime. Le "soufflet" qu'on a connu (qui retombe en ce moment-même) est un phénomène qui me parait "normal": ce n'était pas à proprement parler une "fausse" alerte puisque le virus est bien-là, il se transmet bien rapidement. L'épidémie est réelle! Fort heureusement la virulence de la grippe n'est pas (dans l'état actuel du virus) aussi forte qu'on ne l'a d'abord craint au Mexique.
Et là où je te rejoins, c'est effectivement que le public semble parfois attendre de la science qu'elle fonctionne comme religion: une "prévision" ou une "projection" devient dans leur esprit "prédiction" (sur le mode prophétique), une infaillible annonce du futur. Mais peut-être n'est-ce là que ce que l'Homme appelle de toutes ses forces, ce qu'il souhaite de toute façon: on peut sérieusement se le demander...