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| L'illlusion de la prière | |
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Auteur | Message |
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free
Nombre de messages : 10102 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: L'illlusion de la prière Mer 6 Fév 2019 - 12:02 | |
| "Nous savons, du reste, que tout coopère pour le bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son projet" Rm 8, 28
Je trouve que la formule "tout coopère" est énigmatique, c'est quoi "tout" ? Le projet de Dieu a prévu par avance à faire concourir tout ce qui interagit avec la vie des croyants, à leur bien.
Dernière édition par free le Mer 6 Fév 2019 - 12:35, édité 2 fois |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12461 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: L'illlusion de la prière Mer 6 Fév 2019 - 12:34 | |
| C'est en effet une formule extrêmement importante, panta sunergei (d'où "synergie"), à lire dans la droite ligne de "la création" un peu plus haut. Si le "mystère" chrétien est (en dernière analyse, à l'horizon eschatologique, pan-théo-cosmique) le "mystère" du monde, l'acte à la fois sacré et théâtral (cf. supra) par quoi le monde même se révèle à lui-même et s'accomplit ou se transfigure, le monde entier y participe et rien au monde ne saurait en séparer (voir la suite).
Dernière édition par Narkissos le Mer 6 Fév 2019 - 12:37, édité 1 fois |
| | | free
Nombre de messages : 10102 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: L'illlusion de la prière Mer 6 Fév 2019 - 12:35 | |
| Nous laissons de côté la discussion sur le sujet du verbe sunergeï (vraisemblablement panta, toutes choses) car c’est Dieu, même si ho theos n’est pas le sujet exprimé, qui fait que tout concourt au bien de ceux qui l’aiment. Dans panta il faut inclure tout ce que comporte la vie des croyants, les éléments favorables, les grâces, les délivrances, mais aussi les peines, les déceptions, les souffrances, donc ce qui paraît aller à l’encontre du bien immédiat ou proche, entre autres, ce qui est évoqué au verset 35 de ce chapitre." https://www.cairn.info/revue-etudes-theologiques-et-religieuses-2012-2-page-199.htm
Le v. 27 est surprenant : « Et celui qui sonde les cœurs connaît quelle est l’intention de l’Esprit : c’est selon Dieu qu’il intercède en faveur des saints ». Celui qui sonde les cœurs c’est, à n’en pas douter, le Père lui-même. Or le Dieu qui discerne parfaitement la pensée des ses créatures comprend d’autant plus parfaitement l’intention de l’Esprit que celui-ci pense ce que pense le Père. Comment comprendre cela ? A mon sens, nous sommes très largement ici dans le domaine de l’image. Que signifie l’idée que l’Esprit de Dieu prend nos prières, qu’il les rectifie et les présente à Dieu le Père ? Ou que le Père doit aller lire dans les pensées de l’Esprit, comme s’il s’agissait de deux individus séparés ? Par ailleurs, le Père a-t-il besoin de cette œuvre de l’Esprit pour « entendre droitement » les prières des croyants ? Il faut se garder de prendre tout cela de façon trop littérale. Par contre, il importe de retenir ceci : Paul souligne que l’œuvre de l’Esprit dans la vie de prière des croyants va bien au-delà de ce qu’eux-mêmes peuvent comprendre ou ressentir. Nos requêtes représentent, en quelque sorte, un point précis dans le temps : mais l’œuvre de l’Esprit se place non seulement avant et pendant ce point, suscitant notre prière et la portant, mais encore après, la corrigeant et la présentant au Père. Un commentateur récent propose l’image des vagues de la mer : de notre point de vue, il n’y a que la surface de l’eau. Mais les vagues que nous voyons sont portées par des courants puissants que nous ne percevons ni ne ressentons jamais. De la même manière, nos prières ne représentent qu’une infime partie de l’œuvre de l’Esprit, celle qui est visible, d’ailleurs régulièrement soulevée et balayée par des tempêtes. L’essentiel se passe à un autre niveau, dans l’action de l’Esprit qui, pourtant, nous reste le plus souvent imperceptible. https://larevuereformee.net/articlerr/n260/lesprit-intercede-romains-8-26-27 |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12461 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: L'illlusion de la prière Mer 6 Fév 2019 - 13:16 | |
| Pour comprendre la remarque sus-citée (première citation) de S. Bénétreau (professeur que j'ai beaucoup apprécié et qui est décédé il y a quelques mois), il faut savoir que panta peut se lire comme un nominatif OU comme un accusatif pluriel (tout = toutes choses), donc sujet OU objet du verbe sunergei, "tout coopère" ou "x fait tout coopérer" (la forme du verbe n'étant d'aucun secours puisqu'il s'accorde au singulier avec un sujet neutre pluriel); la seconde option qui impliquerait un autre sujet sous-entendu (x = ho theos = le dieu ou Dieu) est très improbable dans le texte généralement retenu, en revanche elle est explicite dans une variante assez répandue dans la tradition manuscrite (avec, dans le P46, le singulier pan au lieu du pluriel panta). Mais ça ne change pas grand-chose au fond de l'affaire.
Concernant la seconde citation (Cobb, que nous avons déjà lu ailleurs), je trouve assez amusante l'idée d'aller démêler du "littéral" et du "figuré" (ou de l'"imagé") dans un tel discours: la lettre et l'esprit de l'esprit, en somme... On peut toujours s'y essayer, l'expérience n'en est pas moins instructive quand elle s'avère impossible, bien au contraire. La question se poserait au fond pour tout discours et pour tout énoncé, mais elle est particulièrement sensible en théologie: qu'est-ce qui pourrait bien, s'agissant de "Dieu", être "littéral" ? Ou "figuré" ? |
| | | free
Nombre de messages : 10102 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: L'illlusion de la prière Jeu 7 Fév 2019 - 12:03 | |
| "Demandez, et l'on vous donnera ; cherchez, et vous trouverez ; frappez, et l'on vous ouvrira. Car quiconque demande reçoit, qui cherche trouve, et à qui frappe on ouvrira. Si son fils lui demande du pain, quel est parmi vous celui qui lui donnera une pierre ? Ou bien, s'il demande un poisson, lui donnera-t-il un serpent ? Si donc vous, tout en étant mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison votre Père qui est dans les cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui le lui demandent !" Mt 7,7-11
Ce texte, à l'opposé de Rm 8, souligne l'idée que la prière est d'abord, la manifestation d'une volonté sans faille et un investissement total dans la recherche de l'objet désiré, une façon de programmer la réussite de son entreprise. La prière manifeste le pouvoir de la pensée. |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: L'illlusion de la prière Jeu 7 Fév 2019 - 13:11 | |
| L'idée de prière auto-réalisatrice était encore plus nette en Marc 11,24 (déjà évoqué au début de ce fil, et très souvent ailleurs, p. ex. là) -- où c'est d'ailleurs moins la prière que la foi qui est auto-réalisatrice, dans la prière entre autres: revoir tout le contexte, en particulier v. 22ss (une "foi de dieu", rien de moins). "Paul" prend en effet ses distances avec cette conception (disons "charismatique") de la foi, il le fait explicitement dès 1 Corinthiens 13,2, bien avant (semble-t-il, en chronologie relative !) de développer sa "propre" conception (très) "originale" d'une foi qui "sauve" tout autrement dans l'épître aux Romains. "Matthieu" de son côté (chap. 21) atténue considérablement les affirmations de Marc (il dit notamment "vous recevrez" au lieu de "cela sera pour vous", v. 22 comme en 7,7, ce qui ramène de l'idée d'une foi toute-puissante en soi, fût-ce sur un mode quasi psychotique de rupture avec toute "réalité" extérieure -- la montagne pour moi se sera déplacée --au schéma interpersonnel ordinaire et en un sens plus "modeste" de la prière, demande de l'homme et réponse éventuelle du dieu; Luc pour sa part transforme tout l'"anti-miracle" du figuier en parabole, chap. 13); sur Matthieu 7,7ss, voir aussi ici. La certitude de l'exaucement, pour Matthieu, ne réside pas dans un pouvoir autonome de la foi ni de la prière, mais dans la bonté de Dieu au-delà du bon et du mauvais. |
| | | free
Nombre de messages : 10102 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: L'illlusion de la prière Ven 8 Fév 2019 - 9:30 | |
| Dans son ouvrage de philosophie de la religion, La religion dans les limites de la simple raison, Kant écrit, en effet : « La prière […] est une illusion superstitieuse […] ; car elle est un simple souhait tenace face à un être qui n’a besoin d’aucune explication du sentiment intérieur de l’orant. D’ailleurs, aucun des devoirs qui nous incombent comme lois divines n’est accompli par là, de sorte que Dieu n’y est pas réellement servi ». « Cette phrase d’Emmanuel Kant, écrit Wilhelm Weischedel, exprime de la façon la plus rude les réserves que les philosophes opposent à la prière ». Kant voit la nature superstitieuse de la prière dans la tentative de l’homme « d’avoir de l’influence sur Dieu ». C’est, selon lui, « une illusion à la fois absurde et téméraire […] d’essayer de voir si l’on ne pourrait pas détourner Dieu du plan de sa sagesse ». Kant aurait raison si la prière se comprenait seulement comme la possibilité d’« avoir de l’effet sur Dieu ».
Selon la métaphysique classique, Dieu est immuable ; l’immuabilité lui appartient essentiellement. Mais si l’on s’accroche au théorème philosophique de cette immuabilité de Dieu, apparaît alors le dilemme dans lequel s’enfonce inévitablement la théologie de la prière. Ce dilemme, Ludger Oeing-Hanhoff, dans son article sur « La crise du concept de Dieu », l’a exprimé dans les termes suivants : « Peut-on s’adresser avec des prières de supplication à un Dieu qui n’est pas tout-puissant, qui ne peut accomplir aucun miracle ? Par ailleurs, on se demande si l’on peut raisonnablement prier un Dieu qui a déjà tout déterminé d’avance et qui, dans son éternité et dans son immuabilité, est considéré comme “l’immuable cause première de tout mouvement”, qui ne peut en aucune manière être mu [et ému] par une cause antérieure ». https://journals.openedition.org/rsr/327 |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12461 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: L'illlusion de la prière Ven 8 Fév 2019 - 10:55 | |
| Merci (encore) pour cet article très intéressant -- qui, s'il n'apporte rien de foncièrement nouveau (je ne vois guère comment il le pourrait !) montre au moins la permanence du "problème", de l'Antiquité tardive à la pensée contemporaine, à travers la diversité de ses "positions" et de ses "solutions" (façons de poser et de résoudre le "problème").
Il me semble toutefois, à le lire, que ledit problème gagnerait à être replacé dans une perspective beaucoup plus longue et large que celle de la tradition théologico-philosophique, autrement dit judéo-helléno-chrétienne ou "métaphysique". Celle-ci s'aveugle en effet à ce qui est pour l'historien des religions (du moins tant qu'il ne se veut ni philosophe ni théologien) une évidence: si (selon la formule de Pascal) le "Dieu d'Abraham, Dieu d'Isaac, Dieu de Jacob, Dieu de Jésus-Christ" paraît si différent du "Dieu des philosophes", il ressemble comme un frère, ou comme plusieurs, aux "dieux" du prétendu "polythéisme", face auxquels la prière est toujours (d'avant l'écriture et l'"histoire" au sens restreint, depuis le néolithique au moins) allée de soi. Comme je l'ai souvent répété, nos Psaumes en témoignent: on a prié Yahvé comme on avait prié Baal ou Aton, on a continué de prier avec les mêmes mots un "Dieu" censément unique, transcendant et absolu mais toujours considéré comme personnel, relationnel et relatif par la piété juive ou chrétienne, orthodoxe ou hérétique, catholique ou protestante, exactement de la même manière que n'importe quel "dieu" païen. Tout se résume au "mystère", si l'on veut (c'en est un aussi, peut-être le plus simple, le plus vaste et le plus profond), de l'appellation "mon dieu", à chaque fois unique et indéfiniment transférable, exportable et importable, ex-ap-propriable d'un "moi" et d'un "dieu" à l'autre, d'une religion, d'une civilisation, d'une époque à une autre.
La (non-)relation entre le dieu de la prière (et de la "religion" en général) et le dieu (ou Dieu, Un, Être, Au-delà de l'être, etc.) de la pensée n'aura peut-être jamais été mieux exprimée que par Héraclite, à l'aube de la philosophie (quoique la formule nous ait été conservée par un chrétien, Clément d'Alexandrie, Stromates V, 115, 1): ἓν τὸ σοφὸν μοῦνον λέγεσθαι οὐκ ἐθέλει καὶ ἐθέλει Ζηνὸς ὄνομα. "L'un, seul sage, veut et ne veut pas être appelé du nom de Zeus." |
| | | free
Nombre de messages : 10102 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: L'illlusion de la prière Lun 11 Fév 2019 - 9:10 | |
| "Reconnaissez donc vos péchés les uns devant les autres et souhaitez-vous du bien les uns aux autres, pour que vous soyez guéris. La prière du juste, mise en œuvre, a beaucoup de force" Jac 5,16
Le "juste" est celui qui reconnait ses péchés (et non celui qui est irréprochable), ainsi la prière si elle un mouvement vers Dieu, elle n'existe pas sans les autres hommes, sans un travail intérieur qui fait prendre conscience de son état de pécheur et sans justification de Dieu. |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12461 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: L'illlusion de la prière Lun 11 Fév 2019 - 11:56 | |
| En poursuivant ici ce que je disais là de l'enchaînement "lâche" des idées dans l'épître de Jacques ("mots-crochets", etc.), on remarque que le mot "péchés" en 15b appelle le v. 16 (bien que son thème stricto sensu soit différent, on saute de la "maladie" à la "confession") et que le mot "guéris" au v. 16 (où l'on attendrait plutôt "pardonnés") rappelle au contraire les v. 14-15. Rapport (verbal) dans le non-rapport (thématique). Au passage, la NBS (si c'est bien elle) a préféré parler de "souhait" pour la plus générale eukhè (qui est aussi plus rare dans le NT) en réservant le mot de "prière" pour l'habituelle pros-eukhè (de même pour les verbes correspondants, voir la suite). Ça se discute, mais c'est une nuance possible, à entendre sans trop la forcer. Ce qui est peut-être plus significatif quand on regarde l'ensemble des v. 14ss, c'est que la "maladie" paraît plus individuelle que "les péchés", au pluriel, hypothétiques en 15b ( s'il a commis des péchés) et noyés dans une réciprocité générale au v. 16 (confessez vos péchés les aux autres). Contrairement à la "confession" jéhoviste ou catholique, il n'y a pas d'obsession du péché personnel et particulier, "grave" ou "mortel", de tel ou tel. Et cela rejoint, pour le coup, un trait fondamental et constant de ce texte, beaucoup plus préoccupé de "pratique" sociale ou communautaire que de "morale" individuelle (il faut le relire dans son ensemble, ce n'est pas bien long, en notant p. ex. comment la relation des riches et des pauvres l'emporte sur les habituels soucis religieux de "pureté" individuelle, et notamment sexuelle). D'autre part, bien sûr, le processus de "justification" est diamétralement opposé à son anti-modèle paulinien (chap. 2): c'est l'"œuvre" ou l'"acte" qui compte, jusque dans la prière ( ergoumenè, "mise en œuvre", de ergon = "œuvre"), et non la "foi" et sa "confession" comme "simple parole" (cf. chap. 3). (Voir éventuellement ici.) |
| | | free
Nombre de messages : 10102 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: L'illlusion de la prière Lun 3 Juin 2019 - 9:52 | |
| Luc 18, 1-8, propose la parabole du juge et de la veuve qui souligne l'importance de prier envers et contre tout :
"Il leur disait une parabole, pour montrer qu'il faut toujours prier, sans se lasser. Il dit : Il y avait dans une ville un juge qui ne craignait pas Dieu et qui n'avait d'égard pour personne. Il y avait aussi dans cette ville une veuve qui venait lui dire : « Rends-moi justice contre mon adversaire ! ». Pendant longtemps il ne voulut pas. Mais ensuite il se dit : « Bien que je ne craigne pas Dieu et que je n'aie d'égard pour personne, néanmoins, parce que cette veuve m'importune, je vais lui rendre justice, de peur que jusqu'à la fin elle ne vienne me casser la tête. » Le Seigneur ajouta : Entendez ce que dit le juge injuste. Et Dieu ne ferait pas justice à ceux qu'il a choisis, alors qu'ils crient vers lui jour et nuit ? Il les ferait attendre ? Je vous le dis, il leur fera justice bien vite. Mais quand le Fils de l'homme viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ?"
Nous pouvons noter que la veuve réclame justice à un juge qui n’en a que faire. A travers cette parabole Luc s’attaque ici au problème de l’attente de la parousie et de la souffrance injuste ("choisis ... crient vers lui jour et nuit"), et de la menace réelle que cela représente pour la foi ("Mais quand le Fils de l'homme viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ?"). Il s’agit de prier en tout temps, dans le sens de ne pas laisser s’installer des temps où l’on ne prie plus. Le paradoxe de cette parabole consiste à laisser entendre qu'il faut importuner ("cette veuve m'importune") Dieu pour obtenir la délivrance. |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12461 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: L'illlusion de la prière Lun 3 Juin 2019 - 11:49 | |
| Les "paraboles immorales" sont une spécialité lucanienne bien connue (cf. aussi chap. 16) -- en tension d'ailleurs constante avec les "dernières rédactions" de Luc-Actes, qui les enveloppent d'introductions et de conclusions plus "édifiantes", mais décalées par rapport au contenu de la parabole proprement dite, ce qui ne facilite pas la lecture: le "contexte", et tout particulièrement la ou les "morales" censées indiquer le sens ou la "pointe" de la parabole, disent en fait tout autre chose, voire le contraire, quand elles ne se contredisent pas entre elles: ici Dieu attend (patiente) ou n'attend pas, et le dernier logion peut être lu en rapport ou sans aucun rapport avec ce qui précède: sur "trouver la foi", cf. 7,9//; et sur le stéréotype eschatologique de la "venue (future) du Fils de l'homme", 9,26; 12,40; 17,22; 21,27; Marc 8,38; 13,26; 14,62; Matthieu 10,23; 16,27s; 24,27ss; 25,31; 26,64...
Pour entendre vraiment la parabole même (l'histoire du juge et de la veuve), il faudrait faire abstraction non seulement de son "explication" contextuelle et contradictoire, mais d'une bonne partie de "la Bible": elle nous ramène en effet à la prière élémentaire (demande, requête, appel, cri) qui ne préjuge rien de son "destinataire", ni sa "justice", ni sa "bonté", ni le moindre intérêt a priori pour l'orant; soit le fond de la prière "païenne" (autrement dit de la "piété" ou de la "religion universelle") telle que la récuse Matthieu 6 (dont Luc ne conserve qu'une version courte du Notre Père), et qui n'est cependant pas sans échos "bibliques" (Job, Qohéleth, et pas mal de psaumes).
Avec l'"explication", on n'a plus qu'un raisonnement a fortiori, un peu bancal (si ça marche avec un juge pourri, ça n'en marchera que mieux avec le bon Dieu), qui fait de l'illustration un exemple mal choisi... Mais on peut toujours y entendre quelque chose de profond, p. ex.: prier, c'est oublier tout ce qu'on croit savoir de "Dieu", on ne prie vraiment que le dieu inconnu, etc. |
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