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 Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine

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le chapelier toqué

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MessageSujet: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeDim 21 Juin 2020, 14:34

Sur un autre fil Narkissos faisait la réflexion suivante :
Ce qui distingue à mes yeux la doctrine bouddhique d'une théologie, c'est surtout qu'elle n'est pas centrée sur un dieu (theos) -- même si elle s'est généralement bien gardée de nier les divinités traditionnelles de l'Inde et toutes celles qu'elle a rencontrées au cours de sa diffusion historique et géographique. Mais c'est assurément une doctrine, c'est-à-dire un enseignement, qui en tant que tel(le) s'adresse d'abord à l'intelligence, bien qu'elle vise une pratique et une expérience. Cette doctrine n'est évidemment pas opposable aux "sutras du Bouddha" qui en reflètent et/ou en constituent un certain état sans l'empêcher, bien au contraire, de se développer ensuite dans des sens très divers; par analogie, quand un fondamentaliste ou un sectaire chrétien te dit "nous n'avons pas de théologie, nous nous en tenons à la Bible", il ne se rend simplement pas compte que la Bible est pleine de théologies en tout genre et que le "message" qu'il en tire en est encore une autre.

Je te remercie, Narkissos, de cette réflexion qui résume bien la nature et la « méthode » de travail/diffusion de l’enseignement de Bouddha.
A ses débuts cet enseignement s’est propagé par le biais de discours (sutras) prononcés par le Bouddha lui-même dans le but de partager ses réflexions et d’enseigner les premiers disciples qui le suivaient, comme cela se faisait en Inde à cette époque. En effet de nombreux gourous, brahmanes allaient de villages en villages pour promouvoir leurs enseignements religieux.

Avec le temps de nombreux commentateurs et philosophes bouddhistes ont étudié et mis par écrit les discours de Bouddha et ont commencé à commenter l’enseignement qu’ils avaient reçus.
Ainsi à propos de la notion d'existence le Bouddha apprit très rapidement à ses disciples que l’on ne pouvait pas discerner un soi (personnel) impermanent en évoquant les cinq agrégats composants l’être humain soit :

1) La forme, le corps
2) Les perceptions
3) Les sensations
4) Les formations mentales
5) La conscience

Buddhahosa moine, érudit et philosophe qui vécut au 5e siècle de notre ère déclara ce qui suit à propos des 5 agrégats :

« Seule la souffrance existe, mais on ne trouve aucun souffrant ; les actes sont, mais on ne trouve pas d’acteur. »

Ce n’est qu’un petit échantillon mais il n’est pas difficile de se représenter la quantité d’ouvrages rédigés dans le but d’éclaircir, de clarifier le message de Bouddha.
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Narkissos

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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeDim 21 Juin 2020, 16:04

J'aime beaucoup ta (dernière) citation -- dont l'idée est d'ailleurs quasiment devenue un lieu commun de la pensée occidentale contemporaine, sans que le bouddhisme y soit pour grand-chose (p. ex. de Nietzsche, le "sujet" -- ou aussi bien l'"objet" -- comme illusion ou préjugé grammatical, à Borges et ses fictions de langues purement verbales, sans nom ni substantif, qui ne diraient que des événements à chaque fois singuliers).

On peut envisager une "doctrine" d'au moins deux manières: comme une "information" extérieure qui s'apprend et se comprend superficiellement, se retient et se répète, peu importe qu'elle soit vraie ou fausse, étant le plus souvent invérifiable et irréfutable: il suffit pour cela d'une bonne mémoire et d'une bonne volonté, et à ce tarif toutes les doctrines se valent; ou bien comme un enseignement dont l'apprentissage et l'intellection mêmes constituent une expérience de pensée, "existentielle" comme on dit (ou plutôt "inexistentielle" dans le cas précité: *j'*apprends que *je* n'*existe* pas, ce qui est pour *moi* littéralement abyssal): dans ce cas il n'est pas dit que toutes les doctrines se vaillent, nul ne saurait le dire sans les avoir ainsi éprouvées toutes; et surtout la "théorie" y est elle-même une "pratique".
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeDim 21 Juin 2020, 20:27

La doctrine du non-soi est particulièrement troublante. En effet, il peut paraître étrange de déclarer "je n'existe pas" alors que je peux ressentir le vent sur ma peau, différencier la température de l'eau, je peux manger, être heureux ou malheureux. Mais en fait ces divers ressentis ne constituent pas la preuve de mon existence en tant que personne bien particulière.

En effet, je suis devenu Paul, Pierre, Louis, Hélène, Carole, Jennifer dès le moment ou un prénom m'a attribué et que j'ai été enregistré comme tel dans les registres de ma commune, ma ville. Puis au fil du temps j'ai acquis des réflexes, pris des habitudes venant s'ajouter à mon "héritage" familial. Telle une éponge j'ai appris et imité ce que je voyais et entendais.
De nombreuses personnes mal dans leur peau et leur psyché n'hésitent pas/plus à changer de sexe, afin de mieux vivre ce qu'elles ressentaient depuis longtemps en leur for intérieur. Dès lors à quel moment sont-elles devenues Paul, Pierre, Louis, Hélène, Carole, Jennifer, selon leur nouvelle identité? Il ne m'appartient pas de juger les raisons, les motifs qui ont poussé ces personnes à se lancer dans une transformation si radicale que de changer de sexe. Mais en réfléchissant à de telles modifications personnelles cela me permet de mieux comprendre ce que peut signifier la réalité du non-soi. Il ne s'agit pas de nier la réalité de la vie humaine, mais simplement de mettre en doute celle du soi-même.

Les 5 agrégats que le Bouddha a énumérés ne forment pas une personne.

Voici ce que déclare le moine Walpola Rahula dans son ouvrage : "L'enseignement du Bouddha" :

Ce que nous nommons "être", individu ou moi c'est seulement, selon la philosophie bouddhiste, une combinaison de forces ou d'énergies physiques et mentales en perpétuel changement, qu'on peut diviser en 5 groupes ou agrégats.
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeLun 22 Juin 2020, 02:37

Déjà du temps d'Héraclite on ne se baignait pas deux fois dans le même fleuve, et ce n'était pas seulement la faute du fleuve...

C'est le genre de chose qu'on (qui, on ?) pourrait comprendre mille fois dans une vie (s'il y avait rien de tel qu'une vie, et si la même chose y arrivait plus d'une fois) sans jamais l'avoir compris(e).

C'est aussi le genre de doctrine qui se suffit à soi-même et ne se laisse qu'en apparence insérer dans un corps de doctrine, qu'au fond elle ne peut que subvertir ou neutraliser: comment après ça parler de karma (de qui ?) ou de cycle de renaissances (de quoi ?) ? C'est à peu près l'objection du Siddhartha de Hesse à l'autre Siddhartha, ou l'équation mahayanesque samsâra = nirvâna -- la même remarque vaudrait, mutatis mutandis, pour plusieurs énoncés évangéliques qui constituent pour ainsi dire un évangile à soi tout seul, comme "ne jugez pas, et vous ne serez pas jugés" ou "aimez vos ennemis, et vous serez fils de votre père qui est aux cieux, lui qui fait lever son soleil sur les méchants et les bons et pleuvoir sur les justes et les injustes": chacun d'eux rend superflue toute autre doctrine, et pourtant ils s'intègrent et s'agrègent tant bien que mal à une doctrine complexe, de sorte qu'il est impossible de prendre à la fois au sérieux la doctrine particulière et l'ensemble doctrinal, au risque de ne plus entendre ni l'une ni l'autre...
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeLun 22 Juin 2020, 14:34

Tu me donnes envie de relire Siddhartha de Hermann Hess avec plus de circonspection que lors de ma première lecture.
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeLun 22 Juin 2020, 14:39

Narkissos a écrit:
C'est aussi le genre de doctrine qui se suffit à soi-même et ne se laisse qu'en apparence insérer dans un corps de doctrine, qu'au fond elle ne peut que subvertir ou neutraliser: comment après ça parler de karma (de qui ?) ou de cycle de renaissances (de quoi ?) ? C'est à peu près l'objection du Siddhartha de Hesse à l'autre Siddhartha, ou l'équation mahayanesque samsâra = nirvâna

En fait le pratiquant bouddhiste est encouragé à se concentrer sur l'instant présent et à cesser de se demander ce qu'il y avait avant (sa naissance) et à tenter de se projeter dans un futur dont il ne peut qu'essayer d'imaginer la réalité...
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeLun 22 Juin 2020, 23:28

Voici ce que j'ai trouvé à propos de Héraclite :

Disciples et critiques d’Héraclite

Héraclite est un penseur présocratique important à étudier parce que Platon et Aristote – considérés comme les deux philosophes majeurs de l’Antiquité et dont l’opposition structure de larges aspects de la pensée philosophique occidentale – ont conçu une part essentielle de leur doctrine en réponse à sa théorie du mouvement universel et au relativisme qu’elle fait naître.Platon s’est placé dans les pas du mobilisme héraclitéen en ce qui concerne le monde sensible, c’est-à-dire le monde qui nous entoure et dont nous faisons quotidiennement l’expérience par nos sens. Cependant, à la différence d’Héraclite, Platon considère qu’il existe quelque chose qui échappe au changement. Comme le monde est par définition changeant, ce qui demeure identique à soi dans l’éternité doit nécessairement se situer hors du monde. Les premières réalités qui lui ont semblé échapper au flux cosmique sont les vertus morales, au premier rang desquelles la justice. Peu importe les transformations que subit l’humanité, l’évolution des contextes et des circonstances, la définition de la justice demeure une et la même, quoiqu’elle ne soit jamais réalisée parfaitement ici-bas. À côté de la morale, on trouve les mathématiques. Les vérités mathématiques elles aussi échappent aux mouvements et aux modifications. En cela, elles témoignent de l’existence d’un lieu autre que le monde sensible. Par la morale et les mathématiques, Platon a tenté de s’évader du flux héraclitéen et atteindre un domaine qui ne subit pas de changements, celui des Idées, c’est-à-dire des vérités éternelles et transcendantes. Le monde sensible ne peut que participer de manière lointaine aux Idées, mais il en reste irrémédiablement séparé.

Aristote, à l’inverse, s’est opposé à l’idée d’une mobilité universelle du sensible. Selon lui, Héraclite a commis deux graves erreurs. Tout d’abord il a confondu mouvement et changement : ce qui se meut n’est pas nécessairement transformé par son mouvement mais peut rester identique à lui-même. Ainsi, je peux me déplacer d’un point A à un point B sans en être pour autant changé. Ensuite, Héraclite n’a pas vu qu’au sein même du sensible, caché derrière les soubresauts continuels de la surface, se trouve une réalité qui demeure stable : la substance. En latin, substantia signifie « ce qui se tient sous » les mouvements. Certes nos visages, nos habitudes, nos désirs, notre silhouette changent, mais derrière ces changements superficiels se maintient une réalité plus profonde en laquelle se joue notre essence, que nous pourrions appeler notre humanité ou notre personnalité. Le chat a vieilli, il a même perdu un bout de sa queue et un œil, mais il reste un chat. Son essence, incarné par sa substance, demeure une et la même.

Platon, resté héraclitéen, avait cru nécessaire de fuir hors du monde pour trouver une réalité stable susceptible d’asseoir la connaissance. Aristote, pour sa part, s’est efforcé de montrer qu’il n’est pas requis d’aller chercher loin du monde la stabilité. Elle se trouve sous nos yeux, sous-jacente aux bruissements permanents qui nous entourent : on la perçoit notamment au sein du vivant, dans les traits essentiels à chaque espèce, qui se maintiennent dans les individus à travers les âges.
Jehan SimonDiplômé de SciencesPo et agrégé de philosophie

En savoir plus sur https://www.laculturegenerale.com/on-ne-se-baigne-jamais-deux-fois-dans-le-meme-fleuve-heraclite/ | La culture générale
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeMar 23 Juin 2020, 00:55

Comme si nous n'en avions jamais parlé... (c.q.f.d.) :)

Ce que j'essayais de dire à l'embranchement de la discussion (20-21.6.2020) dont est parti le présent fil, c'est que la construction d'une doctrine complexe ne répond pas seulement à des nécessités d'ordre logique, comme le développement d'une idée simple ou l'explication de ses implications: il y a aussi des nécessités d'ordre historique, politique ou diplomatique, donc paradoxalement contingentes, comme celle de faire place à des points de vue différents résultant de logiques différentes. D'où mon analogie graphique: le dessin se complique à mesure que chacun veut l'enrichir, le compléter ou l'améliorer, en le comprenant à chaque fois un peu différemment, et qui pour cette raison ne peut plus jamais se réduire à une idée simple ni même à un ensemble d'idées cohérent.

D'où l'impossibilité, mais aussi la tentation récurrente, de revenir d'une telle complexité hétéroclite à une origine présumée simple et pure; par exemple l'enseignement d'un fondateur (Bouddha comme Moïse, Jésus, Paul ou Mahomet), soit par le privilège accordé à certains écrits ou traditions supposés 100 % "authentiques", en tâchant de les interpréter de façon à en "harmoniser" les divergences, soit par une critique historique qui vise au fond le même but, malgré une antinomie de méthode: dégager de ces écrits ou de ces traditions un noyau supposé original, authentique et homogène -- ce qu'en réalité on ne trouve jamais, mais toujours de la complexité, différente mais tout aussi complexe aussi loin qu'on remonte.
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeMar 23 Juin 2020, 13:13

Merci je n'aurais pas retrouver cette discussion sur le néant et l'être. Un vrai trésor.

Ce que j'ai aimé c'est la remarque suivante:

"Le néant", bien sûr, n'a aucun sens, c'est une fausse piste, un chemin impraticable pour la pensée: le Poème de Parménide ne dit pas autre chose. Rien que le nommer, c'est déjà une absurdité. "Le néant" n'est rien, il n'y a pas de "néant". N'empêche qu'à chaque fois qu'on parle d'"être" il est impliqué, comme le (sans-)fond dont "être" se détache. "Le néant" vient à la pensée comme "l'être", en même temps. Et pourtant chaque fois que je dis "être", je dois penser "néant" (ou "rien") avant; même si je le pense après. C'est une priorité logique qui n'a rien de chronologique, et qui ne peut pourtant s'exprimer que de façon chronologique (comme dans un mythe de création ex nihilo).



Le Bouddha voulait démontrer que notre mal être vient du fait de l'attachement à des êtres, des choses qui ne font que passer et qu'en être conscient peut nous aider à mieux vivre l'instant présent.
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeMar 23 Juin 2020, 22:11

C'est à nouveau la question du "détachement" (lâcher-prise, Gelassenheit, etc.) dont nous avons souvent parlé dans cette rubrique et ailleurs. Que je crois absolument vital pour certains, à certains moments du moins, et impossible voire néfaste à la plupart, la plupart du temps. Remède des uns, poison des autres, parfois des mêmes, l'éternel problème du pharmakon.

Il trouve une solution toute simple au temps du supermarché mondialisé des religions: chaque consommateur choisit ce qui lui plaît, il peut même essayer plusieurs articles pour voir ce qui lui convient le mieux, et en changer à son gré au fil du temps. Ce n'est cependant pas dans un tel cadre que les grandes traditions religieuses se sont construites, mais dans un monde où le choix d'une religion ou le changement de religion étaient une affaire exceptionnelle et largement collective, un roi ou un prince y engageant son royaume ou sa principauté. Or une religion qui doit assumer le destin d'une société ou d'un peuple ne peut pas calibrer sa doctrine sur les besoins (p. ex. de "détachement") de quelques-uns; elle continue fatalement de parler "carotte" et "bâton" à la grande majorité des sujets par qui la vie (notamment économique) continue, précisément parce qu'ils n'en sont pas détachés... Cela fait partie des nécessités non logiques, mais historiques, de la complexité et des contradictions d'une doctrine, au sens de "corps de doctrine(s)" hétéroclite.
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeMer 24 Juin 2020, 10:55

Le fait de choisir sa religion "au supermarché mondialisé des religions" ne dépend-il pas d'une certaine liberté que la société accorde à tout un chacun?

La doctrine de Bouddha s'est répandue en occident à la fin du 19e siècle qui n'était pas encore un temps de grandes libertés. Depuis cette époque et l'intérêt marqué pour lui le bouddhisme a tenté de s'approcher "des consommateurs" occidentaux.

Dans le canton de Genève, certains villages sont "catholiques", "protestants" en fonction du choix des autorités au moment de la réforme. D'autres villages sont devenus suisse lors du traité de Vienne en 1815 et qu'il devenait nécessaire d'attribuer des terrains supplémentaires à Genève. Ces villages transférés sont demeurés catholiques au sein d'un canton protestant. Encore à notre époque certaines familles de ces villages sont très attachées à l'église catholique, plus pratiquantes que le sont celles habitant en ville.

Dans le milieu du 19e siècle la Suisse a connu une guerre civile aux relents religieux, la guerre du Sonderbund :

La Suisse du début du XIXe siècle est marquée par des tensions religieuses et politiques entre cantons. Les cantons conservateurs catholiques sont en opposition avec les radicaux. Ainsi, en 1841, plusieurs couvents sont fermés par les radicaux en Argovie. Le parti radical travaille ainsi au renforcement du pouvoir fédéral, tandis que des Corps-Francs tentent des coups de main contre les cantons catholiques, comme la tentative d'invasion du canton de Lucerne par Ulrich Ochsenbein avec 3 500 volontaires le 31 mars 1845, qui échoue face à la résistance des troupes cantonales.
Le 11 décembre 1845, sept cantons conservateurs à majorité catholique (Uri, Schwytz, Unterwald, Lucerne, Zoug, Fribourg et le Valais) s'unissent dans une coalition politique et militaire appelée Sonderbund. Le pacte, d'abord secret, est révélé en juin 18461.
Le 20 juillet 1847, la Diète fédérale vote une motion de dissolution de la coalition, approuvée par une majorité de 12 cantons, refusée par les cantons du Sonderbund. Sur la proposition du canton de Zurich, la Diète tente une ultime médiation pour éviter la confrontation armée en envoyant, auprès du gouvernement de chacun des membres de la coalition, deux représentants (un catholique et un protestant) porteurs d'une invitation à renoncer à l'alliance. (Wikipedia)

Je ne sais pas si la religion est sortie grandie de ce conflit. Jusqu'au début du 20e siècle, en Suisse, les catholiques et les protestants se sont regardés comme des chiens de faïence.

Bien sûr un tel conflit n'est pas unique dans l'histoire de l'humanité mais il m'a toujours surpris et laissé un goût amer. Un petit pays a connu il n'y a pas si longtemps une "guerre fratricide" à cause de la religion et pas n'importe laquelle celle se réclamant du Christ.

Je n'aime pas cette idée de supermarché des religions même si je comprends ta remarque, car il donne l'impression que l'homme se détache de sa religion "maternelle" et de son pays pour se faire plaisir. Cependant il me semble avoir découvert en lisant le N.T. que chaque individu était concerné et devait prendre sa responsabilité, mais je peux me tromper.
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeMer 24 Juin 2020, 15:09

La "liberté de religion", avec le choix et la responsabilité qu'elle implique, est pour nous une fatalité au même titre que l'était ou l'est encore, en d'autres temps ou en d'autres lieux, l'appartenance à une religion donnée sans le moindre soupçon de liberté... Je ne porte là-dessus aucun jugement de valeur, je constate simplement que les grandes et vieilles traditions religieuses se sont construites dans un monde beaucoup moins "libre" que le nôtre. Il n'est toutefois pas interdit de comparer, quantitativement et qualitativement, les productions des différentes époques: la "liberté religieuse" a certes produit des "sectes" en abondance, mais celles-ci continuent de se référer, pour l'essentiel, aux traditions des époques moins "libres".

Il est certain que le bouddhisme à ses débuts, comme le christianisme, les "cultes à mystère", les "gnosticismes" ou les "écoles" philosophiques, et même l'islam ou le protestantisme à leurs débuts, impliquaient de leurs adeptes un certain "choix" par rapport à des religions plus anciennes (hindouisme, judaïsme, paganismes ou catholicisme ancestraux), et donc l'usage d'une liberté qui n'était pas a priori reconnue comme un "droit", mais revendiquée et gagnée par un conflit plus ou moins violent. Mais dès la deuxième génération des "nouvelles religions" ce qui avait été perçu comme un devoir de désobéissance et de singularisation est à nouveau perçu comme un devoir d'obéissance et de conformité à la religion de ses parents...

Ajoutons à cela que dans le monde ancien, médiéval, et encore aux débuts de l'époque moderne la "liberté de religion" est entendue dans un sens beaucoup moins "individuel" que celui où nous l'entendons: il y a déjà dans les Actes des conversions de "maisonnées", ce qui, s'agissant de personnages plus ou moins importants, implique non seulement femme et enfants, mais aussi esclaves, affranchis et "clients" au sens du clientélisme gréco-romain. Et dès lors qu'il y a des conversions de rois ou de princes (dès le début du IIIe siècle pour Abgar d'Edesse, en attendant Constantin; cf. quatre siècles plus tôt, le rôle de l'empereur Ashoka côté bouddhiste), on a affaire à des "sociétés" et à des "peuples" entiers dont la religion doit assumer la totalité, ce qui ne peut pas manquer d'influer sur la construction de sa doctrine.

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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeMer 24 Juin 2020, 15:28

Merci Narkissos pour ton excellente réponse que j'apprécie.
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeMer 24 Juin 2020, 20:58

J'aurais peut-être dû dire aussi, bien que ce ne soit qu'un corollaire de ce qui précède, que la religion privée du "simple particulier" moderne, qui n'engage que lui le cas échéant, n'a plus les mêmes fonctions que celle d'un prince, d'un roi ou d'un empereur qui entend régler sur elle l'administration de toute une société, d'un peuple ou d'un ensemble de peuples. Par là même une grande partie de la doctrine traditionnelle, élaborée dans de tout autres situations et face à de tout autres nécessités, devient sans objet. Celui qui pratique "le bouddhisme" comme voie d'éveil ou de "spiritualité" strictement individuelle et intérieure n'a plus le besoin ni l'usage des théories générales sur la réincarnation des âmes, le karma ou les enfers, les dieux et démons, qui avaient par contre toute leur place dans une religion "populaire" qui était aussi, bon gré mal gré, un instrument de pouvoir.
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeJeu 25 Juin 2020, 23:36

J'ai donc repris avec grand plaisir la lecture de "Siddhartha" de Hermann Hesse.

Une première remarque m'est venue à l'esprit : ce petit-fils de pasteur, ce fils de pasteur a sans doute été impressionné par l'histoire biblique du fils prodigue, à tel point qu'il en a composé une variante lorsqu'il écrit l'abandon de la vie (mondaine) que Siddhartha avait connue après sa vie d'ascète.

En effet ce dernier quitte la belle Kamala avec laquelle il a entretenu des rapports amoureux brûlants, il délaisse le commerçant Kamaswami qui lui a pourtant tout appris en matière commerciale. Il laisse la vie facile et s'en va tel "un pèlerin" pour se retrouver au bord du fleuve qu'il avait traversé sur un bac.

Bien sûr le contexte est différent il ne revient pas vers son père. Cependant, il décide de continuer sa recherche de vérité et dans un sens se retrouve tel qu'il l'avait été lorsqu'il avait demandé la permission à son père de pouvoir devenir un Samana alors qu'il jouissait d'une vie confortable voire luxueuse.

Narkissos a écrit:
C'est aussi le genre de doctrine qui se suffit à soi-même et ne se laisse qu'en apparence insérer dans un corps de doctrine, qu'au fond elle ne peut que subvertir ou neutraliser: comment après ça parler de karma (de qui ?) ou de cycle de renaissances (de quoi ?) ? C'est à peu près l'objection du Siddhartha de Hesse à l'autre Siddhartha, ou l'équation mahayanesque samsâra = nirvâna --  

p.62 (extrait)
Il se souvenait des paroles mêmes qu'il avait dites au Sublime : chacune d'elles lui revenait à l'esprit et il était tout étonné de s'apercevoir qu'il avait dit des choses que lui-même, à ce moment, ne savait pas. Il avait dit à Gotama que le vrai trésor et le secret de la puissance de Bouddha n'étaient pas sa doctrine même, mais cette chose inexprimable que n'enseignait aucune doctrine et qu'il avait vécue à l'heure de son illumination.

p.48, 49 (extraits)
Hier , ô Sublime, il me fût donné d'entendre ta merveilleuse doctrine.... Tout, en elle, est parfaitement clair, parfaitement démontré; tu représentes le monde sous la forme d'une chaîne parfaite, que rien n'interrompt en aucun endroit, une chaîne infinie faite de causes et d'effets.... Mais d'après ta doctrine même, cette unité et cette suite logique de toutes les choses se trouvent pourtant interrompues en un point, et, par cette petite brèche, pénètre dans ce monde qui doit être toute unité, quelque chose d'étrange, quelque chose de nouveau et qui n'existait pas auparavant et qui ne peut être montré ni démontré: c'est ton enseignement de la manière de vaincre le monde, de s'en délivrer.
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeVen 26 Juin 2020, 01:11

L'idée que j'en avais retenue (ça remonte à quelque 35 ans, mais il est facile de se rafraîchir la mémoire sur Internet, du moins en allemand ou en anglais), c'est qu'il faut avoir traversé le fleuve plus d'une fois et en plus d'un sens (de la ville au désert et du désert à la ville, vers l'ascétisme et l'impassibilité comme vers la jouissance et la souffrance, etc.) pour accéder à la révélation du fleuve lui-même, dans un rapport au fleuve qui n'est plus celui du passager mais du passeur, autrement passant comme le fleuve même (cf. chapitre 12). C'est assez différent de la parabole du fils prodigue ou des deux fils selon Luc 15, qui conserve la notion d'un "bon" et d'un "mauvais" côté, même s'il faut là aussi quitter le "bon" et aller vers le "mauvais" pour revenir (idée similaire d'ailleurs pour les deux fils de Matthieu 21, seul celui qui a d'abord dit "non" fait "oui", celui qui dit tout de suite "oui" ne fait rien). Mais il reste peut-être quelque chose de la "grâce" protestante (fortement indianisée) dans cette idée de révélation à la fois ultime et coextensive à la vie (celle-ci étant plutôt transfigurée que rédimée), de même que dans l'interprétation de l'"éveil" bouddhique ainsi paradoxalement réalisé quoique d'abord refusé.

L'antinomie à laquelle je pensais entre, d'une part, la doctrine du karma et du samsâra, du cycle infini de la naissance et de la mort, du désir et de la souffrance, et d'autre part celle de l'éveil interrompant ledit cycle contre sa "logique" pourtant sans faille, est bien celle du chapitre 3 (ta dernière citation). Dont le mahayâna, pour ce que j'en ai compris, offre une autre solution paradoxale en identifiant la contemplation de la première à la seconde: comprendre le cycle même comme sans issue, c'est une issue paradoxale et la seule possible, de type "gnostique" (c'est aussi à peu près ce qu'en avait retenu Schopenhauer).
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeVen 26 Juin 2020, 13:27

Ce qui m’a fait penser à l’histoire du fils prodigue c’est la demande de Siddhartha faite à son père de partir afin de devenir un Samana.

Cette rupture dans la vie de Siddhartha et du père également est très profonde. A son père il ne demande pas d’avoir sa part d’héritage, maintenant, non au contraire il se sépare de cet héritage, de son parcours de vie tout tracé : devenir un Brahmane.

Dans les deux cas on peut se représenter le père mis devant une demande hors de propos et à laquelle il va devoir répondre…
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeVen 26 Juin 2020, 14:09

C'est, bien sûr, une variation sur la légende de Siddhartha Gautama (le futur Bouddha) lui-même, qui aurait découvert la souffrance en sortant du palais royal, puis quitté la ville pour une initiation ascétique, avant l'éveil à la "voie du milieu".
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeVen 26 Juin 2020, 15:04

Ce qui m'étonne et passionne en même temps c'est la réflexion de Vasudeva à la suite d'une question de Siddhartha, alors qu'ils vivent les deux au bord du fleuve :

un jour il [Siddhartha] lui posa cette question [p.120] : Est-ce que le fleuve t'a aussi initié à ce mystère : que le temps n'existe pas ?
-Oui, Siddhartha, lui répondit-il. Tu veux dire sans doute que le fleuve est partout simultanément; à sa source et à son embouchure, à la cataracte, au bac, au rapide, dans la mer, à la montagne; partout en même temps, et qu'il n'y a pas pour lui la moindre parcelle de passé ou la plus petite idée d'avenir mais seulement le présent?  (fin de citation)

Je parviens à comprendre et accepter que le passé ne peut être rejoué et qu'il est bien difficile d'imaginer avec certitude le futur, mais que le temps en vient à ne pas exister à l'exception du présent cela m'interpelle. Et bien plus que tu ne peux, Narkissos, l'imaginer, car j'avais déjà lu ce passage lors de ma découverte de l'ouvrage. Surtout par le fait que Siddhartha applique à sa vie, la déclaration de Vasudeva à propos du fleuve.
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeVen 26 Juin 2020, 16:59

Le chapelier toqué, je veux dire le Mad Hatter de Lewis Carroll, est un spécialiste de la question (voir en particulier le chapitre 7 d'Alice) :)

Il y a aussi ce dialogue dans Through the Looking-Glass, chapitre 9, qui perd beaucoup en traduction (parce que "time" doit être rendu différemment, "à la fois", "parfois", "cinq fois plus", etc.):

Citation :
Alice was puzzled. ‘In our country,’ she remarked, ‘there’s only one day at a time.’

The Red Queen said, ‘That’s a poor thin way of doing things. Now here, we mostly have days and nights two or three at a time, and sometimes in the winter we take as many as five nights together—for warmth, you know.’

‘Are five nights warmer than one night, then?’ Alice ventured to ask.

‘Five times as warm, of course.’

‘But they should be five times as cold, by the same rule—’

‘Just so!’ cried the Red Queen. ‘Five times as warm, and five times as cold—just as I’m five times as rich as you are, and five times as clever!’

Alice sighed and gave it up. ‘It’s exactly like a riddle with no answer!’ she thought.



Ce que nous appelons "le temps" est sans doute dans toutes les langues, cultures, religions, sagesses ou philosophies, mais dans chacune différemment, l'essence, la matière, le sujet, l'objet, le moyen, la condition et l'horizon de toute "pensée", tout en n'étant rien, rien de particulier ni de déterminable.

"Le présent" n'est pas une "exception", ni une "partie" du temps, mais sa totalité non totalisable: le prétendu passé n'est tel que pour avoir été un présent, le futur hypothétique n'en serait un que s'il devait être un jour présent; en plus d'un sens il n'y aura jamais eu que du présent: au futur antérieur qui est ici une fiction bien pratique (le "point de vue" d'un temps d'après tous les temps qui ne serait pas un temps comme les autres),  tout "temps" aura été "présent", en son temps, et nul "temps" ne l'aura cependant jamais été sans avoir en son temps un passé et un avenir qui n'étaient pas, pour lui, présents. Passé, présent et avenir dépendent à chaque fois d'un point de vue ou d'une situation, qu'on peut représenter spatialement comme un curseur sur une ligne, ou comme la totalité de la ligne, mais en oubliant systématiquement ce dont on parle, car ce n'est ni un point ni une ligne, ni un plan ni un espace, mais la condition même de tout cela -- espacement constitutif de l'être, des événements et des choses sans lequel il n'y a ni chose, ni événement, ni être. Dire qu'*il* n'existe pas ou que *lui* seul existe, qu'*il* est précisément tout ce qui existe ou rien de ce qui existe, cela revient rigoureusement au même. Ce sont probablement des questions qui viennent à l'esprit de tous les enfants du monde un jour ou l'autre, mais qui trouvent plus ou moins d'écho dans la culture environnante selon que celle-ci a su les exprimer, les développer ou les méditer, ou les a au contraire refoulées. A cet égard, la culture occidentale moderne qui calcule d'autant mieux (avec) "le temps" qu'elle ne considère pas son essence, ou son inessence, comme digne de question ou de méditation, pourrait bien être la plus indigente.
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeSam 27 Juin 2020, 15:40

Je n'ai pas lu Alice, mais j'ai vu le dessin animé que Disney a créé dans le courant des années 1950 et je l'ai toujours aimé d'ou le chapelier toqué...

Je ne sais si je me suis préoccupé de me poser des questions sur le temps lorsque j'étais enfant, mais comme la plupart des enfants j'évoquais les métiers que je voulais faire sans vraiment me projeter dans le futur, vivant trop intensément dans l'instant présent.


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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeDim 28 Juin 2020, 21:59

Le roman "Siddhartha" de Hermann Hesse est intéressant par la manière dont l'auteur intègre une partie de la doctrine de celui qu'il appelle "le Sublime", Bouddha.
Bien que déclarant ne pas se sentir bouddhiste Hermann Hesse en a assimilé une partie de la doctrine. Certes il ne tente pas d'apporter une consolation au lecteur ressentant cette souffrance, cette insatisfaction qui amena le Bouddha a déclarer que nous sommes responsables de nos ressentis. Mais il décrit avec élégance cette spiritualité et la traite sans mépris.
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeDim 28 Juin 2020, 23:56

J'ai découvert le dessin animé un demi-siècle après sa parution, avec les vidéos de ma fille, mais c'est bien lui qui m'a donné envie de lire les textes de Lewis Carroll, que jusque-là je ne connaissais que de réputation. Ils valent le détour, même si l'adaptation de Disney est excellente dans son genre -- c'est surtout en traduction qu'on y perd beaucoup, vu l'importance des jeux sur la langue anglaise dans cette oeuvre.

Les parents de Hermann Hesse avaient tout deux été missionnaires en Inde, sa mère y était née. Il était plus proche à mon avis d'un certain hindouisme que du bouddhisme, mais au fond c'est surtout avec le christianisme et la modernité post-chrétienne qu'il s'explique (ce qui est sans doute plus apparent dans ses livres moins "indiens", comme Peter Kamenzind, Demian, Le loup des steppes, Narcisse et Goldmund, le Jeu des perles de verres ou même le Voyage en Orient). Et il est bien possible que ce qu'il "reproche" au bouddhisme dans Siddhartha, bien qu'il le traite en effet avec beaucoup de déférence, soit avant tout une figure du "salut" chrétien.
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeMar 30 Juin 2020, 13:14

Je viens de prendre connaissance de la "biographie" de Hermann Hesse (le livre Siddhartha en donne une version également) et la photo le représentant avec un col amidonné lui donne un cou allongé et un aspect sévère (genre missionnaire chrétien...).

Le livre Loup des steppes est d'un genre bien différent et j'avoue avoir de la peine à le lire d'un seul trait en dépit de son texte remarquable.

J'ai beaucoup apprécié le jeu des perles de verre et je vais le relire ces prochains jours...
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitimeMar 30 Juin 2020, 17:07

Le loup des steppes est sans doute le seul livre que j'aie relu presque aussitôt après l'avoir terminé, et en le comprenant (?) très différemment à la deuxième lecture -- c'était au Béthel de Louviers, à un moment tout à fait décisif pour moi, même si l'oeuvre de Hesse en était plutôt l'occasion que la cause.

Si mes souvenirs sont bons, la deuxième des "biographies" annexées au Glasperlenspiel (entre le "faiseur de pluie" et le "père confesseur") est également "indienne".
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MessageSujet: Re: Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine   Il n'y a pas de théologie bouddhiste mais de la doctrine Icon_minitime

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