inter-minables

Je suis ravi d'entendre Filiu, que j'ai lu avec beaucoup d'intérêt pendant des mois sur son blog du "Monde" avant qu'une intégration supplémentaire dudit blog dans le site du "journal" ne me prive de l'accès à ses billets, faute d'abonnement...

Cela dit, j'ai l'impression qu'on tombe dans un piège symétrique quand on confond "l'Occident" qui soutient aveuglément Israël contre le Hamas avec celui qui soutient l'Ukraine contre la Russie, alors que les rapports de force sont inverses... (Marx, réveille-toi !)

Où s'arrête vraiment "l'arc républicain" ?

https://www.youtube.com/watch?v=YLVEl22OkOA


Manuel Bompard Réponse à Meyer Habib LE SILENCE EST LA MEILLEURE RÉPONSE AUX IMBÉCILES

https://www.youtube.com/watch?v=pQCx4r65fqU

Aux excellentes remarques de Viktorovitch j'ajouterais ceci, que j'ai souvent dit mais qu'on a tendance à oublier: on n'est absolument pas obligé d'être républicain dans (ou sous) une République, pas plus que d'être monarchiste dans (ou sous) une monarchie; on est "soumis" à ses lois, en ce seul sens qu'on est puni comme tout le monde si on les transgresse (et si on se fait prendre), pas même au sens où on s'engagerait, sincèrement ou non, à les respecter... C'est tout ce qui différencie un état de droit d'un régime totalitaire.

Tout autre est à mon avis la question de la "représentation nationale": on peut comprendre qu'une République, ou une démocratie, qui entend rester ce qu'elle est, ne pas perdre son essence, sa nature, sa qualité, sa quiddité ou son identité par le simple dérèglement de son fonctionnement, exclue de ses institutions représentatives ceux qui ne veulent pas jouer son jeu selon ses règles -- ce qui ne signifie ni les chasser d'un territoire ni restreindre leur liberté d'expression, simplement les mettre hors du jeu législatif. Il s'ensuivrait que des "révolutionnaires" au sens strict, déclarés ou masqués et de droite ou de gauche, n'auraient rien à faire dans une institution qu'ils souhaitent renverser. Sur ce critère, paradoxalement, les pires aberrations viendraient en effet de LR plutôt que du RN, et du RN plutôt que de LFI (encore qu'en toute rigueur, vouloir une "sixième république" ce serait aussi s'exclure de la cinquième; mais de tout ça il n'est plus guère question à LFI, me semble-t-il)...

Pour le dire (encore) autrement: il aurait fallu réfléchir avant d'autoriser des partis plus ou moins ouvertement "antirépublicains" ou "antidémocratiques" à accéder à une représentation républicaine et démocratique. Quand c'est fait c'est trop tard, mais la "République" et la "démocratie" ont déjà par là même signé leur arrêt de mort, dont les institutions (structurellement anti-démocratiques) garantes de "l'état de droit" comme le Conseil constitutionnel ne peuvent que retarder l'exécution...

PALESTINE : « Toutes les vies se valent »... mais certaines valent plus que d'autres

La rhétorique de hiérarchisation des victimes à repris de l'écho à l'occasion de l'hommage aux victimes françaises du 7 octobre. Pour Elsa Marcel, invitée sur Le Média, cette distinction affichée entre "victimes de terrorisme" et "victimes de guerre" ne sert qu'à justifier le génocide du peuple palestinien.

https://www.youtube.com/watch?v=LQo9oJziXAM


Guerre Israël-Hamas : un tribunal des Pays-Bas ordonne l’arrêt des livraisons de pièces de chasseurs F-35 à l’armée israélienne

Des organisations de défense des droits humains avaient intenté l’action en justice, arguant que la fourniture de ces pièces contribue aux violations présumées du droit international par Israël dans sa guerre contre le Hamas.

 Les Pays-Bas doivent cesser de livrer des pièces d’avions de combat F-35 utilisés par Israël dans la bande de Gaza, a déclaré la cour d’appel de La Haye lundi 12 février, donnant raison à des organisations de défense des droits humains. Dans sa décision, le tribunal néerlandais a ordonné à l’Etat de « cesser toute exportation et transit réels de pièces de F-35 vers la destination finale Israël dans les sept jours suivant la signification de ce jugement ».

Selon la cour, ces pièces risquent d’être utilisées dans des actions qui violent le droit humanitaire international, comme des frappes contre les civils dans la guerre entre Israël et le Hamas. Par ailleurs, la cour a jugé que le maintien des bonnes relations avec les Etats-Unis et Israël, en jeu dans cette affaire selon l’Etat néerlandais, n’était pas un bon argument pour poursuivre l’exportation des pièces.

https://www.lemonde.fr/international/article/2024/02/12/aux-pays-bas-un-tribunal-ordonne-l-arret-des-livraisons-de-pieces-de-chasseurs-f-35-a-israel_6216109_3210.html

Je crois avoir souvent dit (cf. p. ex. supra 16.10.2023), fût-ce dans le désert, que la connerie originaire en la matière consiste à associer la notion foncièrement économique de "valeur" à celle de "vie": à partir de là on ne dira plus que des conneries, qu'elles soient immondes ou sublimes (comme dans le Coran où la vie d'un homme "vaudrait" celle de toute l'humanité, ce qui neutralise d'avance toute "valeur", toute évaluation, toute comparaison, tout calcul et tout jugement en prétendant les fonder). On peut métaphoriser autant qu'on veut le concept de "valeur", c'est toujours l'économique qui prévaudra sur toutes ses métaphores, même "morales". Du moment qu'une "vie" est traductible ou convertible en autre chose qu'elle-même, fût-ce "une autre vie" sur le mode du talion, et en dernière analyse en "argent" (monnaie, échange, compensation, indemnité, dommages-intérêts, rançon), c'en est fini de sa prétendue singularité, qui ne serait que d'échapper à toute "valeur" et à tout calcul, y compris à toute "égalité" ou "équi-valence"...

Moyennant quoi le calcul sert au moins à nous montrer l'énormité des couleuvres que nous fait avaler le jeu pervers de l'évaluation prétendue "morale", qui mêle le "qualitatif" (guerre ou terrorisme, collatéral ou intentionnel) au "quantitatif" (du nombre des morts, ou des "vies" ou des "corps" atteints, dont on ne sait même pas ce qui est plus ou moins "grave")...

Je remarque au passage que le français ne sait traduire qu'en termes "comptables" ce que l'anglais dit autrement: (Black, Women, Palestinian) lives matter, chez nous ça "compte"... Mais "matter(s)" ça ne veut dire "ça compte" qu'au sens de "ça importe", "c'est quelque chose, ce n'est pas rien"... entre l''être" et le "compte" il y a un abîme.

Quelles conséquences si le droit du sol est abrogé ?

« Le droit du sol, tel qu’il a été institué en 1889, n’a même pas été changé sous Vichy », expliquait sur France Inter l’historien et politologue Patrick Weil, spécialiste des questions d’immigration et de citoyenneté, en 2015. « Le droit du sol fait partie des principes de la République. c’est progressif, ça s’applique aux petits-enfants d’étrangers nés en France. Si on le mettait en cause, qui serait le plus touché ? 95% des Français. Nous sommes, pour la plupart d’entre nous, à la fois Français par la naissance en France et par un parent français. Mais le jour où vous ne pouvez plus le prouver par la naissance en France, c’est un cauchemar. (…) En proposant l’abolition du droit du sol, on foutrait dans un désordre juridique et identitaire 95% des Français ».

https://www.caminteresse.fr/histoire/quest-ce-que-le-droit-du-sol-11184544/

Contre toute vraisemblance géographique, historique ou légendaire, le "droit-du-sol-à-Mayotte" est un cheval de Troie rêvé pour l'extrême-droite ou la droite tout court qui ne demande qu'à étendre sa suppression à la "métropole", puisque personne en face n'ose poser la seule question sérieuse, qui est de nature "(post-)coloniale": qu'est-ce que "la France" a à fout faire à Mayotte ? Question qui se répercuterait, de proche en proche ou de loin en loin, à tout l'"outre-mer", en passant par les Antilles jusqu'à la Corse, et même à la prétendue métropole: pourquoi diable la vie des Catalans, des Basques, des Bretons ou des Alsaciens se déciderait-elle à Paris ?

La question (post-)coloniale se pose tout autant quand elle ne se pose pas, quand elle est interdite parce que les (ex-)colons et (ex-)colonisés sont d'accord pour le statu quo, puisque celui-ci n'en génère pas moins les disparités régionales (en l'occurrence avec le reste des Comores) qui sont la cause de tous ses problèmes.

C'est un cas d'école de l'intrication de logiques contradictoires, un coup à gauche, un coup à droite, au point de devenir inextricable sinon par la destruction de l'ensemble, alias "l'Etat", "l'Empire" ou "la République indivisible", du fait de ses propres contradictions; mais contrairement à ce que suggère le logion évangélique, un royaume divisé contre lui-même peut tenir pas mal de temps.

Face au droit de grève : un "devoir de travailler" ?

https://www.youtube.com/watch?v=nEJwsvPYz2U

Il m'aura fallu cet "attalisme" (et un commentaire lu entre-temps dans "Le Monde") pour découvrir, un peu tard, qu'il y avait dans (le préambule de) la Constitution (française, de 1946) un "devoir de travailler" -- auquel j'aurai beaucoup manqué... Il me rappelle, par contraste, l'inscription pariétale du jeune Debord, "Ne travaillez jamais": un mot d'ordre pour ou contre un autre, guère plus efficace sur tel ou tel destin...

Je m'étonne à vrai dire que ce type de rhétorique fonctionne toujours, avec ses grosses ficelles et ses généralités abusives: à commencer par "les Français" dans la bouche d'Attal ou de n'importe quel politique, violence permanente à l'égard de tous les "Français" qui ne pensent pas comme eux, sans même parler des autres; la symétrie sophistique des "droits" et des "devoirs" qui cache l'absolue vacuité des uns et des autres; et la commode polysémie du "travail" qui noie toutes les différences de salaire, de statut, de peine, d'intérêt et d'utilité, du PDG aux employés, ou encore du contrôleur et de sa cohorte de para-flics au conducteur de train (là où il y en a encore) et au cheminot qui entretient les voies. Tout le monde "travaille", malheur à celui qui ne "travaille" pas, qui renonce à jouer le jeu du "travail" indistinct opposé tantôt à la grève, tantôt au chômage ou à l'oisiveté, jeu des droits et des devoirs, des "Français" et des X ou Y les uns contre les autres...

« Ecraser Rafah constitue l’ultime étape de cette stratégie de liquidation afin que les Gazaouis quittent en masse leur territoire »

Agnès Levallois et Jean-Paul Chagnollaud, vice-présidente et président de l’Institut de recherche et d’études Méditerranée - Moyen-Orient, expliquent, dans une tribune au « Monde », que l’offensive contre Rafah et la mise en cause de l’UNRWA sont la poursuite d’un seul et même objectif par Nétanyahou : liquider la question palestinienne.

Dans notre monde surmédiatisé, une information chasse l’autre avant même qu’on ait eu le temps d’en comprendre le sens. Et, pourtant, les déclarations de responsables israéliens, la mise en cause radicale de l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés palestiniens) et l’imminente offensive terrestre de l’armée contre Rafah forment un tout très cohérent qui révèle le véritable objectif du gouvernement Nétanyahou : liquider la question palestinienne.

Toutes les déclarations des officiels israéliens convergent pour affirmer leur volonté d’en finir non seulement avec le Hamas, mais avec la population de la bande de Gaza pour qu’elle ne puisse plus y vivre. On les trouve tous les jours dans la presse israélienne. Pour Benyamin Nétanyahou, le 3 novembre 2023 : « C’est une guerre entre les fils de la lumière et les fils des ténèbres. Nous n’abandonnerons pas notre mission tant que la lumière n’aura pas vaincu les ténèbres. »

De son côté, le président Herzog, travailliste, a dit, le 12 octobre : « C’est toute une nation qui est responsable. Tous ces beaux discours sur les civils qui ne savaient rien et ne faisaient rien sont absolument faux. … et nous nous battrons jusqu’à leur briser la colonne vertébrale. » Quant au ministre de la défense, Yoav Gallant, le 9 octobre, il « impose un siège complet à Gaza. Pas d’électricité, pas de nourriture, pas d’eau, pas de combustible. Tout est fermé ». Et d’ajouter : « Ceux que nous combattons sont des animaux et nous agissons en conséquence. »

L’UNRWA est, pour Israël, un obstacle majeur

Le ministre de la sécurité nationale, Itamar Ben Gvir (extrême droite), a expliqué, le 10 novembre : « Pour être clair, lorsque nous disons que le Hamas doit être détruit, cela englobe tous ceux qui apportent leur soutien… Ce sont tous des terroristes et tous doivent également être détruits. » Le général Giora Eiland a réitéré, le 9 octobre, son appel à rendre Gaza inhabitable : « L’Etat d’Israël n’a pas d’autre choix que de faire de Gaza un lieu où il sera temporairement, ou pour toujours, impossible de vivre. »

Ces propos ont été immédiatement mis en œuvre et, comme en miroir, un haut responsable de l’ONU constate que « la situation est devenue apocalyptique pour les Palestiniens chassés dans une poche au sud vivant dans une horreur absolue ». Ils « continuent d’être bombardés sans relâche par Israël, subissent l’état de siège et des destructions et sont privés de l’essentiel, comme la nourriture, l’eau, les fournitures médicales vitales ».

https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/02/17/ecraser-rafah-constitue-l-ultime-etape-de-cette-strategie-de-liquidation-afin-que-les-gazaouis-quittent-en-masse-leur-territoire_6217041_3232.html

(Comment dit-on "solution finale", ou "Endlösung", en hébreu moderne ? -- Réponse ici, puisqu'on trouve tout sur Internet: à la lettre, ha-pitrôn ha-sofi.)

Je ne peux pas lire la suite de l'article du "Monde" (ce que j'en vois s'arrête même un paragraphe avant ton extrait). Comme on avait remarqué précédemment (supra 1.11.2023) chez Netanyahou la citation du trito-Isaïe, avec le mot hamas pour "violence", la "guerre des fils de (la) lumière contre les fils des ténèbres" renvoie à Qoumrân -- soit à une tradition opposée, entre autres, au pharisaïsme, et logiquement non retenue par la tradition rabbinique: là encore ce sont 2000 ans de judaïsme pacifique (fût-ce par la force des choses) qui sont ensevelis, autant que Gaza, par la fuite en avant de l'aventure "sioniste"; l'ironie (grinçante) se compliquerait encore si l'on reconnaissait dans le dualisme photologique (lumière / ténèbres) de Qoumrân et du trito-Isaïe, malgré ce qui les différencie (pacifique ici, guerrier là au moins verbalement), un double reflet contrasté du zoroastrisme perse, ou iranien...

A La Haye, le procès du système d’occupation israélien en Palestine (très peu d'écho dans les chaines d'info). 

La Cour internationale de justice est appelée à statuer sur la légalité du régime militaire imposé par l’Etat hébreu en Cisjordanie et à Gaza. Cinquante-deux Etats plaideront, à partir du lundi 19 février et pour une semaine, devant les magistrats de la plus haute juridiction des Nations unies.

Les juges de la Cour internationale de justice (CIJ) s’apprêtent à ausculter le cœur du conflit israélo-palestinien lors d’audiences organisées au palais de la Paix, à La Haye, du 19 au 26 février. Ces débats ne sont pas liés à la requête de l’Afrique du Sud, qui, fin décembre 2023, a accusé Israël de génocide contre les Palestiniens de Gaza. Les audiences qui s’ouvriront lundi ont été lancées un an plus tôt, en décembre 2022. L’Assemblée générale de l’ONU avait alors demandé à la plus haute juridiction des Nations unies de rendre un « avis » juridique sur l’occupation des territoires palestiniens par Israël.

Selon la résolution adoptée fin 2022 par 87 Etats, avec 53 abstentions et 26 votes contre, les juges sont appelés à tirer « les conséquences juridiques de la violation par Israël du droit des Palestiniens à l’autodétermination, de son occupation, de sa colonisation, et de son annexion prolongée du territoire palestinien depuis 1967 ». En d’autres termes, les magistrats sont chargés de statuer sur la légalité de l’occupation israélienne.

La question n’est pas nouvelle. Le régime imposé par l’Etat hébreu en Cisjordanie et dans la bande de Gaza date de plus d’un demi-siècle. Plusieurs rapports du Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU ont estimé que cette occupation était illégale « en raison de sa permanence et des politiques d’annexion de facto du gouvernement israélien ». Mais aucun juge ne l’a jusqu’ici acté. Si les avis juridiques de la CIJ ne sont pas contraignants, ils ont un poids politique important, rappellent souvent les juristes.

https://www.lemonde.fr/international/article/2024/02/17/a-la-haye-le-proces-du-systeme-d-occupation-israelien-en-palestine_6217055_3210.html


Edgar Morin dénonce l'offensive israélienne sur Gaza

https://www.youtube.com/watch?v=COL6CZsm3cU

Edgar Morin, bientôt 103 ans, s'était déjà distingué sur la question il y a plus de 20 ans.

J'avais vu l'article du "Monde" que tu cites (mais pas plus loin que ton extrait, faute d'abonnement). Il faut bien noter qu'en l'espèce la requête (2022) est largement antérieure à la crise en cours (depuis le 7.10.2023): le tempo de la justice, internationale notamment, n'est pas celui des médias; mais en même temps -- c'est le cas de le dire -- cet anachronisme est chronique dans le conflit israélo-palestinien, qui accumule depuis 80 ans des décisions juridiques et judiciaires sans aucun effet: chaque nouvel épisode de violence valide comme quasi normal l'état antérieur de l'anomalie, et relativise ainsi son propre supplément d'anomalie...

Tout a été dit depuis des millénaires (Hegel ou La Fontaine, Platon ou Esope) sur la dialectique perverse du droit et de la force, qui aurait englouti depuis longtemps l'illusion du droit si l'exercice même d'un rapport de force n'avait besoin d'entretenir cette illusion, pour stabiliser par la négociation des périodes de compromis et de paix entre deux phases de conflit ouvert.

Les États-Unis mettent leur veto à un cessez-le-feu à Gaza

https://www.youtube.com/watch?v=IQYOL797EfM


Cessez-le-feu à Gaza : la stratégie complexe des Etats-Unis à l'ONU

Washington, seul pays à avoir mis son veto à l'ONU à une résolution de l'Algérie appelant à un cessez-le-feu indéfini dans la bande de Gaza, va proposer un texte alternatif appelant à une trêve en des termes qui sonnent comme un avertissement au Premier ministre israélien.

Les Etats-Unis vont essayer de faire passer leur propre résolution sur la bande de Gaza au Conseil de sécurité de l'ONU après avoir mis leur veto, la nuit dernière, à celle de l'Algérie.

Treize des quinze membres du Conseil avaient approuvé cette résolution demandant l'instauration d'un cessez-le-feu immédiat et indéfini, qui ne mentionnait pourtant pas l'attaque terroriste du 7 octobre. Le Royaume-Uni s'est abstenu, mais la France a voté pour, « une manière de préserver son image vis à vis des pays arabes sans prendre trop de risque, estime Shany Mor, chercheur à l'université Reichman, puisqu'elle savait que les Etats-Unis opposeraient leur veto à un appel à cessez-le-feu indéfini, c'est à dire qui aurait accordé de facto une victoire militaire au Hamas ». La motion de l'Algérie, pays qui ne reconnaît pas le droit à l'existence d'Israël, appelait aussi à la libération de tous les otages, au nombre d'une centaine, détenus par le Hamas.

Des discussions byzantines

Washington a justifié son veto, son troisième sur cette question, par le fait que la résolution perturberait la médiation qatarie, égyptienne et américaine en vue de la libération des otages détenus depuis plus de quatre mois par le Hamas en échange d'une trêve de quatre à six semaines. Doha a annoncé le week-end dernier que ces négociations sont actuellement dans l'impasse. Mais une nouvelle réunion des négociateurs devrait se tenir en fin de semaine à Paris.

La résolution des Etats-Unis, qui devrait être présentée d'ici vendredi, appelle à un « cessez-le-feu », la première fois que ce terme est employé par Washington puisqu'il est généralement interprété dans le lexique militaro-diplomatique comme indéfini, ce qui sauverait la mise du Hamas, soumis en ce moment à une très forte pression militaire de Tsahal. Mais la Maison-Blanche lui a accolé les termes « temporaire » et « dès que possible ».

Cet ajustement de la communication de Washington, subtil au point de pouvoir paraître alambiqué, correspond visiblement au désir de marquer une certaine prise de distance envers le gouvernement israélien de Benyamin Netanyahou, qui refuse, lui, la moindre pause. La Maison-Blanche juge le gouvernement israélien trop peu attentif aux victimes collatérales à Gaza. Le ministère de la Santé du Hamas a annoncé, mercredi matin, 29.000 victimes depuis le début de la guerre, peu après le 7 octobre, un ordre de grandeur vraisemblable, au vu de la proportion d'immeubles détruits. La motion des Etats-Unis vise à « faire pression sur le gouvernement israélien pour s'assurer qu'il fait les efforts nécessaires afin de limiter les pertes civiles lors de l'offensive inéluctable sur Rafah, d'ailleurs Tsahal prépare des plans sérieux en ce sens », estime Emmanuel Navon, professeur de relations internationales à l'Université de Tel Aviv.

La question du contre-veto russe

Autre signe de divergences croissantes entre Joe Biden et Benyamin Netanyahou, la résolution met en garde contre un assaut israélien sur la ville de Rafah, dans le sud de Gaza, en raison du nombre élevé de victimes civiles que cela provoquerait . L'état-major militaire du Hamas est supposé s'y être réfugié, mais aussi un million de civils palestiniens du reste du territoire. Israël a annoncé qu'il lancerait un assaut sur Rafah vers le début du mois de Ramadan, qui commence le 10 mars. « Une menace qui participe sans doute de la négociation pour la libération des otages, estime Shany Mor, car l'assaut serait très difficile en raison de la densité des réfugiés civils et de la proximité embarrassante de la frontière égyptienne ». L'ampleur des tunnels de contrebande sous cette dernière pourrait être révélée à cette occasion. Mais «la destruction des innombrables tunnels acheminant des armes depuis l'Egypte en profitant de la corruption de ses forces de sécurité est un des objectifs de guerre de Tsahal », souligne Emmanuel Navon.

Le projet de résolution américain met en garde contre le déplacement forcé, par l'armée israélienne, de civils dans des pays voisins, tels que la Jordanie ou l'Egypte, qui ont au demeurant averti qu'ils ne les accepteraient pas. Le texte rejette aussi « toute tentative de changement démographique ou territorial à Gaza » et approuve la solution à deux Etats pour résoudre le conflit israélo-palestinien vieux désormais de 77 ans… Benyamin Netanyahou est résolument opposé à cette solution.

La Chine a fustigé mercredi matin le veto américain, estimant qu'elle allait rendre « encore plus dangereuse » la situation dans la bande de Gaza. Reste à savoir si la résolution des Etats-Unis fera l'objet d'un veto russe, ou chinois, sous quelque motif que cela soit. Il semble actuellement peu probable que le Kremlin accorde à la Maison-Blanche le gain diplomatique que constituerait le vote de sa résolution…

https://www.lesechos.fr/monde/enjeux-internationaux/les-etats-unis-poussent-pour-une-resolution-compliquee-sur-gaza-a-lonu-2077730

La politique et la diplomatie paraissent encore plus immorales quand elles se superposent synchroniquement, simultanément, "en même temps", à la guerre qui est censée les poursuivre "par d'autres moyens", selon la trop fameuse formule de Clausewitz... Mais "en même temps" c'est le temps où l'on peut le moins s'en passer, puisque ce sont elles et elles seules qui offrent une perspective de sortie, si illusoire soit-elle, à la guerre...

S'il y a une chose qui unit les politiques, les diplomates et les militaires de tous les pays et de tous les partis, c'est bien l'art de se rendre indispensables -- qui ne s'exerce jamais sans l'assentiment des populations, dès lors tout aussi "responsables" quand même elles y sont toujours perdantes.

Ce matin un journaliste du quotidien suisse  Le Temps expliquait dans un article que les négociateurs américains, qataris et égyptiens voulaient forcer les négociateurs du Hamas a accepter de mentionner et de s'engager dans un accord de ne plus vouloir éradiquer l'état d'Israël.

Ni le Hamas, ni les Palestiniens en général, ni les Etats qui les soutiennent encore plus ou moins, que ceux-ci "reconnaissent" ou non (au sens diplomatique) l'Etat d'Israël, n'ont les moyens de vaincre ce dernier, sans parler de le supprimer: cela rend à première vue une telle exigence assez futile...

Mais c'est la vieille logique du traité d'allégeance: on ne se fait pas d'illusion sur le (res-)sentiment du vaincu, mais on lui demande quand même un engagement verbal, ou une signature, qui fait de lui formellement un vassal, pour passer superficiellement de l'état de guerre à un état de paix provisoire, jusqu'à la prochaine "révolte" du vassal; tant qu'il n'y consent pas on continue de cogner, même si ça ne sert plus à rien (d'autre). Les Assyriens experts en supplices y mettaient même du sentiment: tu aimeras le roi d'Assyrie comme toi-même... Là encore c'est un seul, roi ou Etat souverain quand même il n'est ni l'un ni l'autre, qui est interpellé au singulier et sommé de répondre pour tout un peuple; mais c'est bien le peuple qui subit, la violence de la guerre comme l'oppression ordinaire de la paix, plus la domination particulière de son chef rebelle ou soumis...

Moment d'émotion (J'ai versé une larme) dans un contexte ou l'"étranger" est stigmatisé, à travers des paroles d'une rare beauté qui nous rappelle une histoire pas si lointaine. Cela me rend nostalgique de ma période collège/lycée qui a été parsemée de rencontre avec de nombreux enseignants "communistes" qui m'avaient initié à la poésie, au théâtre et aiguisé chez moi, une certaine conscience politique (bien que je fus TdJ), notamment une certaine sensibilité à la cause palestinienne ... Je je n'oublie pas les excès de ces idéalistes mais leurs idéaux de fraternité et d'égalité me manquent. 

Manouchian : L’Affiche rouge interprétée par Feu ! Chatterton

Lien réduit.

L'Affiche rouge
Chanson de Léo Ferré
Paroles

Ah
Ah-ah-ah-ah
Vous n'avez réclamé la gloire, ni les larmes
Ni l'orgue, ni la prière aux agonisants
11 ans déjà, que cela passe vite 11 ans
Vous vous étiez servis simplement de vos armes
La mort n'éblouit pas les yeux des Partisans
Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes
Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants
L'affiche qui semblait une tache de sang
Parce qu'à prononcer vos noms sont difficiles
Y cherchait un effet de peur sur les passants
Nul ne semblait vous voir Français de préférence
Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant
Mais à l'heure du couvre-feu des doigts errants
Avaient écrit sous vos photos "morts pour la France"
Et les mornes matins en étaient différents
Tout avait la couleur uniforme du givre
À la fin février pour vos derniers moments
Et c'est alors que l'un de vous dit calmement
"Bonheur à tous, bonheur à ceux qui vont survivre"
"Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand"
Adieu la peine et le plaisir, adieu les roses
Adieu la vie, adieu la lumière et le vent
Marie-toi, sois heureuse et pense à moi souvent
Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses
Quand tout sera fini plus tard en Erivan
Un grand soleil d'hiver éclaire la colline
Que la nature est belle et que le cœur me fend
La justice viendra sur nos pas triomphants
Ma Mélinée, ô mon amour, mon orpheline
Et je te dis de vivre et d'avoir un enfant
Ils étaient 20 et 3 quand les fusils fleurirent
20 et 3 qui donnaient leurs cœurs avant le temps
20 et 3 étrangers et nos frères pourtant
20 et 3 amoureux de vivre à en mourir
20 et 3 qui criaient la France en s'abattant
Ah-ah
Ah-ah
Ah-ah

Paroliers : Louis Aragon / Leo Ferre (Comment peut-on avoir avec une aussi belle plume  :shock:)


Léo Ferré : L'Affiche rouge (Aragon)

https://www.youtube.com/watch?v=Tj5XwjOuq7s

J'ai réduit le (premier) lien à ta demande, mais ce n'est pas exactement le même (le tien menait à la page de recherche Google).

Sous la plume d'Aragon ("communiste") et dans la bouche de Ferré ("anarchiste") ça sonnait déjà différemment, et la différence se creuse dans une cérémonie officielle, nationale, étatique, quand même elle rassemble des "extrêmes", surtout si ça inclut ceux que les premiers se seraient au moins accordés à combattre...

Reste, en effet, la poésie, qui est à tout le monde et à personne, et contrairement aux morts se relève de tout, dès lors qu'il y a quelqu'un pour la lire, la réciter, la chanter ou l'écouter.

Que nous cache la "débureaucratisation" ?

https://www.youtube.com/watch?v=as0biM-1vpQ

La rhétorique de la liberté est un mouvement perpétuel, oscillant sans fin d'une définition à l'autre, sociale, politique, économique, morale, religieuse, philosophique de la "liberté" -- par exemple "libérale" ou "libertaire" dans la terminologie récente (qui varie d'ailleurs d'une langue et d'un pays à l'autre: les liberals américains sont de gauche, et les libertarians de droite, soit à peu près le contraire de nos "libéraux" et "libertaires"): les esclaves de la liberté ne font que changer le nom ou l'apparence de leurs chaînes, de libération en libération, sans même s'étonner que ce soit l'Etat qui prétende les libérer de l'Etat, la loi de la loi, le parti du parti, l'administration de l'administration, le règlement du règlement, l'économie de l'économie, la technique de la technique, et ainsi de suite, sans compter les combinaisons et permutations entre prétendus libérateurs... Entre la liberté des moutons, des bergers, des chiens, des loups, des chasseurs, des bouchers et des consommateurs, il ne peut y avoir que des malentendus qui profitent tantôt aux uns, tantôt aux autres, quelquefois "en même temps" aux uns et aux autres, mais différemment selon leur point de vue; et il y a toujours des perdants.

D'un mot à l'autre, je repensais à l'adage vae victis (malheur aux vaincus, mais d'un malheur de lamentation plutôt que de malédiction, hélas pour, vae n'étant que la forme latine d'une interjection qui court dans beaucoup de langues, oï, ouaï, weh), attribué par la tradition à un Gaulois vainqueur de Rome... Il nous fait penser en français aux "victimes", bien que le lien étymologique soit plus lâche qu'il paraît -- car la victima renvoie au "sacrifice", humain ou animal, où le rapport de force se renverse, en plus d'un sens et d'un tour: du vaincu dont la faiblesse renforce la force du vainqueur à la victime dont la vengeance ou le ressentiment la sape et la retourne contre elle-même. L'histoire des mots est aussi cruelle, et "juste" et "gracieuse" à sa façon, que l'histoire tout court...

Emmanuel Macron et les "Français de préférence"

https://www.youtube.com/watch?v=gUgL8-zBdWc

La phrase d'Aragon est remarquablement ambiguë, et graphiquement incertaine pour autant que je puisse en juger sur Internet: il faudrait consulter une édition originale pour en avoir le coeur net, et encore on n'en serait pas forcément fixé sur son sens: selon qu'on écrit "Français" ou "français", avec ou sans majuscule, qu'on le fait précéder ou non d'une virgule, écrite ou sous-entendue, on peut l'analyser comme attribut de l'objet (= vous voir comme des "Français-de-préférence", voir en vous des "Français-de-préférence"), ou comme simple apposition au "vous" (= vous qui êtes, qui étiez français de préférence, ou "des Français-de-préférence"), voire au "nul" sujet (ce sont les Français surtout, de préférence, qui ne semblaient pas vous voir). Question syntaxe, Aragon n'était pas Mallarmé...

Quant à l'ambiguïté politique de la référence, et de la révérence, elle ne le cède en rien à celle de la préférence.

Des dizaines de morts lors d'une distribution alimentaire à Gaza, Israël ni sa responsabilité

https://www.youtube.com/watch?v=oRAO69BcnKE


Béligh Nabli face à Olivier Rafowicz : + de 100 morts palestiniens après des tirs israéliens .

https://www.youtube.com/watch?v=NkA8xUbaJeg&t=25s


Je trouve que la "propagande" de l'armée israélienne est grotesque, accuser des personnes que l'on affame (privation d'eau, de nourriture, de soins médicaux ...) de voler la nourriture des camions de l'aide humanitaire (que Tsahal laisse rentrer avec parcimonie : avant la guerre 500 camions par jour, aujourd'hui 50) ne manque pas de sel. On se demande bien comment des gens affamés et affaiblis peuvent-ils représenter un danger pour des soldats sur-armés et prêts à tirer sur tout ce qui bouge ... Quand les États-Unis et la communauté internationale mettront un terme à ce carnage 

On ne peut qu'espérer, en effet, que ça s'arrête, si par "ça" on entend le "carnage" en cours, crise aiguë d'une horreur chronique... Mais ça ne changera rien au mal qui est fait, irréversiblement, et qui se refera sans faute si l'on en sort, comme on en sort toujours, avec un minimum de "bonne conscience" quelque part, de part et d'autre... Qu'après des millénaires d'histoire un "camp" quelconque, groupe, parti, nation, Etat, religion, puisse encore se croire "bon", "juste" à quelque degré, c'est la garantie que ça ne s'arrête jamais. Et bien sûr ça ne rend nullement "meilleurs" les "individus" comme nous qui regardons ça de loin sans y prendre autrement part, ou parti...

P.S.: je tombe à ce propos sur cet éditorial du "Monde" qui s'achève sur une proposition ambiguë, qu'à la faveur de son ambiguïté on pourrait méditer longtemps en la prenant au pied de la lettre et hors contexte: "il n'y a pas d'alternative à la honte".