Cf.
ici et
là (entre autres).
Cela me rappelle à nouveau (cf. p. ex.
ici, 23.6.2020) cette
Gelassenheit que Heidegger a empruntée à Eckhart -- qu'on traduit habituellement par "sérénité" ou "équanimité", mais qui évoque encore aussi un "laisser-(-faire, -aller, -courir, filer,
-pisser,, -être, -devenir, -advenir, -arriver, etc.)", soit à peu près ce "lâcher-prise" consacré par les traductions et vulgarisations françaises des textes bouddhiques, quoique
lassen en allemand ait aussi la fonction de quasi auxiliaire factitif ou causatif (soit
faire faire, etc.). Cette nuance est toutefois intéressante parce que le "détachement" (etc.) n'est pas plus "innocent" que l'"attachement", le "lâcher" que le prendre, le saisir ou le tenir. On ne peut pas "laisser faire" (etc.) sans devenir aussi "responsable" de ce qu'on "laisse faire", pas plus que si on l'avait "fait (faire)". Par là c'est l'idée même de responsabilité ou de causalité qui est mise en question, et on en reviendrait par-delà le bouddhisme au
leitmotiv de la
Bhagavad-Gitâ: abandonne le fruit de tes actes, de ton agir comme de ton non-agir. Ou à l'"innocence du devenir" de Nietzsche,
Unschuld des Werdens, qui n'est certes pas innocente au sens d'inoffensive mais n'en échappe pas moins à toute culpabilité, à toute dette et à tout devoir (
Schuld).
Ce qui y correspondrait le mieux dans le NT ce serait la notion de
pardon ou de "rémission" (des péchés),
aphièmi etc., aussi "laisser" (aller, courir, les dettes ou les débiteurs selon la version matthéenne du Notre Père), et celles d'
abandon ou de
reniement (de "soi", du "sien", etc.; dépossession, dépouillement, etc.; cf. aussi la "[dé-]pose de l'âme" johannique).