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| Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien | |
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Auteur | Message |
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free
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| Sujet: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Mar 25 Fév 2020, 15:48 | |
| "C'est par révélation que le mystère a été porté à ma connaissance, comme je viens de l'écrire en quelques mots. En lisant cela, vous pouvez comprendre l'intelligence que j'ai du mystère du Christ. Ce mystère n'avait pas été porté à la connaissance des fils des hommes dans les autres générations comme il a été révélé maintenant par l'Esprit à ses saints apôtres et prophètes : à savoir que les non-Juifs ont un même héritage, sont un même corps et participent à la même promesse, en Jésus-Christ, par la bonne nouvelle dont je suis devenu ministre, selon le don de la grâce de Dieu qui m'a été accordée par l'opération de sa puissance. A moi, le moindre de tous les saints, cette grâce a été accordée d'annoncer aux non-Juifs, comme une bonne nouvelle, la richesse insondable du Christ et de mettre en lumière pour tous la réalisation du mystère caché de tout temps en Dieu, le créateur de tout ; afin que la sagesse de Dieu, dans sa grande diversité, soit maintenant portée, par l'Eglise, à la connaissance des principats et des autorités dans les lieux célestes selon le projet éternel qu'il a réalisé en Jésus-Christ, notre Seigneur" - Ep 3,3-12
La métaphore du « corps » y prend une dimension nouvelle : elle sert à décrire l’unification d’Israël et du monde païen au sein de l’Église, comme unité modèle et archétypale de l’Église cosmique. L’union des chrétiens issus du monde juif et des chrétiens issus du monde païen est le prototype de la réconciliation du tout au sein de l’Église. En dehors de cette unité, la réunification cosmique ne pourra s’accomplir. Ainsi l’Église est-elle présentée comme « la plénitude de celui qui remplit tout en tous » (1,23). Les termes font parfois songer à une fusion de type panthéiste ; mais, en tant qu’elle est le corps en croissance, une telle Église reste une visée.
Après la grande bénédiction qui noue en une seule gerbe le projet créateur et la rédemption en Jésus Christ, la lettre présente une action de grâce qui déploie la révélation de la puissance du Christ sur l’univers et sur l’Église. L’énergie de Dieu se communique au Christ qu’il a ressuscité et fait asseoir à sa droite, et à travers lui elle atteint le corps « à qui il a été donné comme tête, l’Église » (1,22). Le chapitre 2 évoque alors le salut également accordé, par pure grâce, aux juifs et aux païens et donne à contempler, comme déjà acquis, le triomphe des croyants : « Il nous a fait revivre avec le Christ – c’est par grâce que vous êtes sauvés – avec lui il nous a ressuscités et fait asseoir dans les cieux, en Christ Jésus » (2,10). https://www.bible-service.net/extranet/current/pages/856.html
Dernière édition par free le Ven 01 Mai 2020, 20:53, édité 1 fois |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Mar 25 Fév 2020, 17:15 | |
| Comme on l'a vu récemment à propos du texte-"source" de Colossiens (surtout si l'on expurge provisoirement celui-ci des "gloses" qui l'harmonisent avec Ephésiens, comme le "c.-à-d. l'Eglise" de 1,18.24), le "mystère cosmique" précède le "mystère ecclésial", qui s'y inscrit après coup comme un "mystère dans le mystère", voire "le coeur du mystère" -- à la place même du Christ en somme, dans toute l'ambiguïté de cet "à la place": entre lieu-tenance et substitution vicaire. A l'idée qu'en Christ Dieu se réconcilie le monde (déjà 2 Corinthiens 5) s'ajoute l'idée d'une médiation supplémentaire, même si en théorie elle n'est pas supplémentaire (puisque l'Eglise n'est pas ailleurs qu'"en Christ" ni autre chose que "Christ"). Il en résulte une logique passablement contradictoire (ou une couche de paradoxe supplémentaire), puisque "l'Eglise" qui vit de la foi en une rédemption cosmique (qui a priori ne dépendrait pas d'elle) devient le moyen, "mystérieux" entre tous, de cette rédemption cosmique. |
| | | free
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Mar 25 Fév 2020, 17:44 | |
| Merci Narkissos pour ces éclaircissements, face à la complexité du texte biblique. . " Il a tout mis sous ses pieds et l'a donné comme tête, au-dessus de tout, à l'Eglise qui est son corps, la plénitude de celui qui remplit tout en tous." (1,22-23) Ce texte me parait obscur ... l’Église existe-t-elle que dans la mesure où elle est remplie par le Christ ? On retrouve en Col 3,11 ; une expression similaire : "le Christ, qui est tout et en tout". |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Mer 26 Fév 2020, 03:45 | |
| Il faut comparer tout cela à Colossiens, en particulier 1,15ss et spécialement ici les v. 18s, sans oublier que la "plénitude" c'est plèrôma, le "plérôme" (revoir ici une discussion toute récente de ce concept, dans le contexte de Colossiens). Tout le problème d'Ephésiens (et dans une moindre mesure des gloses de Colossiens, 1,18.24), c'est d'insérer "l'Eglise" dans un "mystère" qui est d'abord "théo-cosmique". On a là, en germe, tout le débat qui va opposer au IIe siècle "gnostiques" et "ecclésiastiques", les uns tenant pour un rapport essentiellement individuel au "mystère", les autres pour un rapport essentiellement communautaire avec tout ce que cela implique de médiations magistérielles, traditionnelles et sacramentelles ( sacramentum étant une autre traduction latine de mustèrion, concurrente de sa transcription mysterium). L'épître aux Ephésiens est clairement "ecclésiastique", on peut même dire que c'est elle qui fonde l'interprétation ecclésiastique du "mystère", mais elle le fait encore de façon non polémique (contrairement à sa suite dans les "Pastorales" ou chez les Pères de l'Eglise, depuis Ignace et Irénée), parce que les lignes de front ne sont pas encore clairement tracées. D'où le fait que l'épître aux Ephésiens peut encore utiliser au service de "l'Eglise" des concepts, comme le "plérôme", qui seront plus tard récupérés par le camp "gnostique" et rejetés par le camp "ecclésiastique". On a souvent parlé à son sujet de synthèse proto-catholique irénique (le thème de la "paix", eirenè en grec, y joue un rôle important), qui est aussi à bien des égards une synthèse du "paulinisme" et du "johannisme" (ce qui n'empêchera pas d'autres héritiers de ces courants de suivre des voies divergentes, dans le "marcionisme" et le "gnosticisme" respectivement). |
| | | free
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Mer 26 Fév 2020, 12:49 | |
| "que le Christ habite dans votre cœur par la foi et que vous soyez enracinés et fondés dans l'amour, pour être capables de comprendre, avec tous les saints, quelle est la largeur, la longueur, la profondeur et la hauteur, et de connaître l'amour du Christ qui surpasse la connaissance, de sorte que vous soyez remplis jusqu'à toute la plénitude de Dieu." (3,17-19)
La réflexion de l'auteur est basée sur la conviction que le chrétien vit dans le Christ et que le Christ habite en eux, ce qui implique que Christ "déverse" la plénitude de la divinité, c’est-à-dire tout ce dont Dieu est rempli, dans les croyants. L'auteur essaie-t-il de contrecarrer l'attrait des religions à mystère, en élaborant lui aussi, une religion à mystère ? La gnose semble être dans le viseur de l'auteur, qui combat une connaissance prétendue supérieure à ce que le Christ donne à son Église ("de connaître l'amour du Christ qui surpasse la connaissance"). Le v18, ne précise pas le sujet de la compréhension ou il le définit comme étant : "ce qu’est la largeur, la longueur, la hauteur, la profondeur…" (TOB) |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Mer 26 Fév 2020, 15:45 | |
| Je dirais plus brutalement que le christianisme hellénistique (ou, si l'on préfère, le centre de gravité de la nébuleuse proto-chrétienne rendant possible un "réseau" d'Eglises qui se reconnaissent mutuellement et finalement une "Eglise" et une "identité" "chrétiennes") EST une "religion à mystère", dès avant Paul, pour la bonne raison que le "mystère" est simplement la forme dominante de la "religion" contemporaine: c'est tout naturellement que le thème du "mystère" se développe, dans le corpus paulinien comme ailleurs. (Pas besoin d'aller chercher la complication d'une contre-imitation particulière.)
Comme j'ai essayé de l'expliquer dans mon post précédent, l'épître aux Ephésiens est "ecclésiastique" et "proto-catholique" sans être anti-gnostique, simplement parce que l'antagonisme n'est pas encore constitué comme tel. Elle peut offrir rétrospectivement les plus belles formules "catholiques", comme "comprendre avec tous les saints" (=> pas tout seul, ni dans une chapelle d'"élus", ni selon une tradition seulement locale), tout en utilisant un vocabulaire largement "gnostique" (toujours rétrospectivement)... Autrement dit elle ne "combat" rien, ou si elle "combat" les tendances centrifuges elle le fait subtilement, implicitement ou objectivement, par la dynamique même d'une pensée rassembleuse, sans "polémique" contre qui que ce soit (ce ne sera déjà plus le cas dans les Pastorales). La confluence du paulinisme et du johannisme (notamment dans le schème de l'inclusion réciproque, X en Y ET Y en X), que j'ai déjà évoquée ci-dessus, y est évidemment pour quelque chose.
La série dimensionnelle (largeur, longueur, hauteur) était déjà dans Romains 8, quoique dans un sens négatif (ce qui ne peut nous séparer de l'amour du Christ); ici elle est incluse, positivement, "en Christ". |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Mer 26 Fév 2020, 17:19 | |
| - Citation :
- Comme j'ai essayé de l'expliquer dans mon post précédent, l'épître aux Ephésiens est "ecclésiastique" et "proto-catholique" sans être anti-gnostique, simplement parce que l'antagonisme n'est pas encore constitué comme tel. Elle peut offrir rétrospectivement les plus belles formules "catholiques", comme "comprendre avec tous les saints" (=> pas tout seul, ni dans une chapelle d'"élus", ni selon une tradition seulement locale), tout en utilisant un vocabulaire largement "gnostique" (toujours rétrospectivement)... Autrement dit elle ne "combat" rien, ou si elle "combat" les tendances centrifuges elle le fait subtilement, implicitement ou objectivement, par la dynamique même d'une pensée rassembleuse, sans "polémique" contre qui que ce soit (ce ne sera déjà plus le cas dans les Pastorales).
Désolé Narkissos, si je n'arrive pas toujours à saisir tes explications. Par contre, j'ai découvert la profondeur de la formule ; " comprendre avec tous les saints" (=> pas tout seul, ni dans une chapelle d'"élus", ni selon une tradition seulement locale). Merci. |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Mer 26 Fév 2020, 19:46 | |
| Désolé aussi de ne pas être plus clair: c'est en partie de ma faute et en partie dû à la complexité du sujet, à laquelle ne préparent guère les simplifications habituelles (du genre: les méchants gnostiques qui viennent semer la zizanie -- c'est le nom même de l'"ivraie" -- dans l'Eglise du Christ et des apôtres, ou bien les méchants ecclésiastiques qui viennent imposer leur hiérarchie et leur orthodoxie à la foi égalitaire et spontanée des premiers chrétiens; ce n'est effectivement pas si simple). |
| | | free
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Jeu 27 Fév 2020, 12:11 | |
| - Narkissos a écrit:
- Désolé aussi de ne pas être plus clair: c'est en partie de ma faute et en partie dû à la complexité du sujet, à laquelle ne préparent guère les simplifications habituelles (du genre: les méchants gnostiques qui viennent semer la zizanie -- c'est le nom même de l'"ivraie" -- dans l'Eglise du Christ et des apôtres, ou bien les méchants ecclésiastiques qui viennent imposer leur hiérarchie et leur orthodoxie à la foi égalitaire et spontanée des premiers chrétiens; ce n'est effectivement pas si simple).
Narkissos, cela tient surtout à la complexité du sujet, les concepts abordés me sont souvent étrangers et difficiles à appréhender. Par moment (notamment avec l'épître aux hébreux, j'avais le sentiment d'entendre une langue étrangère).
"Souvenez-vous donc de ceci : vous qui étiez autrefois les non-Juifs dans la chair, qui étiez traités d'incirconcis par ceux qui se disent circoncis et qui le sont dans la chair et par des mains humaines, vous étiez en ce temps-là sans Christ, privés du droit de cité en Israël, étrangers aux alliances de la promesse, sans espérance et sans Dieu dans le monde. Mais maintenant, en Jésus-Christ, vous qui autrefois étiez loin, vous êtes devenus proches, par le sang du Christ." (2,11-13)
L'auteur fait le choix d'une formulation qui n'a rien de neutre : "vous qui étiez autrefois les non-Juifs dans la chair" ("nations dans la chair"), peut-être Est-ce un moyen qu'à ce moment là, ces personnes ne pouvaient avoir "auprès du Père, dans un même Esprit" v18. Ensuite l'auteur aborde la question de la circoncision et précise, concernant "ceux qui se disent circoncis", "qui le sont dans la chair et par des mains humaines", ce qui nous renvoi à un texte que nous avons déjà analysé, celui de Col 2,11 :
"En lui vous avez aussi été circoncis d'une circoncision qui n'est pas faite par des mains humaines : par le dépouillement du corps de la chair, par la circoncision du Christ."
L'expression : "vous étiez en ce temps-là sans Christ", est étrangement reliée à l'affirmation : "privés du droit de cité en Israël", ce qui laisserait entendre que le terme "Christ" fasse allusion à l'oint de l'AT, l’héritier messianique de David. Cette exclusion d’Israël a des conséquences sur ces interlocuteurs, ils étaient : "sans espérance et sans Dieu dans le monde" mais malgré ces multiples empêchements, Jésus, par son sang, permet aux païens de s’approcher de Dieu. L'auteur ne pose pas de conditions préalables, puisqu'il indique à ses lecteurs qu’ils n’ont pas été sauvés grâce aux œuvres mais que le salut est un don. |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Jeu 27 Fév 2020, 20:16 | |
| Si l'un des buts principaux de l'épître aux Ephésiens est de placer "l'Eglise" au centre du "mystère" christique (préalablement théocosmique), un de ses moyens consiste à rapporter les formules existantes dans la pratique de l'Eglise à une problématique ecclésiale (au risque de tourner en rond). C'est typiquement le cas du "deux en un" (v. 14), qui comme le "plérôme" (dont il est d'ailleurs en partie équivalent) va devenir un leitmotiv des textes gnostiques ultérieurs. La formule, en soi, est un énoncé parfait du "mystère" qui consiste à résorber toutes les dualités et les oppositions pour reconstituer l'unité perdue, et elle peut donc s'appliquer à beaucoup de choses: à la distinction des sexes ou des statuts sociaux (cf. Galates 3), du ciel et de la terre (Colossiens 1 / Ephésiens 1), de l'esprit et de la chair, etc.; or la dualité que l'épître aux Ephésiens retient ici, c'est celle que "l'Eglise" peut prétendre avoir surmontée, à savoir la différence entre "juifs" et "païens". Celle-ci peut paraître anecdotique par rapport à la portée cosmique, existentielle ou politique des autres dualités a "résoudre", mais elle a l'avantage de désigner un fait d'expérience, présent et concret, qui se prête néanmoins à la symbolisation de l'universel: pour le dire avec des mots anachroniques, le "judéo-paganisme" que constitue de fait "l'Eglise" ne serait pas un simple syncrétisme, simple accident très ordinaire (sinon règle générale) de l'histoire des religions, mais le signe de la récapitulation et de la réconciliation de l'univers en Christ. C'est ainsi, notamment, que "l'Eglise" se retrouve (au moins rhétoriquement) au centre du "mystère".
Personnellement je ne pousserais pas trop les références au "Christ" dans le sens d'un messianisme davidique, qui n'est nulle part mis en valeur dans le paulinisme (sinon à titre de concession incidente, p. ex. Romains 1 et 9), aurait peu de chances d'être compris de "païens" et, s'il l'était, jouerait à contresens du propos (car le Messie davidique serait plutôt l'instrument de la vengeance et de la domination d'Israël sur les "païens"). Dans la quasi-totalité du NT et surtout dans le corpus paulinien, le mot "Christ" fonctionne comme un nom propre, son rapport à l'"onction" royale OU sacerdotale n'est quasiment jamais exploité. "Christ" ici c'est surtout le "mystère" (donc aussi "l'Eglise"), et la peinture rétrospective d'"avant" (avant le mystère-Christ) situe les "païens" hors de la situation supposée privilégiée d'Israël et de la promesse (à Abraham, selon les termes de Romains ou Galates p. ex.); "sans espérance" et "sans dieu" (atheoi) de ce point de vue, sans quoi ce serait une très forte exagération (au regard du polythéisme, ce sont plutôt les juifs et les chrétiens qui passaient pour "athées"). |
| | | free
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Ven 28 Fév 2020, 11:36 | |
| Je suis émerveillé de constater qu'un texte que j'avais perçu (au départ) comme ordinaire et banal, puisse receler un enseignement aussi profond et complexe. Merci Narkissos de partager avec nous tes analyses. - Citation :
- Si l'un des buts principaux de l'épître aux Ephésiens est de placer "l'Eglise" au centre du "mystère" christique (préalablement théocosmique), un de ses moyens consiste à rapporter les formules existantes dans la pratique de l'Eglise à une problématique ecclésiale (au risque de tourner en rond). C'est typiquement le cas du "deux en un" (v. 14), qui comme le "plérôme" (dont il est d'ailleurs en partie équivalent) va devenir un leitmotiv des textes gnostiques ultérieurs.
"Car c'est lui qui est notre paix, lui qui a fait que les deux soient un, en détruisant le mur de séparation, l'hostilité. Il a, dans sa chair, réduit à rien la loi avec ses commandements et leurs prescriptions, pour créer en lui, avec les deux, un seul homme nouveau, en faisant la paix, et pour réconcilier avec Dieu les deux en un seul corps, par la croix, en tuant par elle l'hostilité. Il est venu annoncer, comme une bonne nouvelle, la paix à vous qui étiez loin et la paix à ceux qui étaient proches ; par lui, en effet, nous avons les uns et les autres accès auprès du Père, dans un même Esprit." (2,14-18) Ce texte nous présente une double réconciliation : Dieu/hommes et juifs/païens qui aboutit à une nouvelle création, pour l'auteur cet évènement semble déjà réalisé, puisqu'il affirme : "c'est lui qui est notre paix". Comme Narkissos l'a souligné, nous retrouvons le "deux en un" : "qui a fait que les deux soient un" ; "pour créer en lui, avec les deux, un seul homme nouveau" et "pour réconcilier avec Dieu les deux en un seul corps". La "paix" est une vraie préoccupation de l'auteur, il oppose cette "paix" à l'hostilité.Il s’agit de la découverte récente par la pensée chrétienne que la paix est au cœur de la révélation de Dieu en Jésus Christ et que, pour cela, elle doit être aussi au cœur de l’éthique et de la spiritualité : elle doit même, à travers les croyants, se répercuter à travers toutes les dimensions de la vie en société (politique, économique, rapports sociaux, culture), aussi bien que dans les rapports interpersonnels et ecclésiaux. Tel est, en effet, le sens qu’il faut donner à une expression de l’Épître aux Ephésiens dont l’importance a trop peu retenu l’attention jusqu’à nos jours : « L’Évangile de la paix » (6, 15). Comme l’a noté l’exégète allemand Hans Conzelmann, « le contenu du salut peut être défini dans tout le Nouveau Testament par la paix ». Par son expression « l’Évangile de la paix », l’auteur de l’Épître aux Ephésiens veut dire que la « Bonne Nouvelle » de la Révélation de Dieu à l’humanité, qui a culminé en Jésus-Christ, peut être synthétisée dans la paix. L’Évangile de la paix est la proposition par Dieu lui-même à tous les êtres humains de la civilisation de la paix – qui est aussi civilisation des Béatitudes et civilisation de l’amour – inaugurée en Jésus Christ, notre Frère humain et Dieu-avec-nous. L’Évangélisation de la paix doit donc être au cœur de l’évangélisation et la pastorale de la paix au cœur de la pastorale. https://www.revue-resurrection.org/Penser-une-theologie-de-la-paix
Dernière édition par free le Mer 29 Mar 2023, 13:26, édité 3 fois |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Ven 28 Fév 2020, 16:38 | |
| Outre les formules épistolaires d'usage (1,2; 6,23), voir aussi 4,3. On peut dire que sur ce point l'épître aux Ephésiens allie le "fond" et la "forme", car elle parle de "paix" (eirenè) sur un ton "irénique", paisible et pacifique (non ou peu polémique) -- ce qui ne va pas de soi (de la "pacification" militaire aux manifestations violentes pour la paix, on ne compte pas les exemples historiques du contraire: la paix est le meilleur argument de la guerre, la guerre le meilleur moyen de la paix, etc.). D'ailleurs l'épître joue elle-même du paradoxe en associant la paix à des métaphores militaires (épée, armure = "panoplie", combat, et ainsi de suite). |
| | | free
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Ven 28 Fév 2020, 17:19 | |
| "Ainsi donc, vous n'êtes plus des étrangers ni des exilés ; mais vous êtes concitoyens des saints, membres de la maison de Dieu. Vous avez été construits sur les fondations constituées par les apôtres et prophètes, Jésus-Christ lui-même étant la pierre de l'angle. C'est en lui que toute construction bien coordonnée s'élève pour être, dans le Seigneur, un sanctuaire saint. C'est en lui que, vous aussi, vous êtes construits ensemble pour être une habitation de Dieu, dans l'Esprit." Ep 2,19-22
Plantation et construction
L’évocation des deux groupes au début du chapitre, la récurrence du « nous » au v. 14 et au v. 18, tout plaide pour y voir le corps de l’Église appelée à rassembler les hommes, toujours plus largement, toujours plus loin. La fin du chapitre (v. 19-22) développe des images nouvelles de la communauté, et d’abord celle de la croissance de l’édifice. En effet, en 2,20 et 4,16, on assiste au croisement des deux images pauliniennes de la plantation et de la construction : il s’agit d’abord de la construction et de la croissance du corps « lié en cohésion et arrangé en unité par toute jointure de l’approvisionnement, selon l’activité à la mesure de chaque partie », mais c’est l’édifice tout entier qui grandit vers le ciel, donnant l’impression de la montée d’une cathédrale gothique, animée d’une poussée organique formidable : celle d’une création dont le principe moteur est l’amour (3,19 ; 4,15).
Mais une autre image encore vient se nouer à celle de l’édifice en croissance : le texte est tissé avec le vocabulaire de la maison et de la famille (que rassemble le terme grec oikos). La racine oik- court tout au long des trois versets (cinq occurrences) ; elle assure l’intégration, la force du lien et de l’appartenance. Il est évident qu’elle annonce ce qui sera dit, dans la deuxième partie de la lettre, de la vie dans les grandes maisons familiales du monde romain. Mais la maison est aussi portée par un dynamisme de croissance, pour former « un temple saint dans le Seigneur ! » (v. 22). https://www.bible-service.net/extranet/current/pages/856.html |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Ven 28 Fév 2020, 17:36 | |
| Les "métaphores" se télescopent, se fondent, s'enveloppent et se développent les unes dans les autres selon une métonymie générale: impossible d'opposer et même de distinguer nettement l'animal (naissance, croissance, corps, organisme, union sexuelle), le végétal (graine, plante, germe, fruit, croissance encore), le minéral, le naturel et l'artificiel (pierres, construction, maison, famille, temple, ville, mais aussi vêtement, dépouiller-revêtir, instrument, outil, arme, armure, panoplie, prothèse en tout genre), etc. |
| | | free
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Lun 02 Mar 2020, 15:18 | |
| - Citation :
- C'est typiquement le cas du "deux en un" (v. 14), qui comme le "plérôme" (dont il est d'ailleurs en partie équivalent) va devenir un leitmotiv des textes gnostiques ultérieurs.
en vous efforçant de conserver l'unité de l'Esprit par le lien de la paix. Il y a un seul corps et un seul Esprit, tout comme vous avez aussi été appelés dans une seule espérance, celle de votre appel ; il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tous, par tous et en tous" (4,3-6)
La découverte du "deux en un" de l'épître aux Ephésiens m'a permis de lire le texte ci-dessus sous un angle nouveau, les formules "un seul" et "une seule" prennent dans mon esprit un sens plus profond. En (2,16), l'auteur nous indique la finalité du dessein de Dieu : "pour réconcilier avec Dieu les deux en un seul corps", ce qui suppose que tout soit "un", dans l'unité de l'Esprit, "jusqu'à ce que nous soyons tous parvenus à l'unité de la foi et de la connaissance" (4,13). L'humanité et l'assemblée des croyants ne doivent plus être morcelées et les "saints" peuvent avoir accès au Père dans un seul Esprit (2,18).
De nombreux textes de l'épître aux Ephésiens font allusion à l'Esprit :
"En lui, vous aussi, après avoir entendu la parole de la vérité, la bonne nouvelle de votre salut, en lui, vous êtes venus à la foi et vous avez été scellés de l'Esprit saint qui avait été promis et qui constitue les arrhes de notre héritage, pour la rédemption de ce qu'il s'est acquis, afin de célébrer sa gloire." (1,13)
"N'attristez pas l'Esprit saint de Dieu, par lequel vous avez été scellés pour un jour de rédemption." (4,30)IL est question d'un sceau invisible à l'œil humain et qui est la marque de l'appartenance au Christ et qui qualifie pour le royaume. L'auteur ne fait pas du baptême, le signe d'appartenance mais il suppose une action mystérieuse de l'Esprit sur les croyants, le sceau étant facteur de rassemblement et d'unité garantissant la "rédemption" ou "la délivrance finale" (TOB).
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| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Lun 02 Mar 2020, 21:53 | |
| Sur le "deux en un", revoir aussi ici. Rien n'autorise à dissocier le Saint-Esprit (ou l'Esprit saint), avec toutes les métaphores qui lui sont attachées (ici le sceau ou les arrhes, ailleurs l'onction, la sanctification/consécration, la purification, la nouvelle naissance, etc.), de l'acte du baptême: il en signifie, si l'on veut, le côté "invisible" ou "intangible", par opposition à l'eau, mais il ne constitue pas pour autant une "chose" ou un "événement" distinct -- c'est d'ailleurs le propre du "mystère" (ou du "sacrement") que TOUT s'y donne intégralement, à chaque fois. Précisément parce qu'il y va de l'"un". |
| | | free
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Mar 03 Mar 2020, 14:20 | |
| La richesse divine (ploûtos), pour Paul, est toujours tournée vers l’homme, c’est la richesse d’un Dieu toujours en acte de générosité. Déjà Paul a rappelé aux Romains la richesse de sa bonté, de sa patience, de sa magnanimité (Rm 2,4), et il va leur parler de la richesse de sa gloire, qu’il veut nous donner en partage (9,23). Dans les Épîtres de la Captivité, d’autres facettes du ploûtos de Dieu apparaîtront : richesse de sa miséricorde (éléos) en Ep 2,4, richesse de sa grâce (Ep 1,7 ;2,7 ;3,16), richesse de sa gloire dans la perspective de l’héritage qu’il nous réserve (Ep 1,18 ; Col 1,27). Mais surtout Paul parlera avec enthousiasme de « l’impénétrable richesse du Christ » (Ep 3,. https://www.cairn.info/revue-nouvelle-revue-theologique-2007-2-page-189.htm"C'est pourquoi moi aussi, ayant entendu parler de votre foi dans le Seigneur Jésus et de votre amour pour tous les saints, je ne cesse de rendre grâce pour vous : je fais mention de vous dans mes prières, afin que le Dieu de notre Seigneur Jésus-Christ, le Père glorieux, vous donne un esprit de sagesse et de révélation qui vous le fasse connaître ; qu'il illumine les yeux de votre cœur, pour que vous sachiez quelle est l'espérance qui s'attache à son appel, quelle est la glorieuse richesse de son héritage au milieu des saints, et quelle est la grandeur surabondante de sa puissance envers nous qui croyons, selon l'opération souveraine de sa force." (1,15-19)Deux expressions retiennent mon attention : 1) un esprit de sagesse et de révélation ET 2) qu'il illumine les yeux de votre cœur.La sagesse de Dieu est inaccessible pour l’homme si Dieu lui même ne se révèle pas à lui : "afin que le Dieu de notre Seigneur Jésus-Christ, le Père glorieux, vous donne un esprit de sagesse et de révélation qui vous le fasse connaître". La lumière de Dieu est nécessaire pour pénétrer un tant soit peu dans ce mystère, à savoir Dieu lui-même, le texte emploie une belle formule : "qu'il illumine les yeux de votre cœur" ; qui implique que la compréhension dont il est question ici n’est pas affaire de raisonnement seulement mais de cœur, une disponibilité profonde à se laisser instruire, illuminer.qu’il illumine… : cf. 3.9 ; 5.8-14 ; Ps 13.4 ; 19.9 ; Mt 6.22// ; 2Co 4.4-6 ; Hé 6.4 ; Règle de la Communauté (Qumrân) 2.3 : « Qu’Il illumine ton cœur par l’intelligence de vie, et qu’Il te favorise de la Connaissance éternelle ! » 11.3ss : « De la source de Sa Connaissance Il a fait jaillir la lumière qui m’éclaire, et mon œil a contemplé Ses Merveilles, et la lumière de mon cœur perce le Mystère à venir… La lumière dans mon cœur vient de Ses Mystères merveilleux ; c’est dans l’Etre éternel que mon œil a contemplé la Sagesse : parce que la Connaissance est cachée aux hommes… La source de la justice et le réservoir de la puissance, ainsi que la demeure de gloire, sont refusés à l’assemblée de la chair ; c’est à ceux qu’Il a élus que Dieu les a donnés en possession éternelle. Et Il leur a accordé un partage dans le lot des Saints. » https://lire.la-bible.net/verset/Éphésiens/1/18/NBS |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Mar 03 Mar 2020, 16:56 | |
| Dans le langage du "mystère" les images centrifuges et centripètes, d'expansion et de contraction -- rayonnement, illumination, croissance, développement, diffusion ET rassemblement, réunion, récapitulation, de l'Un au Tout ET du Tout à l'Un -- se juxtaposent ou superposent sans effet de contradiction, comme les phases d'une ample respiration. Là aussi, d'ailleurs, on peut voir un accord du "fond" et de la "forme", comme on le remarquait plus haut à propos de la "paix" (la "paix" comme thème et le ton irénique, paisible ou pacifique du propos): dans les très longues phrases ou "périodes" du texte grec que les traductions françaises et même les éditions critiques sont obligées de sectionner (ainsi 1,3-14 que Nestle-Aland ponctue seulement à la fin des v. 6, 10 et 12, en se calant sur le rythme des en hô kai, "en qui aussi", dont la répétition constitue déjà une sorte de ponctuation syntaxique); mais malgré cela le style "liturgique", "solennel", voire "pompeux", n'échappe guère au lecteur qui en ressent les effets, apaisants ou lénifiants, euphorisants ou anesthésiants selon son tempérament. (On parlait ailleurs de "litanies de la négation", il y a aussi des "litanies de l'affirmation" dont l'efficacité n'est pas moindre, propres à engendrer un certain "sommeil dogmatique", comme dirait Kant.) |
| | | free
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Mer 04 Mar 2020, 14:05 | |
| "Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous a bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes, dans le Christ. En lui, il nous a choisis avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints et sans défaut devant lui. Dans son amour, il nous a destinés d'avance, par Jésus-Christ, à l'adoption filiale, pour lui, selon sa volonté bienveillante, afin de célébrer la gloire de sa grâce, dont il nous a comblés en son bien-aimé. En lui, nous avons la rédemption par son sang, le pardon des fautes selon la richesse de sa grâce, qu'il nous a octroyée abondamment, en toute sagesse et intelligence. Il nous a fait connaître le mystère de sa volonté, le projet bienveillant qu'il s'était proposé en lui, pour le réaliser quand les temps seraient accomplis : récapituler tout dans le Christ, ce qui est dans les cieux comme ce qui est sur la terre. " (1,3-10)L'élection/prédestination est utiliser comme un moyen d'unification (entre les païens et les juifs), puisque l’élection est liée à l’amour de Dieu, non à un mérite particulier et conduit à l’adoption filiale. Le sang qui couvre les fautes de tout enfant de Dieu, juif ou non juif. Le pardon des fautes n’est possible que par grâce.Concernant la formule : " les temps seraient accomplis" de même 3.2,9 ; voir 1Co 4.1n) de la plénitude (ou de l’accomplissement, en grec plérôma ; ce mot deviendra par la suite l’un des termes techniques du gnosticisme, cf. 2.2n ; il réapparaît, dans l’épître, en 1.23n ; 3.19 ; 4.13 ; cf. Col 1.19+ ; voir « La question gnostique »:diamonds:) des temps ; cf. Mc 1.15 ; Ga 4.4n. https://lire.la-bible.net/verset/Éphésiens/1/10/NBS
Dernière édition par free le Mer 04 Mar 2020, 16:10, édité 2 fois |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Mer 04 Mar 2020, 15:08 | |
| Je ne sais pas exactement ce qui suscite ta perplexité (si j'interprète bien tes émoticônes): l'annotation de la NBS peut paraître assez obscure, parce qu'elle fonctionne par renvoi à d'autres notes (suivre les "n" et les "+") et à un tableau ("La question gnostique"); mais nous avons amplement discuté ce concept de "plérôme" (encore dernièrement sur Colossiens).
La formule grecque est eis oikonomian tou plèrômatos tôn kairôn, en "frangrec" "pour une économie du plérôme des temps" (kairos, le temps qualifié, le "temps de" qqch, comme l'heure du thé ou le temps des cerises). Cf. surtout Galates 4,4 (avec khronos, le temps générique, au singulier) et Marc 1,15 (avec kairos au singulier et le verbe plèroô au lieu du substantif plèrôma). |
| | | free
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| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Mer 04 Mar 2020, 15:22 | |
| - Citation :
- Je ne sais pas exactement ce qui suscite ta perplexité (si j'interprète bien tes émoticônes): l'annotation de la NBS peut paraître assez obscure, parce qu'elle fonctionne par renvoi à d'autres notes (suivre les "n" et les "+") et à un tableau ("La question gnostique"); mais nous avons amplement discuté ce concept de "plérôme" (encore dernièrement sur Colossiens).
Je me demandais comment retrouver « La question gnostique ». Merci pour tes indications.« En Christ, vous avez été circoncis… » Baptême et circoncision en Colossiens
"Et vous êtes parfaitement comblés en lui, lui qui est la tête de toute principauté et autorité, en qui aussi vous avez été circoncis, d’une circoncision faite sans mains humaines – par le dépouillement du corps charnel, par la circoncision du Christ – en étant ensevelis ensemble avec lui par le baptême ; en qui aussi vous avez été relevés au moyen de la foi en l’action de Dieu, qui l’a relevé d’entre les morts. Et vous, qui étiez morts dans les fautes et dans l’incirconcision de votre chair, il vous a fait vivre ensemble avec lui, vous ayant fait grâce de toutes vos fautes." (Col 2.10-12)
Relevons quelques éléments dans cette structure : l’expression en hô kai (« en qui aussi ») fait référence, par deux fois, au Christ, déjà évoqué au verset 10 (« vous êtes parfaitement comblés en lui, lui qui est la tête de toute principauté et autorité »). De même, les aoristes perietmêthête (« vous avez été circoncis ») et sunêgerthête (« vous avez été relevés »), au passif l’un et l’autre, sont parallèles et contiennent les deux affirmations principales de ces versets. Aux versets 11b et 12a, l’expression « par le baptême » (au datif, en tô baptismô) correspond aux deux datifs « par le dépouillement (en tê apekdusei) » et « par la circoncision (en tê peritomê) »10. Le verset 12bβ approfondit ensuite l’idée de la résurrection (spirituelle) en Christ, par le biais d’une phrase indépendante.
Soulignons aussi les analogies avec un autre texte de Paul, Ep 1.3-13. Dans les deux, nous voyons la même tournure pour mettre en avant ce qui est donné « en Christ » : Éphésiens 1.7 : « En qui nous avons la rédemption (en hô echomen tên apolutrôsin) » ;
Éphésiens 1.11 : « En qui aussi nous avons été faits héritiers (en hô kai eklêrôthêmen) » ;
Éphésiens 1.13 : « En qui, vous aussi, ayant entendu la parole de vérité (en hô kai humeis, akousantes ton logon tês alêtheias) […] » ;
Éphésiens 1.13 : « En qui aussi, ayant cru, vous avez été scellés (en hô kai pisteusantes esphragisthête) »11.
Dans l’épître aux Éphésiens, cette expression « en qui » ou « en qui aussi » permet d’articuler ce qui est fait ou donné à ceux qui sont « en Christ ». Il en est de même en Colossiens 2. https://larevuereformee.net/articlerr/n277/en-christ-vous-avez-ete-circoncis-bapteme-et-circoncision-en-colossiens-2
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| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Mer 04 Mar 2020, 17:26 | |
| L'encadré en question se trouve p. 1652s de l'édition originale, avec l'introduction aux épîtres de Jean (je ne sais pas si ça existe "en ligne") -- mais je n'en suis pas satisfait, le mot est faible: c'est un compromis issu d'âpres négociations sur un texte de départ très anti-gnostique, dont on n'a fait que raboter ce qui était (à mes yeux surtout) le plus inacceptable. A tout prendre, les discussions de notre forum sur cette question me semblent nettement plus intéressantes. Le leitmotiv en hô kai, "en qui aussi", est précisément celui que j'évoquais plus haut pour sa fonction rythmique, qui "ponctue" (faute de ponctuation au sens typographique) ou scande la longue "période" des v. 3-14. Quant au sens, j'insisterais néanmoins sur une nuance qui me paraît importante: ce ne sont pas seulement les "récepteurs" (destinataires de l'épître ou "chrétiens" en général, la différence est d'autant plus négligeable qu'il s'agit apparemment d'une "circulaire") qui sont dits et situés "en Christ", mais l'ensemble des opérations évoquées (tout le "mystère" en somme, "sacrements" compris) qui ont lieu "en lui", dans un "espace" et un "temps" qui subsument ("récapitulent") toute totalité, de "Dieu", du "monde" ou de l'"histoire"). La principale "erreur" (à mon sens bien sûr) du protestantisme "sectaire" ou "pré-fondamentaliste" du XIXe siècle (adventisme, darbysme, dispensationalisme, etc.), c'est d'avoir pris tout cela pour un "plan de l'histoire" (ainsi le "divin plan des âges" de Russell, ou le "dessein divin" du jéhovisme ultérieur), conçu comme une grande fresque ou frise (depuis l'invention du cinéma on peut parler de scénario, de story-board ou même de film tourné et monté à l'avance): de la Genèse à l'Apocalypse, du paradis perdu au paradis restauré, ou de la création du monde au "monde nouveau", conformément à la pensée essentiellement "historique" de l'époque (consacrée depuis le début du siècle par Hegel dans le domaine philosophique). "Erreur" naturellement symétrique de celle de la période précédente, surtout depuis la fin du moyen-âge, qui avait réduit le discours de la "prédestination" à une question de destinées individuelles, auxquelles l'"histoire" et le "monde" servaient tout au plus de décor. C'était oublier le "tournant" à maints égards contraire du corpus paulinien depuis l'épître aux Colossiens, "source" directe de l'épître aux Ephésiens, à savoir le passage des catégories principalement temporelles de l'eschatologie proto-paulinienne (avant / après, déjà / pas encore) à des catégories principalement spatiales (en haut / en bas, mais aussi "en Christ" tête et corps), qui limitent la perspective eschatologique à la simple "révélation" ou "manifestation" d'un mystère présent et caché. Dans ces conditions, le "mystère" est tout autre chose qu'un "plan" historico-prophétique, parce qu'il y va d'une "vérité" éternelle et présente quoique en devenir, de dimension à la fois cosmique et communautaire, qui ne se réduit pas à un "avenir" individuel ou même collectif. Cette conversion chrétienne de l'eschatologie, si l'on peut l'appeler ainsi et si absurde qu'un tel concept puisse paraître à l'époque moderne qui n'a pas d'autre horizon que l'histoire indéfiniment continuée, c'est que la "fin des temps" est accomplie et qu'on en a bel et bien fini avec l'histoire (la "plénitude" ou "plérôme" des temps ne dit pas autre chose); avec le "mystère" on est entré dans une perspective qui inclut, englobe, mais aussi dépasse infiniment toute histoire par une transcendance qui n'est plus celle d'un futur. A cet égard l'idée d'une "histoire de l'Eglise" ou d'une "histoire du christianisme" est un parfait contresens théologique, inévitable toutefois par le simple fait que l'histoire continue, apparemment indifférente, dans l'Eglise comme au-dehors (ce qu'intègrent déjà les dernières couches du NT, notamment Luc-Actes). |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Jeu 05 Mar 2020, 12:35 | |
| - Citation :
- Cette conversion chrétienne de l'eschatologie, si l'on peut l'appeler ainsi et si absurde qu'un tel concept puisse paraître à l'époque moderne qui n'a pas d'autre horizon que l'histoire, c'est que la "fin des temps" est accomplie et qu'on en a bel et bien fini avec l'histoire (la "plénitude" ou "plérôme" des temps ne dit pas autre chose); avec le "mystère" on est entré dans une perspective qui inclut, englobe, mais aussi dépasse infiniment toute histoire par une transcendance qui n'est plus celle d'un futur.
Merci Narkissos pour ces éclaircissements qui me rendent le texte beaucoup plus accessible."Il a tout mis sous ses pieds et l'a donné comme tête, au-dessus de tout, à l'Eglise qui est son corps, la plénitude de celui qui remplit tout en tous"(1,22-23)L’Église, plèrôma du Christ L’état d’achèvement d’un processus ayant consisté à compléter ce qui se trouvait au départ ; Rm 13, 10 : plh,rwma no,mou h` avga,ph. La « plénitude des temps », en supposant que la succession des générations soit une longue marche vers un but, la longue préparation à un événement majeur (Ga 4,4 : « Quand vint le plèrôma des temps » ; Ep 1,10 : « Dans l’économie du plèrôma des temps »). Ainsi l’Église en Éphésiens est l’aboutissement du dessein divin visant à récapituler toute chose, en particulier l’humanité enfin réconciliée, dans le Fils bien-aimé.] L’Église « est son Corps, le plèrôma de Celui-qui-remplit pour soi toutes choses en tous — ἥτις ἐστὶν τὸ σῶμα αὐτοῦ, τὸ πλήρωμα τοῦ τὰ πάντα ἐν πᾶσιν πληρουμένου » (Ep 1, 23). Plèrôma est en apposition à sôma. Plèrôma est fondamentalement un vocable passif : l’Église n’existe que dans la mesure où elle est remplie par le Christ. À la différence de Col 1, 24, où antanaplérô a valeur active : Paul complète en lui la passion du Christ pour l’Église « son corps ». Plèroumenou : part. prés. moyen : le Christ remplit complètement l’Église, par lui et par la grâce qu’il répand en elle. L’utilisation du participe moyen souligne cette idée que le Christ remplit un domaine qui lui appartient en propre, et qui est en situation de dépendance et de réceptivité.[/size] Ta panta en pasin : « Il y a diversité d’opérations, mais le même Dieu opère tout en tous » (1 Co 12, 6). « Lorsque toutes choses lui auront été soumises, alors le Fils lui-même se soumettra à Celui qui lui a tout soumis, afin que Dieu soit tout en tous » (1 Co 15, 28). « Là, il n’est plus question de Grec ou de Juif, de circoncision ou d’incirconcision, de Barbare, de Scythe, d’esclave, homme libre ; il n’y a que le Christ, qui est tout et en tout » (Col 3, 11). http://biblissimo.com/2019/03/l-eglise-phesiens-saint-paul-ecclesiologie-paulinienne.html
Dernière édition par free le Ven 01 Mai 2020, 13:52, édité 1 fois |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Jeu 05 Mar 2020, 13:48 | |
| Le "deutéro-paulinisme" de Colossiens-Ephésiens, comme son nom "savant" l'indique aussi bien que le nom propre de "Paul" dans le texte, ne tombe pas du ciel, mais s'inscrit dans une continuité certaine du "paulinisme" antérieur -- avec, surtout dans l'épître aux Ephésiens qui constitue une sorte de point d'orgue en mode majeur, la différence décisive, les avantages et les inconvénients de la "synthèse" (qui à ce stade ratisse et intègre bien au-delà du paulinisme: l'"en Christ" doit aussi beaucoup au jeu des inclusions réciproques du johannisme, x en y et y en x). C'est un tableau sublime, grandiose, majestueux, mais par là même moins "dynamique" que la rhétorique (proto-)paulinienne ou le jeu des paradoxes johanniques. Le "mystère" embrasse tout le pensable (en-deçà et au-delà du monde et de l'histoire), il intériorise tout le mouvement et toutes ses potentialités, mais lui-même ne tend plus vers rien. |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Le mystère du Christ et de l'Église - Ephésien Jeu 05 Mar 2020, 15:35 | |
| Dans le parallélisme établi avec le mariage des humains, l’union du Christ et de l’Église sert ainsi à définir une nouvelle morale conjugale et à fonder un nouveau système de parenté.
"Maris, aimez vos femmes comme le Christ a aimé l’Église : il s’est livré pour elle, afin de la sanctifier en la purifiant par le bain d’eau qu’une parole accompagne ; car il voulait se la présenter à lui-même toute resplendissante, sans tache ni ride ni rien de tel, mais sainte et immaculée. De la même façon les maris doivent aimer leurs femmes comme leurs propres corps. Aimer sa femme, c’est s’aimer soi-même. Car nul n’a jamais haï sa propre chair ; on la nourrit au contraire et on en prend grand soin. C’est justement ce que le Christ fait pour l’Église : ne sommes-nous pas les membres de son Corps ? Voici donc que l’homme quittera son père et sa mère pour s’attacher à sa femme, et les deux ne feront qu’une seule chair : ce mystère est de grande portée ; je veux dire qu’il s’applique au Christ et à l’Église. Bref, en ce qui vous concerne, que chacun aime sa femme comme soi-même, et que la femme révère son mari" (épître aux Éphésiens 5, 25-33).
L’insistance de Paul sur le lien qui doit unir les époux est fort révélatrice. Il l’inscrit dans la force naturalisante de l’union des corps et, en même temps, le fait reposer sur une injonction éthique à l’amour. Le deuxième discours de la Genèse sur la création de l’homme, que saint Paul utilise comme figura, se voit ainsi profondément transformé par l’introduction du thème de l’engagement amoureux. Avec cette modification, Paul pose les bases d’une tension traversant l’histoire du mariage chrétien, qui peut s’appréhender comme union des corps des conjoints ou comme pacte d’amour qui pousse au don de soi pour cet autre soi qu’est l’époux ou l’épouse. Dans tous les cas, la force naturelle des liens de filiation se voit tempérée dans le jeu de renvois entre les registres de la parenté humaine et de celle liant les hommes à Dieu. Au sein de la lutte entre le corps et l’esprit, qui occupe une grande partie de la théologie chrétienne, l’engagement dans la foi définit les enfants de la deuxième alliance. Cela se répercute en deux temps dans la parenté chrétienne : d’abord à travers un large usage de l’image de l’adoption, ensuite par l’approfondissement théologique du consentement qui se trouve à la base du mariage. https://books.openedition.org/editionsmsh/8278?lang=fr |
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