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 Le livre des Juges

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MessageSujet: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeVen 12 Juin 2020, 14:45

La place du livre et son rapport à l’histoire

Dans la Bible hébraïque, le livre des Juges fait suite à celui de Josué et introduit le livre de Samuel en notant, comme un refrain dans sa partie finale, qu' '' en ce temps-là, il n'y avait pas encore de roi en Israël '' (Jg 17,6; 18,1; 19,1; 21,25). Il présente ainsi un temps intermédiaire entre la conquête de la terre (Josué) et l'avènement de la royauté (Samuel), la '' période des Juges '' entre 1200 et 1000 env. av. J.C. – un temps reconnu en d'autres livres, comme Ruth 1,1 ou 2 R 23,22. Mais pareille conceptualisation du temps suppose une rédaction assez éloignée des événements rapportés à une époque qui prend en compte la périodisation de l'histoire israélite. Une telle conscience ne saurait être première; elle vient sans doute de la fin de l époque royale (Josias), et plus probablement de l'exil. Au demeurant, le livre fait allusion à des événements bien postérieurs à ceux qu'il raconte (par ex. I 'exil d'Israël mentionné en Jg 18,30). Tout cela invite le lecteur à mesurer la distance entre la rédaction deutéronomiste du livre et l'histoire sous-jacente.

D'ailleurs le livre n'offre pas une histoire suivie des douze tribus durant ces deux siècles ; il s'attache plutôt à quelques grandes figures (Débora et Baraq; Gédéon; Abimélek; Jephté; Samson) qui, à un moment ou l'autre, ont sauvé Israël d'un grand péril. Le livre les rassemble dans une succession chronologique de douze '' Juges ''. Le caractère artificiel de cette chronologie ne fait aucun doute, et l'addition de toutes les données chiffrées du livre aboutirait à un total de 410 ans! Ce qui est tout à fait improbable. La visée est donc plus dynastique que réellement historique.

Si l'on compare enfin le livre à l'image produite en Josué où un seul grand '' leader '' mène le peuple à la victoire, le contraste est saisissant: le livre des Juges présente un monde morcelé, où les tribus ont bien du mal à s'unir, et la conquête est loin d'être achevée quand il se clôt. D'un livre à l'autre, le point de vue est fort différent, et il ne suffit pas de parler de '' conquête '' et d' '' installation '' pour rendre compte de cette difficulté. À y regarder de près, le rapport à l'histoire est tout aussi complexe dans le livre des Juges qu'en celui de Josué. C'est ce que notre lecture voudrait faire apparaître. https://www.bible-service.net/extranet/current/pages/544.html
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeVen 12 Juin 2020, 16:42

Bonne introduction.

Outre le rapport -- invérifiable -- des récits à l'histoire, il y a probablement dans ce livre des textes très anciens (ainsi une bonne partie du "Cantique de Déborah", chap. 5: d'une façon générale, la plupart des morceaux vraiment anciens de la Bible hébraïque sont "poétiques" et insérés dans une "prose" plus récente, narrative ou autre -- bien que nos notions de poésie et de prose ne conviennent qu'approximativement) et de bien plus tardifs: non seulement l'introduction programmatique la plus nettement "deutéronomiste" (2,6ss, 2e introduction dans le plan d'Abadie) et toutes les transitions qui y renvoient dans le corps du livre, mais aussi, par exemple, le cycle de Samson (à comparer avec l'Héraklès-Hercule de la tradition gréco-romaine) -- les annexes finales (chap. 17--21, 1re et 2e conclusion dans le plan) relèveraient plutôt de la première catégorie, mais ça se discute.

Dans l'ensemble, c'est un livre beaucoup moins "idéologique" que tout ce qui le précède (Torah [= Pentateuque] + Josué = Hexateuque) et le suit (Samuel-Rois; pour rappel, Ruth, qui situe son récit à la même "époque", n'arrive qu'à la fin du canon hébreu, dans les Ketouvim = Ecrits qui commencent par les Psaumes, et dans la sous-section des Megilloth = [petits] Rouleaux, juste avant Daniel, Esdras-Néhémie et les Chroniques). Il porte la marque de traditions populaires et locales échappant plus ou moins aux "intentions" politico-religieuses des centres d'écriture et de pouvoir (monarchique ou sacerdotal, aristocratique, administratif ou économique) -- en y regardant de plus près, on pourrait toutefois dire à peu près la même chose d'un certain nombre de "cycles" à l'intérieur des ensembles adjacents: récits patriarcaux de la Genèse, sections narratives des Nombres, histoires de Saül et de David. Cela donne en tout cas l'impression d'un récit plus "vivant", avec de nombreux éléments tragiques ou comiques (même s'ils sont pas tout à fait en phase avec un "humour" moderne), qui peut s'avérer aussi intéressant d'un point de vue "littéraire" que décevant d'un point de vue "religieux". La formule "En ce temps-là il n'y avait pas de roi en Israël, chacun faisait ce qui lui semblait bon" qui ponctue les annexes (17,6; 18,1; 19,1; 21,16) traduit vraisemblablement la consternation d'un compilateur "monarchiste", mais l'ensemble du livre produirait plutôt l'effet contraire -- surtout avec la superbe parabole anti-monarchique du chap. 9, qui fait écho aux réquisitoires de Samuel contre la royauté en 1 Samuel 8ss.

Une chose qui me frappe alors que je feuillette ce livre (ce que je n'avais pas fait depuis longtemps), peut-être parce qu'elle fait écho à des discussions (vaguement) politiques de ces derniers temps, c'est l'alternance rythmique de la guerre et de la paix, accentuée par la rédaction deutéronomiste qui en tire naturellement une sorte de morale plus ou moins conforme à sa logique de la rétribution (encore collective et transgénérationnelle en ce qui concerne la justice divine): la guerre est pédagogique, mais la paix fait oublier tout ce qu'on y a appris, et conduit à de nouvelles fautes qui ramènent la guerre (cf. en particulier 3,1s et son étrange explication de la subsistance des ennemis, habituellement conçue comme négligence du peuple et/ou châtiment de Yahvé, pas plus loin qu'au chapitre 2; mais ici aussi comme provision ou providence paradoxale en vue d'une pédagogie future -- sans parler de l'explication candide, fort peu deutéronomiste celle-là, d'un Yahvé impuissant devant la technique militaire des Cananéens, 1,19). En tout cas l'idée que la paix n'a pas que des avantages pour les générations qui n'ont connu qu'elle me paraît, hors de toute théologie, d'une étonnante actualité.
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeDim 14 Juin 2020, 11:05

Citation :
sans parler de l'explication candide, fort peu deutéronomiste celle-là, d'un Yahvé impuissant devant la technique militaire des Cananéens, 1,19). En tout cas l'idée que la paix n'a pas que des avantages pour les générations qui n'ont connu qu'elle me paraît, hors de toute théologie biblique, d'une étonnante actualité.


Effectivement, la campagne de Juda, victorieuse dans l’ensemble, se termine par une note négative :  "Le SEIGNEUR fut avec Juda, et celui-ci prit possession de la montagne ; mais il ne put déposséder les habitants de la vallée, parce qu'ils avaient des chars de fer" (1,19).   Pourtant ces chars avaient été détruit par le feu en (Jos 11, 6-9) : "il coupa les jarrets de leurs chevaux et mit le feu à leurs chars".

On retrouve un autre échec en rapport avec Benjamin : "On donna Hébron à Caleb, comme l'avait dit Moïse ; il en déposséda les trois Anaqites.
Les fils de Benjamin ne dépossédèrent pas les Jébusites qui habitaient Jérusalem ; les Jébusites habitent à Jérusalem avec les fils de Benjamin jusqu'à ce jour" (1,20-21).  Benjamin ne dépossède pas les habitants de Jérusalem, pourtant (1,Le livre des Juges  Icon_cool indique que Juda avait combattu Jérusalem et l’avait brûlée : "Les fils de Juda firent la guerre à Jérusalem et la prirent ; ils la passèrent au fil de l'épée et mirent le feu à la ville". 

Outre ces contradictions, le texte laisse apparaitre que Yhwh a pris une certaine distance avec Juda, d'ailleurs ce n'est même pas lui qui a pris l'initiative de la guerre : "Après la mort de Josué, les Israélites interrogèrent le SEIGNEUR : Qui de nous ira le premier faire la guerre aux Cananéens ?" (1,1).

Je découvre que l'on retrouve aussi des échecs de conquêtes en rapport avec la maison de Joseph, "Manassé ne prit pas possession de Beth-Shéân" (1,27) ; "Ephraïm ne déposséda pas les Cananéens" (1,29) …
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeDim 14 Juin 2020, 11:58

Pour rappel, en Josué 10 le roi de Jérusalem (Adoni-Z/C/S/Tsédeq selon les transcriptions, en référence au dieu Zédeq [etc.] plutôt qu'à une "justice" abstraite, cf. Melchi-Zédeq, Zadoq ou Sédécias = Zidqiyah[ou] et même les "sadducéens"; l'Adoni-Bézeq de Juges 1,4ss en est probablement une déformation) avait déjà été vaincu, mais le même "échec" apparaissait néanmoins sans explication en Josué 15,63 -- indispensable d'ailleurs dans les deux cas au "grand récit biblique", qui devait laisser une place à la tradition majeure de la prise de Jérusalem par David en 2 Samuel.

En somme, dans les premières pages des Juges on a au moins quatre explications contradictoires de l'inachèvement d'une "conquête" globalement imaginaire: 1) supériorité technique des Cananéens, malgré l'aide de Yahvé (1,19); 2) négligence des tribus ou d'Israël en général (1,21.27ss); 3) châtiment de (l'ange de) Yahvé (2,1ss); 4) volonté pédagogique de Yahvé (3,1ss).

Je ne suis pas sûr que le récit du chapitre 1 marque une prise de distance de Yahvé par rapport à Juda: c'est bien Juda que l'oracle de Yahvé envoie en premier en réponse à l'interrogation divinatoire (la chose ne reviendra que dans les annexes, au chapitre 20, à propos d'une guerre intertribale particulièrement laborieuse, où la victoire rechigne à suivre l'oracle). Ce premier chapitre reste dans le schéma des douze tribus hérité de la Torah avec sa hiérarchie dominante; la prééminence de Juda, bien sûr, reflète une situation politique assez tardive (le royaume de Juda-Jérusalem n'émerge vraiment qu'avec la chute du royaume d'Israël-Samarie à la fin du VIIIe siècle av. J.-C.). Ce qui est beaucoup plus significatif, c'est au contraire la quasi-absence de ce schéma dans le corps du livre, où la plupart des traditions sont locales, avec des références ethno-géographiques déconnectées des "douze tribus", si ce n'est par les transitions rédactionnelles et les arrangements ultérieurs des généalogies.

Je parlais plus haut du caractère assez peu "religieux" du livre, en contraste avec son vif intérêt narratif: non seulement on est très loin de toute orthodoxie monothéiste (on y trouve même une des plus belles expressions bibliques d'un "polythéisme diplomatique", dans la négociation de Jephté, 11,23ss: à chaque peuple son dieu tutélaire et sa terre, Yahvé est à Israël ce que Kamosh est à Moab -- malgré la confusion avec Ammôn dans le récit qui nous est parvenu; cf. Deutéronome 32,8ss, encore un poème plus ancien que son contexte large, en décalage avec la "monolâtrie" du corps du livre); mais surtout Yahvé (sans parler de "Dieu"), loin d'être "tout-puissant" comme on vient de le voir avec les chars de fer (cf. aussi, à ce propos, Josué 17,16ss), n'en est pas le personnage principal, surtout si l'on excepte les transitions rédactionnelles et deutéronomistes. A vrai dire ce n'est même pas une exception dans la Bible hébraïque: il y a une foule de récits, anciens ou récents (p. ex. Esther), où Yahvé ne joue aucun rôle de premier plan, ni comme acteur ni comme locuteur, ni même comme référence décisive. A partir de là on peut prendre la mesure de la distorsion qu'impose aux textes leur réception dans un canon "sacré", essentiellement religieux et strictement monothéiste, et la violence qu'on leur fait en voulant à tout prix en dégager un message religieux (voire chrétien) au lieu de les laisser être ce qu'ils sont: de bonnes histoires venues d'un monde où il y avait certes des dieux et des cultes, mais où ceux-ci n'étaient pas une obsession permanente (ce qui peut bien, après tout, être entendu comme une leçon religieuse, mais plutôt négative).
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeLun 15 Juin 2020, 12:18

Caleb dit : Je donnerai ma fille Aksa pour femme à celui qui battra Qiriath-Sépher et la prendra. Otniel, fils de Qenaz, frère de Caleb, la prit ; Caleb lui donna pour femme sa fille Aksa. A son arrivée, elle l'incita à demander un champ à son père. Elle sauta de son âne, et Caleb lui dit : Qu'est-ce que tu as ?" Jo 15,16-18

"Caleb dit : Je donnerai ma fille Aksa pour femme à celui qui battra Qiriath-Sépher et la prendra. Otniel, fils de Qenaz, frère cadet de Caleb, la prit ; Caleb lui donna pour femme sa fille Aksa. A son arrivée, elle l'incita à demander un champ à son père. Elle sauta de son âne, et Caleb lui dit : Qu'est-ce que tu as ? Elle lui répondit : Accorde-moi une faveur, car tu m'as donné une terre du sud ; donne-moi aussi des réservoirs d'eau. Alors Caleb lui donna les réservoirs d'en haut et les réservoirs d'en bas" Jg 1,12-15

Caleb est d'abord mentionné dans le Livre des Nombres : parmi les douze éclaireurs envoyés par Moïse pour reconnaître le pays de Canaan, il est, avec Josué, le seul à faire l'éloge de la Terre promise à son retour. Les autres expliquent aux Israélites que la conquête du pays va être impossible. Cela vaudra à Caleb et Josué d'être les seuls hommes adultes sortis d'Égypte à qui il sera donné d'entrer dans le pays de Canaan.

Dans le Livre de Josué, Caleb reçoit en partage la montagne et la ville d'Hébron, puis il promet la main de sa fille Akhsa à celui qui s'emparera de la ville de Kirjath-Sépher (ancien nom de la ville de Debir). Son neveu Othoniel aura cet honneur. Sur l'insistance d'Akhsa, Caleb leur donne également un champ6 avec des sources. Le premier chapitre du Livre des Juges évoque la même histoire.

Caleb est le fils de Jéphunné le Qenizzite (Nb 32:12).

Caleb a pour fils: Irou, Éla et Naam8. Caleb a pour fille: Akhsa. https://fr.wikipedia.org/wiki/Caleb_(Bible)#cite_note-5
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeLun 15 Juin 2020, 13:40

L'"histoire biblique" dominante, l'"histoire sainte" qu'on apprend au catéchisme et qu'on en retient si on en retient quelque chose, mais qui dans la plupart des cas précède toute lecture effective des textes, simplifie beaucoup les choses: Caleb (dont le nom signifie chien, comme en arabe et en argot français) y apparaît d'abord comme un personnage positif, le "bon" représentant de Juda, compagnon fidèle de Josué dans le récit des espions (Nombres 13--14) et seul survivant avec lui des quarante ans au désert. Une analyse historico-critique des textes produit une tout autre image, celle d'un clan ethno-géographique autonome comme beaucoup d'autres (Caleb est dit "qenizzite", comparer Genèse 15,19 avec Nombres 12,32; Josué 14,6.14; que les "Qénizzites" soient ou non un doublet des "Qénites-Caïnites", cf. aussi Juges 1,16, et Jaël ou Yaël femme de Héber le Qénite aux chap. 4--5), fixé dans la région de Hébron et secondairement agrégé à "Juda" à mesure que ce nom prend l'ascendant sur les autres, à la faveur d'une relative unification politique. De cette constitution artificielle, laborieuse et changeante d'une "histoire", témoignent autant la diversité des récits "étiologiques" qui situent tel ancêtre éponyme à tel ou tel endroit que les variations des généalogies, qui placent le même nom tantôt dans une lignée et tantôt dans une autre (ainsi on retrouve Qenaz comme éponyme des Qenizzites aussi en Edom, toujours au sud de Juda, Genèse 36 // 1 Chroniques 1 où il est à la fois nom d'ancêtre, de clan, de chef et de lieu; mais intégré à la "tribu de Juda" en 1 Chroniques 4).
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeLun 15 Juin 2020, 14:58

Merci Narkissos pour ces précisions.

"Israël servit le SEIGNEUR pendant tous les jours de Josué et pendant tous les jours des anciens qui survécurent à Josué et qui connaissaient toute l'œuvre que le SEIGNEUR avait faite en faveur d'Israël" (Jo 24,31)

"Toute cette génération fut, elle aussi, réunie à ses pères, et il se leva après elle une autre génération, qui ne connaissait pas le SEIGNEUR, ni l'œuvre qu'il avait accomplie pour Israël" (Jg 2,10).  

Notons  le contraste entre la génération des "anciens qui connaissaient toute l'œuvre que le SEIGNEUR avait faite" et la nouvelle génération "qui ne connaissait pas le SEIGNEUR". Le texte laisse apparaitre une rupture dans la transmission de la tradition, d'ailleurs Jg 2,7 indique que concernant ceux qui avaient prolongé leur existence après Josué, qu'ils étaient  "ceux qui avaient vu toute la grande œuvre que le SEIGNEUR avait accomplie pour Israël", donc on n'est déjà plus dans le "connaitre" de Josué 24 mais dans le "voir", précision qui explique un affaiblissement de cette transmission.
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeLun 15 Juin 2020, 16:22

C'est en tout cas le point de vue de la rédaction deutéronomiste qui profite des transitions pour établir des liens superficiels d'un livre et d'une "époque" à l'autre, formant précisément la trame méta-narrative (la grande histoire biblique ou histoire sainte) qui deviendra celle de tous les catéchismes, mais qui n'affecte guère le contenu des récits particuliers (lesquels ne présupposent généralement ni exode, ni conquête, ni Torah tels que nous les connaissons). Bien entendu, ce "grand récit" fournit aussi un schéma d'intelligibilité de l'"histoire" conforme à l'idéologie deutéronomiste, avec sa rétribution collective et transgénérationnelle, son alternance rythmique de fidélité et d'infidélité, d'oubli et de ressouvenir, de faute, de châtiment, de repentance et de restauration. Il suffit de suivre les mêmes thèmes dans le Deutéronome (p. ex., sur l'oubli, 4,9.23ss; 6,12; 8,11.14.19; 9,7 etc.). Que cela suppose en effet une faille dans la "transmission" pourtant recommandée par le même Deutéronome (4,9s; 6,2.7.20s; 11,19ss etc.), c'est pour ainsi dire une nécessité de structure: comme la plupart des traditions anciennes d'Israël, et notamment celles qui constituent l'essentiel du matériau narratif des Juges, ignorent ladite "grande histoire" et la "Loi" sous-jacente, elles ne peuvent être comprises a posteriori que sous le signe de l'infidélité, ou de l'"oubli" d'une Torah antidatée (le schème sera encore plus explicite dans les Rois, avec le blâme systématique de tous ceux qui tolèrent les sanctuaires multiples, les divinités étrangères, les hauts-lieux, les images, les stèles et les poteaux sacrés, la divination ou la prostitution sacrée, bref tout ce qu'interdit une Torah... qui n'existait pas encore de leur temps; artifice pseudo-historique qui se traduit et se trahit par un artifice narratif, celui de la découverte d'une Torah oubliée dans le Temple, sous le règne de Josias, 2 Rois 22ss).
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeMar 16 Juin 2020, 11:43

"Les Israélites firent alors ce qui déplaisait au SEIGNEUR (YHWH) ; ils se mirent à servir les Baals. Ils abandonnèrent le SEIGNEUR (YHWH), le Dieu de leurs pères, qui les avait fait sortir d'Egypte, et ils se mirent à suivre d'autres dieux, d'entre les dieux des peuples qui les entouraient ; ils se prosternèrent devant eux et ils contrarièrent le SEIGNEUR (YHWH)" (2,11-12)

Le narrateur nous fait part de la pensée divine face au comportement et aux actions des hommes, qui provoquent sa colère mais qui met en évidence son impuissance à réformer Israël et son incapacité à gérer la situation ce qui se traduit par la déception et la souffrance de Dieu. Dieu est contraint d'observer  la non-convergence entre le point de vue de l’homme et le sien, sans être capable de peser sur cette situation. Même sa colère n'améliore pas la situation et crée un cycle infernal :

"Le SEIGNEUR se mit en colère contre Israël. Il les livra à des pillards qui les pillèrent, il les vendit aux ennemis qui les entouraient : ils ne purent plus tenir devant leurs ennemis. Chaque fois qu'ils se mettaient en campagne, la main du SEIGNEUR était contre eux pour leur malheur, comme le SEIGNEUR l'avait dit, comme le SEIGNEUR le leur avait juré. Ils furent ainsi dans une grande détresse. Le SEIGNEUR suscita des juges qui les sauvèrent de la main de ceux qui les pillaient. Mais même leurs juges, ils ne les écoutèrent pas : ils se prostituèrent avec d'autres dieux et se prosternèrent devant eux. Ils se détournèrent bien vite de la voie qu'avaient suivie leurs pères, qui écoutaient les commandements du SEIGNEUR ; ils n'agirent pas ainsi" (2,14-17)


Dieu punit Israël ensuite il le délivre en suscitant des juges, malgré tout Israël se détourne de Dieu de nouveau, ce qui engendre à nouveau la colère divine ... Au verset 18, nous retrouvons Dieu qui se repent ou qui avait du regret, une divinité enfermée entre miséricorde et colère, prisonnier du comportement humain et qui alterne constatations et ressenti. Un constat désespérant s'impose pour Dieu : "Mais même leurs Juges, ils ne les ont pas écoutés", ce qui débouche  sur la mise à l’épreuve :

"Le SEIGNEUR se mit en colère contre Israël ; il dit : Puisque cette nation a passé outre à mon alliance, l'alliance que j'avais instituée pour ses pères, et qu'ils ne m'ont pas écouté, moi, je ne déposséderai plus devant eux aucune des nations que Josué a laissées quand il est mort, afin de mettre par elles Israël à l'épreuve, pour voir s'ils veilleront ou non à suivre la voie du SEIGNEUR, comme leurs pères y ont veillé. Ainsi le SEIGNEUR laissa ces nations en repos, il ne se hâta pas de les déposséder. Il ne les livra pas à Josué" (2,20-23).

On se demande en quoi cette "épreuve" pourrait tourner à l'avantage d'Israël et lui permettre de renouveler l’alliance, la situation ressemble à une voie sans issue.         
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeMar 16 Juin 2020, 12:24

Comme on l'a dit plus haut, cette introduction "deutéronomiste" est programmatique et idéologique: elle ne se contente pas d'annoncer le contenu du livre, mais entend en énoncer la "loi", la "logique" ou le principe d'intelligibilité, par principe plus "clair" que la suite, et qui par conséquent n'"éclaire" celle-ci qu'en obscurcissant ce qu'elle dit réellement (on peut penser, par analogie, à la fonction du prologue en prose de Job, nettement plus "clair" que les dialogues poétiques mais complètement décalé par rapport à eux, qui ne les "éclaire" donc qu'en les rendant encore plus obscurs).

La "logique" historique ou pseudo-historique du Deutéronome, qui va commander la rédaction deutéronomiste jusqu'à la fin des Rois, est en effet très simple, elle produit une espèce de mouvement de balancier ou de cycle perpétuel, faute-châtiment-repentance-restauration-oubli-faute, etc., avec un effet de lassitude qui s'empare du dieu autant que du lecteur et aboutit au rêve de la "nouvelle alliance" ou de l'"esprit" dans les coeurs (Jérémie-Ezéchiel), qui rendrait la transgression et l'oubli impossibles.

Le thème de l'"épreuve" que tu soulignes avec raison (aussi 3,1.4) serait encore une cinquième "explication" à ajouter aux quatre que j'ai énumérées ci-dessus (14.6.2020) -- encore qu'elle se confonde en partie avec la quatrième, que j'ai appelée "pédagogique" (la glose de 3,2, de l'utilité de la guerre, que je méditais en pensant un peu aux "temps" autrement cycliques de Qohéleth 3, un temps pour la guerre et un temps pour la paix).
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeMar 16 Juin 2020, 13:07

Citation :
Le thème de l'"épreuve" que tu soulignes avec raison (aussi 3,1.4) serait encore une cinquième "explication" à ajouter aux quatre que j'ai énumérées ci-dessus (14.6.2020) -- encore qu'elle se confonde en partie avec la quatrième, que j'ai appelée "pédagogique" (la glose de 3,2, de l'utilité de la guerre, que je méditais en pensant un peu aux "temps" autrement cycliques de Qohéleth 3, un temps pour la guerre et un temps pour la paix).

Je viens de découvrir avec étonnement ( 3,1.4) avec le v2 qui interprète la mise à l'épreuve d'Israël comme un moyen de  "leur enseigner la guerre" donc une méthode pour apprendre  l’art de la guerre ou au contraire de découvrir  ce qu’est la guerre quand on est loin de Dieu et seul, à la merci des peuples alentours. Le v4 indique que Dieu éprouve Israël "pour savoir s'ils écouteraient les commandements", d'un côté l'épreuve est motivée par la volonté d'enseigner aux fils d’Israël la guerre et d'un autre côté, de leurs apprendre a résister moralement à l'influence des nations en gardant les commandements de Yhwh.

Une chose étonnante, en (3,5-6) il n'est plus question de faire la guerre aux nations, puisqu’elles sont devenues des alliés par mariages conséquence directe de la cohabitation  avec les nations.
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeMar 16 Juin 2020, 14:09

La glose de 3,2 (glose restrictive, qui a l'air d'écarter toutes les autres "explications" du contexte, ce n'était que pour cela) m'avait aussi frappé quand j'ai rouvert ce livre, sur ton incitation (cf. mon premier post supra). J'avais plutôt pensé "apprendre la guerre" au sens général de l'expérience (d'abord subie), mais il est vrai qu'on peut aussi bien l'entendre au sens actif, "l'art de la guerre" (cf. 2 Samuel 22,35 // Psaume 18,35; Isaïe 2,4 // Michée 4,3 etc.).

Le principe de l'épreuve "pour savoir" -- comme si Yahvé ne pouvait précisément pas "savoir" sans l'épreuve -- est un leitmotiv du Deutéronome (8,2; 13,3 etc.; on peut aussi penser à l'"épreuve" d'Abraham en Genèse 22 qui débouche sur un "maintenant je sais...").

Quant aux "nations", il faut distinguer celles "de l'intérieur" selon la rédaction deutéronomiste et son schème de la conquête inaboutie ("Cananéens" et leurs listes variables, mais toujours artificielles) et celles "de l'extérieur" (Moab, Ammon, Philistins, etc.) qui seront les vrai(e)s adversaires des récits du livre.
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeMar 16 Juin 2020, 15:15

Juges et mythologie

Les Juges, cʼest flagrant, est un livre qui a subi des réécritures plus ou moins tardives. On trouve d'étonnants parallèles dans les passages mythologiques des Juges. Ainsi le curieux épisode des renards dont Samson enflamme les queues (Juges 15,4-5) a un parallèle dans histoire occidentale : la fondation de Rome contient un épisode semblable relaté dans les «Fastes» dʼOvide, livre IV, 685-710. Le Cantique de Débora (Juges 5) semble être écrit sur le modèle de cantiques de victoire
beaucoup plus anciens. Plus frappant encore est le texte de Yotam (Juges 9,7-20) que l'on trouve quasiment mot à mot dans une fable dʼEsope. La comparaison ci-dessous est fascinante :

Le conte de Yotam en Juges 9,7-15

On lʼannonça à Yotam. Celui-ci alla se placer
au sommet du mont Garizim; il éleva la voix et
cria, puis leur dit: «Écoutez-moi, propriétaires
de Sichem, et que Dieu vous écoute.
Les arbres sʼétaient mis en route
pour aller oindre celui qui serait leur roi.
Ils dirent à lʼolivier : «Règne donc sur nous.»
Lʼolivier leur dit :
«Vais-je renoncer à mon huile
que les dieux et les hommes apprécient en moi,
pour aller mʼagiter au-dessus des arbres ?»
Les arbres dirent au figuier :
«Viens donc, toi, régner sur nous.»
Le figuier leur dit :
«Vais-je renoncer à ma douceur
et à mon bon fruit,
pour aller mʼagiter au-dessus des arbres ?»
Les arbres dirent alors à la vigne :
«Viens donc, toi, régner sur nous.»
La vigne leur dit : «Vais-je renoncer à mon vin
qui réjouit les dieux et les hommes pour aller
mʼagiter au-dessus des arbres ?»
Alors tous les arbres dirent au buisson dʼépines :
«Viens donc, toi, régner sur nous.»
Mais le buisson dʼépines dit aux arbres:
«Si cʼest loyalement que vous me donnez
lʼonctionpour que je sois votre roi,
alors venez vous abriter sous mon ombre.
Mais sʼil nʼen est pas ainsi,
un feu sortira du buisson dʼépines
et il dévorera les cèdres du Liban.»


Les Arbres et lʼOlivier, Fable 252 dʼEsope

Un jour les arbres se mirent en devoir
dʼélire un roi pour les commander,
et ils dirent à l'olivier : «Règne sur nous.»
Et l'olivier leur répondit :
«Moi, que je renonce à la grasse liqueur
si appréciée en moi par Dieu et par leshommes,
pour aller régner sur les arbres !»
Et les arbres dirent au figuier :
«Viens régner sur nous.»
Et le figuier lui aussi répondit :
«Moi, que je renonce à la douceur qui est en moi
et à l'excellent fruit que je porte,
pour aller régner sur les arbres !»
Et les arbres dirent à lʼépine :
«Viens régner sur nous.»
Et lʼépine répondit aux arbres :
«Si vraiment vous m'oignez
pour régner sur vous,
venez vous mettre à l'abri sous moi;
sinon,quʼil sorte du feu de lʼépine,
et qu'il dévore les cèdres du Liban !»
http://cbov.ch/wp-content/uploads/2018/ ... -Juges.pdf
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeMar 16 Juin 2020, 16:12

Lien corrigé.

C'est un peu moins simple que ça: les collections populaires de "Fables d'Esope" se sont enrichies au fil des siècles (des millénaires en l'occurrence) au point d'inclure aussi, depuis la fin du moyen-âge, la fable des Juges (n° 262 et non 252 dans le catalogue de Perry); la part de vérité de cette erreur, c'est qu'on a bien affaire au même "genre", et que la parabole de Jotam, dépouillée de son contexte narratif et de sa conclusion, ne détonnerait pas du tout chez Esope ou La Fontaine. Il reste en revanche tout à fait possible que le texte des Juges s'inspire de "fables d'Esope" plus anciennes, sinon originales, comme celle du débat entre un grenadier et un pommier (Perry 213), ou entre un laurier et un olivier (celle-ci plutôt de Callimaque, poète d'Alexandrie, Perry 439), qu'un buisson d'épines prétend arbitrer; on en trouve aussi des échos dans la Sagesse d'Ahiqar, texte araméen grosso modo contemporain d'Esope (VIIe/VIe s. av. J-C.). C'est dire que les traditions populaires communiquent dans plusieurs sens et à plusieurs époques entre l'Asie, l'Afrique et l'Europe. Voir ici (en anglais).

Pour les Fastes d'Ovide, voir ici (évidemment ce n'est pas Ovide, Ier siècle après J.-C., qui a pu influencer les Juges, et ce type de récit populaire qui peut se retrouver un peu partout est proprement intraçable).

D'autre part, je serais partisan de résister à l'emploi lâche du mot "mythologi(qu)e" pour qualifier tout ce qui n'est pas "factuel": entre la fable, le conte, la légende, le roman, etc., et le "mythe" un peu plus proprement dit il y a des différences beaucoup plus importantes qu'entre tout ça et l'histoire prétendue "vraie" ou "historique"...

Ce qui en Juges 9 détourne la fable du genre fable, ce n'est pas seulement le contexte narratif où elle est insérée (légende, si l'on veut, d'Abimélek rattachée superficiellement à celles de Jérubbaal et Gédéon fondus en un seul personnage; le massacre de tous les fils de Jérubbaal, sauf un, rappelle 2 Rois 11, avec Joas à la place de Jotam; Joas étant par ailleurs le nom du père de Gédéon: à l'intérieur de "la Bible" aussi les traditions narratives communiquent, l'exemple le plus célèbre étant sans doute le doublet Juges 19 // Genèse 19); c'est aussi sa portée politique, qui en fait une satire violente de la monarchie: seul voudrait régner celui qui n'est bon à rien d'autre...
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeMer 17 Juin 2020, 11:28

Dans le chapitre 3, nous découvrons 3 juges : 1) Otniel (3,7-11), 2) Ehoud (3,12-30) et 3) Shamgar (3,31).

Otniel

 Il est membre de la tribu de Juda et son père Qenaz est le frère cadet de Caleb1. Il devient le premier Juge d'Israël après la mort de Josué. Son histoire est racontée dans le Livre de Josué, puis dans le Livre des Juges (chapitres 1 et 3).
L'épouse de Othoniel est Akhsa, la fille de Caleb dont celui-ci offrait la main à quiconque conquerrait la ville de Kirjath-Sépher (ancien nom de la ville de Debir). C'est ainsi que Othoniel gagna par un acte de bravoure en dirigeant la conquête de la ville.
Plus tard, le texte biblique évoque l'éloignement des Israélites vis-à-vis de Dieu et comment ceux-ci s'unirent à des femmes cananéennes5. Un roi de Mésopotamie, Kusham-Risheatayim, s'installe alors dans la région. Othoniel apparaît comme le sauveur suscité par Dieu1. Il rassemble une armée et triomphe des envahisseurs. Il assure la paix en terre d'Israël pendant quarante ans. Ehud succède à Othoniel comme juge d'Israël.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Othoniel

Shamgar

La mention du juge Shamgar en (3,31) semble interrompre la fluidité du récit, en effet (4,1) poursuit l'histoire comme si le juge précédent était Ehoud et non Shamgar :  "Les Israélites firent encore ce qui déplaisait au SEIGNEUR — Ehoud était mort".
Shamgar réapparait en Jg 5,6 dans le chant de Débora : "Aux jours de Shamgar, fils d'Anath, aux jours de Yaël, les sentiers étaient abandonnés, et les voyageurs prenaient des sentiers détournés".
Peut-être que le chapitre 3, rattache l'action de Shamgar au récit d'Ehoud. L'allusion à Shamgar est assez originale, le texte est très court, il ne mentionne pas les motivations théologiques qui expliquent l'oppression par les ennemis d'Israël. A l'inverse de Samson, Shamgar est réduit à un seul exploit, tout comme Shamma (2 S 23, 11) qui comme lui abattent des centaines de philistins avec un objet rudimentaire. En Juges 5,6, il est précisé que Shamgar est le fils d’Anath ... Peu-être un lien avec la déesse Anath.
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeMer 17 Juin 2020, 11:58

Wikipedia (en français) se contente de paraphraser le texte.

Sur le rapport complexe et probablement secondaire du nom "Qenaz" et du gentilice "Qenizzite" à "Juda", voir supra 15.6.2020.

Un roi de "Mésopotamie" (Aram-Naharaïm) dans ce contexte géographique est à peu près aussi fantastique que la "guerre mondiale" d'Abra(ha)m en Genèse 14.

Outre le Shamma de 2 Samuel, Shamgar ressemble à Samson -- avec une mâchoire d'âne au lieu d'un aiguillon à boeufs, 15,15ss, et toujours des Philistins. (Je ne reviens pas sur le problème historique général des Philistins, d'origine européenne selon certaines traditions bibliques qui les font venir de Kaphtor ou de Kereth = Crête, assimilés aux "peuples de la mer" des textes égyptiens et dans cette hypothèse seulement présents dans la région à partir du XIIe siècle av. J.-C.).

Le culte d'Anath, soeur de Baal à Ougarit, est bien présent dans l'Israël ancien, comme cela ressort aussi des toponymes (Beth-Anath, Anatoth, etc.); c'est une déesse guerrière (l'expression ultérieurement biblique "fracasser les crânes / tempes" des ennemis se retrouve à son sujet dans les textes d'Ougarit).
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeMer 17 Juin 2020, 12:51

Ce canevas sert de toile de fond précisément à un tout autre dessin. Ce sont en tout douze Juges, autant que de Tribus, qui paraissent pour sauver les fils d’Israël. À tour de rôle, ils assument la survie d’Israël, sans qu’aucun émerge. Il y en a cinq grands, mais sept de remplissage, tel Chamgar avec son aiguillon, sept qui sont destinés à compléter le nombre de Douze – artificiellement et donc de façon voulue, prophétique. Ajoutons qu’aucun de ces personnages de premier plan ne deviendra roi ; aucun n’aura de successeur dans la famille, ni de tenure sur le sol. Mieux, les « petits » Juges sont sans histoires, au sens de complications, alors que les « grands » en sont encombrés. Ils sont même entachés de fautes : Éhud, de traîtrise, Baraq de lâcheté, Jephté du sacrifice monstrueux de sa fille et de guerre civile ; Samson, d’intérêt personnel et de délire, et ses frasques nous éloignent du cadre moral, deutéronomique, plus ou moins effectif jusqu’à ce dernier Juge, qui est plutôt une caricature du rôle. Par là, comme s’il ne suffisait pas que chaque Juge rentre ensuite dans le rang après s’être mis en avant, la prophétie du livre veut donc que même ces héros provisoires ne soient pas l’idéale figure qu’on risquerait de promouvoir aux fonctions de Prince. Mieux, le rédacteur se préoccupe explicitement de cette tentation et donc du problème de la royauté, en immobilisant soudain sa chronique comme par hasard au milieu de l’ouvrage, une position remarquable, pour mettre en scène une tentative de royauté, dont le récit est complaisant à souhait (la fin du ch. 8 et le long ch. 9).

Car, là, un des cinq grands Juges, Gédéon, s’entend effectivement proposer la royauté. Il en refuse le titre pour la raison, excellente en soi, que seul Yahvé règne sur Israël. Voire. Pourtant, il fait immédiatement les gestes du roi en attirant à lui les trésors pris sur l’ennemi. L’idole qu’il en confectionne alors entraîne tout Israël à se prostituer, ce qui est un comble pour un Juge, un héros sauveur : sauver physiquement Israël, au prix de sa substance divine, est-ce un gain ? Pire, cette promotion personnelle indirecte de Gédéon est l’amorce du long récit où son fils Abimèlek tente de se faire nommer roi pour de bon, en commençant par massacrer ses soixante-dix frères (allusion à la trouble transition qui conduira de David à Salomon ?…). Préfacés par la fable des arbres qui demandent un roi, on sait le désastre et la guerre intestine qui sévissent. L’essai de royauté avorte. Le long récit, au milieu des Juges, apporte donc une preuve a contrario du rôle, sage parce que réglé, des Juges occasionnels – et donc des Tribus. Ne parlons d’ailleurs pas d’anarchie, sinon d’anarchie réglée, plus apparente que réelle, en ce sens précis qu’il n’y a pas de prince qui vaille, mais qu’il existe un principe comme souterrain qui assure autant de fois qu’il le faudra le bien de tous. Le livre des Juges désigne ce socle infaillible, ordinairement invisible et donc divin, du régime des douze Tribus.

Le drame, si frappant pour l’imagination, insiste sur cette leçon théorique fondamentale, nécessaire, divine, infrangible comme le diamant : Israël n’a sa vérité que formé des Douze Tribus solidaires. Plusieurs détails contribuent à fixer ce dogme. Plusieurs fois, il est dit qu’Israël, en l’absence de tout roi, se mobilise comme un seul homme. D’autre part, il était d’abord annoncé que Juda prendrait la tête de l’expédition contre Benjamin, mais la suite des opérations n’en tient pas compte, et Juda n’y joue aucun rôle premier, car c’est le peuple comme un seul homme qui réfléchit, agit, décide, se rassemble au lieu sacré de Miçpa. Ce détail d’un Juda appelé puis oublié, est d’autant plus éloquent ici qu’il joue d’un contraste : au début du livre, pour ouvrir la conquête de Canaan, Juda était déjà désigné d’une formule identique pour monter le premier, et on le voyait effectivement monter le premier. Ici, il est appelé de même, mais sans effet : son appel avorté souligne l’inutilité d’un premier, avec d’autant plus d’ironie et de fermeté qu’il s’agit de Juda, la Tribu bientôt hégémonique.  https://www.cairn.info/revue-pardes-2006-1-page-41.htm
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeMer 17 Juin 2020, 18:45

Lecture très originale et stimulante -- il est remarquable que la tradition juive, quand elle ne se cantonne pas à sa propre récitation et ne verse pas non plus dans un "fondamentalisme" antimoderne (donc moderne), produise au contact des "sciences bibliques" chrétiennes ou post-chrétiennes quelque chose d'aussi sensiblement différent de leurs propres productions.

Je ne choisirais pas pour ma part une "morale", fût-ce sous la forme négative d'une "immoralité" attribuée à tel ou tel récit, groupe ou personnage, comme critère ou clé de lecture -- je ne suis pas sûr d'ailleurs que le deutéronomisme soit "moral" au sens où nous entendons ce terme, ni même au sens où le judaïsme rabbinique l'entendrait. Mais, en suivant la réflexion de l'article, je me demande si c'est bien une "totalité" (avec ce mot bien sûr je pense à Levinas), fût-elle idéale, symbolique ou "utopique", comme celle des "douze tribus" (qui n'apparaissent nulle part comme telles dans le livre, sinon dans les annexes, avec le corps de femme découpé en douze morceaux à l'instar du boeuf de Saül et les expéditions laborieuses qui s'ensuivent contre Guibéa qui sera précisément la patrie de Saül), même interprétée comme contrepartie ou horizon imaginaire d'un "chacun" ainsi que Cazeaux y insiste, qu'il faut opposer à une unité politique institutionnelle (monarchie, sacerdoce, etc.); si ce ne seraient pas plutôt la situation et l'événement, avec la part de nécessité et la part de hasard, d'occasion et d'invention qui les caractérisent, qui font ici et là, de temps en temps, une unité politique provisoire mais effective et décisive, un "peuple" ou une "nation" avec ses hommes et ses femmes "providentiels" (et peu importe alors ce qu'il rassemble, sa composition et ses contours géographiques, ethniques, linguistiques, culturels ou cultuels, sociaux ou idéologiques). L'unité intermittente et changeante de l'insurrection, en somme, contre celle de l'institution constante ou de la simple continuité historique, mais qui retrouverait rétrospectivement dans son acte l'intégrité d'une tradition (tout Israël, les pères, etc.; un peu comme la "révolte" de Camus qui trouve après coup dans son acte a priori singulier et absurde la "raison" ou la "justification" d'une justice universelle). Il me semble en tout cas qu'on pourrait tout aussi bien tirer une "leçon politique" de ce genre du livre des Juges (et qu'elle ne serait même pas incompatible avec celle de Cazeaux).
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeJeu 18 Juin 2020, 12:37

Le récit d'Ehoud est bâti de manière à ménager un suspense, à créer un effet comique et bizarre et à mettre ne évidence la ruse et la supercherie d'Ehoud. Le lecteur est mis dans le secret par le narrateur, il sait qu'Ehoud "se fit une épée à deux tranchants, longue d'une coudée, et il la mit à sa ceinture sous ses vêtements, à son côté droit" (3,16) et qu'il va se passer quelque chose, lorsque Ehoud va remettre le tribut à Eglôn, roi de Moab. Le texte nous indique néanmoins qu'Ehoud est un handicapé :
 
 "Les Israélites crièrent vers le SEIGNEUR, et le SEIGNEUR leur suscita un sauveur, Ehoud, fils de Guéra, un Benjaminite, qui était gaucher. Les Israélites envoyèrent par lui un tribut à Eglôn, roi de Moab" (3,15).

 Note : gaucher : litt. lié de la main droite, ce qui pourrait aussi signifier infirme de la main droite ; v. 16,21 ; le terme hébreu rappelle l’expression traduite par Benjaminite, cf. Gn 35.18n ; LXX ambidextre (cf. Jg 20.16 ; 1Ch 12.2).

De plus le texte ne fait pas allusion une éventuelle descente de l'Esprit de Yhwh sur Ehoud comme ce fût cas pour Otniel, Gédéon, Jephté et Samson. Ehoud n'est pas, non plus, explicitement nommé juge.

L'effet comique et bizarre se traduisent pas la mention que le roi Eglôn était "très gras" (3,17) et  par le fait que "les gens de la cour" quand ils constatèrent que  le roi qui ne donnait plus signe de vie, "se dirent : Il est sans doute en train de satisfaire un besoin naturel dans la chambre fraîche" (3,24).

La ruse et la supercherie apparaissent dans le récit quand Ehoud gagne la confiance du roi Eglôn, en ne provoquant aucun problème lors de la première entrevue, au moment de la remise du tribut. Ainsi lorsque Ehoud rebrousse chemin et se présente devant le roi, celui-ci se sent en sécurité et notamment lorsque Ehoud lui indique qu'il a un secret à lui communiquer, ce qui pousse Eglôn à accepter un tête à tête. Un autre élément, de roi de Moab étant très gras, Ehoud arrive à le faire passer de la position assise à la position debout, afin de parvenir à le tuer :

"Ehoud vint donc vers lui alors qu'il était assis dans la chambre fraîche qui lui était réservée, à l'étage. Ehoud dit : J'ai une parole de Dieu pour toi. Eglôn se leva de son siège" (3,20).
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeJeu 18 Juin 2020, 13:11

Le handicap ou l'infirmité n'est qu'une interprétation possible, non la plus probable à mon sens (cf. 20,16, toujours pour des Benjaminites): parce qu'il est l'exception le gaucher est désigné négativement par la langue (hébraïque en l'occurrence) forgée par le "bon sens" majoritaire, mais il se rattrape dans la réalité comme dans la fiction, puisqu'il a l'avantage de la surprise dans un combat, motif classique qu'on retrouve aussi bien dans le Western que dans les films d'arts martiaux asiatiques... Ici, bien sûr, il ne s'agit pas de combat régulier mais de la possibilité de dissimuler une arme, du côté où on ne l'attend pas, pour un entretien en tête-à-tête.

Plus généralement, on en revient à une remarque qu'on a souvent faite sur le rapport de la faiblesse à l'intelligence: dès lors qu'il y a ruse ou stratégie, et que "Dieu" lui-même doit y recourir, on n'est pas dans le registre de la "toute-puissance" qui annulerait ipso facto toute histoire et tout récit.
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeJeu 18 Juin 2020, 14:59

Ehud en tant qu'agent secret (Juges 3: 19-26)

Une fois l'hommage rendu à Eglon, Ehud rentre chez lui avec les porteurs israélites qui ont rendu l'hommage. Pour Eglon, il semble que la mission soit terminée. Il a reçu ce à quoi il pense avoir droit. Ehud, cependant, se retourne vers les "pierres sculptées" ( ) et retourne à Eglon (v. 19).
La mention des "pierres sculptées" a évidemment une fonction structurante dans la péricope de Judg 3: 12-30. Ils n'apparaissent pas seulement au début du péricope. Ils apparaissent également à sa fin. Leur fonction dans l'histoire est donc de clôturer l'épisode sur la mission secrète d'Ehud. Vv. 19-26 forment ainsi le noyau de l'histoire qui est encadrée entre vv. 12-25 (dépendance d'Israël) et vv. 27-30 (victoire d'Israël). Ces versets centraux (19-26) sont clairement structurés, comme le montre le mot use:

3: 19a: les  ("pierres sculptées")
3: 19b-20a: Les serviteurs d'Eglon partent ( ) et Ehud s'approche ( )
3: 20b-23: dans la chambre royale privée d'Eglon
3:24: Ehud part ( ) et les serviteurs s'approchent ( )
3:26: les  ("pierres sculptées")

La raison pour laquelle l'auteur les nomme explicitement  à Gilgal n'est pas claire. Le terme apparaît environ 20 fois dans l'AT, principalement avec le sens négatif de «idoles». Ce n'est cependant pas une raison immédiate de supposer que le  Jugement 3: 19.26 a également une connotation négative - au contraire. Pour le lecteur, ils rappellent les pierres que les Israélites avaient dressées à Guilgal après avoir traversé le Jourdain (Jos 4: 20-24). On ne peut donc pas exclure que les "pierres sculptées" dans Judg 3:19, 26 aient également une connotation religieuse. Selon Josh 4:24, les pierres avaient une double signification. À travers ces pierres, toutes les nations se souviendraient de la puissance de YHWH et Israël continuerait de le craindre. Précisément, ces deux éléments sont également abordés dans Juges 3: 12-20. De plus,  dans dans Judg 3: 19.26, délimitez une frontière. Entre le moment où Ehud fait volte-face au  et le moment où il repart, quelque chose de crucial se produit, à savoir la mort d'Eglon.

Quand Ehud atteint à nouveau le roi, il sait qu'il doit immédiatement attirer l'attention du roi. Il dit: "O roi, j'ai un secret pour toi." Une fois de plus, nous sommes confrontés à l'ambiguïté de la langue hébraïque. Le texte dit littéralement: "J'ai un secret  pour vous" (v. 19). Ce terme hébreu a une double signification. Le premier est «mot», et c'est ainsi qu'Eglon l'interprète également - comme l'annonce d'un message secret. Il demande immédiatement le silence, un ordre interprété par les autres personnes présentes comme un ordre de partir et de laisser Eglon et Ehud se parler en privé. Le fait qu'Ehoud ne soit plus accompagné des porteurs israélites le rend encore plus excitant pour le roi, mais cela le met également à l'aise. On ne peut guère s'attendre à un homme solitaire, apparemment non armé. Cependant, en plus de «mot»,  signifie également «chose» ou «objet». Pour le lecteur, il est immédiatement clair à quoi l'auteur fait référence, à savoir le poignard que porte Ehud.

Selon le texte, Ehud fait un pas de plus vers le roi. Il entre dans la chambre haute - un lieu habituellement réservé au roi seul. Une fois entré, Ehud dit: "J'ai un  pour toi de Dieu." Cela alimente encore plus la curiosité d'Eglon. Ehoud est en effet venu à cause de Dieu. Une fois de plus, le terme ambigu  est utilisé et interprété par Eglon d'une manière différente de celle du lecteur. Pour le lecteur (israélite), c'est clair. Il pense à l'arme (  comme "chose") qui, grâce à Ehud envoyé par Dieu, annoncera la fin de l'oppression moabite. Pour Eglon, le message devient encore plus mystérieux (en  tant que «mot»). Il semble non seulement être secret, mais les mots semblent d'ailleurs être un oracle divin. Il se lève, peut-être par respect. À ce moment, Ehud saisit l'épée de sa cuisse droite avec sa main gauche et poignarde le roi dans le ventre. https://translate.google.fr/translate?hl=fr&sl=en&u=http://www.scielo.org.za/scielo.php%3Fscript%3Dsci_arttext%26pid%3DS1010-99192017000200003&prev=search&pto=aue
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeJeu 18 Juin 2020, 16:20

Bon article (ici sans traduction automatique...) qui fait ressortir beaucoup de détails et d'hypothèses intéressantes -- p. ex., sur les "gauchers" (paradoxaux en hébreu) de Benjamin (qui désigne le pays du Sud, celui du côté droit quand on s'"oriente" par rapport à l'"orient" du soleil levant, à l'est), il pourrait s'agir d'une formation militaire particulière, qui consisterait à lier la main droite pour s'exercer à utiliser la gauche. L'ambiguïté hébraïque de dbr (parole, chose, événement) joue certainement un rôle dans le texte (j'ai une parole / un message / quelque chose pour toi), ainsi que le nom d'Eglon qui évoque le veau ou le jeune taureau (engraissé) -- noter aussi qu'il est toponyme en Josué 10: le roi d'Eglon s'appelle alors Debir, qui fait écho à la dbr parole-chose susmentionnée et qu'on a déjà vu au chapitre 1 comme autre nom de Kiriath-Sépher (ou Kiriath-Sanna d'après Josué 15); debir est aussi le nom du "Saint des saints" dans le temple qui peut être rapproché de la chambre secrète du texte, il y a beaucoup de fils à suivre... (de proche en proche je repense à la pochade de Leconte d'après Gotlib, Les vécés étaient fermés de l'intérieur...) :)
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeVen 19 Juin 2020, 11:02

"Les Israélites firent encore ce qui déplaisait au SEIGNEUR ; le SEIGNEUR rendit fort Eglôn, roi de Moab, aux dépens d'Israël, parce qu'ils avaient fait ce qui déplaisait au SEIGNEUR. Eglôn réunit à lui les Ammonites et les Amalécites, et il se mit en marche. Il battit Israël et prit possession de la Ville des Palmiers. Les Israélites furent soumis à Eglôn, roi de Moab, pendant dix-huit ans"  (3,12-14)


 D EHUD, EGLON ET VIOLENCE DIVINE

Pour commencer, il est frappant de constater que la violence de Dieu dans cette péricope ne tombe pas d'abord sur les ennemis d'Israël, mais sur Israël lui-même. En d'autres termes, il ne s'agit pas de violence divine contre les oppresseurs d'Israël dans le but de libérer les Israélites d'une situation humiliante, comme c'était le cas dans l'histoire de l'exode d'Egypte. Au contraire. Le début de la péricope souligne clairement: "YHWH a donné à Eglon, le roi de Moab, le pouvoir sur Israël" (Judg 3:12). En remettant Israël aux Moabites, Dieu se retourne contre Israël et fait usage d'une nation hostile. La violence divine s'inscrit ici dans une pédagogie divine - une théologie devenue très problématique. Dieu punit les Israélites parce qu'ils se sont détournés de lui et ont suivi d'autres dieux. Cependant, en même temps, il ne reste pas au niveau de la punition. Chaque fois qu'Israël se repent et retourne à YHWH, Dieu se montre miséricordieux: "YHWH est un Dieu miséricordieux et gracieux, patient, grand en amour et en fidélité, qui fait preuve de bonté envers la millième génération, qui pardonne les méfaits, les transgressions et les péchés, mais ne laisse pas les coupables impunis "(Exode 34: 6-7).

L'auteur n'a aucun problème avec la pédagogie divine qui utilise les autres. Son objectif est de montrer à ses lecteurs comment Israël tombe continuellement du mauvais côté, est puni par Dieu et est finalement mis sur la bonne voie. C'est le message que l'auteur adresse à ses lecteurs. Premièrement, l'auteur explique à ses lecteurs comment les Israélites deviennent des victimes de leur propre péché, encore et encore, et comment cette misère est de leur propre fait. Ensuite, l'auteur cherche à encourager Israël à tirer des leçons de son passé et à éviter de retomber dans l'idolâtrie. Le fait que l'auteur utilise précisément les Moabites pour ce processus de rééducation des Israélites témoigne d'autant plus de son talent d'auteur. À maintes reprises, l'OT raconte comment Israël et Moab ont vécu constamment en guerre l'un contre l'autre. Lorsque l'auteur se moque du gros roi de Moab de la manière la plus horrible, montrant comment le roi a été sacrifié comme un taureau pour une bonne cause - en tant que tel, l'histoire a été caractérisée comme "l'humour ethnique"38 ou "querelle verbale"39 - les Israélites doivent sans aucun doute avoir souri avec un plaisir malveillant. En tant que théologien narratif par excellence, l'auteur de Judg 3: 12-30 réussit comme aucun autre à communiquer son message "deutéronomiste" à travers une histoire merveilleusement composée: les choses iront mal pour celui qui se détourne de Dieu. Mais en même temps, il atteste également la certitude que Dieu ne fuit pas ceux qui reviennent à lui. Malgré toute l'incrédulité et l'infidélité, il reprend toujours les Israélites, et il est - au moins pour ceux qui s'alignent avec lui - un Dieu de vie.
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeVen 19 Juin 2020, 14:12

C'est oublier que "l'auteur" de l'introduction et des transitions "deutéronomistes", celui qui produit l'effet de "grande histoire" avec son "sens" et sa "morale", son idéologie de la rétribution divine qui vire au cycle oubli-faute-châtiment-repentance-salut-oubli et ainsi de suite, n'est précisément pas celui ou ceux des "petites histoires" qu'il compile en les arrangeant superficiellement à son idée, mais sans pouvoir les transformer en profondeur. Si l'écriture en soi n'a pas de sens, ce n'est pas par défaut mais par excès de sens divergents et contradictoires.
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MessageSujet: Re: Le livre des Juges    Le livre des Juges  Icon_minitimeMar 23 Juin 2020, 11:59

Un verset du livre des Juges attribue à Deborah la qualité de prophétesse : « Deborah, femme prophétesse, femme de Lapidot… ». Et pourtant la guemara relève cette dernière expression qu’elle interprète comme une sorte de qualificatif, en faisant de lapidot un nom commun signifiant « torches » ou « flammes », d’où l’explication de Ralbag : son visage s’enflammait quand elle prophétisait. La guemara explique : « Elle faisait des mèches pour le Sanctuaire. » Et le Midrach de commenter que c’était là un mérite qui lui avait valu le don de prophétie : « Elle réfléchissait et fabriquait des mèches plus épaisses pour qu’elles produisent plus de lumière, et Celui qui scrute les reins et les cœurs a dit : “Tu as voulu augmenter Ma lumière, J’augmenterai la tienne !” » C’est en quelque sorte l’application du principe de réciprocité : « mesure pour mesure », mida kenègued mida.

Cette lecture du mot lapidot peut être justifiée par le fait que lorsqu’on désigne une femme par référence à son mari, c’est que ce dernier est un homme connu , mais ce n’est pas le cas ici pour le midrach qui choisit de lire lapidot comme un nom commun ! Pour un autre midrach , elle avait convaincu son mari d’apporter ces mèches au Sanctuaire afin que, tout ignorant qu’il fût, il ait néanmoins sa place parmi les hommes de bien et qu’il ait part au Monde futur. C’est là un exemple explicite de l’influence bénéfique que Deborah a exercée sur sa génération, comme va l’attester la suite du texte talmudique.

La deuxième réponse fait allusion au rôle positif qu’a joué Deborah auprès du peuple. En effet, le chapitre 4 des « Juges » commence par mentionner la mauvaise conduite d’Israël qui a amené Dieu à les livrer au pouvoir oppressif de Yavin, roi cananéen. Cela durait depuis vingt ans quand le peuple enfin « a crié vers Dieu », dans un mouvement de retour vers Lui – ce qui a suscité l’envoi d’un sauveur providentiel en la personne de Deborah. Celle-ci va intervenir en nommant avec l’aval divin un chef de guerre, Barak, et en lui indiquant quelle sera sa mission . Sur son insistance, elle l’accompagne dans son expédition, tout en lui révélant (4 ; 9) qu’il ne pourra tirer gloire de cette action puisque « c’est à une femme (Yaël) que l’Éternel aura livré Sisera (le général ennemi) ». Les forces sont inégales de part et d’autre, les Cananéens ont l’avantage, mais une violente pluie providentielle fait déborder le torrent du Kichon, détrempant le terrain où s’embourbent les 900 chars ennemis. Dans le Cantique que Débora chante avec Barak, la prophétesse mentionne ce miracle . Et le narrateur conclut le chapitre par ces mots : « Le pays fut tranquille pendant 40 ans. » https://www.cairn.info/revue-pardes-2007-2-page-103.htm
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