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 Les particularités de "selon Jean".

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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeLun 26 Mar 2018, 13:45

Très bel article -- qui donne une idée, sur quelques mots de l'évangile, de la richesse de tradition (patristique, médiévale, et même moderne) dont se prive ordinairement l'approche protestante de "la-Bible-seule".

Le principal malentendu possible (cf. notamment p. 3-4 de ce fil, sur ce même passage) est toujours le même, qui se répercute au fond à chaque génération de lecteurs, quelles qu'en soient les variations formelles: ce qui oppose "gnose" et "Eglise", "ésotérisme" et "exotérisme", "mystique" et "institution", "esprit" et "corps" si l'on veut. Sans ce malentendu qui constitue le "christianisme" comme il constitue le texte même, rien ne nous en serait parvenu.

Au point de vue linguistique, on peut noter que le rapprochement avec Genèse 2 (saint Augustin etc.) fonctionne en grec (pleura pour le "côté", d'où "plèvre" ou "pleurésie"), mais pas avec Genèse 6 (la porte sur le "côté" de l'arche) -- ni en grec ni en hébreu (malgré une lointaine assonance de çd et çl`). D'une façon plus générale, l'image de Jean 19,34 se prête mieux à un mouvement de sortie (de l'eau et du sang comme du souffle-esprit, cf. 7,38s) que d'entrée.
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeJeu 29 Mar 2018, 14:10

Autre remarque (de Jeudi-Saint) à propos de la discussion précédente, sur Jean 13: l'"eucharistie" est dé-jouée ou contre-jouée non seulement par le lavement des pieds, mais aussi par la "communion de Judas" qui s'y enchaîne (en passant par le thème de la pureté totale ou partielle, qui fait lui-même allusion au baptême, cf. v. 8ss,18s,21ss). La parodie est caricaturale, surtout si on la compare à l'hyper-réalisme eucharistique de 6,51ss: Satan entre en Judas comme le Christ dans les communiants. Mais si elle est ironique elle n'est pas seulement négative; par là aussi le Christ se défait de son "âme-vie" de sa propre initiative, se donne, se livre, se transmet, à tous les sens de la tradition-trahison-traduction.

Si l'on prend un peu de recul par rapport au détail du texte pour regarder l'ensemble, il apparaît à l'évidence que ce qui est substitué au "sacrement" c'est la "parole" -- un flot de discours qui n'en finira plus de se reprendre et de se développer jusqu'à la fin du chapitre 17. Par là aussi l'adjonction du Prologue et de son logos trouve une accroche solide à l'évangile.

---
Ajout du Vendredi:
Une nouvelle écoute de la Passion selon saint Jean (par l'excellent ensemble baroque de Tom Koopman, de passage à Lyon) me fait remarquer (peut-être à nouveau, mais grâce à l'oubli ça revient au même) certains détails du texte: par exemple, la répétition dramatique des "Je suis" (Ich bin['s] <- egô eimi <=> c'est moi) au moment de l'arrestation trouve son écho dans les reniements de Pierre (Ich bin's nicht <- ouk eimi), qui rappellent à leur tour les dénégations de Jean-Baptiste au début de l'évangile (je ne suis pas - le Christ, la lumière, etc.); le rapprochement de la "prophétie" du grand prêtre et de sa familiarité avec le disciple bien-aimé donne l'impression d'une collusion secrète où le rôle de chacun est double (l'ombre de Judas s'y insinue, qui d'habitude est le seul intermédiaire entre le groupe de Jésus et le groupe des prêtres); l'assonance des transcriptions araméennes ("hébraïques" dans le texte) Gabbatha-Golgotha (qui sonne encore plus en allemand, Golgatha) fait passer d'une association de sens contradictoires à une autre (le condamné assis sur le siège du juge, l'humiliation élévation d'une part; la  mort, le crâne, le tombeau et le jardin d'autre part, via la pierre commune aux deux situations); la similitude de la tunique tissée de haut en bas, qui ne se déchire pas, et du voile du temple qui se déchire de haut en bas selon Matthieu (que Bach intègre à la Passion selon saint Jean, avec les ténèbres, le tremblement de terre et la résurrection générale, en une véritable dislocation de la création à la mort du créateur; de même plus tôt les pleurs de Pierre, qui donneront le fameux Erbarme dich dans la Passion selon Matthieu); le caractère délibérément décalé des références bibliques à ce propos, qui passent à côté de l'élément significatif et du coup le mettent en évidence, comme à propos des os non brisés et du transpercé par rapport au symbole qui compte, le sang et l'eau (cf. supra). Rien dans tout cela qui puisse s'énoncer très clairement (sauf à y perdre tout intérêt), mais un jeu complexe et subtil de résonances à entendre. P. ex. ici.
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeMer 19 Sep 2018, 16:51

"Celui qui m'a envoyé est avec moi ; il ne m'a pas laissé seul, parce que, moi, je fais toujours ce qu'il agrée." (Jean 8, 29)

"vient — elle est venue — où vous serez dispersés chacun de son côté, et où vous me laisserez seul ; mais je ne suis pas seul, car le Père est avec moi."(Jean 16,32) 

Pourquoi cette insistance sur le fait que le Fils n'est pas seul ... J'ai lu que certains exégètes pensaient que Jean a voulu prévenir une mauvaise interprétation de Mc, 15,34 concernant le cri de Jésus sur la Croix. J'ai le sentiment qu'il y a quelque chose de plus profond, une présence permanente du Père dans le Fils (et vice versa).   



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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeMer 19 Sep 2018, 17:21

A mon avis, l'un n'empêche pas l'autre. Il est certain que le quatrième évangile paraît souvent prendre délibérément le contrepied des Synoptiques, ou du moins de ce qu'il en connaît aux différentes étapes de sa rédaction (p. ex., "portant lui-même sa croix" contre "Simon de Cyrène", ou la prière-mono-dia-logue où Jésus exclut l'idée de demander à être "sauvé" de son "heure", contre "Gethsémané"). Mais ces "réactions" ne sont pas de simples caprices, elles répondent aussi à sa "christologie" propre et positive, qui (par rapport à la tradition de l'"abandon", Marc-Matthieu) ne tolère aucun écart, aucune distance entre "le Fils" et "le Père". Ce qui n'est d'ailleurs nullement incompatible (contrairement à ce qu'imaginent, à très courte vue, les TdJ et autres unitariens) avec l'affirmation, encore plus forte qu'ailleurs, de la dépendance et de la soumission totale du "Fils" au "Père", qui n'en est que l'envers. Si le Fils révèle pleinement le Père, c'est précisément parce qu'il n'est rien de "propre", d'autonome ou d'indépendant -- il ne dit ni ne fait rien de lui-même. Et pour le révéler pleinement il faut d'ailleurs que le "Jésus terrestre" disparaisse tout à fait (relire le chapitre 12, depuis le v. 20).

On y "perd" évidemment quelque chose: dans ce "Jésus tout dieu" (totus deus sinon totum dei) il n'y a plus rien d'"humain", si l'on entend par "humain" ce qui s'oppose ou résiste au "divin". Même s'il pleure c'est (le) dieu qui pleure, l'esprit qui se trouble, etc. C'est tout autre chose que la relation turbulente, conflictuelle, souvent antagoniste, de "l'homme" et de "l'esprit" chez Marc (mais pour ça on a Marc).
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeJeu 20 Sep 2018, 10:53

Citation :
Mais toutes ces "réactions" ne sont pas de simples caprices, elles répondent aussi à sa "christologie" propre et positive, qui (par rapport à la tradition de l'"abandon", Marc-Matthieu) ne tolère aucun écart, aucune distance entre "le Fils" et "le Père". Ce qui n'est d'ailleurs nullement incompatible (contrairement à ce qu'imaginent, à très courte vue, les TdJ et autres unitariens) avec l'affirmation, encore plus forte qu'ailleurs, de la dépendance et de la soumission totale du "Fils" au "Père", qui n'en est que l'envers. Si le Fils révèle pleinement le Père, c'est précisément parce qu'il n'est rien de "propre", d'autonome ou d'indépendant -- il ne fait rien de lui-même. Et pour le révéler pleinement il faut d'ailleurs que le "Jésus terrestre" disparaisse tout à fait (relire le chapitre 12, depuis le v. 20).

Merci Narkissos pour cette explication qui m'a permis de comprendre "pleinement" l'idée exprimée en Jean 14,28 : "car le Père est plus grand que moi.".

En relisant le chapitre 14 de l'évangile de Jean, j'ai découvert le v1, qui laisse entendre apparemment que les disciples croient davantage en Dieu qu’en Jésus :

"Que votre cœur ne se trouble pas : vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi" (14,1)

Ce texte semble mettre la foi en Dieu, sur le même plan que la foi en Christ.

Juste avant d'affirmer que "le Père est plus grand que moi", Jésus dit à ses disciples : "Si vous m'aimiez, vous vous réjouiriez de ce que je vais vers le Père" ...  si les disciples de Jésus l’aimaient vraiment, ils seraient heureux qu’il retourne auprès du Père, car il retourne vers ce à quoi il appartient, à la gloire qu’il avait auprès du Père avant la création du monde (17.5) ... dans sa situation actuelle ( Jésus incarné homme), le Père est indéniablement plus grand que lui.

Peut-on penser que le Père est plus grand que le Fils en tant source de la divinité ?
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeJeu 20 Sep 2018, 11:46

Cf. supra 8.2.2013 et , 6.11.2014ss.

Ce n'est pas seulement un "Jésus homme" qui est nécessaire mais insuffisant à la pleine révélation divine; en 12,20ss, c'est aussi un "Jésus juif" qui paraît inadéquat à la révélation aux Grecs: seul le Fils de l'homme élevé de la terre (par la croix et le retour au Père, qui sont ici la même chose) attirera tous à lui.

Le sens de 14,1 est très incertain, en raison de l'hésitation entre l'indicatif et l'impératif dont les formes sont identiques: on pourrait aussi bien lire "croyez au dieu, croyez aussi en moi", "vous croyez au dieu, vous croyez aussi en moi" -- sans compter les possibilités interrogatives, "vous croyez au dieu ? -- croyez aussi en moi". Peu importe d'ailleurs quand on lit la suite (v. 6, 8, 12 à rapprocher aussi de 28, etc.).

La métaphore de la "source" paraît inévitable, bien qu'elle soit foncièrement fausse: ce qu'on appelle LA source d'un fleuve n'est jamais qu'une de ses origines parmi des milliers d'autres (affluents, pluie, ruissellement). Il faudrait penser une "source" dont proviendrait tout son fleuve et à laquelle celui-ci retournerait -- "sans que rien ne se perde", comme dit le leitmotiv johannique (bref, le "plérôme" gnostique, alias "plénitude"). Mais en effet toutes les différences dans cette perspective sont structurelles, fonctionnelles et relationnelles, et ainsi "essentielles" -- ce qui s'inscrit à même le vocabulaire "familial": le Fils n'est Fils que par rapport au Père, mais le Père n'est Père que par rapport au Fils (cf. le commentaire de l'Evangile de la vérité sur le nom du Père donné au Fils, dont nous avons parlé ici, 18.6.2015). Elles se déploient comme elles se replient ou se résorbent, expansion-contraction, à l'horizon du "monde" dans un sens et de l'"Un" dans l'autre -- l'un dans l'autre, tout peut se lire dans cette seule formule.
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeJeu 20 Sep 2018, 12:36

"Ne crois-tu pas que, moi, je suis dans le Père, et que le Père est en moi ? Les paroles que, moi, je vous dis, je ne les dis pas de ma propre initiative ; c'est le Père qui, demeurant en moi, fait ses œuvres." (Jean 14,10) 

L'affirmation de Jésus : "je ne les dis pas de ma propre initiative" ; sert souvent aux antitrinitaire, pour établir une distinction entre le Père et le Fils, alors que le texte en question développe l'idée contraire, c'est parce que " je suis dans le Père, et que le Père est en moi" , que le Fils ne peut pas agir indépendamment du Père.    

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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeJeu 20 Sep 2018, 16:14

Le problème -- comme nous le ressassons depuis le début -- c'est que les positions "trinitaires" et "antitrinitaires" sont empêtrées dans le même essentialisme statique et identaire qui leur rend le dynamisme du quatrième évangile totalement incompréhensible. Si on y vient avec des questions du genre "qui est" ou "qu'est" ("Dieu" ou "Jésus-Christ" -- comme si ça ne pouvait pas bouger, comme si ça ne changeait pas par le jeu même de leur relation), il ne faut pas s'étonner d'en recevoir des réponses contradictoires. Mais ce ne sont pas des réponses, ce ne sont que les reflets à la surface du texte de questions étrangères, anachroniques et surtout décalées par rapport à sa "logique dynamique". En un sens, les questions idiotes se donnent à elles-mêmes les réponses qu'elles méritent, et le texte, au fond, n'y est pour rien.

A la limite, et sans le faire exprès, la Watchtower est bien plus près de l'esprit ironique, ludique et facétieux du johannisme dans sa traduction délirante d'Exode 3,14: si Dieu devient ce qu'il choisit de devenir (pourquoi pas homme, ou araignée, papillon ou libellule, comme dirait Prévert), à quoi bon s'enquiquiner encore et toujours à vouloir définir ce qu'il est et le distinguer des autres ?
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeMer 04 Mar 2020, 17:36

Citation :
Mais ces "réactions" ne sont pas de simples caprices, elles répondent aussi à sa "christologie" propre et positive, qui (par rapport à la tradition de l'"abandon", Marc-Matthieu) ne tolère aucun écart, aucune distance entre "le Fils" et "le Père". Ce qui n'est d'ailleurs nullement incompatible (contrairement à ce qu'imaginent, à très courte vue, les TdJ et autres unitariens) avec l'affirmation, encore plus forte qu'ailleurs, de la dépendance et de la soumission totale du "Fils" au "Père", qui n'en est que l'envers. Si le Fils révèle pleinement le Père, c'est précisément parce qu'il n'est rien de "propre", d'autonome ou d'indépendant -- il ne dit ni ne fait rien de lui-même. Et pour le révéler pleinement il faut d'ailleurs que le "Jésus terrestre" disparaisse tout à fait (relire le chapitre 12, depuis le v. 20).


"Jésus leur répond : L'heure est venue où le Fils de l'homme doit être glorifié. Amen, amen, je vous le dis, si le grain de blé ne tombe en terre et ne meurt, il demeure seul ; mais s'il meurt, il porte beaucoup de fruit. Celui qui tient à sa vie la perd, et celui qui déteste sa vie dans ce monde la gardera pour la vie éternelle." (Jean 12,23-25)

"Celui qui m'a envoyé est avec moi ; il ne m'a pas laissé seul, parce que, moi, je fais toujours ce qu'il agrée." (8,29)

Jean 12 ; semble souligner l'idée que tant que le Fils n'a pas réintégré le Père, "il demeure seul" (incomplet), d'un autre côté Jean 8, soutient que le Père n'a pas laissé seul le Fils, que leur UN n'a jamais été brisé. Comment concilier ces deux idées ?  

 

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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeMer 04 Mar 2020, 18:12

Je ne vois pas vraiment là de contradiction: ce qui est dit en 12,23s du grain de blé (non de "Jésus"), qui resterait seul s'il ne "mourait" (soit une possibilité sur deux, l'autre étant au contraire de mourir pour porter du fruit et ne pas être seul), illustre justement ce que "Jésus" ne fait pas: ce qui est pour le grain de blé une éventualité a priori indifférente est pour "Jésus" un "irréel" absolu; lui est bel et bien "semé", il va "mourir", et donc ne pas être "seul" (monos, cf. aussi v. 16 et 16,32); il reste dans le mouvement du don de soi qui est celui de "Dieu" même, il ne serait pas ce qu'il est sans cela. Une fois encore (dans ce fil où on y aura beaucoup insisté depuis près de douze ans): ce qui peut paraître contradictoire en termes d'"être" et d'"essence(s)" statiques, ou d'une hypothétique indifférente qui construit abstraitement des alternatives égales (ceci ou cela sont également possibles) se résout naturellement dans une compréhension dynamique de l'"être" et de l'"essence", nullement opposables au "devenir" -- qui sont le "devenir" même. (Gottes Sein ist im Werden, l'être de Dieu est dans le devenir, comme dirait Jüngel.)
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeVen 10 Avr 2020, 13:00

Citation :
Surtout quand on observe le renversement par rapport au point de départ:

Il y a beaucoup de demeures (monai) dans la maison de mon Père. Sinon, vous aurais-je dit que je vais vous préparer une place? Si donc je m'en vais vous préparer une place, je reviens vous prendre auprès de moi (paralèmpsomai humas pros emauton), pour que là où, moi, je suis, vous soyez, vous aussi.
...
nous viendrons à lui et nous ferons notre demeure (monèn) auprès de lui (par'autô).


"ce que nous avons vu et entendu, nous vous l'annonçons, à vous aussi, pour que vous aussi vous soyez en communion avec nous. Or notre communion est avec le Père et avec son Fils, Jésus-Christ." 1 Jean 1,3 

vous soyez en communion : litt. vous ayez communion, de même v. 6s ; le terme grec a aussi le sens concret de solidarité ; cf. Jn 17.20s ; Ac 2.42n ; 1Co 1.9 ; Ph 1.5n

Narkissos, peut-on établir un lien entre "demeurer" et "communion" ?

La notion de "solidarité" suppose une interdépendance résultant d'une symbiose Shocked  

 

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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeSam 11 Avr 2020, 00:06

La "communion" (koinônia etc., très proche en effet de notre notion de "solidarité" jusque dans son galvaudage; nous en avons reparlé tout récemment ici 5.4.2020) n'appartient pas au vocabulaire spécifique du quatrième évangile; c'est une notion d'abord paulinienne, puis plus généralement ecclésiastique, que le johannisme intègre à sa façon sur le tard, comme beaucoup d'autres (ainsi la "communion eucharistique" dans l'addition sur Jean 6, dont nous avons aussi parlé un peu plus loin dans le même fil, 7.4) -- en l'occurrence seulement dans la Première épître (1,3.6). Mais on peut en effet la rapprocher du thème de l'unité (du Père, du Fils, des élus qui sont "un") qui est déjà dans l'évangile (p. ex. 17,20s), et aussi du "demeurer" (menein) associé ou non à l'inclusion réciproque (x en y et y en x). Je ne sais pas ce que tu entends exactement par "symbiose" ni ce qui cause ton étonnement émoticonique, mais l'idée me semble plutôt pertinente a priori -- tout au plus pourrait-on lui objecter que dans le johannisme (et dans la gnose en général) l'"unité" est aussi d'origine.
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeSam 11 Avr 2020, 11:53

Citation :
Mais on peut en effet la rapprocher du thème de l'unité (du Père, du Fils, des élus qui sont "un") qui est déjà dans l'évangile (p. ex. 17,20s), et aussi du "demeurer" (menein) associé ou non à l'inclusion réciproque (x en y et y en x). Je ne sais pas ce que tu entends exactement par "symbiose" ni ce qui cause ton étonnement émoticonique, mais l'idée me semble plutôt pertinente a priori -- tout au plus pourrait-on lui objecter que dans le johannisme (et dans la gnose en général) l'"unité" est aussi d'origine.

Merci Narkissso pour ses éclaircissements.

En fait, j'aimerais savoir si le "demeurer" comporte une notion d'inclusion réciproque, merci pour ta réponse. Il me semble que Jean 15, établit bien ce rapport entre "demeurer" et inclusion réciproque : 

"Demeurez en moi, comme moi en vous. Tout comme le sarment ne peut de lui-même porter du fruit, s'il ne demeure dans la vigne, vous non plus, si vous ne demeurez en moi. C'est moi qui suis la vigne ; vous, vous êtes les sarments. Celui qui demeure en moi, comme moi en lui, celui-là porte beaucoup de fruit ; hors de moi, en effet, vous ne pouvez rien faire.Si quelqu'un ne demeure pas en moi, il est jeté dehors comme le sarment et il se dessèche ; on ramasse les sarments, on les jette au feu et ils brûlent. Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voudrez, et cela vous arrivera. Mon Père est glorifié en ceci : que vous portiez beaucoup de fruit et que vous soyez mes disciples" (Jean 15,4ss)

Le sarment fait parti de la vigne, il n'en n'est pas un élément extérieur, c'est la même sève qui nourrit la vigne et le sarment : "Demeurez en moi, comme moi en vous", cette image exprime plus que l'unité et l'intimité.
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeSam 11 Avr 2020, 16:58

"Demeurer" (menô, menein) n'implique pas forcément la préposition "en/dans" introduisant un complément de "lieu", au sens propre ou figuré (aussi en en grec; ex.: "que votre joie demeure", sans préposition ni complément de lieu), et encore moins la réciprocité de celle-ci (x en y et y en x, qui peut également fonctionner sans le verbe "demeurer"). Mais ça va quand même assez souvent ensemble (menô + en dans les deux sens: Jean 6,56; 15,4.7ss; 1 Jean 2,24; 3,6.9.24; 4,12ss).
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeSam 11 Avr 2020, 17:31

"Personne n'a jamais vu Dieu. Si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous, et son amour est accompli en nous. A ceci nous savons que nous demeurons en lui, comme lui en nous : c'est qu'il nous a donné de son Esprit. Et nous, nous avons vu et nous témoignons que le Père a envoyé le Fils comme sauveur du monde.Celui qui reconnaît que Jésus est le Fils de Dieu, Dieu demeure en lui, comme lui en Dieu. Et nous, nous connaissons l'amour que Dieu a pour nous, et nous l'avons cru. Dieu est amour ; celui qui demeure dans l'amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui.  1 Jean 4,12-16

L'explicitation de la communion avec Dieu et les uns avec les autres se fait de manière assez surprenante au chapitre 4, si l'on tient compte de la macrostructure d'ensemble de l'épître. En effet, le lecteur du prologue est placé en fin de parcours devant une étonnante déclaration. À l'affirmation solennelle et convaincante entrée sur «ce que nous avons vu» (1 Jn 1, l-3a) correspond un non moins solennel «Dieu, personne ne l'a jamais contemplé ». Le contraste est pour le moins frappant. C'est pourtant bien à une communion avec Dieu qu'est invité le lecteur. Une définition de cette communion avec Dieu est en effet donnée, fondée sur les formules d'intériorité et d' inhabitation réciproque (Dieu en nous et nous en lui), particulièrement mises en relief en 4, 12b- 16. La définition des possibilités de la communion avec Dieu se poursuit et s'achève à la fin du chapitre 4. En 4, 20 l'auteur de l'épître énonce non plus les conditions de la communion avec Dieu, mais es conséquences du refus de l'amour fraternel: «Celui qui n'aime pas son frère qu'il voit, Dieu qu'il ne voit pas, il ne peut l'aimer». Ce renversement, déjà annoncé en 1, 6-7 à propos de la koinônia, conduit le lecteur à reprendre les énoncés du voir dans le prologue. L'expression «ce que nous avons vu, touché, entendu,...», qui dit la réalité de l'incarnation et du salut advenu en Jésus Christ, conduit, voire «oblige» selon le vocabulaire johannique, à une «incarnation de la charité». Le lecteur est sollicité à un changement de regard: pour voir Dieu (que l'on ne saurait voir), il lui faut voir le frère et découvrir ainsi l'amour de Dieu (3, 17). La communion avec Dieu s'exprime certes par une inhabitation (Lui en nous et nous en Lui), mais l'accomplissement de l'amour en nous (4, 17-18) se vérifie dans le concret de l'amour du frère qui, lui, est bien «à voir» (4, 20). ttps://www.persee.fr/docAsPDF/rscir_0035-2217_2005_num_79_1_3749.pdf
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeDim 12 Avr 2020, 00:31

Dès lors que "Dieu" devient le sujet d'un prédicat essentiel -- emblématiquement dans les textes johanniques, "amour", "lumière" ou "esprit", ce que "Dieu est" -- il devient un "signifiant" comme un autre, interchangeable au moins avec les prédicats en question: tout ce qui est dit de "Dieu" pourra être dit de "l'amour", de "la lumière", ou de "l'esprit" -- et réciproquement. Ce jeu qui constitue à lui seul une grande partie de la rhétorique de la Première épître (où il y a "amour", il y a "Dieu", et inversement) n'est qu'un des moments les plus remarquables -- à cause de sa nature strictement "théo-logique" -- du mouvement général dont nous parlons depuis le début (plutôt , en fait): cette "danse des signifiants" qui ne laisse à aucun une place centrale ou seulement fixe, mais les entraîne tous, du plus humble comme "eau" ou "pain" au plus "chargé" comme "Dieu", dans un jeu potentiellement infini de renvois mutuels et circulaires.
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeSam 25 Avr 2020, 21:18

« Il écrivait du doigt sur le sol » (Jn 8,6)

Examinons les détails. Au v. 6, Jésus : 1) avec son doigt ; 2) écrit ; 3) sur la terre / le sol. « Écrire » n’est pas tout à fait une bonne traduction de katagraphô, qui peut signifier « graver », comme l’indique son usage dans la lxx en Ex 32,15lxx à propos des tables de pierre, ou en Os 8,12lxx à propos de lois, sans doute gravées, qui semblent d’origine étrangère. Ces trois détails renvoient donc clairement à la représentation de YhwH écrivant de son doigt la charte des Dix Paroles sur les tables de pierre, que nous avons notée plus haut. Au v. 8, la description du narrateur est simplifiée, l’adverbe palin renvoyant à la description du v. 6.

Il est donc tout à fait clair que Jésus écrit quelque chose de l’ordre de la loi, peut-être du niveau de la charte des Dix Paroles. Quant au rapport à la loi, donc, le mouvement du récit ne va pas dans le sens d’une suppression, ou d’une absence de loi, ni d’un rejet de la loi, comme si c’était la position de Jésus face à la situation de la femme, et à sa propre situation d’accusé (v. 6). Il y a bien une loi, et sans doute une loi nouvelle. Le fait à souligner ici est que nous n’avons pas accès au texte ou au contenu de cette loi. Il y a bien une loi, puisqu’il y a une écriture, mais le texte nous échappe. https://www.cairn.info/revue-nouvelle-revue-theologique-2014-4-page-529.html
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeSam 25 Avr 2020, 23:28

Il n'est pas forcément idiot de rapporter la péricope de 7,53ss au quatrième évangile, même si c'est un "contexte" accidentel ou artificiel, puisque c'est là qu'elle a été placée dans la majorité des manuscrits (tardifs) où elle figure: ceux qui l'ont mise à cet endroit plutôt qu'ailleurs ont bien pu y voir un rapport, même si leur principal souci était sans doute de la caser quelque part. Par contre, la démarche inverse, qui consisterait à utiliser cette péricope pour "éclairer" tant soit peu le sens d'un livre dont elle n'a jamais fait partie, jusqu'aux toutes dernières étapes de sa rédaction (p. ex. chap. 21), me paraît désespérée, sauf à désespérer de toute rationalité en exégèse...

Il n'empêche que ce passage mérite, comme tout autre, d'être lu, étudié et comparé avec la littérature (grosso modo) contemporaine (ce qui, s'agissant d'un texte relativement tardif, inclut non seulement la Septante, la littérature juive dite intertestamentaire et l'ensemble du NT, mais aussi une bonne partie de la littérature chrétienne ultérieure, patristique, apocryphe ou hérétique. (L'article de R. Meynet que tu as cité aujourd'hui même dans un autre fil peut compléter utilement celui de J.M. Carrière, ci-dessus.)
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeMer 08 Mar 2023, 17:07

2. Changement du statut de serviteur à ami (15,15) : "Je ne vous appelle plus esclaves, parce que l'esclave ne sait pas ce que fait son maître. Je vous ai appelés amis, parce que je vous ai fait connaître tout ce que j'ai entendu de mon Père". 

Cette structure éclaire le rapport « doulos – philos » (serviteur – ami). Le terme « ouketi » (ne plus), en 15,15a, marque une nouvelle étape dans la révélation. Jésus achève sa mission dans le monde en faisant connaître aux disciples tout le dessein du Père. Le verbe « legô » a souvent le sens « dire », ce verbe en 15,15a.c est traduit par « appeler ». En 15,15a, il est au présent de l’indicatif : « legô » exprimant l’idée d’inachèvement et de répétition. Tandis qu’en 15,15c, ce verbe est au parfait de l’indicatif : « eirèka » exprimant l’idée d’achèvement définitif. Ainsi les disciples sont amis de Jésus pour toujours. Il s’agit d’un changement de statut qui marque une nouvelle étape dans leur relation avec Jésus.

Les termes « serviteurs » (A) et « amis » (A’) sont suivis de la conjonction « hoti » (car, parce que) qui introduit une explication. Les serviteurs (A) sont définis par le fait qu’ils ne savent pas ce que fait leur maître (B). Tandis que les amis (A’) sont les bénéficiaires de la totalité de la transmission de Jésus (B’) et non de la connaissance des disciples. Les disciples deviennent les amis de Jésus parce que ce dernier leur a fait connaître tout ce qu’il a entendu auprès de son Père. De la sorte, l’ignorance du serviteur sur le « faire » de son maître (B) est mise en parallèle avec la totalité de la révélation de Jésus (B’). Le parallèle B // B’ est donc dissymétrique car ce n’est pas le savoir du serviteur qui fait passer du statut de serviteur à celui d’ami, mais l’accomplissement de la révélation de Jésus.

Ces observations montrent que certains auteurs parlent du parallèle qui ne figure pas en 15,15. Par exemple, ce n’est pas le parallèle entre « ne pas comprendre » et « comprendre » comme le propose D.A. Carson, The Farewell, p. 105-106 : « La distinction dressée par Jésus entre un serviteur et un ami n’est pas la distinction entre obéir et ne pas obéir, mais la distinction entre ne pas comprendre et comprendre. » Il ne s’agit pas non plus de la symétrie entre la révélation partielle et la pleine révélation comme le propos de F.F. Segovia, The Farewell, n. 54, p. 159 : « L’opposition entre “serviteurs” et “amis” peut donc être comprise à partir d’une perspective épistémologique (manque de compréhension – parfaite compréhension) ou christologique (révélation partielle – pleine révélation), les deux étant au bout du compte analogues. » Nous sommes en désaccord avec ces interprétations puisque, selon le texte, il existe deux parallèles en 15,15 : le premier est un parallèle d’opposition des appellations : « serviteurs » (15,15a) et « amis » (15,15c) ; le deuxième est un parallèle dissymétrique entre « ne pas savoir » du serviteur (15,15b) et le « tout faire connaître » de Jésus (15,15d).

La dissymétrie du parallèle entre l’ignorance du serviteur et la totalité de la transmission de Jésus dévoile une double signification : d’abord, la situation du serviteur qui ne sait pas ce que fait son maître sous-entend que l’ami sait ce que fait son maître. Dans le contexte de Jn 13–17, le « faire » de Jésus renvoie à son passage de ce monde vers le Père, cela est annoncé en 13,1. Ainsi, le serviteur ne comprend pas la signification du passage de Jésus vers le Père (15,15b), tandis que l’ami peut le saisir. Ensuite, sur le plan de la révélation, l’expression « faire connaître tout » en 15,15d renvoie à la mission de Jésus, en particulier l’acte de « déposer sa vie pour ses amis » (15,13b). Cette interprétation est confirmée puisque les verbes « akouô » (entendre) et « gnôrizô » (faire connaître) en 15,15d sont à l’aoriste : « èkousa » (j’ai entendu), « egnôrisa » (Je l’ai fait connaître). Ce temps indique l’accomplissement de la révélation de Jésus. Notons que, dans le récit, Jésus continue son discours après 15,15d et il n’a pas encore achevé sa mission en offrant sa vie sur la croix, mais pour le narrateur, c’est Jésus glorifié qui s’adresse à la communauté et au lecteur après Pâques.

http://leminhthongtinmunggioan.blogspot.com/2018/03/jn-1513-1520-serviteurs-et-amis-de-jesus.html
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MessageSujet: Re: Les particularités de "selon Jean".   Les particularités de "selon Jean". - Page 7 Icon_minitimeMer 08 Mar 2023, 18:31

Cette étude laborieuse est à mon avis une illustration caricaturale des ravages de l'esprit "technicien" ou "mécaniste" appliqué au langage et aux textes: il traite tout, grammaire, vocabulaire, sens, structures, comme des pièces de Lego (TM) qu'on peut à loisir séparer, isoler, combiner et recombiner. Ce n'est pas comme ça qu'on parle, qu'on écrit, qu'on lit ou qu'on entend, sinon dans l'illusion plus ou moins savante ou scolaire du métalangage...

D'abord je pense que doulos doit bien être traduit par "esclave" et non par "serviteur": dans le contexte gréco-romain il désigne un statut (opposé à celui d'homme libre) plutôt qu'une fonction (servir, ce que peut aussi bien faire un homme libre, qui ne sera pas doulos pour autant). Que son usage soit péjoratif ou non, plus ou moins selon les contextes, ne change rien à ce sens fondamental (là encore, c'est une vision technicienne ou mécaniste de la "polysémie" qui prend les différents "usages" distingués dans un dictionnaire comme des "sens" hermétiquement séparés, des boîtes où le traducteur ou l'interprète pourrait piocher à sa convenance). Quand un "apôtre" se qualifie de doulos khristou, il signifie une relation d'appartenance au Christ plutôt que de service (ce que peuvent exprimer beaucoup d'autres termes en fonction du genre de "service" envisagé).

De même, si l'on peut parfois voir des nuances entre les verbes agapaô et phileô, dans les textes johanniques ils sont interchangeables, comme l'usage johannique des (quasi-)synonymes en général (cf. p. ex. le commentaire de Brown sur Jean 21, qui avait été pour moi une petite "révélation" par rapport à ce que j'avais répété bêtement depuis le jéhovisme). Les textes "pauliniens", rhétoriques, tendent parfois à la précision, à la définition et à la distinction quasi techniques du vocabulaire, les "johanniques" fonctionnent tout autrement, ils accumulent les synonymes sans les distinguer, et créent même de la synonymie fonctionnelle entre des termes qui ne sont pas du tout synonymes (ce qu'on a appelé maintes fois dans ce fil la "danse" ou "ronde des signifiants": lumière-vie-vérité-amour-esprit-eau-ciel-dieu-christ etc. c'est toujours le même, c'est pour ainsi dire la musique qui compte plus que les paroles et certainement pas les "concepts").

Il faut surtout tenir compte de la place qu'occupe ce texte dans le développement du livre, on est dans une énième rédaction, développement de développement (reprise du chap. 13 après la première conclusion du 12, réécriture des thèmes des 13--14 dans les 15 et 16), toujours de style et d'esprit "johanniques", mais on ne gagne pas grand-chose à rapporter les éléments les uns aux autres sans tenir compte de la place qu'ils occupent et surtout du "mo(uve)ment d'écriture" auquel ils appartiennent. Ainsi le thème de l'"amour", du moins comme (nouveau) "commandement", est une innovation de la deuxième partie du livre.
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