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| Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... | |
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free
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| Sujet: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Mar 31 Mai 2022, 11:11 | |
| Livre de Sophonie La prédication du prophète Sophonie date de la fin du VIIe siècle avant J.-C. et a sans doute précédé celle d'Habacuc. Au moment où elle a été prononcée, le roi Josias n'a vraisemblablement pas encore mis en place sa réforme religieuse (voir 2 Rois 23.1-28), et le royaume de Juda vit un moment dramatique de son histoire. Le prophète répond à ceux qui se demandent si Dieu s'intéresse vraiment aux hommes et s'il mène l'histoire. Il annonce l'intervention de Dieu sous plusieurs formes: Dieu viendra juger les habitants de Juda et de Jérusalem (1.1-2.3), il détruira les peuples voisins de Juda (2.4-15), puis il restaurera Jérusalem après en avoir extirpé le mal et y avoir laissé une population humble et pauvre dans le but de transformer l'humanité entière (3.1-20).
Sophonie souligne que le peuple de Dieu ne peut retrouver une relation vraie avec son Dieu sans une élimination radicale de ceux qui font passer leur propre profit avant les exigences du Seigneur. Mais il témoigne d'une tendresse particulière pour les « humbles du pays » (2.3; 3.12).
http://www.interbible.org/interBible/ecritures/bfc/introductions/at_introductions/i_sophonie.htm |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Mar 31 Mai 2022, 11:30 | |
| Sur Sophonie 3,17 que rappelle ton (sous-)titre ("il gardera le silence dans son amour"), je rappelle ce fil qui, au-delà du verset et de la formule, a aussi évoqué quelques considérations plus générales sur le livre (en particulier avec un excellent article de B. Renaud que tu nous avais apporté) et sur les "silences de Dieu". Comme pour l'ensemble des "Douze (petits) prophètes" (entre autres), il faut distinguer la "situation originelle" présumée pour le "prophète-personnage" (fin du VIIe s. av. J.-C. selon l'introduction de la BFC, d'après la seule notice de 1,1; la BFC récite en matière de datation des opinions plus ou moins consensuelles, généralement celles de la TOB, ici avant sa révision de 2010) et les rédactions ultérieures, qui s'étendent sur plusieurs siècles jusqu'à la réception (pré-)"canonique" des textes que nous lisons (en traduction du moins). En fait nous ne lisons quasiment jamais un texte du VIIe siècle avant J.-C., mais un texte composite qui relève de différentes époques et milieux, même s'il y reste quelques vestiges de la "situation originelle". D'un point de vue "historique", le texte de Sophonie (du moins ce qui en lui se rapporterait effectivement au règne de Josias) pourrait aussi bien remettre en question la "réforme de Josias" telle qu'elle est construite par l'historiographie de Samuel-Rois -- ce que tente d'éviter la datation de l'"oracle" avant la "réforme"; pourtant l'oracle n'épargne pas le "roi", cf. p. ex. 1,8. Au-delà du déchaînement de violence tout azimut qui occupe la majeure partie du livre (Jérusalem, Juda, les "nations" proches comme Moab, Ammon ou la Philistie et lointaines comme Ninive ou les "Koushites" -- Nubie, Ethiopie, Haute-Egypte -- curieusement intégrés dans la généalogie même du prophète, 1,1, "fils de Koushi ou du Koushite"), les ajouts "positifs" et "universalistes" du chapitre 3 se distinguent aussi par la référence à la langue (littéralement "lèvre", sph, 3,9s, que la Septante traduit glôssa), qui présenterait l'eschatologie (au moins relative) comme une sorte d'anti-Babel (on retrouve le même terme à plusieurs reprises en Genèse 11) -- selon une opposition plus symétrique et univoque que la future "Pentecôte" des Actes, puisque là il s'agirait bien du retour à une "langue unique". (N.B.: le qualificatif de la "lèvre" ou de la "langue", "pure" = brwrh-beroura, n'est pas le terme habituel de la "pureté rituelle", quoiqu'il s'oppose naturellement aux "lèvres impures", p. ex. Isaïe 6,5; la Septante d'ailleurs ne le traduit pas puisqu'elle semble lire une lettre pour une autre, bdwrh pour brwrh, soit "dans sa génération".) |
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Mar 31 Mai 2022, 13:14 | |
| "Je faucherai tout ce qui est sur la terre, — déclaration du SEIGNEUR — je faucherai les humains et les bêtes, je faucherai les oiseaux du ciel et les poissons de la mer, les causes de chute avec les méchants, et je retrancherai les humains de la terre — déclaration du SEIGNEUR" (1,2-3).
L'auteur semble utiliser la pédagogie de la peur et de la menace propre au genre littéraire de la prophétique. Ces versets donnent au cataclysme annoncé une ampleur cosmique, dans le ciel, dans la mer et sur la terre, pourtant à partir du verset 4, la catastrophe se limitent à Juda et à Jérusalem.
"J'étendrai ma main sur Juda et sur tous les habitants de Jérusalem ; je retrancherai de ce lieu ce qui reste du Baal, le nom des desservants — les prêtres, ceux qui se prosternent sur les toits en terrasse devant l'armée du ciel, ceux qui se prosternent en se liant par serment au SEIGNEUR (YHWH) tout en prêtant serment par Milkom. Ceux qui se dérobent au SEIGNEUR, ceux qui ne cherchent pas le SEIGNEUR, qui ne le consultent pas" (1,4-6).
Notes : Sophonie 1:4 J’étendrai ma main 2.13 ; Ex 3.20 ; Es 5.25+ ; Jr 6.12 ; 15.6 ; 51.25 ; Ez 6.14. – je retrancherai… le nom Za 13.2+. – ce lieu : il s’agit peut-être du temple de Jérusalem. – ce qui reste du Baal : cf. 2R 18.3s ; 23.4ss ; Es 14.22 ; LXX les noms du Baal. – desservants : le terme hébreu correspondant désigne exclusivement dans la Bible les prêtres des dieux étrangers ; ici le texte porte, litt. des desservants avec les prêtres ; cf. 2R 23.5n ; Os 10.5n.
Les prêtres semblent officier pour une religion qui était plus ou moins marquée par du syncrétisme : "se liant par serment au SEIGNEUR (YHWH) tout en prêtant serment par Milkom".
Le v 6 rappelle Dt 4,29 qui souligne la nécessité de rechercher Dieu : "De là vous rechercherez le SEIGNEUR, ton Dieu ; tu le trouveras, si tu le cherches de tout ton cœur et de toute ton âme". Jér 29,14 fait allusion à un Dieu qui affirme : "Je me laisserai trouver par vous". |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Mar 31 Mai 2022, 13:59 | |
| Formellement au moins c'est plus que de la "menace", dans la mesure où aucune condition ("si vous faites ceci ou ne faites pas cela, alors...") n'est énoncée, et aucun moyen de "salut" (ou d'évitement de la catastrophe, comme dans la conclusion de Malachie) annoncé; les "oracles de salut" viennent plus loin, pour un "reste" (survivants) ou pour la terre entière, mais pas forcément "de la même main" (comme on dit), et de toute façon à contresens de la destruction universelle... Au passage, d'un point de vue "intertextuel" et "synchronique" (sans préjudice de la chronologie des rédactions), la destruction irait encore plus loin que celle du déluge de la Genèse, qui épargnait au moins tacitement les poissons... mais le récit du déluge recèle bien la même contradiction, entre l'annonce de destruction totale et l'exception de Noé, outre la promesse finale de non-répétition (plus jamais) motivée par la même raison que l'annonce de destruction initiale (l'homme est mauvais). Contradiction dès lors aussi avec tous les oracles de destruction présumés ultérieurs, d'autant qu'ils se veulent "universels", du "jour de Yahvé" des Prophètes (dont on a vu qu'il était particulièrement fréquent chez les Douze) à l'"eschatologie proprement dite" des "apocalypses" (fin de l'âge-monde ou du monde tout court). -- L'insertion de Jonas parmi les Douze fait à cet égard figure de contrepoint ironique, voire burlesque, à la "prophétie de malheur" (et, par extension, même au déluge ou à la fin du monde).
D'autre part, le texte suggère plutôt un "polythéisme" qu'un "syncrétisme", qui supposerait un culte unique quoique "synthétique", "synthèse" de religions différentes: la différence (exceptionnelle) du vocabulaire sacerdotal (cf. ci-dessus la note de la NBS sur le v. 4) tendrait à le confirmer, il y a des "cultes" distincts qui se tolèrent tant bien que mal, rivalisent ou se complètent, ce qui correspond aussi aux descriptions (à charge) des Rois (depuis la fin du "règne de Salomon"): on adore ou sert d'autres dieux à côté ou en plus de Yahvé, dans le même temple ou dans d'autres sanctuaires, ça ne rend pas le culte de Yahvé "syncrétique" (bien qu'il le soit aussi nécessairement, et d'autant plus qu'on élimine les "autres dieux").
Sur les synonymes traduits par "chercher" et "consulter" (bqš/drš, parallélisme classique), qui peuvent évoquer aussi bien une attitude religieuse ou pieuse en général qu'une "consultation" particulière (de prêtre, prophète, devin, etc.), cf. 2,3 (où le premier verbe revient trois fois, chercher Yahvé / la justice / l'humilité), avec un "peut-être" ('wly-'oulay) aussi rare que mémorable dans un oracle (peut-être serez-vous cachés au jour de la colère de Yahvé). |
| | | free
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Mer 01 Juin 2022, 10:42 | |
| Sur plusieurs points, So 1,2-3 se rapproche d'Ez 38,19-20 qui associe les thèmes du jour, de la jalousie, du feu, de la colère de Yhwh que nous retrouvons aussi en So 1,18 avec un horizon universaliste de la destruction : " Ni leur argent ni leur or ne pourront les délivrer au jour de la colère du SEIGNEUR : par le feu de sa passion jalouse toute la terre sera dévorée, quand il accomplira l'extermination — quelle épouvante ! — de tous les habitants de la terre" (So 1,18). " Je le déclare, dans ma passion jalouse et dans le feu de ma colère : A coup sûr, en ce jour-là, il y aura un grand tremblement de terre en Israël. Les poissons de la mer et les oiseaux du ciel trembleront devant moi, ainsi que les animaux sauvages et toutes les bestioles qui fourmillent sur la terre, et tous les hommes qui sont sur la terre. Les montagnes seront rasées, les parois des rochers tomberont, et toute muraille tombera par terre" (Ez 38,19-20). Dieu lance des accusations contre Juda/Jérusalem mais procède à une destruction totale de la vie sur terre, donc le texte passe une invective locale à une destruction globale. Dans ce chapitre 1, nous retrouvons le thème du " Jour de Yhwh", au v 8 : " au jour du sacrifice du SEIGNEUR" ; au v 9 : " en ce jour- là" et au v 12 : " En ce temps-là". L'idée de la proximité imminente du jour de Yhwh est très marquée : " Il est proche, le grand jour du SEIGNEUR ; il est proche, il arrive très vite ; au bruit du jour du SEIGNEUR, le guerrier pousse des cris amers" (1,14). Pourtant So 1,13 indique : " ils bâtissent des maisons, mais ils ne les habiteront pas ; ils plantent des vignes, mais ils n'en boiront pas le vin" ; le futur " ils bâtiront, ils planteront" implique un délai assez long qui contredit le concept d'imminence du jour. Un extrait d'un article : III.1.4. Le jour de YHWH dans le livre de Sophonie. Le thème du Jour de YHWH domine le livre de Sophonie et détermine aussi sa structure. Pour cerner celle-ci, l’indice littéraire à considérer, estime B. Renaud, est le doublet qui apparaît en So 1,18 et 3,8. En ces deux versets se trouve la phrase « car au feu de ma colère, toute la terre sera dévorée » ; à cette phrase So 1,18 ajoute : « Car il va faire une extermination terrifiante de tous les habitants de la terre ». Ce doublet permet de diviser le livre en trois sections délimitées autrement que d’habitude, et qui concernent chaque fois les nations et Jérusalem : elles annoncent, successivement, le jugement universel (1,2-18), une condamnation avec des limitations (2,1-3, , et un reste purifié et objet de promesses (3,9-20). Au début du livre, So 1,2-6 promet la venue de YHWH ; les vv. 2-3 d’une part et le v. 19 d’autre part délimitent, par inclusion, une première partie du livre : de part et d’autre il est question d’anéantissement de tout sur la terre. Cet événement, Sophonie l’identifie au « Jour de YHWH » (1,7.14) qui est proche. L’idée de la proximité du Jour appartient à une tradition que l’on retrouve en Is 13,6, So 1,7.14 ; Ez 30,3 ; elle est reprise plus tard par Ab 1,15 ; Jl 1,15 ; 2,1 ; 4,14. So 1,7 en fait le « Jour du sacrifice de YHWH » : le « sacrifice », dans le contexte terrifiant du Jour de YHWH, désigne un châtiment (v. 8.9.12) accompagné de pillages et de massacres (1,10.13). Ensuite, ce Jour est « grand » (1,14 ; cf. Mal 3,23 ; Jl 2,11 ; 3,4) : jour de guerre, marqué par un cri amer et strident, comme en Is 42,13 où YHWH est comparé à un guerrier qui pousse le cri de guerre ; d’après le texte d’Isaïe, c’est la jalousie de Dieu qui motive son intervention. So 1,16 parle d’un jour de sonnerie du cor ( Jl 2,1) et de clameur pour déclencher le combat. So 1,15-16 décrit ce Jour de YHWH par une litanie de termes traditionnels : il est un jour de colère ( So 1,18), de détresse et d’angoisse, de dévastation et de désolation, de ténèbres (Am 5,8.18.20 ; 8,9 ; Mi 3,6 ; 7,8 ; Na 1, , de nuages et de sombres nuées. Cette litanie est partiellement reprise en Jl 2,2ab. La première section du livre de Sophonie (1,2-18) est donc une peinture du Jour de YHWH, un jour de jugement universel ne laissant place à aucune échappatoire ; d’où la finale radicale de 1,18b. Mais cet événement a été relu et interprété par une série de gloses rédactionnelles. Ainsi, par exemple : - le v. 6, ajout de style deutéronomiste, généralise et transforme l’oracle de menaces en prophétie eschatologique. - Les vv. 7-8 qualifient la menace de (Jour de YHWH) et de (jour de sacrifice de YHWH). Cette dernière expression est propre à Sophonie, mais on trouve l’usage du mot (...) en d’autres contextes où il est associé au thème de « l’épée du Seigneur » qui dévore et se rassasie de sang (cf. Is 34,2-6 ; Jr 46,10) : en Ez 39,17-20, par exemple, le massacre des ennemis est un « sacrifice » proposé en festin pour les oiseaux et les bêtes sauvages. En Is 34,2-6, ce jour de sacrifice est caractérisé par le herem (vv. 2.5). - L’encadrement des vv. 2-3 et 17-18 donne au Jour de YHWH une portée universelle65. Leur horizon universaliste est indiqué par le terme (...) (v. 3 et 17) et par l’absence de toute mention de Juda et du peuple élu. Mais So 1,17 justifie et précise : « car ils ont péché contre YHWH » ; le glossateur restreint donc l’effet catastrophique du Jour de YHWH aux seuls pécheurs. https://dial.uclouvain.be/pr/boreal/object/boreal%3A5400/datastream/PDF_03/view |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Mer 01 Juin 2022, 11:35 | |
| C'est un chapitre (III) de la thèse de Pfuti-Phabu sur la conclusion de Malachie (voir ici 23.5.2022), qui étudie plus particulièrement le motif du "jour de Yahvé" dans les "Douze (petits) prophètes" -- que de fait la conclusion de Malachie conclut aussi, que ce soit ou non son "intention". A propos de Sophonie, il se réfère largement à l'article de B. Renaud dont j'ai redonné le lien hier ( supra 31.5.2022 10 h 30). A vrai dire, au chapitre 1 la destruction globale (v. 2s) précède et englobe le jugement sur Jérusalem (v. 4ss), même si celui-ci reste sa visée principale ("cœur de cible" comme on dit). Cela créerait déjà un problème "logique" et "chronologique" (si tout est détruit d'emblée, pourquoi, comment et quand prendrait-on le temps de s'occuper spécialement de Jérusalem ?), qui ne ferait qu'en annoncer d'autres (salut possible du chap. 2, assuré et universel au chap. 3). Toutefois je ne pense pas qu'il faille interpréter les "bâtir" et "planter" de 1,13 au "futur": même si ce sont en hébreu des "accomplis consécutifs" qui équivalent à des "inaccomplis", ils signifient aussi bien un présent progressif ou fréquentatif (ils bâtissent/plantent, on bâtit/plante, maintenant comme toujours et en général) -- c'est tout aussi contradictoire avec la perspective de la destruction universelle, si l'on veut, mais ça ne rajoute pas de délai supplémentaire. Il faut surtout noter que la phrase renverse des formules de promesse ou de bénédiction traditionnelles (planter ET récolter ou manger, bâtir ET habiter, c'est le bonheur; planter et NE PAS récolter ni manger, bâtir et NE PAS habiter, c'est le malheur, cf. p. ex. Deutéronome 28,30.39; Josué 24,13; Isaïe 65,21s; Jérémie 29,5.28; Amos 5,11; Michée 6,15). |
| | | free
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Mer 01 Juin 2022, 12:28 | |
| I. Le yahvisme fondé sur le mythe de la création
10 Les autres, notamment les porte‑parole de Yahvé qui ont donné leurs noms à des livres prophétiques (Isaïe, Michée et Sophonie) voient plutôt dans la présence de Yahvé à Jérusalem une source d’exigences. Isaïe en est un excellent représentant. Pour lui, le roi Yahvé qui siège à Jérusalem est le seul à pouvoir donner la paix et le bien‑être à la ville (et à Juda), ainsi qu’au monde entier. Cela implique que Jérusalem s’en remette entièrement à Yahvé, en n’usant pas des moyens militaires, et que ses dirigeants rendent justice au peuple. Enfreindre ces exigences équivaut à rejeter la royauté de Yahvé. Par le recours à la stratégie et l’injustice, les gouvernants usurpent en fait une royauté qui n’appartient qu’à Yahvé. Cette tentative de dépouiller le Créateur de ses prérogatives et de s’en emparer au profit d’une créature est un fruit de l’orgueil, source même du péché. Pareille prétention de renverser l’ordre du monde est absurde, elle ne pourra qu’échouer : quoi qu’il arrive, Yahvé restera le Créateur, sans que ses créatures puissent le détrôner ni, à plus forte raison, prendre sa place. Quiconque essaiera de le faire – Israël, Juda, l’Assyrie ou tout autre peuple – s’attirera immanquablement la ruine.
https://journals.openedition.org/asr/199
L'imprégnation du yahwisme historique dans le yahwisme de la création fut évidemment décisif. Son imprégnation en terre judahite est clairement visible dans les livres prophétiques de la fin de la période royale, au cours de la seconde moitié du VIIe siècle. Le livre de Nahum commence même par l'annonce que Yhwh est "un Dieu jaloux et vengeur" et le dieu de l'orage apportant la pluie, il devient celui qui assèche tout sur son passage (Nah 1,3-4). :
"Le SEIGNEUR est patient ; sa force est grande ; le SEIGNEUR ne tient jamais le coupable pour innocent.I l fait son chemin dans l'ouragan, dans la tempête ; il soulève une nuée de poussière. Il rabroue la mer et la dessèche, il fait tarir tous les fleuves ; Bashân et Carmel dépérissent, la fleur du Liban dépérit."
Dans le livre de Sophonie, il est le destructeur, défaisant la création en effaçant de la surface de la terre hommes, animaux et même oiseaux du ciel et poissons de la mer (So 1,2-3), ceci annonçant le récit du déluge dans la Genèse. Le yahwisme de la création a fini par "habiller" le yahwisme exclusif : l'organisation du pentateuque en est le résultat. Le pentateuque s'ouvre effet par le récit sacerdotale de la création du cosmos et de l'humanité. A l'instar d'Amos et de ses oracles contre les nations (Amos 1-2), le prophète Sophonie s'adresse tout autant aux voisins de Juda (Philistins, Ammon, Moab ...) qu'à Jérusalem _ Amos comparait d'ailleurs Israël aux Kushites, montrant ainsi que la notion d'élection n'émane pas de ce yahwisme de la création.
Lien.
Dernière édition par free le Mer 01 Juin 2022, 15:00, édité 3 fois |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Mer 01 Juin 2022, 14:15 | |
| Lemardelé (second lien) répond en partie à Gonçalves (premier), mais à mon avis c'est l'ensemble du problème qui est mal posé: la tension et l'articulation entre une divinité de la "création" et du "monde" d'une part (théogonie, cosmogonie, mais aussi maîtrise des phénomènes que nous appelons "naturels", astronomiques, météorologiques, saisonniers), du "peuple" ou de la "nation" d'autre part, avec ce que cette dernière part implique de "politique" (fondation des institutions, notamment royale et sacerdotale) et d'"historique" ou de "légendaire" (des annales royales aux récits épiques ou autres) n'ont rien de spécifiquement "yahwiste" (ni "israélite" ni "judéen"): on les retrouverait à peu près chez tous les peuples et dans toutes les "cultures" du Proche-Orient ancien, et sûrement ailleurs -- dans des proportions naturellement variables en fonction de la taille et de la puissance des cités, des royaumes et des empires, qui favorisent plus ou moins le développement d'une "littérature" substantielle et de tel type de littérature (mythologique, épique, légendaire, historique). Que ce soit le même "dieu" ou plusieurs, ou le même sous des noms différents, qui joue(nt) les rôles de "créateur/maître du monde" ou de "divinité tutélaire de la nation", c'est somme toute accessoire par rapport à cette nécessité fonctionnelle et structurelle à la fois, de distinction et d'articulation des rôles: dès lors que "Yahvé" est l'objet d'une monolâtrie (sans même parler de monothéisme), il est obligé d'assumer tous les rôles, quand bien même ceux-ci auraient été préalablement distribués entre plusieurs dieux ou noms de dieu (p. ex. entre El et Yahvé comme entre El et Baal à Ougarit, encore que ces derniers soient aussi "créateurs" à divers titres, l'un comme "Père des dieux et des hommes" et l'autre comme victorieux de la théomachie cosmogonique contre Yam[m] et Lôtan = Leviathan; cf. Mardouk qui à Babylone est à la fois créateur théomaque, contre Tiamat, et tutélaire de la cité-empire, alors qu'à Ninive c'est Assour qui joue le second rôle). Que dans la littérature "juive" ou "judéenne" (surtout postexilique) l'"histoire" ou la "pseudo-histoire" l'emporte sur le "mythe", en particulier cosmogonique, c'est une autre affaire, qui ne change rien au fait que "Yahvé" (ou 'El, ou 'elohim, etc., selon les textes et les rédactions) soit également impliqué des deux côtés, si l'on peut dire.
Tout cela ne me semble avoir qu'un rapport assez ténu à Sophonie (ça en aurait davantage avec Amos p. ex.), mais c'est intéressant quand même. |
| | | free
Nombre de messages : 10102 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Jeu 02 Juin 2022, 10:31 | |
| Petite digression :
Quand le corps de l’acteur-croyant devient empreinte de l’expression trinitaire de Dieu
1/ Théâtre et Bible
En ce qui nous concerne, notre approche biblique prendra un autre chemin : dire qu’existe une théologie autre, qui précède le récit même; il ne s’agit donc pas de lois et de constructions théoriques, mais des corps qui bougent, qui se rencontrent et qui s’expriment par des gestes et des paroles. En effet, nous pourrons constater une logique autre fondamentalement nouvelle et expressive, qui se cache derrière des gestes corporels montrés par les récits. En effet, notre intérêt repose sur l’expressivité du corps en mouvement (théâtre) que montrent les récits évangéliques, pour penser le corps du croyant comme possible expression trinitaire de Dieu.
Une évidence nous permet d’entreprendre l’aventure de notre recherche : le récit biblique raconte un scénario de gestes et d’expressions du corps en mouvement, sur la base des drames humains, des visites divines ou des rencontres entre le divin et l’humain qui surgissent dans des situations multiples. Ainsi, on notera que plusieurs versets bibliques montrent le mouvement et l’expression corporels tels que la danse, le drame et les chants, pour exprimer la rencontre de l’homme avec Dieu. Par exemple, en Proverbes 8,30, la sagesse est décrite comme dansant devant Dieu ; Sophonie 3,17 dit que Dieu danse et crie de joie. David danse devant l’arche du Seigneur (2Sm 6,14) ; le banquet est préparé avec des chants et des danses pour fêter le retour du fils prodigue (Lc 15,25). Jésus est né dans la Ville de David, qui avait dansé devant Dieu lors de la cérémonie d’introduction à Jérusalem de l’arche qui portait la présence divine. Le ministère de Jésus est défini comme celui qui porte le salut en lui-même pour manifester dans le corps d’un autre l’action de Dieu : « L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il m'a consacré par l'onction, pour porter la bonne nouvelle aux pauvres. Il m'a envoyé annoncer aux captifs la délivrance et aux aveugles le retour àla vue, renvoyer en liberté les opprimés, proclamer une année de grâce du Seigneur » (Lc 4, 18-19).
https://www.academia.edu/1234472/Th%C3%A9%C3%A2tre_et_Th%C3%A9ologie_Quand_le_corps_de_l_acteur_croyant_devient_empreinte_de_l_expression_trinitaire_de_Dieu |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12460 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Jeu 02 Juin 2022, 11:38 | |
| Je ne sais pas si l'auteur de ce mémoire en a parlé ou non -- je n'ai fait que le "feuilleter", et chez moi la recherche automatique ne fonctionne pas sur ce document: quoi qu'il en soit le rapprochement de la danse et de la théologie, spécialement trinitaire mais aussi christologique (de l'"union hypostatique"), me rappelle furieusement la périchorèse, dont nous avons déjà parlé et qui sert à décrire, au moins depuis les "Pères cappadociens" et en particulier Grégoire de Nazianze, le jeu des "personnes" ou "hypostases" divines et/ou des "natures" (divine et humaine) du Christ, dans un vocabulaire qui évoque précisément la danse (cf. chorégraphie; avec le préfixe peri- qui lui donne un tour circulaire ou cyclique, ça tourne en rond, d'où ses traductions-calques latines en circum[in]cessio etc. -- khôrein signifie aussi céder, céder la place ou céder le pas, accueillir dans un espace, khôra; on peut penser aux jeux héraclitéens de rhéô et khôréô,, tout coule ou tout passe, tout cède et accueille ou relève ce qui passe -- cela reste très "chorégraphique").
En ce qui concerne Sophonie 3,17 auquel nous avons déjà consacré un fil (cf. mon premier lien au début de ce fil-ci), l'image de la danse ne me paraît pas évidente mais elle est possible, du moins elle conviendrait au champ lexical de la joie qui y est abondamment représenté (sws/sys, smhh-simha, gyl, rnh-rinna; d'autant que l'avant-dernier, gyl, rappelle facilement des termes qui évoquent le cercle ou la ronde, cf. gilgal) -- toutefois le registre sensoriel est plus sonore ou auditif (cris de joie, rires, à la rigueur chants) qu'optique ou visuel (danse), bien que tout relève du "corps". Comme nous l'avions souligné dans l'autre fil, les connotations "érotiques" de l'ensemble du passage sont tout aussi nettes. |
| | | free
Nombre de messages : 10102 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Jeu 02 Juin 2022, 16:10 | |
| "Cherchez le SEIGNEUR, vous tous, gens humbles du pays, vous qui agissez selon son équité ! Cherchez la justice, cherchez l'humilité ! Peut-être serez-vous cachés au jour de la colère du SEIGNEUR" (So 2,3).
Même si ce texte laisse entrevoir une possibilité d'échapper au jugement, le "peut-être" souligne le caractère aléatoire de ce salut et laisse planer une menaçante terrifiante, même après avoir cultivé l'équité, la justice et l'humilité, la certitude du salut n'est pas garantie.
Existe-t-il un autre texte dans la Bible qui utilise ce peut-être" ou qui laisse planer un doute sur le salut malgré des efforts produits ? |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Jeu 02 Juin 2022, 16:38 | |
| Pour d'autres usages comparables du même "peut-être" ( 'wly-'oulay), en rapport avec un "salut" hypothétique ou fortuit, qu'il soit par ailleurs eschatologique ou anecdotique, voir par exemple Genèse 32,20; Exode 32,30; Josué 14,12; 1 Samuel 6,5; 14,6; 2 Samuel 16,12; 1 Rois 20,31; 2 Rois 19,4 // Isaïe 37,4; Jérémie 21,2; 26,3; 36,3.7; 51,8; Ezéchiel 12,3; Amos 5,15; Jonas 1,6; Lamentations 3,29; cf. aussi Genèse 18; 24 et Nombres 22 où le même adverbe revient à plusieurs reprises dans des "négociations", d'Abraham avec Yahvé, du serviteur avec Abraham, ou de Balaam avec Balaq. Ce n'est donc pas si exceptionnel, ça ne devient étonnant que si l'on considère le "salut" (au sens relatif et circonstanciel, ou absolu et éternel) comme une sorte de dû, qui doit être objet d'assurance et de certitude au moins sous conditions, en vertu d'une sorte de dogme (juif ou chrétien en l'occurrence). Dans la vie, si je puis dire, c'est bien le "peut-être" et l'incertitude qui sont la règle, en particulier du rapport d'un présent à un futur. On peut s'en étonner aussi d'un autre point de vue, d'ailleurs corollaire, celui du "monothéisme" -- quand c'est un Dieu réputé omniscient et omnipotent qui dit "peut-être", comme s'il admettait que quelque chose lui échappe. Mais ce n'est visiblement pas le point de vue de la rédaction des textes en question. Sur l' humilité, le substantif `nwh-`anawa (qui n'apparaît ailleurs que dans les Proverbes, 15,33; 18,12; 22,4) renvoie naturellement aux "humbles de la terre / du pays" ( `nwy 'rç) au début de la phrase, mais il faut rappeler que le champ sémantique de la ou des racines correspondantes est très large: humiliation, affliction, oppression, pauvreté, qui sont a priori des "situations" ou des "conditions" subies plutôt que des "vertus"... recherchées, bien qu'elles le deviennent -- et plus encore quand ce sont des auto-désignations de groupes, p. ex. à Qoumrân, "les pauvres / humbles" = "les justes" ou "les élus", soit à la limite des "titres de gloire". Il y a sans doute déjà de ça dans le texte de Sophonie (// çdq, "justice"), mais on y perçoit encore un sens ordinaire qui convient également au contexte: "faire profil bas" comme on dit par anglicisme ( low profile), "marche à l'ombre" comme dirait Renaud, pour peut-être passer inaperçu ( str, être caché) au jour de la colère (cf. notamment le contexte de Lamentations 3, qui débouche sur le même "peut-être" au v. 29). |
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Mar 07 Juin 2022, 14:48 | |
| "Le SEIGNEUR sera redoutable contre eux : il anéantira tous les dieux de la terre ; toutes les îles des nations se prosterneront devant lui, chacune en son lieu" (2,11).
Le v 11, attire notre attention sur la personne de Dieu et sur son attitude face aux nations, il élargit soudain l'horizon à la totalité des nations et ne se limite pas aux peuples de l'est. Ce texte souligne la volonté de la divinité d'humilier tous les dieux de la terre. Ensuite l'auteur décrit la prostration des peuples qui fléchissent le genou devant Dieu, le maitre du monde, tout comme en Es 45,22-23 :
"Tournez-vous vers moi et soyez sauvés, vous tous, aux extrémités de la terre ! Car je suis Dieu, et il n'y en a pas d'autre. Je le jure par moi-même — de ma bouche sort ce qui est juste, une parole qui ne sera pas révoquée : Tout genou fléchira devant moi, toute langue prêtera serment par moi" (Es 45,22-23).
Cette prostration annonce la conversion des nations exposée et annoncée en So 3,9-10. |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Mar 07 Juin 2022, 15:07 | |
| Pourquoi "(peuples) de l'est" ? Moab et Ammon (v. 8ss) sont à l'est, mais les Philistins (v. 4ss, Gaza etc.) sont à l'ouest... De toute façon les invasions assyriennes et néo-babyloniennes ont assez démantelé les "royaumes" de la région pour que l'ensemble des références ethno-géographiques proches ou lointaines, à la fin du VIIe siècle et a fortiori au-delà, soient surtout "littéraires" (ce qui n'empêche pas le contraste du proche et du lointain mais lui donne un autre sens, moins "politique" et plus "théologique") -- même si la Transjordanie, à l'est, semble avoir un peu mieux survécu sous les empires néo-babylonien et perse que la Philistie, à l'ouest: la juxtaposition de "nations" défuntes et d'autres encore contemporaines témoignerait aussi du caractère "littéraire" de l'ensemble de l'"oracle".
Le verbe rzh est assez bizarre, on l'interprète habituellement au sens d'"affamer", d'"émacier" ou d'"affaiblir" d'après l'arabe (Gesenius-BDB), cf. sa seule autre (?) occurrence au passif (niphal) en Isaïe 17,4, par opposition à la graisse (de Jacob). Toujours est-il que l'idée d'"affaiblir" les dieux, ou même de les "anéantir", présuppose qu'ils existent avec une certaine puissance, contrairement au "monothéisme" (absolu ou relativement pur) du deutéro-Isaïe (il n'y en a pas d'autre; l'islam ne dira pas mieux). |
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Jeu 09 Juin 2022, 10:57 | |
| "Il étendra sa main vers le nord, et il fera disparaître l'Assyrie ; il fera de Ninive un lieu dévasté, une terre desséchée comme le désert. Des troupeaux se coucheront au milieu d'elle, des animaux de toute espèce ; aussi bien le pélican que le hérisson passeront la nuit parmi ses chapiteaux ; une voix hululera à la fenêtre. La ruine sera sur le seuil, car les lambris de cèdre seront arrachés. Voilà donc cette ville en liesse, qui habite en sécurité et qui se dit : Moi, et rien que moi ! Comment ! Elle est dévastée, c'est un gîte pour les animaux ! Tous ceux qui passent près d'elle sifflent d'horreur et agitent la main" (2,13-15).
Ce texte met en scène Ninive qui subit la condamnation divine, avec une particularité dans le texte, un changement de temps : on passe du futur, au présent au verset 15, les verset 13-14 annonce que la divinité fera de Ninive un lieu dévasté et le verset 15 présente cette annonce comme déjà réalisée : "Elle est dévastée". Cet oracle contre l'Assyrie ressemble à toutes les condamnations que Dieu a formulé contre les nations (comme Babylone) coupables de la même volonté d'étendre leur suprématie. Paradoxalement, cette annonce est suivi de So 3,1 qui décrit Jérusalem comme une ville "tyrannique" : "Quel malheur pour la rebelle, la souillée, la ville tyrannique !"
Notes : Sophonie 2:13 Il étendra sa main 1.4+. – le nord Jr 1.14n. – Sur la chute de Ninive, capitale de l’Assyrie, en 612 av. J.-C., voir Na 1.1n ; cf. Es 10.5ss ; 14.24ss ; Na 2–3. |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Jeu 09 Juin 2022, 11:43 | |
| Les choses ne sont pas si claires en hébreu qu'elles en ont l'air en français: notre système temporel de conjugaison oblige à ranger en passé, présent, futur, des distinctions "aspectuelles" (accompli / inaccompli) qui ne leur correspondent que très partiellement; d'autre part la répartition en chapitres et paragraphes des bibles modernes (avec ajout d'intertitres le plus souvent) crée des ruptures nettes dans un flux de texte continu (où s'arrête "Ninive", où commence "Jérusalem", c'est bien moins évident si on ne lit que le texte).
D'autre part (cf. supra 31.5.2022, aussi sur les "Koushites" qui sont plus énigmatiques dans Sophonie) il est toujours hasardeux de démêler l'"historique", si et quand il y en a, du "littéraire" (omniprésent): la chute de Ninive et l'effondrement subséquent de l'empire assyrien correspondent grosso modo au règne de Josias de la notice initiale (1,1), mais la notice a aussi bien pu être "inspirée" par l'évocation de ces "événements". Et cela pèse finalement très peu par rapport au topos littéraire des "oracles", en l'espèce de "jugement": de toutes les villes et pays condamnés (Ninive, Babylone, Tyr, Damas, Samarie, Jérusalem, villes d'Egypte, toponymes d'Ammon, de Moab, d'Edom, etc.), les "Prophètes" (livres) disent souvent les mêmes choses (il suffit de se reporter aux références des bibles courantes pour s'en apercevoir, si on ne le remarque pas soi-même par effet de réminiscence au cours de la lecture).
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Jeu 09 Juin 2022, 12:48 | |
| " J'ai retranché des nations ; leurs tours d'angle sont dévastées ; j'ai fait de leurs rues un champ de ruines : plus de passants ! Leurs villes sont ravagées, plus d'hommes, plus d'habitants ! Je disais : Si seulement tu me craignais, si tu voulais recevoir l'instruction ! — son séjour ne serait pas retranché. Chaque fois que je lui ai fait rendre des comptes, ils se sont hâtés de se pervertir dans tous leurs agissements. Attendez-moi donc — déclaration du SEIGNEUR — au jour où je me lèverai pour le butin, car j'ai résolu de réunir les nations, pour rassembler à moi les royaumes, pour répandre sur eux ma fureur, ma colère ardente ; car par le feu de ma passion jalouse tout le pays sera dévoré" (3,6- . Les versets 6-7 accusent Jérusalem mais le verset 8 sanctionne les nations, comme si la punition des nations avait valeur d'exemplarité, leur châtiment des nations devait servir de "leçon" à Jérusalem : " N'en a-t-il pas été de Kalno comme de Karkemish ? Ou encore de Hamath comme d'Arpad ? Ou encore de Samarie comme de Damas ? De même que ma main a su trouver les royaumes des faux dieux, dont les statues dépassaient celles de Jérusalem et de Samarie, de même ce que j'ai fait à Samarie et à ses faux dieux, ne le ferai-je pas à Jérusalem et à ses idoles ?" (Es 10,9-11). Il y a une volonté d'associer les nations au jugement de Jérusalem. |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Jeu 09 Juin 2022, 13:55 | |
| Les oracles sur les "nations" ont ceci de particulier qu'ils ne sont pas censés parvenir à leurs destinataires -- dans le cas contraire ça vire au comique, cf. Jonas -- autrement dit, leur seul véritable destinataire est toujours "Israël" (c.-à-d., au moins après la chute de Samarie: Juda, Jérusalem, etc.).
En Sophonie 3 il y a apparemment une rupture entre les v. 6s et 8: sous toutes les réserves que je viens d'exprimer en ce qui concerne les "temps" des verbes, les v. 6s semblent évoquer des destructions passées et le v. 8, au contraire, un châtiment futur. Des premières on pourrait dire, en effet, qu'elles auraient dû servir d'avertissement salutaire à Juda-Jérusalem, mais non du second qui prend plutôt l'allure d'une eschatologie au moins relative (du genre "jour de Yahvé") -- d'ailleurs ça rebascule aussitôt après en oracle "positif" sur les (mêmes) "nations" (v. 9s, la "lèvre-langue pure").
En outre, le texte est souvent corrompu (abîmé) dans le détail; par exemple, au v. 7 il faudrait peut-être le corriger, en partie d'après la Septante, pour lire quelque chose comme: "J'ai (= je me suis) dit: Sans doute elle (= Jérusalem) va (me ?) craindre, elle va recevoir la discipline (instruction, correction), elle ne perdra pas de vue (litt. ne sera pas retranché de ses yeux, m`ynyh au lieu de m`wnh pour "son séjour" ou "sa demeure") tout les châtiments que je lui ai infligés (pqd, verbe de la "rétribution" ou du "règlement de comptes", de l'intervention positive ou négative selon le contexte)." Dans ce cas on aurait plus clairement un effet dissuasif ou correctif espéré des châtiments passés -- mais l'espoir serait aussitôt déçu par la fin du verset (rien n'y fait, le châtiment produit du pire). En tout cas ça nous ramène à la problématique du "peut-être" (cf. supra sur 2,3) et du "dieu pitoyable"... |
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Jeu 09 Juin 2022, 14:20 | |
| Sophonie 3, 9 : " Alors je ferai que les peuples aient les lèvres pures pour qu'ils invoquent tous le nom du SEIGNEUR, pour qu'ils le servent dans un même effort."
Comme toujours, le texte dit ce qu'il dit, l'interprétation est à la charge du lecteur. Que la "lèvre" (sph) évoque la parole, le langage et la langue (concepts bien distincts pour nous, pas forcément autant dans l'esprit des auteurs-rédacteurs et des premiers lecteurs-auditeurs), ça tombe sous le sens -- par exemple, quand tu parles de "modifier le vocabulaire 'religieux' des nations idolâtres", c'est bien une affaire de parole et de langage; pas forcément de langue, mais ça peut l'être aussi, si l'on considère l'hébreu comme l'unique langue sacrée adéquate au culte de Yahvé (ce qui était manifestement le cas dans certaines composantes "particularistes" du judaïsme du Second Temple, cf. Néhémie 13,24ss, mais évidemment pas dans d'autres qui intégraient volontiers l'araméen ou le grec dans les textes "sacrés" -- cf. les passages araméens d'Esdras ou de Daniel, les targoums araméens ou la Septante grecque -- comme dans le rite).
Le "parallèle" que la Watch établit avec le récit de Babel ne me paraît pas entièrement saugrenu, puisque aussi bien la langue primordiale unique que les langues résultant de la "confusion" y sont désignées par le même terme sph, "lèvre" (au singulier), et qu'en Sophonie 3,9s il n'est pas question d'Israël mais des peuples (non juifs). Dans un autre sens, on peut aussi penser (surtout en français, car le mot hébreu généralement traduit par "pur" en Sophonie, brwr, n'est pas le terme technique de la "pureté rituelle"; on pourrait aussi traduire "une lèvre/langue éprouvée, de qualité") à la vision inaugurale d'Isaïe (6,5ss) où les "lèvres impures" caractérisent l'inadéquation du prophète et de son peuple à porter et à recevoir la parole de Yahvé -- ce qui, en l'occurrence, est sans doute une affaire de parole et de langage, mais pas de langue, du moins pas au sens "propre". Mais la différence n'est pas si grande: Isaïe une fois les lèvres purifiées pourra porter la parole de Yahvé, il n'en parlera pas moins la même langue que son peuple "aux lèvres impures", mais il ne sera pas compris par ses contemporains, tout comme s'il leur parlait dans une langue étrangère (v. 9s); c'est d'ailleurs un lieu commun des vocations prophétiques: le prophète proteste de son incapacité à parler (Moïse dans Exode 4, Jérémie 1), puis quand il parle aux autres (pour ainsi dire dans la langue de Dieu, cf. Isaïe 50, 5) c'est comme s'il parlait une langue étrangère -- ce qui devient quelquefois présage de l'exil, où le peuple n'apprendra que par la main des "barbares", qui parlent une langue incompréhensible (Isaïe 28,11; 33,19; Jérémie 5, 15; Ezéchiel 3,5s).
Cela dit, que ce passage (tardif, comme les autres additions relatives à une conversion des nations chez les Prophètes en général, cf. IsaÏe 18,7; 19,18ss; 45,14) de Sophonie envisage une "conversion des langues" ou seulement de la "parole" et du "langage" (ça me paraît difficile à trancher), le côté moral du "bien-parler" reste présent chez lui (cf. 3,13). https://etrechretien.1fr1.net/t1001-babel?highlight=babel
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| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Jeu 09 Juin 2022, 15:31 | |
| A près de dix ans d'intervalle, nous n'aurons pas beaucoup varié... Je signale, parce qu'on l'oubliera encore plus vite, que nous avons aussi évoqué ce texte tout récemment ici (3.6.2022), à propos de la Pentecôte des Actes qui l'ignore ou feint de l'ignorer... Pendant qu'on y est, le verbe ( hpk) de Sophonie 3,9a mérite d'être remarqué, parce qu'il suggère un renversement (retournement vertical, de haut en bas, de fond en comble ou cul par-dessus tête): mot-à-mot, "je renverserai sur / vers des peuples une lèvre pure"; c'est aussi, entre autres, un terme caractéristique des traditions relatives à Sodome et Gomorrhe (etc.), renversées ou bouleversées avec ou sans feu du ciel. En Sophonie la Septante le traduit par meta-strephô qui donne à peu près la même idée, cf. kata-strephô pour le renversement ou bouleversement, de Sodome et Gomorrhe notamment (et le susbstantif correspondant mieux connu, kata-strophè = "catastrophe"), épi-strephô pour la "con-version", etc.; "métastrophe" ferait un joli néologisme. Curieusement, le vocabulaire de l'" effusion de l'esprit" comme un liquide versé ou renversé implique une image analogue, celle d'un retournement de haut en bas (mais en Joël 3,1 c'est špk en hébreu -- noter l'assonance -- et ekkheô en grec, de même Actes 2,17s.33; 10,45, outre les tripes de Judas en 1,18 et le sang d'Etienne en 22,20; on retrouve par contre hpk/meta-strephô en Joël 3,4 où le soleil "tourne / se change" en ténèbres et la lune en sang, idem Actes 2,20). Plus généralement, que le "devenir" s'exprime par le retournement (cf. tornar[-]se en espagnol ou en portugais, ou même la parenté du germanique werden et du latin vertere), c'est toujours intéressant pour un "esprit" qui pense en mots et en images... |
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Mer 15 Juin 2022, 11:03 | |
| "En ce jour-là, tu n'auras plus honte de tous les agissements par lesquels tu t'es révoltée contre moi ; car alors j'écarterai de toi ceux qui exultent de ton triomphe, et tu ne seras plus hautaine dans ma montagne sacrée. Je laisserai en ton sein un peuple pauvre et faible, qui trouvera un abri dans le nom du SEIGNEUR. Le reste d'Israël n'agira plus injustement. Ils ne diront plus de mensonges, et il ne se trouvera plus dans leur bouche une langue trompeuse, quand ils se coucheront dans leur pâturage et qu'il n'y aura personne pour les troubler" (3,11-13).
Ce texte met en évidence la transformation morale d'un "reste" d'Israël qui "n'agira plus injustement", mais la conversion est l'œuvre de Dieu, puisque Dieu chasse les orgueilleux et maintient un "reste" de gens "pauvre et faible". Pour l'auteur Dieu opère une sélection au sein de son peuple et ne retient qu'un reste. Nous pouvons être étonnés par cette information, en effet d'une part, le peuple tout entier s'est révolté, a été orgueilleux et d'autre part l'orgueil s'est concentré dans certaines personnes et la conversion s'opèrera par l'élimination des éléments coupables. Ce reste converti jouira d'une paix sans fin : "il n'y aura personne pour les troubler". Nous remarquons que l'esprit hautain est opposé à la pauvreté qui devient un marqueur de la foi. Comme d'Ezéchiel et en Jérémie, Dieu est à l'origine de la conversion et du changement : "Je vous donnerai un cœur nouveau", plus exactement en Sophonie Dieu crée les conditions favorables à cette conversion et affirme à plusieurs reprises, sans préciser que c'est un changement des individus, comme par décret : "tu ne seras plus hautaine" ; "Le reste d'Israël n'agira plus injustement" ; "Ils ne diront plus de mensonges". La volonté des individus n'apparait, la métamorphose est l'œuvre de la divinité qui la décrète. |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Mer 15 Juin 2022, 11:52 | |
| Le rapport entre "laisser" (v. 12) et "reste" (v. 13) se comprend assez naturellement en français, mais il est encore plus clair en hébreu où c'est la même racine (š'r, au moins connue par le nom propre d'Isaïe 7,3), d'abord comme verbe puis comme substantif (she'erith): cf. Sophonie 2,7.9 et Genèse 45,7; 2 Samuel 14,7; 2 Rois 19,4.31; 21,14; Isaïe 14,30; 15,9; 37,4.32; 44,17; 46,3; Jérémie 6,9; 8,3; 11,23; 15,9; 23,3; 24,8; 25,20; 31,7; 39,3; 40,11.15; 41,10.16; 42,2.15.19; 43,5; 44,7.12.14.28; 47,4s; 50,26; Ezéchiel 5,10; 9,8; 11,13; 25,16; 36,3ss; Amos 1,8; 5,15; 9,12; Michée 2,12; 4,7; 5,7s; 7,18; Aggée 1,12.14; 2,2; 8,6; Zacharie 8,6.11s; Psaume 76,10; Esdras 9,14; Néhémie 7,72; 1 Chroniques 4,43; 12,38; 2 Chroniques 34,9; 36,20. Comme on peut le voir si l'on a la patience de faire au moins quelques sondages dans cette longue liste, il y a bien une "idée" ou un "concept" de "reste" qui émerge (d'autant qu'en hébreu "biblique" les substantifs "abstraits" sont nettement plus rares et donc plus significatifs qu'en français), même si les usages du terme varient considérablement (il y a ou il n'y a pas de "reste", le "reste" est condamné ou épargné, et ainsi de suite); et bien sûr ce terme n'est pas le seul de son "champ lexical" à exprimer sensiblement la même notion de "reste" (cf. ytr etc.). Mais comme on l'a noté plus haut (31.5.2022), ce qui tend à se préciser et à se particulariser comme une "théologie du reste" dans l'exégèse et la théologie "bibliques" relève de la plus grande banalité: ce sont toujours les survivants qui survivent, et dès lors racontent, écrivent, s'estiment maudits, condamnés, châtiés, victimes, malchanceux ou chanceux, pardonnés, sauvés, vengés, rétablis, guéris, etc...
Sur le thème de la pauvreté et tout ce qui s'y rattache (affliction, oppression, humilité, etc.), voir aussi supra 2.6.2022 sur 2,3 (`nw là, `ny ici en parallèle avec dl qui signifie de façon moins ambiguë la pauvreté "matérielle" ou "économique"). |
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Nombre de messages : 10102 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Mer 15 Juin 2022, 12:31 | |
| Yahvé, ton dieu (possessif féminin), (est/sera) en ton sein[/i] (idem), puissant, sauveur; il exulte(ra) de joie sur toi (idem), il se tait (taira) dans son amour; il se réjouit (réjouira; ou danse[ra]) sur toi (idem) avec des cris d'allégresse...Sophonie 3,17.Une seule proposition (celle que j'ai soulignée) m'avait marqué dans ce verset, que j'ai d'ailleurs mis un moment à retrouver. Bien sûr il faut relire le contexte où tout s'explique, le référent féminin (fille [de] Sion / Jérusalem / Israël, v. 14ss), les images érotiques qui s'ensuivent et n'ont rien d'exceptionnel chez les "Prophètes" (cf. p. ex. Isaïe 62); même le silence a priori surprenant, et aussitôt contredit par les "cris d'allégresse", se comprend aisément comme absence de reproche, de jugement ou de condamnation (v. 15); il n'en fait pas moins l'objet d'une hésitation textuelle, depuis la Septante, entre les racines hébraïques hrš et hdš, que seul un trait de lettre sépare en graphie dite araméenne ou carrée: au lieu de "il se taira dans son amour", on pourrait aussi comprendre "il te renouvellera dans son amour" (ainsi LXX) ou "il (te ?) renouvellera son amour". La leçon "massorétique" garde cependant tout son intérêt, avec ou sans rapport à l'autre: il serait bon que "Dieu" se taise, ne fût-ce que pour se "renouveler"; leçon assez singulière en tout cas dans la Bible, où "Dieu" -- comme les hommes, du reste -- ne semble presque jamais las de parler; et fort différente des versions plutôt sinistres du "silence de Dieu", réprobateur ou indifférent, qu'on peut trouver ailleurs dans la Bible (p. ex. du point de vue "prophétique", dans 1 Samuel, 3,1; 8,18; 14,37ss; 28,6 ou encore Isaïe 42,14; Amos 8,11; Habacuc 1:13; voir aussi Job, 19,7; 30,20; 35,12; Psaumes, 18,42; 22,3; 28,1; 35,22; 83,2; 109,1 etc.) et davantage encore dans les théologies subséquentes. (Voir éventuellement cette discussion en partie connexe, à partir d'un tout autre texte.) ce fil "En ce temps-là, j'agirai contre tous ceux qui t'affligent ; je sauverai ce qui boite, je rassemblerai ce qui était banni. Je ferai d'eux une louange et un nom sur toute la terre où ils ont honte. En ce temps-là, je vous ramènerai, en ce temps je vous rassemblerai ; car je ferai de vous un nom et une louange parmi tous les peuples de la terre, lorsque sous vos yeux je rétablirai votre situation, dit le SEIGNEUR" (3,19-20).Notes : Sophonie 3:20Cf. v. 19n. – je rétablirai, même formule hébraïque qu’en 2.7n ; ici certains comprennent, exceptionnellement : je ramènerai vos captifs ; cf. Dt 30.3n ; Jr 29.14n ; 32.37. (2,7 : "il rétablira leur situation").Dieu va opérer un retournement de situation et restaurer son peuple dans ses privilèges. En 3,20 dans un contexte de rassemblement, l'expression peut aussi évoquer le retour de l'exil. Ainsi ce minuscule "reste" est promis à une grande extension il deviendra un véritable peuple de réputation mondiale. Le centre de ce rassemblement se situe à Jérusalem. Les peuples étrangers eux-mêmes se joindront à ce rassemblement et rendront un culte à Yhwh : "Alors je rendrai pures les lèvres des peuples, pour qu'ils invoquent tous le nom du SEIGNEUR (YHWH) en le servant dans un même effort" (3,9). Le signe visible de cette unité c'est le pèlerinage des nations à la montagne sacrée : "D'au-delà des fleuves de Koush mes adorateurs, mes dispersés m'apporteront l'offrande" (3,10). Dans ce texte, si Jérusalem est le centre du monde, Il n'y a aucune trace d'une soumission des peuples, vis-à-vis du peuple élu, tout simplement une reconnaissance par les nations de prééminence du peuple élu et la volonté de se joindre à lui. L'auteur met en évidence la présence divine au cœur même de la communauté : "le roi d'Israël, le SEIGNEUR, est en ton sein" (3,15). Yhwh est au milieu du peuple source de Joie : "En ton sein, le SEIGNEUR, ton Dieu, est un héros sauveur ; il fera de toi sa plus grande joie" (3,17). |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12460 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Le livre de Sophonie : il gardera le silence dans son amour ... Mer 15 Juin 2022, 13:42 | |
| Il paraît difficile de lire tout le chapitre comme une suite: on repasserait souvent de la gloire à l'humiliation, de la menace à la promesse, du malheur au bonheur, etc. Comme dans la vie, dira-t-on... (l'"ascenseur émotionnel" traduit mal le roller coaster qui désigne plutôt nos "montagnes russes"). S'il s'agit d'ajouts successifs (dans tout le livre mais plus encore dans sa ou ses "conclusions"), ça ne répond à aucune "intention", mais ça n'en fait pas moins son effet.
Nous avons aussi évoqué dans l'autre fil les connotations érotiques des v. 15 et 17, qui sont quelque peu escamotées par les traductions (Yahvé jouit "dans" et "sur" une Jérusalem-Sion "fille" ou "femme", ce qu'on retrouve dans pas mal de passages "prophétiques", notamment Isaïe 62): si on lit hrš avec le texte massorétique, au sens du silence ou de l'apaisement, ce serait presque une "petite mort de dieu"...
L'hésitation récurrente dans la plupart des traductions entre "ramener les captifs (de)" et "rétablir la situation (de)" résulte d'une confusion entre deux racines hébraïques (šwb/šbh) qui donnent des formes verbales et nominales extrêmement ressemblantes, confusion que la vocalisation massorétique a plutôt embrouillée que dissipée; mais la confusion était sans doute déjà dans les textes prémassorétiques (variantes d'une expression stéréotypée, qui fait différemment jeu de mots et de sens selon la façon dont chacun la prononce ou l'entend)... |
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