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| Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah | |
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Auteur | Message |
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Narkissos
Nombre de messages : 12412 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Sam 22 Aoû 2020, 12:32 | |
| Bonnes questions (je me suis laborieusement désinscrit de Facebook il y a plusieurs années et je m'en tiens donc à cet extrait).
Le problème principal, à mon sens, consiste précisément à traiter l'"expérience TdJ" comme un "problème" spécifique, voire singulier -- singulière, elle l'est assurément à chaque fois, mais comme toute "expérience" -- qu'on pourrait analyser séparément et opposer globalement à toutes les autres "expériences", ou du moins comme une anomalie à une norme (sociale, psychologique, etc.). Cela ne rend pas compte du caractère de "caricature" dont on parlait précédemment (on n'a pas affaire à un "modèle" social ou psychologique radicalement étranger, hétérogène, extra-terrestre ou inhumain au sens fort, mais à des variations quantitatives, à l'exagération de certains traits qui se retrouvent aussi ailleurs, et que tout le monde peut reconnaître justement parce que ce sont les mêmes traits qui sont forcés). Mais, ce qui est peut-être plus grave, cela tend à empêcher les ex-TdJ d'assumer ou d'interpréter l'"expérience TdJ" comme la leur, aussi "personnelle" que tout ce qui a pu leur arriver par ailleurs. C'est (ironiquement) un phénomène de "conversion" (j'allais dire à l'envers, mais il n'est pas sûr qu'il y ait un endroit): tout comme le nouveau converti (à n'importe quoi) se plaît à imaginer qu'une vie nouvelle commence à l'instant de sa conversion, que le passé ne compte plus, qu'il devient vraiment "lui-même" à ce moment-là et que son histoire antérieure n'est plus vraiment la sienne, de même le "déconverti" voudrait que tout commence ou recommence à l'instant de sa déconversion, ce qui l'expose à de nombreuses désillusions, et à constamment traiter les éléments de continuité qui ne manquent pas de reparaître comme des séquelles à exorciser. Ce qui est difficile pour chacun c'est d'apprendre à lire sa vie comme un seul livre, dont on ne peut ni ne veut arracher aucun chapitre ni effacer aucun mot, tout juste en modifier marginalement le sens par ce qu'on y ajoute (ou pas).
A côté de cela, la naïveté qui consiste à opposer un "dedans" à un "dehors" et un "physique" à un "mental", comme si de telles oppositions étaient assez tenables et distinctes pour se combiner en "cas" de logique binaire, me paraît bénigne. |
| | | le chapelier toqué
Nombre de messages : 2606 Age : 77 Date d'inscription : 31/08/2010
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Sam 22 Aoû 2020, 18:51 | |
| J'apprécie ton dernier message, Narkissos. En fait il faudrait inclure l'expérience Témoin dans notre vie.
Par exemple, j'étais Catholique avant de devenir Témoin, puis j'ai quitté les Témoins et me suit intéressé aux mouvements Évangéliques. Régulièrement j'étais rattrapé par mes anciennes convictions qui en fait n'étaient pas anciennes, puisqu'elles continuaient de faire partie de ma vie.
Avec le temps il m'est apparu que mes "passages" chez les Catholiques et les Témoins m'ont été utiles pour m'amener et être ce que je suis maintenant. Mon intérêt pour le Bouddhisme était déjà présent depuis fort longtemps, mais le temps n'était pas encore venu. Je pense que nous "marchons" sur une voie qui n'est pas toujours droite, mais nous permet de nous enrichir spirituellement parlant.
Dès lors pourquoi renier ce que nous avons été.... essayons plutôt de vivre ce que nous sommes à l'instant présent... |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12412 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Sam 22 Aoû 2020, 21:04 | |
| D'autant que "ce que nous sommes à l'instant présent" est forcément le résultat (provisoire) de tout ce qui le précède (qu'on entende par "le" le "ce que", le "quoi" ou le "qui" "nous" sommes et qui dépend de tout ce que "nous" avons été, et de tant d'autres "êtres" et "devenirs" avant et autour de "nous" -- ou bien "l"instant"): il est tout aussi vain pour un ex-TdJ de tenter d'extirper "le TdJ en lui" qu'il était vain pour celui-ci de vouloir supprimer ou réprimer l'homme ou la femme "du monde" -- mortifier ou crucifier le "vieil homme", l'"homme ancien", l'homme "psychique" ou "naturel" dans un vocabulaire chrétien plus traditionnel. Outre qu'il n'y a rien de plus douteux que ce privilège de "l'instant présent" sur tous les autres (?) "instants", d'avant, d'après ou d'ailleurs, qui n'ont pas été, ne sont ou ne seront pas moins "présents" que lui.
[Je suis en train de relire les cours de Heidegger sur Nietzsche, dont l'écriture est aussi laborieuse que celle de Nietzsche est légère, mais qui ont le mérite d'examiner sous toutes ses coutures le rapport complexe, subtil et variable de ce qu'il est convenu d'appeler -- en français -- "l'éternel retour" et "la volonté de puissance" (Deleuze là-dessus est plus stimulant, mais autrement unilatéral): vouloir, ce n'est certes pas vouloir tout et n'importe quoi, mais cela passe et repasse nécessairement par un moment -- le "portique" de l'Instant ou le "midi" de Zarathoustra -- où il faut vouloir tout, l'intégralité des "causes" et des "conséquences", des "circonstances" et des "coïncidences", et les vouloir comme si elles devaient se répéter indéfiniment, pour vouloir effectivement quelque chose. -- Ce qui, bien entendu, est aussi une longue réplique au "bouddhisme" de Schopenhauer, et un retournement des "comme si" de la morale kantienne, mais ne peut pas (vouloir) dire "le contraire" sans dire également "la même chose".]
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Il serait sans doute tentant de simplifier tout cela dans un schème de "progrès" continu, fût-il en zigzag, où chaque étape conserverait le "sens" des précédentes tout en le modifiant ou en l'inversant (la Watch elle-même a usé et abusé du concept de "louvoiement"): tout comme le TdJ modèle tient à montrer (le "bon témoignage" jusqu'au "faux témoignage", comme disait à peu près Bertrand) qu'il est meilleur, plus heureux, plus épanoui, mieux dans sa peau et dans sa vie qu'avant, l'ex-TdJ tend à faire la même chose, souvent sans s'en rendre compte: il faut désormais "témoigner" qu'on va mieux depuis qu'on n'est plus TdJ, c'est le "bon témoignage" attendu et applaudi par tous les "ex", avec le même risque de "faux témoignage". Avant comme après, du reste, et quel que soit le public, la "double contrainte" psychosociale (double bind) est redoutablement efficace, et elle a de la ressource, puisque à tout point de vue elle explique tout et son contraire, et elle a toujours raison (pile je gagne, face tu perds): si, TdJ, tu es malheureux, c'est que tu es éprouvé ou persécuté, ou alors que tu es infidèle ou que tu n'en fais pas assez, et si tu es heureux c'est que Jéhovah te bénit; ex-TdJ malheureux, aux yeux des TdJ tu es puni par Jéhovah, heureux béni par Satan; aux yeux des "ex", heureux tu donnes tort à la Watch, malheureux tu es encore victime et tu prouves sa nocivité... Toute cette surdétermination des situations et des affects ne facilite pas la lucidité ni l'honnêteté, et encore moins une considération sereine des descentes qui font pourtant partie de la plupart des parcours, surtout vers la fin (pensée nietzschéenne encore de l'Untergang: la condition a posteriori de tout "midi" et de tout "sommet", c'est aussi qu'un déclin s'ensuive, et c'est encore cela qu'il faudrait vouloir). |
| | | free
Nombre de messages : 10055 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Lun 24 Aoû 2020, 11:45 | |
| J'ai le sentiment que quelque chose nous dépasse et que l'on ne maitrise pas grand chose dans notre vie, en effet je ne saurais pas dire précisément pourquoi je suis devenu TdJ à 14 ans et pourtant à l'époque cela m'a paru être une évidence, tout comme 30 ans après, il m'est apparu inéluctable que je devais quitter les TdJ, ce n'était plus ma place, une force inexplicable m'a poussé à l'intérieur et ensuite à l'extérieur du mouvement, avec la même intensité et d'une manière toute aussi mystérieuse. Il y a surement des ressorts psychologiques et affectifs qui ont influencé mes choix mais j'ai le sentiment que tous ces choix constituent mon chemin de vie, sinueux et vallonné.
Dernière édition par free le Lun 24 Aoû 2020, 13:04, édité 1 fois |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12412 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Lun 24 Aoû 2020, 12:53 | |
| Ce sentiment est sans doute particulièrement intense pour des générations qui ont été élevées dans la culture, le culte ou l'illusion de la "liberté" et de la "décision" individuelles, même si celles-ci se réduisent en pratique au choix du consommateur -- alors que pour tant d'autres, d'avant ou d'ailleurs, un tel choix, qu'il s'agisse de religion, de politique, de métier, de sexualité, de lieu ou de mode de vie n'a jamais été une possibilité ni un problème. A contrario, le sens du "destin", de la "vocation", de l'"élection", de la "providence" ou de la "grâce", d'une impulsion ou d'une direction divines ou non, mais irrésistibles, en est également renforcé pour une minorité, ou peut-être dans un recoin secret de chacun. -- Je pense à Schleiermacher qui, aux temps des révolutions et de l'autonomie de la Raison, définissait l'essence de la religion comme un sentiment de dépendance absolue -- et, beaucoup plus loin, au NT lui-même dont toute la thématique est corollaire d'une époque de relative liberté culturelle due à l'hellénisme et à la pax romana.
Toujours est-il que ce paradoxe retors (choisir la dépendance) m'a aussi beaucoup marqué. Et que le sentiment d'être "conduit par Dieu" hors du jéhovisme comme j'avais été "conduit" plus tôt à celui-ci fournissait une certaine "clé de lecture" et d'intelligibilité douloureuse de la contradiction. (J'ai déjà raconté comment, dans mes derniers mois au Béthel, j'ai dû traduire un "Annuaire" rempli de témoignages de gens divinement "dirigés" vers l'organisation, alors que j'étais consciemment engagé sur la trajectoire inverse, avec l'impression de les croiser dans l'escalier pour ainsi dire... initiation pénible mais efficace à un certain sens du "mystère", qui aurait sans doute pu être évitée d'un haussement d'épaules "rationnel", mais celui-ci n'était pas à ma portée et ne l'est probablement toujours pas. Au fond je souscrirais toujours au diagnostic de mon adolescence, "je ne peux pas vivre sans Dieu" -- même si pour moi le sens de "Dieu" -- et de "je" -- a beaucoup changé entre-temps. Cela ne m'a pas empêché d'user et peut-être d'abuser de la "raison", mais celle-ci me reste, je crois, foncièrement étrangère.) |
| | | free
Nombre de messages : 10055 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Mar 25 Aoû 2020, 10:50 | |
| Ce n'est pas une analyse rationnelle qui a provoqué ma crise de conscience mais la "souffrance", la souffrance subite (mais qui me travaillait depuis longtemps surement) de ne pas savoir qui j'étais (en tant que TdJ je me sentais être un étranger à moi-même), d'avoir également le sentiment de n'avoir rien décidé (de devenir TdJ, de me marier, d'avoir des enfants ...) et d'être mal marié, en un mot, de n'être à ma place nul le part. J'avais l'étrange sensation d'être sorti d'une certaine léthargie ou d'une anesthésie et de prendre conscience que j'existais sans savoir qui j'étais vraiment. A cet instant, je me suis mis à me poser des questions qui n'étais jamais venu à mon esprit : pourquoi suis-je devenu TdJ ? Pourquoi ai-je choisi de me marier avec la mère de mes enfants ? pourquoi ai-je besoin de me valoriser et d'exister à travers ma fonction d'ancien ? Ma vie de TdJ n'est-elle pas illusoire ?
Ces questions existentielles m'ont chamboulé et fait énormément souffrir, en effet je me sentais dans une voie sans issue, incapable de quitter la Watch, comme aliéné et sans la force d'affronter tout ce que la désaffiliation éventuelle pourrait générer dan ma vie. Un ami TdJ en phase de sortie, m'a suggéré de faire une psychothérapie qui m'a permis de de découvrir que je pouvais décider (ce fut effectivement une découverte), au moins de sortir de la Watch. Je ressentais la volonté de partir mais je ne m'en sentais la force. |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12412 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Mar 25 Aoû 2020, 12:32 | |
| J'entends bien et je ne doute pas que ce type de démarche soit plus "saine" que la mienne au regard des critères en vigueur de la "santé" mentale ou psychique, voire de la "santé" tout court -- mais pour ma part je ressens la résistance d'un certain "mystère", donc aussi d'une certaine obscurité, sous les distinctions verbales et même conceptuelles du "désir", de la "volonté", de la "décision", de la "liberté", et du prétendu "sujet" individuel et autonome de tout cela. En tout cas c'est une question qui dépasse largement celle du passage par une "secte", même si pour toi comme pour moi elle lui est nécessairement liée. |
| | | courtois troubadour
Nombre de messages : 21 Age : 58 Date d'inscription : 25/05/2018
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Ven 30 Oct 2020, 17:28 | |
| Bonjour à tous - free a écrit:
- J'ai le sentiment que quelque chose nous dépasse et que l'on ne maitrise pas grand chose dans notre vie, en effet je ne saurais pas dire précisément pourquoi je suis devenu TdJ à 14 ans et pourtant à l'époque cela m'a paru être une évidence, tout comme 30 ans après, il m'est apparu inéluctable que je devais quitter les TdJ, ce n'était plus ma place, une force inexplicable m'a poussé à l'intérieur et ensuite à l'extérieur du mouvement, avec la même intensité et d'une manière toute aussi mystérieuse. Il y a surement des ressorts psychologiques et affectifs qui ont influencé mes choix mais j'ai le sentiment que tous ces choix constituent mon chemin de vie, sinueux et vallonné.
Bien souvent, quand on pense que "on ne maîtrise pas", il est à ce moment-là question d'inconscient (qui nous gouverne) et je pense qu'il faut aller creuser de ce côté-là. A partir du moment où on sait que l'inconscient est à l'origine de + de 90 % de nos actions, il devient quasi important de comprendre comment il fonctionne et comment il nous fait fonctionner. Et + on a l'impression de subir notre vie - chemin sinueux et vallonné - et + la certitude qu'on a un petit travail à faire de ce côté-là s'impose. Pour ma part, j'ai pris conscience de ce qu'il me faisait faire (tous mes échecs en sont un exemple) ou du moins en partie... Bonne journée à tous ! |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12412 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Ven 30 Oct 2020, 22:41 | |
| Bonsoir, et joyeux confinement ! :)
Vouloir ou prétendre être conscient de l'inconscient, autrement dit connaître l'inconnu ou savoir l'insu (das Unbewusste dans le texte freudien), a fortiori le maîtriser, ce pourrait aussi en être doublement dupe...
Je revoyais récemment l'Adieu au langage de Godard, qui cite approximativement une phrase qu'il attribue à Monet, alors qu'elle semble être de Proust (Jean Santeuil) à propos de Monet: "peindre ni ce qu'on voit parce qu'on ne voit plus rien, ni ce qu'on ne voit pas puisqu'on ne doit peindre que ce qu'on voit, mais peindre qu'on ne voit pas..." (Un peu plus de contexte ici). Cela me semble très bien convenir au seul rapport ou non-rapport possible d'une "conscience" à un "inconscient", savoir qu'on ne sait pas (comme aurait aussi dit Socrate). |
| | | VANVDA
Nombre de messages : 1610 Date d'inscription : 09/05/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Ven 11 Déc 2020, 11:25 | |
| Bonjour à tous, J'ai terminé d'enregistrer, pour "Solal Invictus" qui m'avait sollicité et qui le "post-produit", mon récit autobiographique (parfaitement honnête et sans doute bien mensonger) Je ne m'attendais pas forcément en commençant à raconter tout ça, je suis bien trop bavard... J'ai été sollicité par deux personnes différentes pour raconter ma vie (Elisabeth Feytit, pour son émission Méta de Choc, dédiée à l'esprit critique qui diffusera au printemps), faut croire que ça peut intéresser quelques-uns. La troisième partie est en ligne, où j'y livre un moment de "folie" qui reste douloureux, même presque 20 ans plus tard. https://youtu.be/jAk9pF5QTCQ |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12412 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Ven 11 Déc 2020, 12:49 | |
| Bonjour VANVDA (j'avais spontanément écrit ton prénom, le jeu des liens Internet tendant à déjouer celui du pseudonymat) et merci de ce récit difficile. Je n'ai d'ailleurs pas très bien compris s'il s'arrêtait là (comme ton post me l'avait laissé penser) ou s'il va continuer (comme le suggère l'"à suivre" à la fin de la vidéo). Tu sais en tout cas ce que tu m'en avais déjà raconté, ce qui me dispense, je pense, de commentaire sur le "fond" (comme on dit).
A titre personnel, l'autobiographie (-phonie en l'occurrence) me laisse toujours un peu perplexe: j'ai l'impression d'avoir raconté, plutôt dix fois qu'une au fil des années et sans doute assez différemment à chaque fois, la plupart des anecdotes qui constitueraient l'intérêt éventuel de la mienne, et je ne me suis jamais décidé à en faire un récit suivi. C'est un peu comme pour le rêve: il y a des plans, des scènes, des enchaînements même qui ont l'air de "rester", de ne pas être complètement "inventés" quoiqu'ils ne soient pas forcément plus "vrais" pour autant, mais la mise en histoire longue, le "montage", le "filage" ou le "chapitrage" général, tout cela me paraît toujours factice -- bien que ce soit à d'autres égards le moins discutable, puisque ça peut s'appuyer sur une chronologie "objective".
Mais je ne doute pas que ça puisse "intéresser" pas mal de gens, à beaucoup de points de vue. Il y a là de l'incalculable: comme tu l'as dit ça confortera fatalement certains dans leurs opinions, leurs jugements, leurs peurs et leurs "rassurances" de TdJ OU d'ex-TdJ, mais cela ne manquera pas de donner à penser à quelques autres. |
| | | free
Nombre de messages : 10055 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Sam 12 Déc 2020, 08:52 | |
| Bonjour VANVDA,
J'ai beaucoup apprécié tes vidéos qui font réfléchir et qui met en évidence que le système jéhoviste fonctionne parce que les individus qui forment ce groupe jouent le jeu (inconscient) de la double pensées. Je pense que tes vidéos permettront à certains d'y voir un peu clair en eux.
Tu pointes un phénomènes que j'avais observé dans la congrégation dont j'ai fait parti pendant 30 ans, à savoir une grande proportion de dépressifs et de personnes ayant des troubles psychiatriques. Pendant 30 ans, j'ai connu des TdJ qui ont perpétré des tentatives de suicides, certaines réussies. Je ne pense pas que le système jéhoviste soit à l'origine des ces fragilités psychologiques, de nombreux TdJ adhérent à la Watchtower alors qu'ils sont déjà dépressifs, ils espèrent souvent rompre avec la solitude, trouver une raison de vivre et une solution à leur angoisses existentielles (Un Dieu qui va résoudre tous leurs problèmes). Par contre, le système élitistes de la Watch met beaucoup de TdJ en échec et génère un sentiment d'indignité, de ne pas être à la hauteur avec la perspective d'être victime de la défaveur de Dieu. L'intensité des activités "théocratiques" engendrent souvent chez ces personnes une fatigue physique et psychologique profonde. Enfin une moralité extrême suscite un sentiment de culpabilité destructeur. La solution que ces personnes pensaient avoir trouvé, devient la cause d'accentuation de leur fragilité psychologique sans qu'ils puissent faire le lien car l'organisation est sacralisée et ils sont censés être "heureux" puisqu'ils font partis du "peuple heureux". S'ils sont incapables de connaitre la joie qui caractérisent les TdJ, c'est qu'ils ont un problème spirituel ce qui les met encore en échec.
Ces souffrances intérieures peuvent (mais pas toujours) générer une prise et crise de conscience salutaire. |
| | | VANVDA
Nombre de messages : 1610 Date d'inscription : 09/05/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Sam 12 Déc 2020, 11:42 | |
| @Narkissos, en effet mon anonymat est désormais plus que relatif ( même si on se demande bien ce que ça peut vouloir dire, cette expression). On va dire que la seule chose pour laquelle je m'arrange, c'est qu'on ne puisse pas faire le lien entre "moi sur Internet" et "moi de le vraie vie" de façon automatique, c'est-à-dire que quelqu'un me connaissant dans la vraie vie (comme un collègue de boulot, voire une éventuel employeur) ne tombe pas sur ces vidéos en googlisant mon nom. Je ne suis pas gêné que ça fonctionne dans l'autre sens, que quelqu'un me connaissant, tombant sur une telle vidéos, puisse me reconnaître (même si je sais que cette situation-ci pourrait bien un jour déboucher sur celle-là, si je tombe sur quelqu'un de réellement malveillant). Merci donc de ta prudence ici, quoique n'importe qui suivant ce fil saura que je suis "Bertrand", et que je l'ai bien voulu ! Oui, il y a encore une suite à venir : je disais que j'ai fini d'enregistrer entièrement mon récit, mais j'abandonne au propriétaire de la chaine la partie technique. Il fait le feuilletonage, la musique, les images (qui sont loin de faire l'unanimité d'ailleurs...). Il a apparemment prévu de sortir encore deux "épisodes". J'ai une certaine conscience de tout ce qu'un récit comme celui-ci a d'artificiel : il n'est jamais ni vrai ni faux, ni même entre les deux peut-être. Après, pour tout dire, je ne le vois pas vraiment plus problématique que celui de l'anecdote, qui est elle aussi la réinterprétation que l'on fait aujourd'hui du passé, en la présentant tout de même comme la vérité de l'époque. C'est peut-être la "prétention" implicite de chacun des deux styles de récit que tu évoques (le récit autobiographique "complet" promettant tacitement un peu --ou beaucoup-- plus à l'auditeur, et trahissant donc bien plus) ? (Au passage, je parle pas mal de fidélité et de trahison dans la suite, avec un résultat qui me laisse sur ma faim --mais comme toujours quand je me relis ou me réécoute.) @free, merci. Je dois t'avouer, rougissant, que je ne saisis pas trop la subtilité de ce que tu dis : d'un côté tu sembles dire que le jéhovisme n'est pas LA cause, mais que les gens qui y viennent (avec le problème, selon moi, que plus personne ou presque n'y "vient" plus, mais se contente d'y rester, dès que tu considères la génération des moins de cinquante, voire oixante ans) sont déjà "dépressifs". Mais par la suite tu sembles aussi expliquer ce que le jéhovisme a de pathogène, donc ce qui fait qu'il serait la cause. Bon, ceci dit, d'une manière générale, les relations de cause à effet sont toujours à la fois inévitables, pour ne pas dire indispensables, et toujours bien problématiques dès qu'on y pense un tout petit peu sérieusement. Ça me rappelle la vieille histoire de ce qui permet la victoire : c'est la voiture ou c'est le pilote ? La réponse convenue : "c'est 50/50" pouvant alors amener à la conclusion qu'un pilote qui se présenterait sur la ligne de départ sans sa voiture aurait encore 1 chance sur 2 de gagner la course... |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12412 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Sam 12 Déc 2020, 12:43 | |
| Merci à toi VANVDA.J'étais en train de taper quelque chose qui recoupe en grande partie ce que tu dis en réponse au post de free, je le copie quand même, surtout pour le lien "Google" qui peut être une piste de recherche: - Citation :
- Les "convertis" qui constituaient le gros des troupes dans les années 1970 sont devenus vieux quand ils ne sont pas morts, les générations suivantes sont presque entièrement le produit d'une éducation jéhoviste: les troubles psychiques des TdJ sont désormais essentiellement "endogènes" sous ce rapport.
Cela bien sûr n'explique pas tout puisqu'il y a des familles et des éducations jéhovistes très différentes les unes des autres, et qu'il reste pour ceux qui y naissent et y grandissent le "choix" de perpétuer la religion familiale ou de s'en écarter.
J'ai le vague souvenir (de JWD peut-être) d'études statistiques comparant la proportion de troubles psychiques ou psychiatriques à l'intérieur et à l'extérieur du groupe, mais je ne me souviens pas de leurs conclusions -- peut-être parce qu'elles n'étaient pas concluantes, ou contradictoires entre elles. En regardant un peu le sujet sur le net je vois que les principales études, toujours citées et débattues (y compris par Furuli, fort loin de son domaine de compétence), datent des années 1970-80. Mes réserves sur l'"autobiographie" (longue et suivie) sont strictement personnelles: tout simplement je n'y arrive pas, mes rares velléités d'écriture rencontrent très vite une réticence fatale (à quoi bon ou le démon de Socrate ?). Mais d'une part ça ne m'empêche pas d'apprécier les autobiographies en général et la tienne en particulier -- je devrais dire les tiennes, car outre l'"autobiophonie" présente je garde l'excellent souvenir d'un début de texte que tu m'avais fait lire il y a longtemps -- et d'autre part ça ne se limite pas à ce "genre": le livre, la thèse, l'essai, sont également trop longs pour moi, je n'en ai pas la patience, et j'en suis venu à redouter la cohérence artificielle de la construction qui finit par noyer les intuitions brèves. Le post de blog ou de forum reste à ma mesure, et même si je lis de gros livres je n'en retiens que des phrases. (Dieu sait pourtant que j'ai eu l'esprit de système, mais ça m'a passé avec le jéhovisme.) Au passage, en lisant les commentaires de la page YouTube sur la "haine" supposée des TdJ pour les "apostats" (etc.) je me suis dit -- toujours à titre personnel -- que c'est surtout de la peur (c'est peut-être vrai de toutes les "haines", d'ailleurs, si l'on en juge par la fortune des mots en -phobie): peur panique et confuse en ce cas de Dieu et du diable, des autres et de soi, de l'avenir, du présent ou du passé, de la perdition, du péché, de la souillure, du châtiment divin ou de la discipline du groupe, de la solitude, de l'inconnu... toute explication définie de cette "peur" (y compris en "haine" ou en "peur" de quelque chose de précis) est une simplification et déjà une façon de se rassurer. A propos, j'ai oublié de le dire: je me réjouis qu'il y ait une suite à ton récit, et je suis impatient de l'entendre (je ne suis pas sûr non plus que les images et la musique y apportent grand-chose). |
| | | free
Nombre de messages : 10055 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Sam 12 Déc 2020, 21:06 | |
| - Citation :
- @free, merci. Je dois t'avouer, rougissant, que je ne saisis pas trop la subtilité de ce que tu dis : d'un côté tu sembles dire que le jéhovisme n'est pas LA cause, mais que les gens qui y viennent (avec le problème, selon moi, que plus personne ou presque n'y "vient" plus, mais se contente d'y rester, dès que tu considères la génération des moins de cinquante, voire oixante ans) sont déjà "dépressifs". Mais par la suite tu sembles aussi expliquer ce que le jéhovisme a de pathogène, donc ce qui fait qu'il serait la cause.
J'ai pensée une idée mais je ne l'ai pas écrite … Ce que je voulais dire, c'est que le système jéhoviste (pour toutes les raisons que j'ai évoqué) joue un rôle aggravant sur une dépression existante. J'ai le souvenir d'une TdJ qui était victime de graves troubles psychiatriques et qui était torturée par l'idée que le fait de manger constitué un péché grave devant "Jéhovah". Elle était persuadée qu'elle serait détruite lors de la grande tribulation. Cette souffrance mentale aggravée par un sentiment de culpabilité (religieux) s'est terminée par un dramatique suicide. Elle était déjà malade quand elle est devenue TdJ mais sa nouvelle religion à aggraver sa pathologie en introduisant les notions de "péché" et de "culpabilité".Le titre d'un livre que j'ai trouvé très évocateur :Témoin de jehovah, dépressif, heureux et suicidaire ... Jean-Louis Pons Paru le 10 juin 2013Un fait vécu :
Un ex-Témoin de Jéhovah raconte Isolement, culpabilité, dépression, libération Gaëtan, qui a quitté les Témoins de Jéhovah chez lesquels il a passé toute sa jeunesse au Québec, vit à Toronto depuis 4 ans.
Gaëtana été élevé parmi les Témoins de Jéhovah. À 24 ans, suite à une sévère dépression, il quitte le mouvement. C’est le début d’une longue et difficile reconstruction.
Gaëtan, 33 ans, a élu domicile à Toronto depuis 4 ans. Toute son enfance, il l’a passée au sein de la communauté des Témoins de Jéhovah de Saint Georges de Beauce au Québec. Sa vie de jeune recrue n’est alors pas de tout repos. Son temps libre est partagé entre assister aux offices et faire du porte-à-porte. «Du plus loin que je me souvienne, je donnais des tracts». Sa vie tourne autour du culte: «Si tu lis un livre, il faut que ça soit un livre de l’Organisation.»
Témoin de Jéhovah: une philosophie qui isole
Gaëtan a beaucoup souffert de l’isolement forcé auquel il a dû faire face dès l’enfance. «Ils te mettent dans la tête que tu ne dois pas te faire des amis non-Témoins, on te dit que tes voisins vont être détruits, ce qui fait que ça te sépare, ça t’isole. C’est un mode de vie, une philosophie qui t’isole.»
En effet, pour suivre les principes dictés par ce qu’il appelle «l’Organisation», Gaëtan refuse de participer à de nombreuses activités au sein de son école.
«Je n’avais pas beaucoup d’amis parce que j’étais toujours séparé», se souvient-il. «Si quelque chose avait rapport avec une célébration, il fallait que j’aille dans des cours spéciaux, ce qui fait que j’étais tout le temps tout seul, comme si je n’étais pas assez intelligent ou moins intelligent. Mais ce n’était pas ça, c’était juste que je ne pouvais pas participer à cause de la Watchtower.» (NDLR – «The Watch Tower Bible and Tract Society of Pennsylvania» est le nom de l’association à but non lucratif, créée en 1884, gouvernant les «Témoins de Jéhovah».)
La dictature de la culpabilité
Le dogme religieux strict suivi avec soin par les membres de la communauté a mis régulièrement Gaëtan à l’épreuve, notamment les règles concernant le refus du sang (par voie orale ou sous forme de transfusion), le refus de participer aux célébrations ainsi que l’interdiction d’avoir des rapports sexuels en dehors du mariage.
Dans la vie de Gaëtan, la culpabilité est une rengaine familière qui ne le quitte jamais. On lui a appris à se méfier des aliments qui sont susceptibles de contenir des traces de sang comme le peppéroni. Il se rappelle de ce qu’il a vécu à 10 ans, alors que toute sa classe se régalait autour d’une pizza qui en était justement garnie: «J’ai enlevé le peppéroni et je l’ai jeté. Mais il y en restait un petit bout quand même que j’ai mangé et je me suis senti coupable.» Cette même culpabilité le suivra durant l’adolescence, même dans sa vie intime. «La sexualité n’est pas bien vue dans l’Organisation. Avant l’adolescence, on te dit que la masturbation c’est mal, c’est une faiblesse. Tu te sens toujours mal, tu te demandes pourquoi tu n’es pas capable de surmonter cette faiblesse. Tu n’as pas d’estime de toi.» secte religion
Une lente descente aux enfersÀ 22 ans, Gaëtan se sent plus seul que jamais. Alors qu’il envisage de se marier avec une jeune fille faisant elle aussi partie de la communauté, cette dernière le quitte jugeant qu’il n’est «pas assez spirituel».
Rejeté par ses amis, le jeune homme se sent abandonné. «J’arrivais à un point où je me tapais la tête contre les murs, je voulais me suicider. Je sentais que je n’étais pas capable d’arriver à avoir l’approbation de mes parents.» Déprimé, Gaëtan va chercher du réconfort au fond d’une bouteille, un acte prohibé chez les Témoins de Jéhovah. «C’était carrément de l’autodestruction. C’était une décision consciente de ma part, j’ai utilisé l’alcool pour essayer de détruire mes cellules, pour me guérir de mes faiblesses.» Les conséquences ne se font pas attendre. Il avoue son «crime» et, parce qu’il refuse de se repentir, est immédiatement excommunié. «Je n’en avais rien à foutre, je voulais juste mourir.» La vie à l’extérieur Toute sa vie, on avait inculqué à Gaëtan une vision particulière du «monde», c’est à dire ceux qui n’appartiennent pas au «peuple élu». «Les Témoins de Jéhovah sont en couleurs et le monde est en noir et blanc , dit-il. Excommunié, il fait donc partie du «monde».
«Je me voyais comme étant méchant. Je me disais je vais boire de l’alcool parce que c’est ce que quelqu’un de méchant fait. Je vais aller dans les bars parce que c’est ce que quelqu’un d’immoral fait.»
Se sentant misérable, il finit par se retrouver à la rue. Il sera sans domicile fixe pendant quatre longues années. Renié par la communauté et non préparé à la vie à l’extérieur, Gaëtan a du mal à trouver sa place. «J’ai été vivre dans la rue parce que je ne fonctionnais pas dans le monde. Personne ne me comprenait.» Aujourd’hui encore, il déclare avoir des difficultés à nouer des relations. «J’ai tout le temps de la misère à me mélanger avec les autres. […] Je n’ai jamais appris les bases de comment se socialiser. Juste dire «salut» pour moi, c’est énorme.» https://l-express.ca/un-ex-temoin-de-jehovah-raconte/ |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12412 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Sam 12 Déc 2020, 23:44 | |
| Le "délire" parle toutes les langues dont il dispose -- j'ai connu au moins deux TdJ passés par la psychiatrie qui parlaient en style TMN, l'un en portugais et l'autre en français, il m'est même arrivé de "traduire" pour des médecins ou d'autres "aidants" qui n'y comprenaient rien; les "fantasmes", les "phobies" et autres "obsessions" utilisent tout le matériel linguistique, conceptuel et imaginaire qui leur tombe sous la main. On n'a pas besoin d'être TdJ ou religieux pour être anorexique ou suicidaire, mais si on l'est ça prendra forcément un tour religieux. Seules des statistiques pourraient dire si ça aggrave un peu, beaucoup ou pas du tout sur le grand nombre, mais contrairement à toute intuition rationnelle elles n'ont aucune prise sur le cas singulier (sans quoi ça fait longtemps que les mathématiciens seraient interdits de loterie).
Mais le grand nombre, évidemment, n'est pas négligeable pour autant. Qu'il y ait des facteurs "pathogènes" spécifiques au jéhovisme comme à d'autres "sectes", "religions", ou "communautés", et qu'il n'y ait entre tous ces milieux, et entre chacun d'eux et la "société-en-général", aucune "égalité" de principe, ça ne fait à mes yeux aucun doute... Reste que la "causalité", comme disait à peu près VANVDA, est toujours plus complexe qu'on ne croit: il n'y a jamais une seule "cause" à quoi que ce soit, et chaque "cause" en cache toujours une foule d'autres; les "religions" ne seraient pas pathogènes si "le monde" ou "la vie" ne l'étaient pas, rien ne serait particulièrement "dangereux" s'il n'était aussi potentiellement "bénéfique", et inversement (ambiguïté du pharmakon, même Macron en parlait l'autre jour à propos des vaccins...), et bien sûr une telle généralité ne garantit aucun équilibre a priori des risques et des bénéfices nulle part... |
| | | free
Nombre de messages : 10055 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Dim 13 Déc 2020, 08:29 | |
| - Citation :
- Reste que la "causalité", comme disait à peu près VANVDA, est toujours plus complexe qu'on ne croit: il n'y a jamais une seule "cause" à quoi que ce soit, et chaque "cause" en cache toujours une foule d'autres; les "religions" ne seraient pas pathogènes si "le monde" ou "la vie" ne l'étaient pas, rien ne serait particulièrement "dangereux" s'il n'était aussi potentiellement "bénéfique", et inversement (ambiguïté du pharmakon, même Macron en parlait l'autre jour à propos des vaccins...), et bien sûr une telle généralité ne garantit aucun équilibre a priori des risques et des bénéfices nulle part…
Tu fais bien d'insister sur la complexité de la dépression et sur ses causes multifactorielles. Avec le recul, je constate le décale qu'il y a entre le discours de la Watch qui affirme que ses membres constituent le peuple le plus heureux sur la terre , ce qui résulterait des bonnes relations que ceux-ci entretiennent avec Dieu et la réalité du terrain, ou même certains éléments "moteurs" et très actifs sont frappés par la dépression. Voici comment est introduit un article de la TdG : "LE PEUPLE de Jéhovah possède un bien précieux : le bonheur. “ Heureux le peuple dont le Dieu est Jéhovah ! ” s’est exclamé le psalmiste David (Psaume 144:15). Le bonheur est un sentiment de bien-être ; et quand nous avons la conviction d’être bénis par Jéhovah, c’est alors qu’il est le plus intense, qu’il nous touche au plus profond de nous-mêmes (Proverbes 10:22). Ce bonheur-là découle de relations étroites avec notre Père céleste et du sentiment de faire sa volonté (Psaume 112:1 ; 119:1, 2)." https://wol.jw.org/fr/wol/d/r30/lp-f/2004802 Que ressent un TdJ qui fait parti du peuple heureux et qui est frappé par la dépression ? Peut-être aura-t-il la conviction de ne pas être bénis par Dieu. J'ai également le souvenir que la Watch avait (dans les années 70) des réticences vis à vis des psychiatres : Qu’il s’agisse de consulter un psychiatre ou n’importe quel autre médecin, c’est une décision personnelle que doit prendre chaque chrétien. Quoi qu’il en soit, les vrais chrétiens ont une foi profonde dans la grande valeur des conseils de la Bible. Ils reconnaissent que le Créateur connaît mieux l’homme — y compris son esprit — que n’importe quel humain. Les témoins de Jéhovah examinent donc toute thérapeutique à la lumière de “la sagesse d’en haut”. — Jacq. 3:17. (…) Bien que tous les psychiatres et psychanalystes ne soient pas athées ou agnostiques, beaucoup le sont. Une enquête a révélé que plus de la moitié des psychiatres interrogés étaient d’accord avec Sigmund Freud pour dire que la croyance en Dieu est “infantile” et en désaccord “avec la réalité”. Beaucoup croient que l’homme est dirigé par “des instincts animaux qu’il a hérités au cours de son évolution à partir des formes de vie inférieures”. D’autre part, selon le livre Les psychiatres (angl.), “la plupart des psychiatres et psychanalystes pensent que les lois qui régissent la conduite sexuelle sont beaucoup trop strictes”. (Page 167.) Permettrez-vous à des hommes qui ont de telles opinions d’influencer votre vie ? https://wol.jw.org/fr/wol/d/r30/lp-f/1975287 Actuellement, la Watch reconnaît la dépression nerveuse comme étant une maladie bien réelle : https://wol.jw.org/fr/wol/d/r30/lp-f/102004002 |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12412 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Dim 13 Déc 2020, 13:44 | |
| Rien n'est peut-être aussi déprimant que l'obligation sociale de s'afficher heureux, certains TdJ en étaient d'ailleurs tout à fait conscients... mais on ne peut pas dire non plus qu'ils aient l'exclusivité de la chose, pas même de sa caricature: du simple "ça va ?" qui n'attend qu'une réponse affirmative -- si encore il l'attend -- à tous les développements de la "pensée positive" et de la "résilience" dans la psychologie populaire, les ravages du bonheur impératif ne connaissent pas de frontière. |
| | | le chapelier toqué
Nombre de messages : 2606 Age : 77 Date d'inscription : 31/08/2010
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Dim 13 Déc 2020, 18:56 | |
| De très belles réflexions, merci. Le bonheur ne devrait pas être le but d'une recherche. Que l'on cherche le bonheur est tout à fait banal et peut-être normal, mais est-on sûr de le découvrir ou de vouloir le découvrir? Cela ressemble à l'Utopie. Pays fantastique dans lequel tout un chacun se doit d'être heureux.
Et pourtant nous avons tous fait l'expérience de nous être réveiller un peu grincheux et d'avoir dû faire face en nous rendant à la salle de bain, puis à la cuisine. Et après...
Nous voilà dans notre voiture ou en transport en commun et la vue d'une personne souriante ou d'un ami avenant nous fait à nouveau nous sentir un peu mieux presque heureux. C'est venu simplement parce que notre cerveau a reçu des signaux qu'il a perçu comme non agressifs et nous voilà prêt à passer une bonne journée jusqu'au moment ou nous rencontrerons notre chef...
Cela est valable pour les gens qui ne sont pas à la retraite, pour les rentiers il leur est toujours possible de se tourner vers leur compagne/compagnon... à défaut de prendre un bon livre.
Rien n'est permanent ni le malheur, ni le bonheur... |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12412 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Lun 14 Déc 2020, 00:35 | |
| This too shall pass... (Hermann Hesse aussi avait fait une nouvelle de ce conte, c'est chez lui que je l'ai découvert, il y a longtemps, avant de m'apercevoir que l'expression était devenue quasi proverbiale en anglais.)
A propos, je ne connaissais pas la formule "best life ever" comme slogan jéhoviste à la mode (cf. la vidéo, v. 33') -- bien que l'idée ait souvent été évoquée ici... mais je ne suis pas certain que ce genre de réduction de la réalité au slogan publicitaire soit plus jéhoviste qu'américain, pour autant qu'on puisse encore distinguer l'américain de la mondialisation culturelle.
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| | | free
Nombre de messages : 10055 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Lun 14 Déc 2020, 12:17 | |
| Trouvons de la joie dans l’œuvre d’évangélisation
Certains ont du mal à prêcher de maison en maison. Peut-être sont-ils gênés d’aborder des inconnus ou d’entamer des conversations. Ou peut-être se sentent-ils tout simplement inaptes à instruire autrui. Éprouvez-vous parfois de tels sentiments? Si oui, comment pouvez-vous trouver de la joie dans l’œuvre d’évangélisation? Avant tout, gardez une attitude positive. Bien des gens seraient ravis d’être employés par une célébrité ou un politicien connu, n’est-ce pas? Ne devrions-nous donc pas être comblés de joie, nous qui servons le “Roi d’éternité”, Jéhovah Dieu en personne? — I Timothée 1:17. Souvenez-vous en outre que cette œuvre ne se répétera jamais. Réfléchissez: ce sont les anges qui dirigent les efforts que font les chrétiens sur la terre pour chercher les personnes au cœur de brebis (Révélation 14:6). Cela ne vous remplit-il pas de joie ? https://wol.jw.org/fr/wol/d/r30/lp-f/1987205
Je me souviens des nombreux TdJ qui n'aimaient pas la prédication mais qui participaient régulière à cette activité par "obligation" (cela faisait parti du package du salut) et qui lisaient régulièrement que cette activité procurait de la joie. Je ne doute pas que certains TdJ prenaient du plaisir à évangéliser mais il me semble qu'ils constituaient une minorité.
Certains publications de la Watch sont une vraie propagande :
Le peuple le plus heureux de la terre
“ Heureux le peuple dont le Dieu est Jéhovah ! ” (Ps. 144:15). Ces paroles montrent que les Témoins de Jéhovah sont le peuple le plus heureux qui soit. Il n’y a pas de plus grande joie que celle que nous retirons à servir le seul vrai Dieu vivant, Jéhovah. Comme il est le “ Dieu heureux ”, ses adorateurs reflètent son allégresse (1 Tim. 1:11). Quels sont quelques-uns des aspects de notre culte qui contribuent à notre joie ? https://wol.jw.org/fr/wol/d/r30/lp-f/202002040?q=peuple+heureux&p=par |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12412 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Lun 14 Déc 2020, 13:31 | |
| Même pour ceux qui trouvaient parfois un certain intérêt à la "prédication" -- ça m'est arrivé -- c'était plutôt l'exception dans de longues heures d'ennui...
Que le "bonheur" soit axiomatique et/ou incantatoire plutôt que phénoménal, qu'en d'autres termes il se décrète ou s'invoque plus qu'il ne se constate, c'est peut-être la part de vérité de la caricature jéhoviste qui est aussi celle de son modèle "biblique" et antique (béatitudes et autres macarismes, heureux-'ashré-makarios-beatus-blessed-selig etc. [est/soit] qui... ce qui revient effectivement à une forme d'auto-bénédiction). Mon père avant de devenir TdJ était adepte de la fameuse "méthode Coué" (d'auto-suggestion) qu'il prenait très au sérieux...
Je soupçonne par ailleurs ce repli de la "vérité" sur le "bonheur" d'en cacher un autre, moins avouable encore mais peut-être plus sage (tout au moins au sens de Qohéleth): avec l'âge, ce qui vaut pour l'individu et autrement pour une communauté vieillissante, il apparaît aussi peu "important" d'avoir été heureux ou malheureux que d'avoir eu raison ou tort.
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| | | free
Nombre de messages : 10055 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Lun 14 Déc 2020, 19:25 | |
| Avec le recul, je constate que la Watch développe un système de pensée "incantatoire", elle décrète par exemple que les TdJ ont découvert le "secret" du bonheur familial et que par conséquent les familles TdJ connaissent davantage la réussite familiale, alors qu'en réalité les couples TdJ connaissent autant de problèmes qu'ailleurs (ce n'est ni pire, ni meilleur). Au fond les TdJ sont conscients de cette réalité mais à force de se répéter, réunion après réunion, que leur communauté connait le bonheur familial, ils finissent par se persuader que cette utopie est réelle. Dans les articles de la Watch nous trouvons des phrases "incantatoire" (ce mot plait beaucoup), du style : "Les Écritures nous ont aussi enseigné le meilleur des modes de vie" ; "Grâce à cela, nous avons de saines compagnies dans notre joyeuse communauté de frères chrétiens" ; "L’obéissance aux principes moraux élevés de Dieu nous procure une grande satisfaction, car nous savons qu’elle nous protège et réjouit Jéhovah" … Il y a comme une forme de superstition qui fait croire (par exemple) que l'obéissance aux principes moraux nous protège d'une manière "magique" de toutes les difficultés.
La Watch exprime souvent l'idée qu'il y a une "recette universel" pour le bonheur qui est valable pour tout le monde et pour toutes les époques.
Un extrait révélateur de la vision fantasmée chez les TdJ :
LES Témoins de Jéhovah sont de toute évidence un peuple heureux. Quand ils sont ensemble, que ce soit lors d’une réunion, d’une assemblée ou d’un moment de détente, on les entend rire et discuter joyeusement. Pourquoi sont-ils aussi heureux ? Principalement parce qu’ils connaissent, servent et s’efforcent d’imiter Jéhovah, le « Dieu heureux » (1 Tim. 1:11 ; Ps. 16:11). Étant la Source du bonheur, Jéhovah veut que nous soyons heureux, et il nous donne de nombreuses raisons de nous réjouir (Deut. 12:7 ; Eccl. 3:12, 13). https://wol.jw.org/fr/wol/d/r30/lp-f/2018567
Dernière édition par free le Lun 14 Déc 2020, 20:11, édité 1 fois |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12412 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Lun 14 Déc 2020, 20:01 | |
| Pourtant les TdJ ressentent fort bien (et expriment assez souvent) la différence en leur propre sein des personnalités, des familles ou des congrégations assemblées plus ou moins gaies, chaleureuses ou sinistres (je l'ai moi-même éprouvée entre ma famille et ma première congrégation, puis entre celle-ci et les suivantes, et cela ressort aussi très nettement du témoignage de "Bertrand", entre Cherbourg et Caen p. ex.) -- alors que cette différence ne s'explique nullement par l'axiome général et tendrait plutôt à l'infirmer: si c'est le fait d'être TdJ qui rend "heureux" par principe, c'est que le "bonheur" effectif et plus ou moins grand ne vient pas de là.
J'ai toutefois constaté quelque chose d'assez semblable chez les "évangéliques", peu après avoir quitté les TdJ: à ceux qui se "convertissaient" de façon purement formelle, par exemple lors d'une "mission" (comme celle de Billy Graham qui était passé à Paris cette année-là), on annonçait qu'ils étaient "nés de nouveau", qu'ils "avaient le Saint-Esprit" et que leur vie avait changé... et à ceux qui avouaient honnêtement dans les jours, les semaines ou les mois suivants qu'ils n'éprouvaient rien de tel, on n'avait plus rien à dire, sinon que c'était vrai quand même parce que c'était "biblique" et qu'ils devaient le croire. |
| | | free
Nombre de messages : 10055 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Mon expérience chez les Témoins de Jéhovah Mar 15 Déc 2020, 13:30 | |
| Je trouve qu'il faut beaucoup de courage pour se "livrer", exposer sa vie et se mettre à nu ... Je suis admiratif. Le fait de se raconter est peut-être une thérapeutique du soi, une façon de mieux se comprendre et de panser ses "plaises". Je suis admiratif car l'acte de se souvenir peut être un acte de douleur, même si à longue cela apporte soulagement. Se raconter c'est à la fois une introspection et une manière de se regarder de l'extérieur .... Pas facile. Bertrand, as-tu écrit ton texte, donc fait (en quelque sorte) une autobiographie ? |
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