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 la lettre de Jacques

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Narkissos

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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeVen 08 Oct 2021, 15:00

Sur tout le problème de l'"épreuve-tentation", y compris chez Jacques, voir ici.

Sans rentrer à nouveau dans cette discussion qu'il vaudrait mieux d'abord relire, avant d'éventuellement la poursuivre à sa place, même si elle est partie du Notre Père, comme l'article précité d'ailleurs, je trouve ledit article singulièrement déficient en matière de pensée de la langue, du rapport entre le lexique et les concepts.

Il est clair que pour nous "épreuve" et "tentation" sont des notions bien distinctes, pas même des "synonymes" approximatifs: notre problème n'est pas du tout de les distinguer mais au contraire de les rapprocher, d'imaginer un "rapport" entre l'une et l'autre; bien sûr on peut toujours en trouver: la "tentation" est une sorte d'"épreuve", parce qu'elle nous détermine ou nous révèle; et toute "épreuve" peut conduire à une "tentation", ne serait-ce que celle d'en sortir d'une manière contestable. Mais ette pensée n'est possible, et nécessaire, que parce que nous les entendons précisément comme deux mots et deux concepts distincts: quand nous entendons "épreuve", nous ne pensons pas du tout "tentation", et inversement, il faut faire un effort intellectuel pour relier les deux qui n'en font pas moins deux. Il ne se passe rien de tel dans une langue (le grec) qui n'emploie qu'un seul mot ou famille de mots (peirazô etc.), même si elle a aussi des "synonymes" partiels (dokimazô etc.): elle n'entend ni "épreuve" ni "tentation", elle ne "distingue" donc rien et n'éprouve (!) nul besoin de "relier" deux "choses" (idées, notions, concepts). De ce point de vue aucune traduction ne peut être satisfaisante: tout choix (entre "épreuve" et "tentation") est arbitraire, la juxtaposition de deux vocables ("épreuve ou tentation") crée artificiellement un dilemme ou une équivalence qui n'existe pas dans l'original, mais le pire est encore de changer de traduction dans le cours d'un même passage, comme s'il y avait glissement ou progression d'une "idée" à l'autre, ce qui n'est évidemment pas le cas.

La "logique" de "Jacques", en tout cas, est parfaitement claire, puisqu'il s'agit toujours d'une logique de la "responsabilité": inutile de chercher des excuses ou des alibis dans des causes ou des principes transcendants, dominants et déterminants, que ce soit "Dieu" comme auteur ou initiateur de l'épreuve-tentation, le "péché" ou la "chair" aux sens pauliniens (voir la suite), ou encore le "diable" (chap. 4) à qui il suffirait de résister pour qu'il s'évanouisse aussitôt. Chacun fait ce qu'il fait et veut ce qu'il veut, il ne peut s'en prendre qu'à sa propre duplicité (dipsukhia, l'âme double, 1,6ss) pour autant qu'elle aussi, c'est lui qui la "fait" et la "veut".
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeVen 08 Oct 2021, 15:36

"Mes frères, si quelqu'un parmi vous s'est égaré loin de la vérité et qu'un autre l'y ramène, qu'il sache que celui qui ramène un pécheur de la voie où il s'était égaré sauvera sa vie de la mort et couvrira une multitude de péchés" (5,19-20).

Plusieurs interprètes protestants modernes pensent que c’est celui qui aura ramené le pécheur qui sauvera sa propre âme et couvrira la multitude des péchés qu’il a lui-même commis antérieurement. L’idée ainsi exprimée ne serait pas sans analogie avec Jacques 2.13. Elle éviterait une certaine tautologie : celui qui ramènera un homme de son égarement sauvera l’âme de cet homme.

On est surpris de voir une telle affirmation introduite par les mots : qu’il sache… Il le sait bien et c’est pour cela qu’il s’est efforcé de le ramener !

Cependant cette pensée, que le chrétien peut considérer une conversion dont il est l’instrument comme le gage et le moyen de son propre salut, est si peu conforme à l’enseignement de tout le Nouveau Testament qu’on hésite à l’attribuer à l’auteur. Proverbes 10.12, qui est probablement dans sa pensée, montre qu’il s’agit des péchés des autres.  https://www.levangile.com/Amp-Bible-Annotee-Jacques-5.htm#note-verset-9
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeVen 08 Oct 2021, 16:36

Pour rappel, la "modernité" de La Bible annotée date, pour l'essentiel, du XIXe siècle (même si c'est A. Schroeder, petit-fils de L. Bonnet, qui l'a terminée en 1912).

De toute façon la phrase est ambiguë, avec ou sans le possessif (que les éditions critiques récentes retiennent: son âme / sa vie plutôt qu'une âme-vie, psukhè); et le sens de la citation, si c'en est une, serait en tout cas décalé par rapport au proverbe, en grec comme en hébreu: l'amour ou l'amitié, philia, couvre = pardonne, oublie les offenses (qui lui sont faites), contrairement à la haine qui éveille, suscite ou attise les querelles. "Jacques" ne suivrait d'ailleurs pas la complication de la Septante qui restreint le propos, "l'amitié couvre tous ceux qui ne sont pas amis des querelles".

Je reviens sur la fin de mon post précédent, car il me semble qu'on touche là à la différence la plus profonde entre l'épître de Jacques et le paulinisme en un sens très large (de l'épître aux Romains à la conception deutéro-paulinienne, puis ecclésiastique en général, catholique et orthodoxe, du christianisme comme "mystère") -- l'opposition plus visible, sur la "foi" et les "oeuvres", n'en est qu'un épiphénomène. SOIT une "éthique de la responsabilité" qui ne laisse à son "sujet" aucune échappatoire possible par des "explications" de son comportement (Dieu ou diable tentateur, péché ou chair orientant forcément vers le mal -- on pourrait traduire en langage classique ou moderne fatalité, nécessité, hérédité, inconscient ou société -- foi, amour, esprit ou grâce portant irrésistiblement au bien); SOIT un "mystère" (mustèrion, mysterium ou sacramentum), une initiation plus ou moins rituelle qui ferait (mystérieusement) passer d'un type d'influence ou de détermination à un autre (du diable à Dieu, du monde à l'Eglise, de la chair à l'esprit, de la mort à la vie, des ténèbres à la lumière), le "sujet" étant de part en part sujet au sens d'assujetti, intégralement soumis à une puissance supérieure, l'une puis l'autre, après comme avant. C'est aussi la réplique d'une "pratique" à une "théorie" perçue comme paralysante (à l'instar des controverses éléatiques de la tradition philosophique: à la théorie tautologique de l'être absolu et immuable qui rendrait tout mouvement, changement ou événement impossibles, on répondrait en marchant -- et ce faisant on n'y répondrait pourtant pas, justement pas sur le plan théorique). Vaste question qui ne cesse de se re-poser sous d'autres formes (Pélage et Augustin, Erasme et Luther, etc.), les deux côtés du débat ne manquant jamais d'intérêt, même si le débat est à chaque fois un dialogue de sourds. Entre une pensée invivable et une vie impensable, y a-t-il seulement un choix ? -- ce serait toujours, ironiquement, la même question.
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeLun 11 Oct 2021, 14:45

L’inefficacité de la prière est dénoncée lorsque Jc s’en prend à ceux qui cherchent à instrumentaliser l'aide divine pour le mettre au service d’une vie déréglée :

"Si vous demandez, vous ne recevez pas, parce que vous demandez mal, afin de pouvoir dépenser pour vos plaisirs" (Jc 4,3).
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeLun 11 Oct 2021, 15:35

Sur la prière, cf. 1,6ss (la "sagesse" demandée revient en 3,13ss, et son défaut -- sagesse non pas d'en haut mais terrestre, animale, démoniaque, génératrice de conflits -- renvoie au défaut de demande, non-demande ou demande viciée par le "désir", au chap. 4; cf. 1,14s) et 5,13ss.

En rapport avec la fin de mes deux posts précédents (j'y insiste !), la prière constitue un trait d'union ou un pont remarquable entre les deux "logiques" opposées -- "logiques" ou "théories", même s'il s'agit plutôt dans le cas de "Jacques" d'une théorie de la pratique et dans celui de "Paul" (etc.) d'une pratique de la théorie: justement parce que, comme on l'a souvent remarqué depuis Aristote, elle (la prière) échappe à toute "logique" (ou à toute "théorie"). Que chacun soit considéré comme intégralement responsable de sa volonté et de ses actes, ou au contraire comme intégralement déterminé dans un sens ou dans l'autre (la chair, le péché, le diable, le mal, OU l'esprit, la foi, la grâce, etc.), la prière n'a aucun sens. Mais de fait tout le monde prie, du moins cela peut arriver à tout le monde, au moraliste volontariste comme au fataliste ou au déterministe, même à l'athée s'il n'y prend pas garde...

Sans doute ne prie-t-on pas de la même manière à partir de l'une ou l'autre "logique": chez "Jacques" ce sera pour affermir sa volonté ou sa résolution, en tranchant (dans) son doute-hésitation et sa duplicité (dipsukhia, 1,7s), mais ça n'en débouchera pas moins sur la contemplation (theôria) d'un Dieu-lumière très proche du johannisme (comparer Jacques 1,17 et 1 Jean 1,5); chez "Paul" ce sera pour se laisser imprégner et transformer par le "mystère" du Christ, en vue de conséquences "pratiques" au moins espérées (l'amour dont toute "pratique" ou "éthique" est censée découler). Le même pont s'emprunte dans les deux sens, d'une rive à l'autre, sans toutefois les rapprocher.
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeMar 12 Oct 2021, 10:55

LA DOUBLE EXPLICATION ISIDORIENNE DE LA FORMULE ὁ κόσμος τῆς ἀδικίας

Dans sa volumineuse correspondance, Isidore de Péluse a consacré à la formule de Jc 3,6 la Lettre 1298 qui, à elle seule et malgré sa brièveté, est un témoignage de la pénétration exégétique de son auteur.

Le passage qui te préoccupe – « La langue est un feu, le cosmos du mal » – donne lieu, selon moi, à une double interprétation, l’une plus vraisemblable, l’autre plus fine et plus subtile.

(L’expression se justifie) d’abord tout à fait parce que (la langue) agile et très légère a une grande facilité à dire beaucoup de mal. C’est ainsi qu’elle accuse, médit, se parjure, ment, fait de faux témoignages, précipite injustement dans les flammes bien des gens, les jette sur une épée ou dans la mer. D’autre part, l’Écriture a coutume d’appeler la multitude ‘monde’ (κόσμος) : « Le monde, c’est-à-dire la multitude, dit-elle, ne l’a pas connu » (Jn 1,10). Selon elle, donc, la langue est ou
bien un feu qui embrase dans le mal une multitude, ou bien une multitude qui est le réceptacle d’un feu mauvais.

D’un autre côté, comme beaucoup se font les complices du vice et célèbrent le mal, – ils sont très habiles à faire de la rhétorique à propos d’actions mauvaises et illégales, et ils ne sont pas en peine pour faire de beaux discours – comme ils ne voient pas qu’ils se condamnent eux-mêmes et prouvent par de tels discours qu’ils ont choisi la pente du mal, c’est peut-être pour les dénoncer que l’Écriture a dit : « La langue est un feu, la parure du mal », comme si elle disait que le flambeau du
beau langage, quand il est la parure des grands coupables, semble être un ornement du mal. On doit donc se servir de cette compétence non pour parer le vice, mais pour célébrer la vertu qui, même sans discours, a suffisamment d’éclat.

Isidore commence donc par annoncer deux lignes de sens et à porter sur chacune une appréciation globale : la première est présentée comme « plus vraisemblable », la seconde, comme « plus fine et plus subtile » (τὴν μέν πιθανωτέραν, τὴν δὲ δεινοτέραν καὶ πικροτέραν ἑρμηνείαν). Il est remarquable que l’exposé d’Isidore
soupèse soigneusement, à partir d’une fine analyse philologique, les possibilités de compréhension de Jc 3,6 et, tout en avouant une préférence, les maintienne en suspens. Comme si l’interprétation du texte de Jc lui paraissait finalement indécidable. https://www.persee.fr/doc/rhpr_0035-2403_2012_num_92_3_1702
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeMar 12 Oct 2021, 12:10

Excellente étude -- qui accessoirement me rassurerait plutôt sur la qualité générale de la NBS, en dépit du manque de temps et de documentation qui a pesé sur sa réalisation (aucune chance d'aller chercher Isidore de Péluse !): ce sont habituellement, quoique pas très souvent, des regrets qui m'y ramènent, de telle traduction ou annotation qui aurait pu être meilleure, mais ici du moins l'ensemble supporte assez bien l'analyse détaillée.

Là encore, comme pour "épreuve et tentation" (voir supra 8.10.2021), on retrouve l'éternel problème de la "polysémie", mais dans un sens plus profond, comme problème d'exégèse et non plus seulement de traduction: ce n'est pas uniquement par rapport à une autre langue (le français en l'occurrence) qu'apparaissent deux "sens" (= traductions) possibles, mais dans l'entente même du grec: on pense en effet différemment "monde" et "parure" avec kosmos, ou "cours" et "roue" avec trokhos, alors que rien n'indique qu'on pense deux choses différentes avec peirasmos, tant qu'on n'a pas à le traduire dans une langue qui distingue "épreuve" et "tentation". Par conséquent il faut bien envisager dans le texte même un jeu possible, jamais certain, sur les différents sens d'un même mot (polysémie au sens strict, tendant vers l'homonymie, deux acceptions d'un même mot comme deux mots de forme identique): monde et/ou parure de l'injustice, cours et/ou roue du devenir-existence. L'imagerie du texte bénéficie de ce flottement, dans la mesure où on l'entend (ce qui dans une autre langue passe nécessairement par le jeu de la traduction et des notes, si l'on ne s'autorise pas une paraphrase maximaliste, agrégeant les différents sens possibles, façon Kuen première mouture -- celui de Parole vivante et non de la Bible du Semeur, qui a perdu les avantages de la première en même temps que ses inconvénients).

On notera au passage l'interprétation augustinienne qui, sans surprise, ramène l'épître de Jacques dans le giron paulinien (fatalité du "péché"), à l'encontre de l'intention obvie de l'auteur: les effets désastreux de la langue, y compris dans l'"enseignement" ou "doctrine" survalorisés par le christianisme paulinien (post-paulinien, ecclésiastique), ne sont pas des raisons de désespérer, ni d'en minimiser l'importance, mais bien de parler moins -- en particulier de "doctrine", où la discussion conduit inévitablement à des anathèmes réciproques -- à défaut de pouvoir se taire tout à fait (ce qu'évidemment "Jacques" ne fait pas non plus, surtout quand il conteste la doctrine paulinienne).

Là encore il y aurait une certaine proximité avec 1 Jean, jusque dans le paradoxe: vous n'avez besoin de personne pour vous instruire, dit l'instructeur...
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeMar 12 Oct 2021, 14:36

Citation :
Sans doute ne prie-t-on pas de la même manière à partir de l'une ou l'autre "logique": chez "Jacques" ce sera pour affermir sa volonté ou sa résolution, en tranchant (dans) son doute-hésitation et sa duplicité (dipsukhia, 1,7s), mais ça n'en débouchera pas moins sur la contemplation (theôria) d'un Dieu-lumière très proche du johannisme (comparer Jacques 1,17 et 1 Jean 1,5); chez "Paul" ce sera pour se laisser imprégner et transformer par le "mystère" du Christ, en vue de conséquences "pratiques" au moins espérées (l'amour dont toute "pratique" ou "éthique" est censée découler). Le même pont s'emprunte dans les deux sens, d'une rive à l'autre, sans toutefois les rapprocher.

"tout don excellent, tout présent parfait, vient d'en haut ; il descend du Père des lumières, chez qui il n'y a ni changement ni éclipse. Parce qu'il en a décidé ainsi, il nous a fait naître par une parole de vérité, pour que nous soyons en quelque sorte les prémices de ses créatures" ( Jac 1,17-18).

En fait, à travers le mythe de Psyché, les néoplatoniciens retrouvent les données anciennes de l’orphisme notamment, dont la doctrine, mise en œuvre dans les célébrations mystériques d’Éleusis par exemple, a pour but de faire réaliser à l’initié tout un cheminement de l’âme. Déchue des espaces célestes, elle passe par l’espace intermédiaire des astres parmi lesquels les planètes ne permettent de mesurer qu’une fraction parfois déclinante du rayonnement universel, alors que le soleil fait briller toute la puissance du démiurge. L’Épître de Jacques recommande pour sa part une spiritualité sans « éclipse ni déclinaison » qui se tourne vers Dieu en tant que Père des lumières, et qui ne s’inspire pas des mouvements « d’astres errants » (1,16-17). Ensuite, chez les orphiques l’âme s’incarne, mais elle cherche toujours à échapper au cycle des générations corporelles et à rejoindre le pur éblouissement des origines. L’initiation éleusinienne enseigne aux adeptes le chemin du retour vers cet univers incorruptible, par une élévation progressive et une ultime contemplation mystique au terme de laquelle l’âme s’arrime solidement au divin. Plotin souligne la difficulté de cet exercice qui demande une concentration et une application intenses, de manière à conserver le souvenir de cette vision de l’intelligible. Il faut parvenir à se maintenir, à demeurer dans le champ révélé par la contemplation. L’obstacle vient de l’enveloppe corporelle qui ne capte pas le rayonnement émis par l’essence divine que seule l’âme, qui est de même substance, peut recevoir. De même, le corps n’enregistre pas le souvenir des visions immatérielles. Parvenue à sa perfection, l’âme n’agit d’ailleurs pas en fonction d’une mémoire, mais d’une énergie propre (ἐνέργεια). 

https://www.persee.fr/docAsPDF/rhpr_0035-2403_2010_num_90_3_1495.pdf
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeMar 12 Oct 2021, 15:34

Sur cet article, voir supra 30.9.2021. Comme je n'ai toujours pas retrouvé les autres endroits où nous en avions parlé auparavant, je rappelle une objection élémentaire que j'ai certainement déjà formulée: le "néoplatonisme" par convention, Plotin en tout cas, datent du IIIe siècle après J.-C., ils sont donc postérieurs de plus d'un siècle à l'épître de Jacques et peuvent difficilement servir à l'"expliquer", du moins directement. Le "néoplatonisme" est toutefois précédé, dans la nomenclature usuelle, d'un "médio-platonisme" plus diffus: Philon d'Alexandrie serait l'un de ses principaux représentants au début du Ier siècle, et il offrirait en outre l'avantage d'une communauté de culture philosophique et littéraire (notamment par la Septante), sinon tout à fait religieuse (lui ne connaît pas de "christianisme"), avec l'épître de Jacques. D'autre part, compte tenu du brassage général des philosophies (platonicienne et stoïcienne surtout) à cette époque, il n'est guère étonnant que nous retrouvions des "idées" similaires dans des milieux fort différents (religions, philosophies, judaïsmes, christianismes, "mystères" ou "gnoses"); ces idées communes rendent d'ailleurs les différents milieux moins différents, plus poreux ou perméables les uns aux autres qu'on pourrait le croire avec une vision trop schématique ou taxonomique de l'histoire (des idées, des religions ou des philosophies).

Quoi qu'il en soit, il est clair (!) que le Dieu-tout-lumière-et-tout-bon (théo-étho-axio-photo-logie) est la référence centrale de la quasi-totalité des "systèmes", qui ne se différencient que par leur façon d'expliquer le "mal", les ténèbres, l'ignorance, la méchanceté ou la bêtise: dualisme asymétrique de principes inégalement transcendants (diable, péché, chair, matière, création d'un démiurge inférieur qui ne sont toutefois jamais sur le même plan que "Dieu"), et/ou responsabilité individuelle et morale (on aura compris que c'est la préférence de "Jacques"). Mais il est tout à fait juste de dire que même chez Jacques (ou Matthieu), la responsabilité ne s'oppose pas à une relation essentielle au principe divin ou archi-divin, qui reste la seule source de "bien" et de "lumière" et l'unique moyen d'y accéder (d'où l'importance de la prière, commune à toutes les tendances, par laquelle on se rapporte à celui qui est l'origine et la fin de tout, quelles que soient les théories intermédiaires).
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeMar 12 Oct 2021, 16:25

"Qui est sage et intelligent parmi vous ? Que celui-là montre ses œuvres par sa belle conduite, avec douceur et sagesse. Mais si vous avez au cœur une passion jalouse et amère ou une ambition personnelle, n'en soyez pas fiers et ne mentez pas contre la vérité. Cette sagesse-là n'est pas celle qui descend d'en haut : elle est terrestre, animale, démoniaque. En effet, là où il y a passion jalouse et ambition personnelle, il y a du désordre et toutes sortes de pratiques mauvaises. La sagesse d'en haut, elle, est d'abord pure, ensuite pacifique, conciliante, raisonnable, pleine de compassion et de bons fruits, sans parti pris, sans hypocrisie. Or le fruit de la justice est semé dans la paix par les artisans de paix" (3,13-18).


La sagesse d'en haut est-elle assimilable au fruit de l’Esprit de Ga 5 ?
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeMar 12 Oct 2021, 17:25

Ça se ressemble en effet, notamment par le(s) "fruit(s)" (karpos pluriel v. 17, singulier v. 18; cf. 5,7.18; voir aussi, outre Galates 5,22, Romains 1,13; 6,21s; 15,28), et ça n'a rien d'un hasard: l'auteur est un excellent lecteur, quoique critique, d'une partie au moins du corpus paulinien (de l'épître aux Romains à coup sûr, de l'épître aux Galates probablement). Mais la différence, davantage encore que sur la description du "fruit" (qui vise en particulier chez Jacques les défauts des enseignants doctrinaires: "passion jalouse" = "zèle", ambition, rivalité, vs. paix, tolérance, justice), porte sur ce qui le produit, "sagesse" OU "esprit". Par rapport à l'"esprit" qui est dans le paulinisme la puissance divine, quasi magique ou mécanique, du "Christ" ou du "mystère" (et qui ne joue en revanche quasiment aucun rôle "théologique" chez Jacques, cf. 2,26 dans une simple comparaison "anthropologique" et 4,5 dans la citation non identifiée dont nous avons parlé plus haut), la "sagesse" se caractérise comme une qualité pratique qui s'acquiert consciemment, intelligemment, patiemment, non par l'opération d'un "mystère", et qui n'agit(e) pas un "sujet" malgré lui...

Je reviens sur le point précédent: sans doute tous les "christianismes" impliquent-ils une "relation essentielle" (= de l'ordre de l'"être" ou de l'"essence") à "Dieu", mais ils le font avec toute sorte de nuances: dans le johannisme et la plupart des "gnoses" ultérieures, comme on l'a souvent relevé, la relation est immédiate et absolue, les "élus" ("spirituels", "pneumatiques") sont enfants ou fils de Dieu, nés ou engendrés du Père, d'en haut et pas de ce monde, etc.; la révélation consiste seulement à faire apparaître cette "essence" ou "nature" qu'ils ont déjà même quand ils l'ignorent; dans le paulinisme aussi la relation est essentielle et forte, mais médiatisée "en Christ" ou "par l'esprit", parfois relativisée par la notion d'"adoption" (on devient fils de Dieu plutôt qu'on ne l'est), en tout cas (explicitement à partir des deutéro-pauliniennes, Colossiens-Ephésiens) le fait du "mystère". Jacques 1,18 y met un (ou deux) "bémol(s)" supplémentaires: 1) "nous" sommes "enfantés" (apokuô, verbe qui suggère plutôt la fonction féminine et maternelle de l'accouchement, bien que le sujet soit formellement le "Père des lumières": cf. le v. 15 où c'est le péché, féminin en grec, qui "enfante" la mort) par une parole de vérité (logô alètheia, datif sans article, qui renvoie plutôt à une parole intelligible, donc à quelque chose de plus proche de la "sagesse" au sens ordinaire que d'un logos christologique, personnifié; cf. 1 Pierre 1,22ss qui combine sans doute à sa façon "Paul" et "Jacques"); 2) "nous" ne sommes que "des prémices", mot-à-mot "quelque prémice" (aparkhèn tina), formule ostensiblement indéfinie, d'où les traductions "en quelque sorte" ou "pour ainsi dire" (= "façon de parler") pour suggérer une réserve. Ces deux tournures relativisent considérablement la notion de "relation essentielle", car en fait la "relation" dépend de ce que nous apprenons, comprenons et pratiquons (soit la "sagesse", ou plus loin la "loi de liberté"); cela conviendrait aussi bien au platonisme qu'au stoïcisme (la relation au divin relève de l'intellection des "idées" ou d'un logos "rationnel", liée en tout cas à la pratique de "vertus" morales, aussi chez Philon); mais c'est également proche de l'antipaulinisme matthéen, qui est "pratique" sans être, du moins en apparence, "philosophique" pour un sou: on est "fils de Dieu" si, seulement si et dans la mesure où on se comporte comme "Dieu" (Matthieu 5,45ss).
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeMer 13 Oct 2021, 12:41

"Mes frères, si quelqu'un parmi vous s'est égaré loin de la vérité et qu'un autre l'y ramène, qu'il sache que celui qui ramène un pécheur de la voie où il s'était égaré sauvera sa vie de la mort et couvrira une multitude de péchés" (5,19-20).


Commentaire biblique de Jacques 5.20

B porte : sachez, au lieu de : qu’il sache ; on a corrigé le texte pour le conformer à l’apostrophe : mes frères.
Son âme (Codex Sinaiticus A, versions) est la leçon la plus autorisée. Le texte reçu porte : une âme, B : une âme de sa mort.
S’égarer loin de la vérité, ce n’est pas commettre une faute isolée, mais se mettre par toute sa conduite en opposition avec « la parole de la vérité » (Jacques 1.18).

Ramener une âme ainsi égarée, c’est la sauver de la mort éternelle et couvrir ses péchés, qui alors lui sont pardonnés, quelques nombreux qu’ils puissent être (comparer Proverbes 10.12 ; 1 Pierre 4.Cool. C’est bien là le motif le plus puissant pour animer le zèle d’un disciple du Sauveur.

Il nous faut donc bien donner garde que les âmes rachetées par Jésus-Christ et dont Dieu met en quelque sorte le salut entre nos mains, ne périssent par notre nonchalance. Non pas que nous leur conférions le salut, mais pour ce que par notre ministère Dieu délivre et sauve ce qui autrement semblait être prochain de perdition.
— Calvin

Plusieurs interprètes protestants modernes pensent que c’est celui qui aura ramené le pécheur qui sauvera sa propre âme et couvrira la multitude des péchés qu’il a lui-même commis antérieurement. L’idée ainsi exprimée ne serait pas sans analogie avec Jacques 2.13. Elle éviterait une certaine tautologie : celui qui ramènera un homme de son égarement sauvera l’âme de cet homme.

On est surpris de voir une telle affirmation introduite par les mots : qu’il sache… Il le sait bien et c’est pour cela qu’il s’est efforcé de le ramener !

Cependant cette pensée, que le chrétien peut considérer une conversion dont il est l’instrument comme le gage et le moyen de son propre salut, est si peu conforme à l’enseignement de tout le Nouveau Testament qu’on hésite à l’attribuer à l’auteur. Proverbes 10.12, qui est probablement dans sa pensée, montre qu’il s’agit des péchés des autres.  https://www.levangile.com/Bible-Annotee-Jacques-5-Note-20.htm
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeMer 13 Oct 2021, 13:41

Cf. supra 8.10.2021.

Sur le premier point de critique textuelle (qui n'était pas inclus dans ta citation précédente de la même note), les éditions récentes (p. ex. Nestle-Aland 28) retiennent la troisième personne du singulier (ginôsketô, qu'il sache ou connaisse) plutôt que la deuxième du pluriel qui entraînerait en outre une hésitation sur le mode, impératif ou indicatif (ginôskete, sachez-connaissez ou vous savez-connaissez).

Sans surprise, l'épître de Jacques embarrasse particulièrement une lecture "protestante", surtout calviniste (à un moindre degré une lecture augustinienne, cf. supra 12.10.2021), et pas seulement sur la question la plus visible, celle de la "foi" et des "oeuvres": elle est en tension avec la logique du "mystère" en général, qu'on le comprenne de façon plus ou moins "sacramentelle", mais elle l'est davantage encore avec une interprétation "élective" et "prédestinatienne" dudit "mystère" (les "élus" comme les "réprouvés" le sont par le décret de Dieu de toute éternité, avant la fondation du monde): dans cette perspective en effet et au sens strict, personne ne "sauve" personne (jusque-là l'islam en dit autant), pas même soi-même. On peut certes récupérer formellement tous les énoncés au prix d'une acrobatie intellectuelle (Dieu "sauve" ceux qu'il a décidé de toute éternité de "sauver", mais en prédestinant aussi les moyens de ce "salut", p. ex. le secours qu'un "élu" apportera à un autre), mais l'exhortation y perd quand même l'essentiel de sa force, qui ne "fonctionne" vraiment qu'en dehors de toute idée de "prédestination".
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeMer 13 Oct 2021, 16:06

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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeMer 13 Oct 2021, 16:56

Sans revenir sur le détail de ce fil, je suis tenté par une remarque générale et anachronique, qui rejoindrait ce que j'avais écrit ici il y a dix-huit ans (je m'aperçois d'ailleurs que la conclusion a été accidentellement tronquée, je ne dispose ni du fichier ni du texte imprimé pour la rétablir, mais on peut l'imaginer sans trop de difficulté): la "religion", le "christianisme", l'"Eglise" ou "synagogue" idéale ou virtuelle que "Jacques" oppose à celle, réelle et historique, qui est en passe de devenir l'institution universelle, catholique et orthodoxe, du "mystère du salut", c'est une communauté au sens le plus "communautariste" du terme, une "micro-société" qui se distinguerait surtout du "monde" par d'autres normes, valeurs et critères sociaux et économiques: une "contre-société" et une "contre-culture", un "laboratoire social" ou une "société alternative" pour reprendre des expressions déjà passées de mode. Aussi loin cependant de la "religion" que de la "secte" au sens habituel de ces mots, pour autant qu'elles sont toutes deux dogmatiques et autoritaires, qu'elles ont pour seul vis-à-vis l'"individu" en quête de "spiritualité" ou de "salut" individuels, et qu'autant elles se distinguent de la société ambiante par leurs croyances et leurs rites, autant elles se conforment à son ordre économique et social.
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeJeu 14 Oct 2021, 15:06

LA PRIÈRE DE DEMANDE ET LA REPRÉSENTATION DU DIEU QUI DONNE «SIMPLEMENT » (JC 1, 5-Cool

Cette représentation recouvre un paradoxe, puisqu’elle insiste d’une part sur la constance divine qui garantit la valeur des dons d’« en haut » et que, d’autre part, elle met en évidence la capacité créatrice de Dieu qui lui permet à tout moment l’initiative du don ou de l’exaucement. Parmi ces initiatives, il faut sans doute compter l’« enfantement »  d’un « nous »(Jc 1, 18) qui englobe le rédacteur de Jc et ses lecteurs. La pente de l’argumentation, initiée en Jc 1, 16 par un avertissement bien typé, permet en effet de relier la perfection des dons de Dieu (Jc 1, 17) à son initiative en faveur de ceux qu’il a choisis comme « prémices »de ses créatures (Jc 1, 18). Indépendamment de son interprétation, ce passage situe les dons de Dieu dans un cadre plus vaste au sein duquel peuvent s’inscrire aussi les prières de demande circonstanciées ou individuelles. En définitive se dessinent trois traits saillants du portrait d’un Dieu auquel s’adresse la prière de demande :

- il est présenté comme constant et simple (au sens d’intègre), donc fiable, en cela il s’oppose aux variations et à la duplicité humaines ;

- Dieu est à l’origine de tout don de qualité et réciproquement tout cadeau parfait provient d’« en haut ». Il n’a par contre aucune responsabilité dans les éléments négatifs que sont la tentation (l’épreuve)ou la convoitise, le péché ou la mort. Un certain dualisme transparaît dans ces affirmations ;

- il semble que soient distingués deux types de dons de Dieu. D’une part, un don originel à l’initiative de Dieu inscrit dans une histoire une fois pour toutes. D’autre part, des dons ponctuels qui répondent à des demandes humaines circonstancielles.

https://www.academia.edu/38473510/La_pri%C3%A8re_de_demande_et_le_d%C3%A9sir_de_Dieu_dans_l%C3%A9p%C3%AEtre_de_Jacques


Dernière édition par free le Ven 15 Oct 2021, 12:52, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: la lettre de Jacques   la lettre de Jacques - Page 2 Icon_minitimeJeu 14 Oct 2021, 16:05

Excellent article, qui mérite d'être lu intégralement et attentivement: il touche à plusieurs des passages que nous avons discutés depuis le début de ce fil et apporte des compléments fort utiles.

En effet, l'idée (par excellence) de la simplicité de "Dieu", autrement dit de son unité essentielle, qui avec ou sans "dieu" domine toute la philosophie grecque de Platon et d'Aristote à Plotin (Bien ou Un au-delà de l'être, de l'essence ou de l'étantité, en passant par l'"acte pur" et le "moteur non mû", principes toujours uniques et simples), s'oppose à la "duplicité de l'âme" (dipsukhos, dipsukhia) autant qu'au "diable" (diabolos) -- mais aussi, par la même occasion, au "monothéisme" initial d'un deutéro-Isaïe subsumant les deux "côtés" du dualisme perse (lumière et ténèbres, bien et mal, Isaïe 45,7) d'ailleurs mal compris, de façon trop symétrique (entre Ahura-Mazda et Ahriman, le dieu-lumière et le démon-ténèbres du zoroastrisme, il n'y avait ni égalité ni indifférence). Le "Dieu-un-bon" reste en tout cas "transcendant", en-deçà, au-delà, au-dessus ou au-dessous de toute différence et de toute complication; il demeure par conséquent la référence fondamentale et ultime de toute prière, méditation et contemplation (là encore, le johannisme n'est pas loin, mais à vrai dire quasiment personne ne l'est).

Je pense toutefois (toujours en raison de la simplicité-unité fondamentale) qu'il n'y a pas lieu de trop distinguer entre don "initial" et "subséquent", le second par exemple comme "réponse" à la prière (comme entre "création initiale et continue"): l'idée même de monothéisme, qui tend vers le panthéisme, suppose que ce soit le même, et que ce même l'emporte sur toute altérité ou différence. D'autre part, en rapport avec la fin de l'article, il faudrait confronter l'idée centrale et centralisatrice (là encore, aussi bien chez "Jacques" que chez "Paul" ou "Jean", chez les platoniciens que chez les stoïciens) de la soumission du "désir" particulier au "désir" général ou universel, "désir de Dieu" dans toute l'ambiguïté du génitif (le désir qu'on aurait de Dieu, le désir que Dieu aurait de nous), aux réflexions lacaniennes sur le "désir de l'Autre" (avec la même ambiguïté), et à toutes les critiques qui en ont été faites depuis (Derrida et Deleuze notamment).
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