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Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: aurore Mar 03 Avr 2018, 16:55 | |
| Juste un lien pour ta dernière phrase... |
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| Sujet: Re: aurore Mar 11 Déc 2018, 13:43 | |
| Une douce régression
Du fait de la nativité, Noël est pour beaucoup la grande fête de l’enfance. Derrière l’enfant fêté, qui se retrouve parfois symboliquement associé à l’enfant Jésus de la crèche, c’est l’enfance que chacun de nous peut retrouver en lui-même et rappeler à ses bons souvenirs, qui peut être fêtée. Comme le remarque Laurent Gagnebin dans son ouvrage Pour un christianisme en fêtes (Église réformée de la Bastille, 1996), Noël fonctionne comme un rite de passage inversé sur le plan temporel. On ne va plus de l’enfance vers l’adulte, mais de l’adulte vers l’enfance. Cette dimension légèrement régressive de la fête est sans doute l’une des raisons de son succès contemporain. Ce passage vers l’enfance allège en effet, le temps d’une fête, le poids que représentent pour beaucoup les obligations sociales à la responsabilité, à la maîtrise, au sérieux. Autant d’exigences que le réveil de l’enfant qui sommeille en chacun met délicieusement entre parenthèses…
La féerie d’un instant
Cet enchantement est d’autant plus fort qu’il recrée, l’espace d’un temps très bref, un monde qui apparaît lui-même comme un monde enchanté ou, du moins, pacifié et plus harmonieux. Ne parle-t-on pas à cette occasion de la « trêve des confiseurs » ? Un film récent, Joyeux Noël, rappelait un épisode émouvant de la guerre 14-18 : des soldats français, anglais et allemands, sortant de leurs tranchées respectives pour fêter Noël ensemble ; miracle de paix et de vie tout aussi majestueux que dérisoire. Cette pacification est peut-être d’autant plus démonstrative et exubérante qu’on la sait fragile ou même fictive. La fête de Noël fonctionne socialement comme un masque carnavalesque qui transfigure le monde et ses champs d’horreur en théâtre de joie. Toute fictive qu’elle soit, la mise en scène de ce bonheur, à l’instar du carnaval, entend faire croire que l’humanité est capable de générosité, d’amour partagé et de paix. Noël ne veut-il pas nous faire croire que le Père Noël existe ?
La grâce du don
La fête de Noël, remarque encore Gérard Delteil, peut aussi être interprétée comme une véritable mise en scène du don du ciel. Le cadeau, et plus généralement ce qu’il signifie : l’attention, la bienveillance, la générosité, se trouve ici au cœur de la fête. Ce cadeau, parce qu’il est offert systématiquement, à date commandée, de manière non conditionnée, apparaît toujours comme étant un peu plus que le cadeau lui-même. Il fait signe d’une bienveillance qui nous dépasse, d’une générosité qui nous comble indépendamment de nous, tel un écho à la notion même de grâce. C’est encore plus probant lorsque le cadeau est anonyme, avec la fameuse croyance au Père Noël. Comme l’écrit Delteil, celui-ci apparaît comme le « donateur légendaire, qui préserve cette origine céleste du cadeau et lui confère une apparence féerique ». Isambert, ajoute que ce cadeau est le signe d’une « merveilleuse abondance gratuite exceptionnellement offerte ».
Retenir le temps qui passe Noël, avec le cortège de souvenirs qu’il porte en lui, sert bien souvent de repère dans le déroulement de notre propre histoire. Que faisions-nous à Noël dernier ? Comment le passions-nous, enfant ? Et comment oublier tous ces proches, aujourd’hui disparus, que nous aimions retrouver alors ? La fête de Noël s’apparente ici à une fête d’anniversaire, par sa capacité à retenir le temps qui passe. À quelques jours de l’achèvement de l’année civile, c’est bien la continuité de la vie familiale et sociale qui se trouve ici réaffirmée. Mais c’est aussi, à travers le don, la dépense, l’exubérance, une manière de s’affirmer, de se montrer, de se donner, et de conjurer par là même une certaine angoisse liée à la fuite du temps, à l’inconnu de l’avenir. Fêter Noël, donner raison à son succès, ne doit pas faire oublier le malaise profond que la fête peut aussi engendrer. La débauche de consommation, le caractère absurde des fêtes obligatoires, l’effroyable sentiment de solitude que ces festivités sociales peuvent produire, sont autant de trouble-fêtes qui gâchent l’événement. Il n’en demeure pas moins qu’à travers la nature tout ambiguë et paradoxale de la fête, Noël reste une invitation à croire en la possibilité d’un enchantement et en la promesse d’avenir et de nouveauté que porte en elle toute nouvelle naissance. https://www.evangile-et-liberte.net/elements/numeros/204/article2.html |
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| Sujet: Re: aurore Mar 11 Déc 2018, 15:05 | |
| Je ne pensais pas que mon lien en forme de commentaire -- à moins que ce ne soit le contraire -- entraînerait la disparition du fil d'origine -- donc, du commentaire.
De mémoire: le cycle, c'est aussi le retour du sens au signe.
Soit: le contraire d'une exégèse et d'une herméneutique, d'une explication et d'une interprétation: régression du signifié vers le signifiant, du clair vers l'obscur, de l'univoque vers l'équi- ou le plurivoque, de la doctrine "révélée" vers le rite "païen", du logos comme énoncé vers le muthos, mythe mixte de dire et de taire. Moment et mouvement nocturne nécessaire à toute "aurore", à toute "renaissance"; ascétique à sa manière, comme l'"avent" ou le "carême". |
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| Sujet: Re: aurore Mar 11 Déc 2018, 15:54 | |
| - Citation :
- Je ne pensais pas que mon lien en forme de commentaire -- à moins que ce ne soit le contraire -- entraînerait la disparition du fil d'origine -- donc, du commentaire.
Je trouve plus pertinent de rouvrir ce fil en ce moment, à la veille de Noël. |
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| Sujet: Re: aurore Mar 11 Déc 2018, 16:10 | |
| Ce n'était pas un reproche !
J'en profite pour préciser que j'ai beaucoup apprécié l'"esprit" de ton article, qui tranche agréablement avec les habituels sermons anti-Noël émanant des milieux les plus divers (libéraux, orthodoxes, fondamentalistes, sectaires) et qui, ironie du sort, n'échappent pas eux-mêmes à la répétition rituelle, année après année... :) |
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| Sujet: Re: aurore Mar 11 Déc 2018, 17:13 | |
| - Narkissos a écrit:
- Ce n'était pas un reproche !
J'en profite pour préciser que j'ai beaucoup apprécié l'"esprit" de ton article, qui tranche agréablement avec les habituels sermons anti-Noël émanant des milieux les plus divers (libéraux, orthodoxes, fondamentalistes, sectaires) et qui, ironie du sort, n'échappent pas eux-mêmes à la répétition rituelle, année après année... Je ne l'ai pas pris comme un reproche mais j'apprécie énormément ce fil et tu m'y a fais pensé, tant mieux. Effectivement j'ai noté que la Watch (il me semble d'ailleurs qu'elle a renoncé à son article habituel du mois de décembre sur noël) n'est pas la seule a dénigrer la célébration de noël.L’annonce d’une grande joie D’un point de vue théologique, Noël est donc le commencement du sacrement pascal, qui comporte dans la profession de foi l’Incarnation du Fils de Dieu. Noël est également le commencement de la rédemption, parce que Dieu assume dans ce mystère la nature humaine.Une autre caractéristique est que dans le Christ glorieux est également présent le mystère salvifique de sa naissance. Et l’« aujourd’hui » de la naissance du Christ devient présence éternelle du Verbe/Parole de Dieu (J. Castellano, 1989).Concernant la spiritualité de Noël, on peut distinguer trois caractéristiques : c’est un mystère de lumière – la victoire sur les ténèbres ; c’est une restauration cosmique – le début de la normalisation de la communion avec Dieu, troublée par le péché ; c’est l’échange réalisé par la Rédemption – en devenant l’un d’entre nous Dieu nous permet de devenir héritiers de la vie éternelle.Noël est encore annonce de paix, avec la manifestation du « Prince de la paix » (selon le prophète Isaïe). La naissance du Seigneur représente donc l’annonce d’une grande joie et la fête de la gloire de Dieu. Aux hommes d’aujourd’hui, Noël continue à apparaître comme une fête universelle. « En effet, même ceux qui ne se professent pas croyants peuvent percevoir dans cet événement chrétien annuel quelque chose d’extraordinaire et de transcendant, quelque chose d’intime qui parle au cœur ».https://fr.aleteia.org/2016/12/06/le-vrai-sens-de-noel/ |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: aurore Mar 11 Déc 2018, 20:21 | |
| On retrouve là, en effet, cette "communication générale" dont on parlait récemment à propos de la " prédication" (en particulier luthérienne): il n'y a jamais qu'une seule chose à dire, un seul "évangile" ou "mystère" auquel on accède par n'importe quelle "porte" et qui s'y donne tout entier, une fois pour toutes à chaque fois. Reste que les implications "universelles" de la Nativité sont évidentes dès les récits évangéliques, surtout avec les mages de Matthieu (il faut beaucoup de mauvaise foi aux TdJ pour prendre l'épisode en mauvaise part !); mais aussi chez Luc avec les bergers, les anges, le "peuple" et les "hommes de bonne volonté", quoi qu'il en soit de la traduction de cette dernière formule. Et bien que le Prologue de Jean n'ait formellement aucun rapport avec la naissance de Jésus, l'idée du devenir-chair, à défaut d'in-carnation, s'y associe tout naturellement et sa portée est également universelle (lumière qui éclaire tout homme en venant dans le monde, ambiguïté incluse). Il y a là un rayonnement qui ne s'arrête ni aux limites d'"Israël", ni à celles de l'"Eglise". |
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| Sujet: Re: aurore Mer 12 Déc 2018, 10:39 | |
| Ce qui vaut à Prométhée une place privilégiée dans le coeur des hommes, c'est ce feu qu'il a dérobé à Zeus pour le leur donner, les arrachant ainsi aux ténèbres. Apparemment, sa nature profonde le prédisposait à un tel don. À propos des Titans, Jean-Pierre Vernant écrit ainsi :
"l'élément terreux semble bien se combiner dans leur naissance un élément igné. La terre les produit sous l'action de la chaleur solaire. Leur nom évoque en effet la terre calcinée, cette cendre blanche qui est la chaux vive et que les Grecs désignent du nom de titanos"
Dans le froid des ténèbres et de l'ignorance, ce feu a de multiples vertus : il éclaire, il réchauffe, il permet de cuire les aliments et d'incinérer les morts. À la fois puissant et fragile, il est cette lumière attendue qui, en resplendissant dans l'obscurité, offre à l'homme un secours providentiel. Descendu des cieux dans la main de Prométhée, on le voit briller à nouveau, dans la tradition chrétienne, à travers l'étoile qui éclaire la nuit de la Nativité. Et il reparaît sous de multiples formes dans la dérive païenne qui mélange fête de Noël et fête du solstice. Le Père Noël, déjà, est vêtu de rouge : un beau rouge aux dorures flamboyantes, qui rappelle la couleur du feu dans son rayonnement à la fois lumineux et chaleureux. Quand il descend du ciel, il incarne lui-même la flamme prométhéenne, présentée sous la forme la plus rassurante qui soit : celle d'un gros bonhomme souriant, chargé de cadeaux. Lorsqu'il descend par la cheminée, il s'affirme à nouveau comme l'égal du feu ; son maître, même, puisqu'il ne s'y brûle pas, non plus qu'il ne se salit avec la fumée ou la suie. Double de la foudre de Zeus - dont on sait qu'elle entre aussi par les cheminées, mais pour dévaster les maisons -,il en est la version pacifiée, l'envers bienfaisant dont on espère la venue au lieu de la redouter. https://www.persee.fr/doc/comm_0588-8018_2005_num_78_1_2284 |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: aurore Mer 12 Déc 2018, 13:16 | |
| La mythologie polythéiste a évidemment beaucoup plus de ressources que le monothéisme, même relatif, pour décrire et raconter, complexifier et nuancer, rendre lisible et intelligible le rapport de l'homme au divin. Les médiations monothéistes tombent aussitôt sous une alternative dualiste: ou bien elles sont "bonnes" et ne parviennent pas vraiment à se distinguer de leur "source" (les "anges" ou "fils de Dieu" se confondent avec "Dieu" lui-même, ils ne sont en fin de compte que ses "manifestations"), ou bien elles sont "mauvaises" et s'installent face à lui dans une opposition radicale, mais dépourvue de fondement (ainsi la diabolisation des rôles "prométhéens" de la Genèse, serpent de l'Eden et fils de Dieu du chap. 6). D'une façon ou d'une autre, toutes les médiations s'annulent à mesure qu'elles se posent, le monothéisme "absolu" (façon deutéro-Isaïe) tendant à la fascination hébétée devant l'Unique qui fait tout, le bien et le mal, la lumière et les ténèbres, sans laisser aucune prise, rituelle ou sapientiale, à un quelconque "sujet" de connaissance ou même d'action (en quoi ce monothéisme est inséparable d'un panthéisme et d'un dualisme qui en marquent deux limites opposées).
Autrement dit, chaque fois que la religion a des choses à raconter, à jouer, à célébrer, fût-ce pour dire "la même chose", c'est dans le fond polythéiste et mythologique qu'elle les puise. |
| | | free
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| Sujet: Re: aurore Mer 12 Déc 2018, 16:13 | |
| Tout part, pour Israël, de la conscience aiguë d’une existence vouée, semble-t-il, à l’obscurité de la nuit et aux ténèbres de la mort : « Regardant la terre, on n’y trouvera que détresse et ténèbres, obscurité de l’angoisse et on ne verra plus que la nuit Ésaïe 8, 22. Ou encore Ésaïe 59, 10 : « Nous habitons les…. ». Au point que le croyant qui traverse cette épreuve se demande s’il ne faut pas l’attribuer à Dieu lui-même, à un Dieu qui fait « marcher dans les ténèbres sans lumière » et « habiter dans les ténèbres chez les morts de jadis » (Lm 3, 2 et 6). Cela n’empêche pourtant pas de continuer à avancer, comme si l’obscurité ne devait pas avoir le dernier mot, comme si une parole secrète ne cessait de venir ordonner et éclairer le chemin : « Une lampe sur mes pas ta parole, une lumière sur ma route » (Ps 119, 105). À l’écoute de cette intimation énigmatique, la nuit peut se révéler zébrée de lueurs qui la partagent (Gn 14, 15) et l’exode pascal de l’existence s’éprouver accompagné d’une « nuée obscure » (Ex 13-14) où se signifie et se manifeste la fidélité d’une présence en alliance. La même loi qui commande l’existence guide aussi son cheminement et l’ouvre déjà à l’éventualité et au discernement d’une promesse de libération.
Ésaïe 9, 1, qui se trouve repris en Lc 1, 79 : «Le peuple qui marche dans les ténèbres a vu une grande lumière ; sur ceux qui habitent le pays de l'ombre de mort une lumière a brillé. »
Cette attention toute en discernement serait, selon Emmanuel Levinas, la caractéristique de la véritable intelligence (biblique) : « L’alouette qui salue le soleil, tout le monde peut en faire autant. Tout le monde est capable de saluer l’aurore. Mais distinguer l’aube dans la nuit obscure, la proximité de la lumière avant son éclat, l’intelligence, c’est peut-être cela » (Difficile Liberté, Paris, Albin Michel, 1976, p. 123). https://www.cairn.info/revue-etudes-theologiques-et-religieuses-2012-4-page-421.htm#re23no23 |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: aurore Mer 12 Déc 2018, 17:14 | |
| Il faudrait espacer toutes ces citations (bibliques ou autres) de beaucoup de silence pour avoir une chance d'en entendre quelques-unes... C'est d'ailleurs le grand mérite du calendrier liturgique ou rituel, que d'imposer une distance entre les textes, en les répartissant selon les heures, les jours, les semaines et les saisons; à partir de quoi on peut trouver un sens et un intérêt à les "rapprocher", sans toutefois en abuser (l'anthologie thématique finit vite par donner le tournis, voire la nausée !). Le défaut congénital de la "lumière" (religieuse, théologique, philosophique, morale, spirituelle, intellectuelle, etc.; métonymique en tout cas), c'est d'être aveugle, surtout à la nécessité et au temps de son ou de ses "contraires" ( darkness shining in brightness which brightness could not comprehend, renversement du Prologue de Jean dans l' Ulysses de Joyce, c'est peut-être la citation qui manque !): ceux-ci ne peuvent lui arriver que de l'extérieur; la "surprendre", en effet. A une photo-logique totalitaire, qui n'aurait plus rien à éclairer à force de transparence (cf Apocalypse 21--22), il faut qu'une opacité résiste obstinément pour qu'il y ait quelque chose à voir, ne fût-ce qu'un théâtre d'ombres... |
| | | le chapelier toqué
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| Sujet: Re: aurore Jeu 13 Déc 2018, 20:32 | |
| Je désire rebondir sur le beau texte que Free a partagé mardi 11 décembre. Il m'a émerveillé et enthousiasmé, merci Free. A quoi peut nous avancer de dénoncer les célébrations de la Noël, si l’on n’a pas compris le message sous-jacent ? La joie retrouvée, un instant, que l’on désire, que l’on est prêt à partager avec son prochain, cet illustre inconnu.
Le tragique rappel de la fragilité de la vie et de la violence inutile qui a frappé la ville de Strasbourg m’a interpellé avec sa froideur d’un côté et l’impression d’arrêt momentané de nos activités, que nous reprendrons avec sérieux comme si nous voulions oublier la futilité de la vie qui joue dans un même envol l’éternel retour de notre esprit d’enfant face aux lumières de décembre et plaque au sol des femmes et des hommes jeunes et vieux les tuant, les blessant pour les plus chanceux.
*******
Comment peut-on manquer de tant d’à propos et ne pas comprendre que nous avons besoin de marquer une pause dans notre quotidien. Nous retourner pour constater que nous avons accompli de belles comme, malheureusement de mauvaises choses dans le cours de l’année. Souvent nos occupations ne nous ont pas permis de regarder autour de nous. Les soucis des fins de mois difficiles, la colère des gilets jaunes peut aider ceux qui n’avaient pas pris conscience du cheminement compliqué sur lequel le citoyen lambda est engagé.
Il est vrai que toutes les histoires tournant autour de la crèche accueillant un couple et leur enfant nouveau-né ne sont pas vérifiables et peuvent porter à rire. Un bœuf et un âne soufflant sur le petit enfant pour le réchauffer ce n’est pas sérieux n’est-ce pas, pas plus que l’arrivée de mages venus apporter des trésors et saluer celui qu’ils semblent considérer comme un être hors du commun. Et pourtant qui n’y a pas cru ou voulu y croire ?
Quel message se cache dans le récit qui nous est parvenu ? Certains vont tenter de convaincre leurs auditeurs, leurs lecteurs de l’impossibilité de connaitre le déroulement de ce qui s’est vraiment passé il y a plus de 2000 ans, d’autres vont s’en tenir aux textes des évangiles et se lancer dans une lecture sans compromis, mais aussi sans compréhension de ces récits.
Les évangiles dits de « Matthieu » et de « Luc » annoncent une bonne nouvelle, telle est leur fonction, la naissance d’un enfant qui sera considéré comme le fils de Dieu. Combien de personnes considèrent-elles comme vérité la procréation miraculeuse de cette jeune femme, Marie, promise à Joseph ? Cette question et la ou les réponses apportées ne sont pas sans intérêt, mais nous éloignent de ces moments au cours desquels des femmes et des hommes redeviennent des enfants avec des étoiles au fond des yeux tenant par la main leurs enfants, leurs petits-enfants, partageant avec eux ces moments de joie et de partage, devenus si rares tout au long de l’année. |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: aurore Ven 14 Déc 2018, 12:55 | |
| Ceci me rappelle cela. On peut gloser (on l'a assez souvent fait ici) sur la vérité du mythe, de la légende, du conte, de la fable, de la parabole, de la poésie, de la littérature, de l'art en général, qui n'est pas celle de l'histoire "vraie", factuelle, historique: on en revient toujours au constat que ces différents genres de "vérité" et de "récit" sont, certes, distincts en principe, mais indémêlables en fait: ils ont besoin les uns des autres, ne serait-ce que pour se distinguer (partiellement, fragilement, provisoirement) les uns des autres. L'idéal de l'information pure (historico-journalistique) aujourd'hui ébranlé par les fake news dont l'effet réel peut être très supérieur à celui des événements réels, ce n'est pas l'avènement d'une ère de post-vérité, c'est l'économie générale, complexe, retorse, de la vérité et du récit dont on n'est jamais sorti depuis qu'on (se) raconte des histoires. Il n'empêche que les histoires ont leur façon à elles de se faire comprendre, pour peu qu'on les laisse se raconter. Les récits évangéliques manient très bien le dosage du "merveilleux" (fort différent, par exemple, dans les récits de la Nativité, de la marche sur la mer ou de la tempête apaisée, de la Transfiguration, de la Résurrection, et même d'un miracle à l'autre, par rapport au récit de la Passion -- on parlait hier d'éclipse du divin, c'est aussi du point de vue littéraire une éclipse du "merveilleux"). Le conditionnement préalable du lecteur compte finalement assez peu face à l'effet de vérité du texte, qui produit son propre type de "vérité" pourvu qu'il y ait lecture (ou écoute). [Pour la petite histoire (que j'ai sûrement déjà racontée), l'épisode des mages fut l'occasion de mon unique "apostasie-hérésie" réelle, quoique modeste, par rapport à la doctrine de la Watchtower. Je "conduisais" alors des "études bibliques" sur la Bible seule (TMN quand même): c'était officiellement "permis", quoique non recommandé. Chez une dame (portugaise) je propose Matthieu et nous arrivons très vite à l'histoire des mages, qu'elle comprend, tout naturellement, en bonne part -- et au lieu de lutter contre sa compréhension spontanée du texte je me contente de relever des détails qui la confirment et la mettent en valeur (les mages sont effectivement des "païens" et une catégorie plutôt mal vue dans l'AT -- comme les femmes de la généalogie du chap. 1 -- mais en l'occurrence ce sont eux qui voient dans le ciel ce que les scribes ne voient pas dans le texte, qui font ce qu'Hérode ne fait pas, etc.). Je n'avais pas anticipé cela, mais sur le coup il me paraissait impossible d'aller contre l'émotion évidente du texte (la joie !). A la sortie, par contre, panique de la "sœur" ("pionnier") qui m'accompagnait: non qu'elle eût quoi que ce soit à objecter pour sa part à ce qui avait été dit (elle y avait participé, sans chercher non plus à ramener l'interprétation jéhoviste), mais parce qu'elle prenait soudain conscience, selon ses propres termes, que nous ne faisions plus du tout ce que "la Société" attendait de nous...] |
| | | le chapelier toqué
Nombre de messages : 2607 Age : 77 Date d'inscription : 31/08/2010
| Sujet: Re: aurore Ven 14 Déc 2018, 15:49 | |
| Merci Narkissos pour ce récit se rapportant aux mages et aux divers signes les accompagnant, et ton expérience de l'apostasie c'est toujours plus rafraichissant que les doctrines "officielles". |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: aurore Ven 14 Déc 2018, 17:18 | |
| (Je dis "apostasie", bien sûr, selon la définition de la Watch <=> "hérésie" dans le vocabulaire commun; qui, pour être constituée, devait en principe être publique ! Or, si mon "enseignement" ne ressemblait plus guère à celui de la Watch, il se gardait bien de la contredire, il parlait d'autre chose, ou plutôt tentait de laisser parler les textes. Mais dans ce cas précis la contradiction était inévitable -- sauf à choisir un autre texte. Toujours est-il que cet épisode, n'ayant pas été rapporté, n'a eu aucune conséquence directe sur la suite des événements: mon procès en "apostasie" a été instruit sans que j'aie jamais été accusé d'avoir remis publiquement en question le moindre enseignement de la Watchtower, ce qui est en soi assez comique eu égard aux règles qu'elle affiche.) |
| | | le chapelier toqué
Nombre de messages : 2607 Age : 77 Date d'inscription : 31/08/2010
| Sujet: Re: aurore Ven 14 Déc 2018, 18:29 | |
| les meilleurs procès pour "sorcellerie" sont ceux qui ne peuvent être contestés faute d'accusation(s)…. |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: aurore Ven 14 Déc 2018, 19:24 | |
| (En l'occurrence, le procès provoque la "faute", puisqu'on te somme de t'exprimer sur des sujets que tu n'aborderais pas de toi-même; cela dit, je suis repassé par une expérience similaire quelques années plus tard en milieu "évangélique", et si les sujets et les enjeux étaient différents la méthode était sensiblement la même: l'interrogatoire n'enquête sur aucune faute préalable, il produit la faute même qu'il entend établir et juger -- "qu'avons-nous besoin de témoins ?")
Pour revenir au sujet, même si c'est par l'autre côté du cycle annuel (Pâques, la Semaine-sainte): c'est remarquable qu'un procès (ambigu et diversement interprété, plus ou moins religieux ou politique selon les textes: le Sanhédrin, le ou les grands prêtres, Pilate, Hérode, etc.; mais toujours judiciaire, donc juridique, et cependant compris comme foncièrement injuste et renversé par la résurrection et tout ce qui s'ensuit) fasse partie intégrante d'un "mystère" ou d'un "salut" ("religieux" par définition). La "justice", divine ou humaine, avec son simulacre et sa dérision, est prise dans le jeu de la révélation divine, elle le sert ainsi malgré elle, mais elle n'en donne pas le sens ni n'en a le dernier mot. |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: aurore Lun 17 Déc 2018, 11:21 | |
| - Citation :
- [Pour la petite histoire (que j'ai sûrement déjà racontée), l'épisode des mages fut l'occasion de mon unique "apostasie-hérésie" réelle, quoique modeste, par rapport à la doctrine de la Watchtower. Je "conduisais" alors des "études bibliques" sur la Bible seule (TMN quand même): c'était officiellement "permis", quoique non recommandé. Chez une dame (portugaise) je propose Matthieu et nous arrivons très vite à l'histoire des mages, qu'elle comprend, tout naturellement, en bonne part -- et au lieu de lutter contre sa compréhension spontanée du texte je me contente de relever des détails qui la confirment et la mettent en valeur (les mages sont effectivement des "païens" et une catégorie plutôt mal vue dans l'AT -- comme les femmes de la généalogie du chap. 1 -- mais en l'occurrence ce sont eux qui voient dans le ciel ce que les scribes ne voient pas dans le texte, qui font ce qu'Hérode ne fait pas, etc.).
J'ai toujours trouvé ce récit de rois-mages très beau et je n'ai jamais été convaincu par les explications négatives de la Watch, certes cela relevé du ressenti et d'une certaine intuition et non d'une analyse du texte. Il est vrai que ce récit nous présente ces mages et leurs offrandes d'une manière positive, cela n'empêche pas la Watch de tirer cette conclusion :"Étant donné tous les maux qu’a engendrés cette visite, il est logique de penser que l’étoile ainsi que le message concernant ‘ celui qui était né roi des Juifs ’ venaient de l’ennemi de Dieu, Satan le Diable, qui voulait éliminer Jésus." https://wol.jw.org/fr/wol/d/r30/lp-f/2002928#h=5Le texte ne fait jamais allusion à Satan, par contre il précise que ces mages sont venus pour rendre hommage au "roi des Juifs qui vient de naître", lui offrent trois présents, or, encens et myrrhe et que c'est Dieu qui a averti les mages par l'intermédiaire d'un songe de ne pas retourner auprès d'Hérode ... Rien de diabolique !Ce récit des mages s'inspire de texte de l'AT qui font référence qu'à des données positives du dessein de Dieu, qui veut que des gens de toutes nations (et notamment des rois) reconnaissent la royauté du Messie et lui rendent une adoration le Ps 72, 10-11 : "Les rois de Tarsis et des îles apporteront des offrandes, les rois de Saba et de Seba offriront des présents. Tous les rois se prosterneront devant lui, toutes les nations lui seront soumises."Is 60,6 qui décrit un pèlerinage eschatologique des nations (Jérusalem attire tous les peuples du monde) qui offrent ses produits de valeurs à Sion :"Tu seras couverte d'une foule de chameaux, de dromadaires de Madiân et d'Epha ; ils viendront tous de Saba ; ils porteront de l'or et de l'encens et annonceront, comme une bonne nouvelle, les louanges du SEIGNEUR." |
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| Sujet: Re: aurore Lun 17 Déc 2018, 12:44 | |
| L'affectivité d'un texte relève de l'évidence: un sentiment, une émotion (en l'occurrence, la joie, expressément v. 10) se communiquent et se reconnaissent instantanément ou pas du tout, ils ne se déduisent pas d'une analyse ou d'un raisonnement "logiques". La "première impression" (celle dont il faut se méfier parce qu'elle est souvent juste, comme disait à peu près Guitry) n'est que partiellement et provisoirement soluble dans le "raisonnement"; dès qu'on revient au texte, si contraignantes qu'aient pu paraître l'argumentation et sa conclusion, on sent toujours ce qui "ne colle pas".
Le contresens affectif est d'ailleurs récurrent dans l'interprétation jéhoviste du NT, surtout en ce qui concerne la christologie (donc: souvent): mauvaise "interprétation" au sens non seulement exégétique ou herméneutique mais artistique du terme, à contre-ton plus encore qu'à contresens: chaque fois que des textes de célébration (d'exaltation, d'exultation) sont abordés avec une réticence ou une méfiance sourcilleuses, de façon "froide" sinon hostile, on a déjà raté l'essentiel.
Accessoirement: les mages de Matthieu ne sont sans doute pas des "rois" dans le texte, mais l'intertextualité que tu évoques montrent bien comment et pourquoi ils le deviennent dans la tradition subséquente.
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| Sujet: Re: aurore Lun 17 Déc 2018, 14:14 | |
| Qui a envoyé cette “ étoile ” pour guider les astrologues ? La plupart des Églises enseignent que c’est Dieu. Est-ce bien le cas ? Souvenez-vous qu’elle n’a pas mené en premier les astrologues à Bethléhem, mais plutôt jusqu’au roi Hérode à Jérusalem. Ils ont révélé l’existence de Jésus à ce meurtrier jaloux et puissant, et ils lui ont donné de bonnes raisons de haïr cet enfant qui pourrait devenir “ roi des Juifs ”. https://wol.jw.org/fr/wol/d/r30/lp-f/2012251
L'analyse de la Watch est tendancieuse, l'étoile n'a pas guidé les mages jusqu'au roi Hérode MAIS à Jérusalem, ensuite c'est le roi Hérode qui les fit appeler en secret.
Le récit de l'étoile — qui dans Matthieu guide les mages — semble s'être développé à partir de la prophétie de Balaam sur l'étoile qui figure dans le Livre des Nombres, considérée par les Juifs contemporains de Jésus comme une prophétie messianique, annonçant la venue d'un rédempteur54. Cette prophétie suscite d'autres développements postérieurs dans la littérature chrétienne, à propos de l'« étoile du Rédempteur » un astre plus lumineux qui, à son lever, obscurcit les autres astres et détruit la magie et l'astrologie, transformant un thème messianique juif non narratif en récit. On trouve le récit de l'étoile des mages dans le Protévangile de Jacques qui y ajoute celui de « l'astre le plus lumineux » , thème qui est indépendant de l'épisode des mages56 comme on peut également le constater chez Ignace d'Antioche. https://fr.wikipedia.org/wiki/Rois_mages#cite_ref-53
"Je le vois — mais ce n'est pas maintenant. Je le contemple — mais ce n'est pas de près. Un astre sort de Jacob, un sceptre s'élève d'Israël. Il fracasse les tempes de Moab et le crâne de tous les fils de Seth." Nb 24,17 |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: aurore Lun 17 Déc 2018, 14:45 | |
| Cf. supra 20.12.2015 (thème voisin chez Luc, même si ce n'est pas toujours apparent dans les traductions françaises: l'"aurore" -- justement ! -- c'est le "lever", anatolè, du soleil ou d'un autre astre, toujours à l'est = orient).
Dans la géographie du récit de Matthieu, arriver à Jérusalem est tout simplement la voie normale depuis l'Orient (il faut faire un détour pour l'éviter, v. 12). Bien sûr, l'étape est aussi théologique: la révélation du ciel (l'astrologie, comme la "magie", est loin d'être unanimement condamnée par le judaïsme contemporain, toute une tradition la rattache à la sagesse, divine et universelle: Salomon, Joseph, Daniel, etc.) doit être complétée par l'Ecriture; d'où l'ironie supplémentaire et typiquement matthéenne: ceux qui savent ne font pas, mais leur savoir est juste et nécessaire à ceux qui font (cf. chapitres 5 et 23, scribes <=> pharisiens). |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: aurore Lun 17 Déc 2018, 16:20 | |
| Un astre à son lever
Partons du contraste entre ce qui se passe à Jérusalem dans la première partie du récit (v. 1- et ce qui se passe à Bethléem dans la deuxième partie (v.9-12). À Jérusalem, Hérode et toute la ville étaient «troublés» par la demande des mages ; à Bethléem, ceux-ci éprouvent «une très grande joie» devant l'astre qui les guide. A Jérusalem, le roi Hérode ne cessait de s'agiter et de parler ; à Bethléem, l'enfant ne fait rien d'autre que recevoir l'hommage des païens. D'un côté le tumulte et l'inquiétude, de l'autre la joie et le silence. Dès que l'astre s'arrête, le temps est comme suspendu. Qu'est-ce que Matthieu décrit ? La vue de l'astre qui comble de joie, puis la vue de l'enfant et de sa mère qui appelle un hommage. Et si Matthieu proposait un itinéraire à son lecteur ? Prendre la route avec les mages, quitter le tumulte de Jérusalem pour la joie de Bethléem. Quitter Hérode pour le Messie. Et s'arrêter le temps qu'il faudra. Être croyant, ce n'est pas seulement savoir des choses sur Dieu. Les scribes et les grands prêtres savaient ce qu'il en était des rapports entre le Messie et Bethléem. Ils n'ont pas reconnu Jésus pour autant. Ils le rejetteront et le crucifieront. Dès le début de l’Évangile, le lecteur, lui, sait qui est Jésus, sa double origine, à la fois divine et royale. Il connaît le lieu de sa naissance. Mais que faire de ce savoir ? L'histoire des mages devient alors exemplaire. À la fin de la rencontre avec Hérode, les mages en savent autant que le lecteur. Redisons-le : pour la foi, la connaissance des Écritures est une réalité incontournable. Le détour par Jérusalem était nécessaire pour que les mages païens entendent les mots du Livre de l'Alliance, même prononcés par des scribes insensibles, même murmurés par un Hérode hypocrite. Qu'ils n'aient pas tout compris importe moins que l'orientation donnée alors à leur itinéraire. Néanmoins, les Écritures seules ne suffisent pas. Il leur fallait retrouver ce qui les avait mis en route, «l'astre vu à l'Orient» - ou bien, selon une autre traduction possible, «l'astre à son lever». Or en lui-même un astre est ambigu. Que ne fait-on pas dire au soleil, à la lune et aux étoiles ! Matthieu est clair : dès qu'il a montré l'enfant, le signe céleste devient inutile et il n'en parle plus. Le seul astre qui reste, celui qui guide, qui précède et réjouit les hommes, c'est désormais l'enfant de Bethléem, «Emmanuel», Dieu-avec-nous. Par un chemin où ne manquent ni les ambiguïtés, ni les errements, ni l'ignorance, les mages nous conduisent vers le seul vrai roi de l'univers. Par un chemin où se vérifie la qualité de notre foi, Matthieu nous conduit vers celui qui a promis qu'il serait toujours avec nous (Mt 28,20) et qui, au coeur du quotidien, s'identifie avec les plus démunis (Mt 25,31s). https://www.bible-service.net/extranet/current/pages/1498 |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: aurore Lun 17 Déc 2018, 20:38 | |
| En effet: ce qui guide l'itinéraire des mages (à mesure, façon GPS ?), ce n'est pas seulement étoile -> Ecriture, mais étoile -> Ecriture -> étoile (+ rêve pour le retour); ce "cycle" dans le récit s'inscrit dans la droite ligne courbe de notre fil.
L'idée du ciel (cf. Psaume 19) et plus généralement du monde (nature, création, histoire) comme écriture ou livre, autrement dit d'une équivalence ou d'une complémentarité des savoirs traditionnels, expérimentaux, profanes et sacrés vient de loin et elle a culminé à la Renaissance (cf. Foucault, Les mots et les choses), avant le grand morcellement moderne des "sciences" et autres "disciplines" (qui distingue notamment l'astronomie et l'astrologie dans deux catégories complètement différentes, "science" sérieuse et expérimentale d'une part et "science occulte" ou "pseudoscience" d'autre part). |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: aurore Mar 18 Déc 2018, 17:51 | |
| Pour l’étoile, elle est évidemment liée à l’activité astrologique des mages. On ne peut guère en dire plus. On a parfois supposé qu’il s’agirait d’une comète ou d’une étoile filante. Mais ni l’une ni l’autre ne permettent de suivre un itinéraire terrestre et de localiser une maison ; il faut renoncer à des explications de ce type. Notons que les mages ont vu l’étoile en orient au départ ou avant de se mettre en route ; ils la retrouvent en quittant Jérusalem ; entre temps, elle semble avoir été absente (d’où leur joie quand ils le revoient).
Il existe dans la littérature latine une histoire qui ressemble beaucoup à ce que raconte Matthieu. En 66, à Rome, Néron ajoute le titre d’imperator à son nom. D'après Pline et Suétone, sur l'indication des astres, des mages de Perse seraient venus à cette occasion à Rome pour l’honorer, et comme ceux de l’évangile, ils seraient repartis par un autre chemin. On situe en général la rédaction de notre évangile entre 70 et 90. Que peut-on conclure de cette ressemblance ? Matthieu connaissait-il cette histoire et a-t-il voulu donner à Jésus une stature impériale, une importance comparable à celle de Néron, à l’époque l’homme le plus puissant sur la terre ? Ou bien, au contraire, la légende latine reprend-elle et attribue-t-elle à l’Empereur ce que les chrétiens disaient de Jésus ? On n’en sait rien, et il paraît plus probable que ces différents récits ont emprunté leur thème à un fonds commun de légendes répandues autour de la Méditerranée. http://andregounelle.fr/bible/naissance-de-jesus-3-le-recit-de-matthieu.php |
| | | le chapelier toqué
Nombre de messages : 2607 Age : 77 Date d'inscription : 31/08/2010
| Sujet: Re: aurore Mar 18 Déc 2018, 19:52 | |
| Voici ce que j’ai découvert dans le mensuel ECR info de l’Eglise catholique de Genève, numéro 54 décembre 2018, à propos de l’Epiphanie. Il s’agit de l’entretien avec Frère Guy Musy (membre du couvent dominicain de Genève (Grange-Canal/Cologny)
[Je vous livre trois extraits de l’entretien]
Question : Le récit de l’Épiphanie peut se lire comme une fable, parsemée de personnages et symboles, notamment une étoile, les mages, les cadeaux et bien sûr l’Enfant. Quelle est la signification théologique de ces pages ?
Guy Musy : Le récit de l’Épiphanie tel que nous le lisons dans l’Évangile de Matthieu n’est pas historique au sens moderne et scientifique de ce terme. Les spécialistes bibliques en parlent comme d’un midrash chrétien, un récit reconstruit et truffé de références à l’Ancien Testament. Ce qui ne signifie pas qu’il soit un mythe, mais un récit chargé de sens exprimé symboliquement. Ainsi, le roi Hérode dont il est question dans le texte a bien existé, mais il signifie ici le piège à éviter sur le chemin des chercheurs de Dieu. Ce n’est pas dans un palais royal qu’on a découvert le fils de Dieu, mais dans la « maison de Marie ». Ne le confondons pas avec un vulgaire prince-héritier.
Question : Que signifie le passage de Noël vers l’Épiphanie ?
Guy Musy : Fondamentalement, c’est la même démarche, mais avec des accents différents. L’une et l’autre fête célèbrent la manifestation ou l’apparition de Dieu sur la terre (le mot « épiphanie » signifie « manifestation » en grec). Mais le récit de Noël, celui de Luc, lu dans la nuit du 24-25 décembre évoque l’apparition aux bergers qui n’ont pas un long chemin à parcourir pour se rendre à la crèche et qui, disons-le tout de go, ne jouissent pas d’une excellente réputation. Ils représentent les enfants perdus d’Israël pour qui le Sauveur est venu en priorité. L’humilité et la pauvreté de cette manifestation divine continuent à frapper nos esprits et nos cœurs. Le récit de l’Évangile de Matthieu lu le 6 janvier, fête de l’Épiphanie, confirme la même vérité théologique, tout en lui donnant un autre cadre. On nous parle de « mages », donc d’hommes instruits et qui viennent de loin à la recherche de l’Enfant-Dieu. Les bergers étaient guidés par les anges, les mages par une étoile. Pas forcément celle apparue sur la lunette de leur télescope, mais par celle qui scintillait dans leur cœur. Donc deux récits parallèles et complémentaires, très parlants l’un et l’autre : le Christ apparaît aux bergers qui sont proches de lui et qui lui ressemblent, mais aussi à ceux qui le cherchent depuis longtemps et qui ont pris une très longue route pour le trouver. Noël a besoin de l’Épiphanie pour souligner que le christianisme n’est pas une religion tribale. Si Jésus est apparu au milieu des siens, il ne s’y enferme pas. Il s’ouvre aux nations lointaines et étrangères pour rencontrer tous les « chercheurs de Dieu », les plus proches et les plus lointains. D’où la note missionnaire de la fête de l’Épiphanie. ………. De nos jours, en Occident, la célébration liturgique de l’Épiphanie, le plus souvent renvoyée au deuxième dimanche qui suit Noël, passe inaperçue ou, du moins, a perdu de son importance et de sa solennité. Et, je le répète, cette relégation est très regrettable. Par contre, dans la tradition des Eglises orientales, l’Épiphanie occupe toujours une place centrale. Certaines, Églises, comme l’Église copte en Égypte, ne connaissent que l’Épiphanie et non pas Noël. |
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