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| Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Apocalypse 4/5 | |
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| Sujet: Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Apocalypse 4/5 Mar 20 Sep 2022, 13:51 | |
| Le trône de Dieu et le culte céleste
"Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Telle une trompette, la première voix que j'avais entendue parler avec moi dit : Monte ici, et je te ferai voir ce qui doit arriver après" (4,1).
La symbolique du livre (ch. 4 –11)
Cet ensemble que forment les ch. 4 à 11 combine une symbolique de l’espace — il s’agit en effet pour Jean (4,1), puis pour les deux témoins (11,12), de monter au ciel —, et une symbolique liée au temps, celle du livre et de son dévoilement progressif (ch. 5 et 10).
On retrouve ici la double dimension traditionnelle de l’apocalyptique, qui est à la fois révélation des réalités célestes et révélation des réalités à venir, mais révélations faites ici sous un éclairage nouveau, puisque c’est par l’Agneau qu’elles adviennent. D’où le schéma suivant :
Entre le début du ch. 4 et la fin du ch. 11, la montée au ciel change de signification. On passe d’une symbolique de communication (révélation) à une symbolique de communion (résurrection et élévation définitive) qui amorce la suite. N’y aurait-il pas là une pédagogie de Jean à l’égard de ses auditeurs ? Ceux-ci s’impatientent de la levée du secret sur les intentions mystérieuses de Dieu. Jean veut les faire aller plus loin par une voie déroutante pour eux, la voie pascale. Celle-ci peut leur donner accès à une compréhension qui sera une communion plénière et vitale avec Dieu et avec ce qu’il est en train d’accomplir. Cette leçon garde toute son actualité.
Quant à la correspondance entre les scènes du ch. 5 et du ch. 10, elle se déduit de leur source scripturaire commune : Ez 2,9-10 et 3,1-3. Jean a dédoublé la vision inaugurale du prophète entre la remise du livre à l’Agneau d’une part (ch. 5), et celle du petit livre ouvert à Jean de l’autre (ch. 10), mettant ainsi le second sous la dépendance du premier. Un autre trait, emprunté à Dn 12,5-9, insinue la connexion entre les deux scènes. À Daniel, l’ange recommande de garder le livre scellé jusqu’à la fin. Or, les « anges forts » d’Ap 5,2 et 10,1 qui soulèvent la question du « qui ? » puis celle du « quand ? » de la révélation, manifestent que le temps de la fin est inauguré. L’Agneau vainqueur est chargé d’ouvrir le livre scellé, et les deux témoins exercent un ministère prophétique actif (11,3, cf. Dn 12,7) qui n’est pas de l’ordre du délai, de l’attente passive, mais de celui d’une préparation immédiate de l’accomplissement du mystère de Dieu, comme l’indique la liturgie de la septième trompette (10,7). Du fait de l’emboîtement des septénaires, cet accomplissement apparaît comme la conséquence de l’ouverture du livre scellé par l’Agneau. Les hommes habilités à coopérer avec lui ne le pourront qu’en passant à leur tour par le mystère pascal (ch. 11).
https://www.cairn.info/revue-nouvelle-revue-theologique-2007-3-page-371.htm |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Apocalypse 4/5 Mar 20 Sep 2022, 14:53 | |
| Les voies de la monstration conviennent peut-être mieux à l'Apocalypse (révélation, dévoilement) que celles de la démonstration... Il me semble que dans et autour de ce qu'on appelle communément l'apocalyptique, le ciel et la terre, les montées et les descentes n'en finissent pas de changer de sens et de signification: des ascensions qui se présentaient a priori comme salvatrices (préservation, mise à l'abri, récompense, justification, glorification, apothéose), comme celles d'Hénoch et d'Elie (puis de Moïse, Isaïe, Baruch et tant d'autres hors du "canon") deviennent révélatrices, ce qui suppose, pour que la révélation serve à quelque chose, que le bénéficiaire redescende sur terre, du moins sous forme d'écriture; et ce qui est révélé au ciel se transforme ainsi en promesse du ciel, dans toute l'ambiguïté du génitif, pour les destinataires; quand même à la fin c'est le ciel qui (re)vient sur la terre (notoirement dans l'Apocalypse dite de Jean). Il y a là comme un jeu (yo-yo ?) cosmique qui ne s'arrête jamais, du moins tant qu'il y a quelqu'un (sur terre) pour lire et relire... J'ai déjà souvent signalé, je radote, ce qui est à mes yeux l'une des plus belles expressions néotestamentaires de l'aspect "provisoire" et "conservatoire" (non définitif) du "ciel", pour "Jésus" en l'occurrence, dans le discours de "Pierre" en Actes 3,20s: "... et qu'il vous envoie le Christ Jésus qui vous a été pré-désigné, lui que le ciel doit recevoir/accueillir jusqu'aux temps du rétablissement (apocatastase) de tout..." Le Christ lui-même ne monte "au ciel" (il n'est pas certain, dans Luc-Actes, qu'il y retourne, faute de "préexistence") que pour en revenir; dans Apocalypse 21 "le dieu" lui-même n'a pas d'autre but ni d'autre destination finale que d'"être-avec-les-humains". Le "tableau final" décrit un "monde" nouveau, sans histoire, comme un rapport ciel / terre (ciel nouveau, terre nouvelle), mais où ces deux termes ont perdu tout caractère d'opposition. |
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| Sujet: Re: Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Apocalypse 4/5 Mer 21 Sep 2022, 11:18 | |
| Un trône et Un Agneau (4-5)
Si Ap 1-3 se trouve introduit par une vision inaugurale du Fils d'homme (1,13), c'est au cours de la liturgie céleste des ch. 4 et 5 qu'apparaissent et interviennent successivement UN trône (4,2) puis Un Agneau (5,6).
Si en 4,2 trône apparaît comme «UN trône avec quelqu'un siégeant sur lui », nous retrouvons ce trône 11 fois en 4,2-10 et 5 fois en 5,1-13 à propos de Dieu. Globalement, trône se retrouve 47 fois dans toute l'Apocalypse, mais certaines fois, ce n'est pas le trône de Dieu. Ainsi 2,13 : le trône de Satan ; 13,2 ; le trône du Dragon ; 16,10 : le trône de la Bête, car Satan, le Dragon et la Bête ont aussi la prétention de régner ; Dieu est le plus fréquemment mentionné par l'exercice du règne comme celui qui est assis sur le trône (4,3-9-10 ; 5,1-7 ; 6,16 ; 7,15 ; 19,4 ; 20,11 ; 21,5) Mais il y aussi les trônes des 24 Anciens (4,4 ; 11,16) et de ceux qui viennent juger (20,4) Nombre d'actions se déroulent autour du trône (4,6 ; 5,11) devant le trône (4,5-6-10 ; 7,15 ; 8,3 ; 14,5-5 ; 20,11) ou encore partent d'auprès du trône (16,17) ; le trône tient la place littéraire d'un personnage aux traits insaisissables, mais aux effets certains.
Tout à coup au milieu d'une magistrale liturgie céleste où le trône est déjà situé, UN Agneau surgit en 5,6. Ensuite il interviendra 26 fois comme L'Agneau jusqu'à la fin du livre. Une seule fois son titre sera attribué à la Bête qui le singe en 13,11, «semblable à un Agneau, parlant comme un Dragon ». L'Apocalypse est le seul livre du Nouveau Testament à user de ce titre à propos du Christ. Il le fait entrer dans une christologie apocalyptique qui constitue une particularité dans le genre littéraire «apocalypse ».2 L'Agneau prend progressivement une place de plus en plus grande et son rôle se précise. Ainsi de 19,9 à 22,3 (section finale), en quelques versets, il y a huit mentions de l'Agneau. Quelle attente constitue-t-il ? quelle urgence représente-t-il ? Vers quel monde conduit-il ?
Comment l'Agneau se situe-t-il par rapport au trône ? Sept fois, Dieu est présenté avec l'Agneau : cinq fois comme celui qui siège sur le trône (5,13 ; 6,16 ; 7,10 ; 22,1-3) et deux fois, soit comme Dieu et l'Agneau (14,4), soit comme le Seigneur Dieu et l'Agneau (21,22).
À lire l'ensemble du livre, l'Agneau figurant quatre fois en 5,6-13 mettrait en valeur une manière d'inclusion entre les ch. 4 et 5 d'une part et les ch. 19, 9 à 22,3 d'autre part avec une accentuation finale sur l'Agneau. Le Trône est un personnage symbole du Règne auquel il veut associer toute la création. Dans la nouvelle Jérusalem, paradis retrouvé, «le trône de Dieu et de l'Agneau sera en elle » (22,3) ...
La situation de l'Agneau et le livre de l'apocalypse
... Mais tout à coup en 5,6 dans cette prophétie apocalyptique en forme de lettre circulaire à lire à haute voix en public (1,3) Jean voit et fait intervenir «Un » Agneau. Toute une christologie dynamique de l'Agneau va se déployer au fil des mentions dont il va être l'objet. Elle commence avec une porte ouverte dans le ciel lors de la vision d'inauguration (4,1) et s'épanouit lorsque le ciel est ouvert pour une vision d'achèvement (19,11). Apparaît alors en finale la Jérusalem nouvelle, épouse de l'Agneau avec sept des vingt huit mentions de l'Agneau (21,9-14-22-23-27 ; 22,1-3).
La liturgie céleste au cours de laquelle Un Agneau intervient
C'est au cours d'un ensemble de visions célestes avec des liturgies célébrées pour la victoire du Ressuscité (4-5) que se trouve la vision (5,6-14) de l'intronisation de l'Agneau immolé.4 D'emblée, sans introduction préalable, l'Agneau est situé (5,6) : au milieu du Trône (donc avec Dieu), entouré par les quatre Animaux et les vingt-quatre Anciens. Sa localisation n'est pas pleinement cohérente ; il est d'abord vu au milieu du trône, puis il vient et prend le livre comme s'il se trouvait à l'extérieur. Mais pour l'auteur, ce qui importe, c'est l'addition des différents symboles et de ce qu'ils expriment. Personnage central, l'Agneau est doté de la totalité du pouvoir divin puisqu'il est au milieu du trône ; il se tient dressé, debout, donc ressuscité, vivant, mais il a été immolé et il en porte les marques. Symbole de sa toute puissance céleste et terrestre de Ressuscité, il a sept cornes et il mène le combat avec décision.
Personne ne pouvait prendre le rouleau scellé, l'Ancien Testament. Seul l'Agneau le peut et le reçoit de la droite divine (5,7). Le voilà investi et prêt à agir. Trois chœurs successifs vont célébrer et préciser liturgiquement cette intronisation.
https://www.persee.fr/doc/rhpr_0035-2403_1999_num_79_1_5534 |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Apocalypse 4/5 Mer 21 Sep 2022, 12:03 | |
| Sur l'article de Carrez, cf. ici 17.2 et 2.3.2022 -- où je vois aussi que nous avions déjà beaucoup parlé du "télescopage" d'images, métaphores etc., dont nous reparlions encore là avant-hier. Soit dit en passant, on pourrait méditer aussi sur la riche médiation animale qui fait communiquer, dans l'apocalyptique en général et cette Apocalypse en particulier, des "catégories" habituellement opposées (Dieu / homme, ciel / terre, bien / mal, etc.). De l'"agneau-lion" au "dragon-léopard" en passant par les quatre "animaux" ou "vivants" ( zôa / hayyim/ot, d'après les keroubim d'Ezéchiel) qui entourent le trône du début à la fin, ou par les différentes "bêtes (sauvages, thèria)" nommées ainsi, c'est une manière à la fois conventionnelle et inventive de faire de la "théologie" et de l'"anthropologie" en parlant moins de "dieu" et d'"homme", à défaut de n'en pas parler du tout... Voir éventuellement ici. Autre remarque encore plus générale: à peu près tout ce qui a été interdit au plan cultuel dans le judaïsme du Second Temple, en termes d'image et de représentation, ressort à foison (c'est le cas de le dire) dans l'"apocalyptique" (et déjà dans les visions "prophétiques" qui la préparent). Pour faire un raccourci provocateur à l'échelle du "canon" chrétien (AT/NT), on pourrait dire que la grande séquence qui a débuté par le scandale du culte du veau ou du taurillon s'achève par le culte universel de l'agneau ou du jeune bélier... et même si l'on y regardait de plus près, du point de vue de l'"histoire des religions", on retrouverait au début comme à la fin l'histoire (animalisée) d'un dieu père et fils (El / Baal-Yahvé). |
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| Sujet: Re: Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Apocalypse 4/5 Mer 21 Sep 2022, 15:10 | |
| 3) L'image est approximative, elle demeure volontairement ambiguë, son interprétation ne va pas de soi. Mais c'est ici que l'inspiration du pro¬ phète vient révéler la signification véritable des visions. C'est pourquoi certaines scènes gardent, dans la description, une imprécision d'autant plus remarquable qu'elle ne nuit en rien à l'intelligence du sens. Si la voix entendue en Ap. 19, 1 n'est comparable que de très loin à un son connu, ce qu'elle exprime est tout à fait clair et intelligible. De même il y a des visions qu'on aurait bien du mal à représenter picturalement tant elles comportent d'impossibilités matérielles : ainsi les vingt quatre anciens tiennent-ils chacun une harpe et des coupes d'or, et pourtant ils réussissent à se prosterner en déposant leurs couronnes devant le trône (Ap. 5, 8. 14) ! De la bouche du Fils de l'homme sort une épée (1, 16) ...
Les visions ne veulent pas représenter. Elles ne sont pas la description d'un spectacle céleste. Elles signifient. Elles n'offrent donc pas d'abord à voir, mais à entendre et à comprendre, comme les discours prophétiques.
L'image n'est pas, dans l'Apocalypse, destinée à illustrer une histoire, à ressembler à la réalité ou à représenter une allégorie. Visant une réalité plus haute, elle tourne le dos à l'imitation et à la facticité pour inviter à la transposition, à l'analogie, à la transfiguration du visible promu à la dignité de révélateur de l'invisible. Mais le représentable ne peut répondre à cette vocation qu'au prix d'une épuration : il lui faut dépouiller tous ses aspects émotionnels, ses caractères esthétiques ou artistiques pour accéder par une véritable ascèse à la dignité des types et des symboles.
5) Venons en au caractère le plus intéressant des visions de l'Apocalypse : leur pointe est résolument et constamment tournée vers la situation humaine contemporaine. L'important n'est pas de contempler les mystères cachés dans le secret des ordonnances divines, mais bien de projeter sur le monde où vi¬ vent les chrétiens une révélation dont la vive lumière pourra les éclairer dans leurs difficultés comme dans leurs certitudes.
Souvent, nous l'avons remarqué, les images sont expliquées. Presque toujours leur portée réelle se trouve dégagée ou soulignée dans des hymnes dont l'intention constante est de tirer et d'exprimer les conséquences pour les hommes de ce qui vient d'être annoncé en images. C'est pourquoi les hymnes (proclamations, cantiques...) jouent dans l'Apocalypse un rôle primordial. C'est là que les implications des visions sont dégagées dans toutes leurs dimensions existentielles. Ces hymnes ont dans la plupart des cas, une indiscutable résonance liturgique. Quelques uns d'entre eux sont d'ailleurs explicitement situés au cœur d'une célébration cultuelle (Ap. 4 et 5). D'autres semblent être les répons qui suivent quelque action liturgique (7, 10-17 ; 11, 15-19...). Ces cultes célestes sont évidemment conçus sur le modèle offert par les célébrations terrestres des offices auxquels l'auteur de l'Apocalypse a pu prendre part.
Tout ceci n'a rien de fortuit : il y a entre l'image et le culte une réelle et étroite parenté. Le culte terrestre est le reflet du culte véritable au cours duquel Dieu doit être glorifié par l'univers entier. Quand les fidèles y participent, ils goûtent donc à l'avance mais effectivement, aux gloires indicibles du culte eschatologique. Ils sont déjà au ciel autour du trône de Dieu en compagnie de l'agneau. De même l'image est plus qu'une représentation, elle atteste la vérité et la réalité d'une présence. Et les hymnes le redisent sous une forme plus proche du langage quotidien, avec les mots que la liturgie familière utilise pour guider l'adoration des hommes.
https://www.persee.fr/doc/rhpr_0035-2403_1979_num_59_3_4494
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| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Apocalypse 4/5 Mer 21 Sep 2022, 15:41 | |
| Remarque de détail sur le texte de Prigent: l'approximation est souvent déjà dans les modèles littéraires de l'Apocalypse, ainsi le "comme un fils d'homme" de Daniel 7 ou les nombreuses formules redondantes d'Ezéchiel (comme la ressemblance de l'apparence de...). Cela n'enlève d'ailleurs rien au grand mérite de Prigent qui aura été de montrer, sans doute mieux que personne avant lui, l'analogie profonde de la scène apocalyptique à la scène liturgique (cultuelle, rituelle). A vrai dire et bien que je sois loin d'être "à la page", il me semble que le développement continuel du "virtuel" (du théâtre et du roman au cinématographe, à la télévision, aux séries et aux jeux vidéos) nous permettent de beaucoup mieux sentir ce qui se jouait il y a 2000 ans, aussi bien dans un "culte" que dans une "apocalypse" -- malgré les anachronismes qu'induit fatalement une telle comparaison. Dans une apocalypse comme dans un culte, a fortiori quand l'apocalypse est lue ou récitée dans le cadre d'un culte, il s'agit beaucoup moins de communiquer un "message" ou une "information" que de vivre une "expérience", "virtuelle" si l'on veut mais aussi "réelle" pour ceux qui y participent que la "réalité" extérieure, quand même elle s'y oppose frontalement (comme dans l'Apocalypse de Jean). |
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| Sujet: Re: Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Apocalypse 4/5 Ven 23 Sep 2022, 10:52 | |
| "Autour du trône, vingt-quatre trônes ; sur ces trônes, vingt-quatre anciens assis, habillés de vêtements blancs ; sur leurs têtes, des couronnes d'or" (4,4). Il est assez difficile d'être précis, mais la description rappelle la "cour céleste" de Yahvé (elle-même dérivée de l'assemblée des dieux présidée par El dans la mythologie cananéenne), Isaïe 24,23. Les "anciens" de l'Apocalypse ont un caractère royal (trônes, couronnes) et sacerdotal (vêtement blancs, encens/prières); le nombre de 24 évoque d'ailleurs les classes de prêtres et de lévites selon 1 Chroniques 24. Ils semblent en effet distincts des "vainqueurs" chrétiens, qu'ils précèdent (comme ils précèdent l'Agneau) dans la proximité de Dieu: beaucoup y voient dès lors une représentation des fidèles de l'A.T. glorifiés, c'est en tout cas une possibilité...https://etrechretien.1fr1.net/t27p25-a-quelles-personnes-lee-redacteur-de-l-apocalypse-destinait-il-son-livre Apocalypse : quatre regards, une seule visionLes « quatre Vivants » de la vision d’Ézéchiel et de l’Apocalypse de Jean - un lion, un taurillon, un homme et un aigle en vol -, habituellement invisibles, se dévoilent lorsque la porte du Ciel s’entrouvre.Sculptés sur les tympans des cathédrales, mis en couleurs dans les enluminures, voici les « quatre Vivants » de la vision d’Ézéchiel (ch. 1) et de l’Apocalypse de Jean (ch. 4) : un lion, un taurillon, un homme et un aigle en vol. Ils suggèrent ce qu’il y a de plus sage, de plus fort, de plus noble et de plus rapide au sein de la création, personnifiant ainsi les qualités et l’action de Dieu. Habituellement invisibles, ils se dévoilent lorsque la porte du Ciel s’entrouvre. Ils sont au plus près d’un trône sur lequel est assis le Seigneur, inondé de lumière. Les « Vivants » se tiennent autour de lui, contemplant à la fois celui qui est sur le trône et tous ceux qui l’observent, eux qui sont « pleins d’yeux par-devant et par-derrière, tout autour et au-dedans » (Apocalypse 4, 6.. Cette vision associe les « quatre Vivants » à quatre constellations d’étoiles diamétralement opposées : le Lion, le Scorpion (parfois représenté sous les traits d’un homme), le Taureau et Pégase, le cheval ailé. Voilà le cœur du message de l’Apocalypse ici révélé : Dieu règne au centre de l’univers créé, et tout l’univers lui appartient. Selon les versets 8-11, les « quatre Vivants » chantent le Trisagion des séraphins : « Saint ! Saint ! Saint, le Seigneur Dieu, le Souverain de l’univers, Celui qui était, qui est et qui vient.« Ils s’associent ainsi à la liturgie éternelle : « Lorsque les Vivants rendent gloire, honneur et action de grâce à celui qui siège sur le Trône, lui qui vit pour les siècles des siècles » (v. 9).En associant les significations cosmiques et liturgiques des « quatre Vivants », le visionnaire de l’Apocalypse décrit le rôle et le secret du Tétramorphe : ces « quatre Vivants » ne cessent de scruter l’horizon, leur horizon, au moment même où ils entonnent ensemble leur cantique. Le panorama cosmique n’est intégral que si chacun des quatre regarde droit devant lui, et cependant ce que chacun aperçoit n’épuise pas le réel, puisque chacun ne voit qu’un quart de la totalité. Unis dans leur diversité, les « quatre Vivants » représentent aussi les quatre évangélistes (le taureau pour Luc, l’homme pour Matthieu, le lion pour Marc et l’aigle pour Jean) d’un seul et même Évangile. Ils décrivent ainsi, chacun à leur manière, l’unique Bonne Nouvelle du Christ.https://croire.la-croix.com/Definitions/Lexique/Invisible/Apocalypse-quatre-regards-une-seule-vision |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Apocalypse 4/5 Ven 23 Sep 2022, 11:16 | |
| (13.2.2009 !) En tout cas ces deux éléments (24 anciens et 4 vivants-animaux) ont le grand mérite d'ouvrir l'Apocalypse, qu'à d'autres points de vue on pourrait dire fermée ou sectaire, à une perspective cosmique ou universelle: le divin en vue (en visée et en vision) ne se limite ni au "chrétien" (les anciens sont là, en un sens au moins, avant l'agneau, bien que celui-ci soit aussi "avant la fondation du monde"; cf. ici) ni à l'"humain" (dans un tout autre genre littéraire, même fonction de décentrement de tout anthropo-, ethno-, ecclésio-, égo-centrisme que les discours de Yahvé à la fin de Job, qui répondent aux questions sur la justice -- humaine -- par "la vie des animaux"; d'autant que l'"homme" n'y est qu'un animal parmi d'autres, pas même le premier ni le dernier de la série). Bien sûr, il suffit de lire les textes pour constater qu'il n'y a pas de correspondance exacte entre les hayyoth d'Ezéchiel 1 (p. ex.: chacun[e] a quatre faces différentes; cf. les keroubim-"chérubins" du chap. 10) et les zôa de l'Apocalypse, qui "mixent" plusieurs descriptions d'êtres fabuleux du même genre (p. ex. les seraphim-"séraphins" d'Isaïe 6). |
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Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Apocalypse 4/5 Mar 27 Sep 2022, 12:49 | |
| "Alors je vis, au milieu du trône et des quatre êtres vivants et au milieu des anciens, un agneau debout, qui semblait immolé. Il avait sept cornes et sept yeux, qui sont les sept esprits de Dieu envoyés par toute la terre. l vint recevoir le livre de la main droite de celui qui était assis sur le trône" (5,6-7)Le déploiement de la christologie de l'Agneau dans l'Apocalypse (déjà cité) — égorgé, immolé, marqué à tout jamais par les traces de son passage à travers la mort. Trois fois en 5,6-9-12. La première fois dans la vision de Jean, la seconde dans le chœur des quatre Vivants et des vingt-quatre Anciens, liturges de gloire, la troisième dans le chœur céleste d'une multitude d'Anges qui entourent le trône, les Vivants et les Anciens, Donc au centre de tout, l'Agneau immolé ;— par son sang, il offre en les rachetant (5,9) l'Alliance nouvelle à tout l'univers mentionné sept fois dans l'Apocalypse par : «races, langues, peuples, nations » avec une présentation des termes ordonnés chaque fois différemment pour mettre en valeur la variété et l'approfondissement de l'accomplissement salvifique opéré par l'Agneau, et le faire découvrir au lecteur ;— lorsque l'Agneau surgit tout à coup, prend le livre de la droite de celui qui siège sur le trône, il met en valeur que ce qu'il fait, Dieu le fait. Le trône devient un trône pour deux (5,13 ; 7,9-10) et l'Agneau est en son centre (5,6 ; 7,17). Désormais pour connaître Dieu, il faudra connaître l'Agneau. Cette incohérence narrative communique une force supplémentaire au récit ;— l'Agneau a sept cornes sur une seule tête (5,6) : il a un pouvoir unique à la différence des Bêtes qui ont dix cornes sur plusieurs têtes (12,3 ; 13,1 ; 17,3-7-12-16) ou de la Bête de la terre qui a deux cornes pour imiter l'Agneau (13,11). Seul l'Agneau a la plénitude divine de la puissance. Les yeux de l'Agneau (5,6) sont les sept esprits de Dieu envoyés en mission par toute la terre https://www.persee.fr/doc/rhpr_0035-2403_1999_num_79_1_5534Notes : Apocalypse 5:6– un agneau v. 12 ; 7.17 ; 13.8 ; 14.1 ; Jn 1.29n ; 1P 1.19s ; cf. Ex 12.3-6 ; Es 53.7 ; Jr 11.19 ; en 1 Hénoch 89–90 « l’agneau » est en fait un bélier puissant, instrument du jugement divin ; cf. Testament de Joseph 19.8 : « Je vis que de Juda était née une vierge portant une robe de lin ; d’elle surgit un agneau sans tache, et à sa gauche se tenait comme un lion ; toutes les bêtes sauvages s’élancèrent contre lui, et l’agneau les vainquit, les détruisit et les foula aux pieds. » – immolé : autre traduction égorgé (comme en 13.3 ; le même verbe est traduit par s’entre-égorger en 6.4) ; même verbe v. 9,12 ; 6.9 ; 13.8 ; 18.24 ; voir 1Jn 3.12n. – sept cornes : symbole de puissance ; cf. Dt 33.17 ; Dn 7.7,24. – sept yeux Za 4.10. – les sept esprits : certains mss portent les esprits 1.4+.Au chapitre 5, il est question d'un "un livre écrit au dedans et au dos, scellé de sept sceaux", ce qui nous renvoi à Ézéchiel 2,9-10 ("Je regardai : une main était tendue vers moi, tenant un livre-rouleau. Il le déploya devant moi : il était écrit en dedans et en dehors. Il y était écrit : Lamentations, plaintes, gémissements"), sans la précision du contenu. Cette scène nous fait penser également au chapitre 10, ou l'on retrouve la vision du petit livre. Quelle est la signification de ce livre ?Le livre de vie (Ap 3,5 ; 20,12 et 15) |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Apocalypse 4/5 Mar 27 Sep 2022, 15:33 | |
| Supra 21.9.2022 les liens au "déjà cité" (Carrez). (Je joue au petit Poucet chaque fois que je peux, ça n'empêchera rien ni personne de se perdre...). Sur le chap. 10, voir aussi ici (24.1.2018).Je ne pense pas qu'il faille chercher de "signification", au sens de correspondance terme à terme, à chaque mot ou image de l'Apocalypse -- ce qui reviendrait à en faire une allégorie hyper-systématisée, à la façon des "explications" synoptiques de la parabole du Semeur; ou une sorte de pesher qoumranien, sur le mode péremptoire "ceci signifie cela"; de toute façon il s'agit toujours de remplacer un signifiant (mot, expression, figure) par un autre, sauf à prendre le second (ou l'énième, le dernier) pour un signifié et un référent ultimes, en vue d'arrêter le jeu potentiellement infini des références d'un mot, d'un énoncé ou d'un texte à un autre. Si je dis, par exemple, que le rouleau du chapitre 5 signifie ou représente "les destinées du monde", "les secrets de l'avenir" ou "le sens de l'histoire", je donne l'impression d'avoir éclairci le texte sans lui avoir fait faire le moindre pas au-delà de ce qu'il dit. Sur le "livre de vie", voir éventuellement ceci. |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Apocalypse 4/5 Mar 27 Sep 2022, 15:53 | |
| 1) Penses-tu que la traduction “anciens” est préférable “vieillards”. Dans le cadre de mes recherches, j'ai découvert que la présence des "anciens" dans l'Apocalypse est (peut-être) tirée du livre d'Esaïe : " La lune rougit, le soleil a honte ; car le SEIGNEUR (YHWH) des Armées est roi au mont Sion, à Jérusalem, et la gloire est en face de ses anciens" (Es 24,23). 2) La TOB rend (5,14) comme suit : " Et les quatre animaux disaient : Amen ! Et les anciens se prosternèrent et adorèrent". La NBS n'emploie pas le terme "adorèrent", même si la tonalité et l'exaltation du texte conduit à cet acte d'adoration. Est-ce une interprétation de la TOB |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Apocalypse 4/5 Mar 27 Sep 2022, 16:38 | |
| 1) Oui, je préfère nettement "anciens", parce que c'est le mot qui me semble offrir le champ sémantique le plus large, ne se limitant pas à l'âge (d'autant que "vieillard" fait quelque peu décrépit, et par là même est plus ou moins banni des convenances modernes, au profit d'euphémismes comme "personnes âgées", "seniors", etc.), mais incluant d'éventuelles fonctions ou dignités qui lui sont associées dans le monde antique, juif, chrétien ou païen (le "sénat" romain, p. ex.). Bien sûr, si ça devient un pur titre de fonction totalement indépendant de l'âge (comme chez les " elders" mormons de 18 ans) cette richesse de sens se perd dans une direction opposée. Au passage, les "anciens" (d'Israël) sont aussi bénéficiaires de la vision de Yahvé en Exode 24. 2) Sur la traduction de proskuneô par "se prosterner" ou "adorer", autrement dit par un geste physique et concret OU une notion plus abstraite et difficile à définir (ce qui est aussi le cas du "rendre hommage" qu'on lui oppose pour des raisons dogmatiques), le débat est... ancien -- voir ici et là. Mais surtout en ce qui concerne l'Apocalypse qui décrit des "visions", je crois qu'il y a tout intérêt à conserver la référence à un geste concret (ici dans la séquence immédiate de piptô, "tomber": de même 4,10; 7,11; 11,16; 19,4.10; 22,8s; voir aussi 3,9; 9,20; 11,1; 13,4.8.12.15; 14,7.9.11; 15,4; 16,2; 19,20; 20,4 où, sans "tomber", on pourrait hésiter davantage, n'eût été l'effet de correspondance générale de toutes ces formules). Cela évite d'ailleurs d'avoir à l'"interpréter" (le geste de prosternation peut correspondre à l'adoration d'un dieu ou à l'hommage rendu à un supérieur non divin, si l'on tient à les différencier: tant qu'on en reste à la description d'un geste il n'y a rien à choisir). Soit dit en passant, le fait que la proskunèsis soit (dans l'Apocalypse) refusée aux anges (ou par les anges) n'incline pas du tout à lui prêter un "sens" affaibli (comme un "hommage" qu'il n'y aurait aucune raison de refuser). --- Je me souviens que le verbe "tomber" était jadis dans le collimateur des champions de l'"équivalence fonctionnelle", car évidemment on ne "tombe" pas (sur sa face ou aux pieds de qqn, selon les formules sémitiques sous-jacentes à cet usage de piptô dans la Septante ou le NT) comme quand on glisse sur une peau de banane (il y aurait de quoi méditer sur l'importance de la dérision dans l'argumentation linguistique). Mais qu'on interprète la combinaison piptô + proskuneô comme hendiadys (un seul acte exprimé en deux verbes) ou comme la séquence d'un acte initial soudain et d'une attitude qui dure, il me semble que ça se comprend très bien en français: parce que "tomber" veut (aussi) dire "tomber", il s'ensuit en français un sens hyperbolique qui n'est probablement pas loin de ce qu'aurait compris un lecteur ou auditeur hellénophone. En tout cas ce n'est absolument pas une raison pour réserver au premier verbe un sens concret et imposer au second un sens abstrait (adoration / hommage, du moins dans la mesure où les gestes et postures corporels associés à ces mots-là sont eux-mêmes perdus de vue.) |
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