| | La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. | |
| | |
Auteur | Message |
---|
free
Nombre de messages : 9921 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Jeu 30 Juil 2020, 11:38 | |
| Pourrais-tu me rappeler l'explication concernant le texte suivant :
"Et tous ceux-là, qui avaient reçu par leur foi un bon témoignage, n'ont pas obtenu ce qui avait été promis. Dieu, en effet, avait en vue quelque chose de supérieur pour nous, afin qu'ils ne soient pas portés à leur accomplissement sans nous" (11,39-40).
Le texte semble établir une opposition entre "ceux-là" qui n'ont pas obtenu ce qui avait été promis et le "nous" qui attendaient quelque chose de supérieur alors que les fidèles des temps passé aspiraient à une patrie céleste.
Merci pour ton aide. |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12270 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Jeu 30 Juil 2020, 12:34 | |
| L'explication, il y en aurait sans doute plus d'une.
Peut-être faut-il commencer par une traduction un peu plus serrée, même si elle paraît, dans un premier temps, moins compréhensible: Et tous [ceux-là] (le démonstratif n'est pas dans tous les manuscrits) at-testés (participe passif de martureô, où on peut entendre aussi bien "ayant été rendus témoins" que "ayant reçu un témoignage", cf. v. 2,4s; 12,1) par la foi, n'ont pas reçu la promesse (variante: les promesses), le dieu pré-voyant à notre sujet du meilleur / supérieur, de sorte qu'ils ne fussent pas rendus parfaits / accomplis sans / hors de nous.
Même si nous l'avons souvent fait au cours de ce fil et dans tous ceux que nous avons consacrés à l'épître aux Hébreux, il faut rappeler sommairement la perspective médio-platonicienne qui caractérise ce texte et qui gouverne l'usage particulier de tous ses termes-clés: il y a d'une part le monde des "ombres", temporelles, transitoires, et d'autre part l'éternel, qui n'est lui-même que figuré (mais d'une figuration "supérieure" à celle des "ombres") dans le "ciel" de l'idéalité (au sens platonicien des "idées", qui sont en quelque sorte l'"essence" et la "vérité" des "choses" phénoménales, à la lettre de toute ré-alité, de res = chose). La "perfection" ou l'"accomplissement", c'est le passage de l'un à l'autre; le "témoignage" et donc la "foi", c'est au contraire le signe de celui-ci (l'éternel) dans celui-là (le monde des ombres).
Moyennant quoi le sens paraît assez clair, et même simple pour peu qu'on arrive à s'engager dans ce type de pensée où "le temps" n'est pas tout, où il n'est du moins pas un horizon infini et indépassable: les "fidèles" (ou "croyants", il faut bien y entendre le mot "foi" qui est le leitmotiv du chapitre) de jadis (en l'occurrence, de l'Ecriture), par-delà leurs différences (notamment entre ceux qui ont tiré de leur foi des avantages temporels et ceux qui n'en ont tiré aucun, cf. le contraste au milieu du v. 35), n'ont pas connu d'autre "accomplissement" que celui qui est maintenant offert aux chrétiens, pour la bonne raison qu'il n'y en a qu'un seul pour tous: l'unique passage du temporel à l'éternel, dans le "Christ" de la fin des temps qui n'est pas seulement à un point du temps (c'est aussi bien le Melchisédek d'Abraham et le "Fils" origine des mondes, 1,1ss; qui précède toute "foi" comme il l'englobe, 12,1s: arkhègos et teleiotès de la foi, "pionnier" ou "initiateur" et "perfecteur" ou "accomplisseur", si l'on ose écrire, à la place du traditionnel "consommateur").
Dernière édition par Narkissos le Jeu 30 Juil 2020, 15:55, édité 1 fois |
| | | free
Nombre de messages : 9921 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Jeu 30 Juil 2020, 15:54 | |
| L’Épître aux Hébreux, elle, est aux antipodes d’une telle évolution .En effet, l’auteur ne met en avant aucun droit de propriété des patriarches ou d’Israël, mais affirme au contraire qu’ils vinrent s’établir en étrangers résidents sur la terre de la promesse, et que cette terre appartenait à d’autres . L’auteur de l’Épître affirme en outre que le peuple d’Israël n’est jamais vraiment entré en possession de la terre promise, même du temps de Josué (He 4, 8: «En effet, si Josué leur avait donné le repos, il n’aurait pas, après, parlé d’un autre jour»)! Comme le souligne Knut Backhaus, l’Épître aux Hébreux utilise l’expression «terre de la promesse» pour désigner non pas tant la terre promise que la terre sur laquelle est donnée la promesse, qui renvoie à l’événement Christ. L’auteur procède en fait à une réinterprétation radicale de la notion de terre promise, qui équivaut à une désacralisation des biens de la première alliance au profit d’une réorientation christologique.
Cette réinterprétation va à contre-courant de la tradition juive et rend la liste des figures bibliques du chapitre 11 très novatrice par rapport aux listes des grands ancêtres connues dans la littérature juive du Second Temple, comme Siracide 44 à 50 ou 1 Maccabées 2, 50-61. Pamela Eisenbaum a raison de voir dans les figures bibliques d’Hébreux 11 des héros chrétiens plutôt que juifs, et d’affirmer que le but de l’auteur est de «dénationaliser» l’histoire d’Israël . Elle écrit aussi: «God’s promises, which in biblical history are traditionally nationalistic – promises for land, temple, and monarchy – are depicted as not having been fulfilled, in order thata new ending might be grafted onto the story: the heavenly rest nowattainable because of Christ (vv. 39-40; cf. He 4,6-11)». Et elle conclutqu’Abraham et Moïse sont les héros paradigmatiques d’Hébreux 11 précisément parce qu’ils ne vivent pas l’accomplissement de ces promesses à dimension «nationale»
À la terre de Canaan qui demeura pour les patriarches une terre étrangère, l’auteur de l’Épître oppose en effet une patrie céleste (vv. 14-16),une notion à forte connotation médio-platonicienne que l’on rencontre à plusieurs reprises chez Philon . Dans le De Confusione Linguarum ,Philon écrit ainsi :
«77. […] tous ceux que Moïse appelle sages sont décrits comme des étrangers résidents. Leurs âmes ne constituent jamais une colonie établie hors du ciel; mais elles ont coutume de voyager dans la nature terrestre pour satisfaire leur envie de voir et de connaître. 78. Aussi, une fois qu’elles ont passé un certain temps dans le corps et qu’elles ont observé par son intermédiaire l’ensemble du monde sensible et périssable, retournent-elles vers l’endroit d’où elles s’étaient élancées au début, car elles estiment que leur patrie, c’est l’espace céleste, où elles jouissent de tous leurs droits, et que l’étendue terrestre où elles ont résidé leur est étrangère. En effet, pour ceux qui fondent une colonie, la terre qui les reçoit devient naturellement une patrie à la place de la cité mère, pour les voyageurs au contraire, c’est le pays d’où ils sont partis qui reste la patrie vers laquelle ils désirent revenir».
Immédiatement après, Philon illustre son propos en citant Gn 23,4, «Je suis un résident étranger et temporaire parmi vous»
Immédiatement après, Philon illustre son propos en citant Gn 23,4, «Je suis un résident étranger et temporaire parmi vous» .Le lien avec Hébreux 11, renforcé par cette référence commune à Gn 23,4, semble clair. Dans les deux cas, les patriarches sont présentés comme des étrangers voyageant dans ce monde sans s’y fixer, y compris lorsqu’ils se trouvent sur la terre promise. Cependant, plusieurs points différencient ce texte philonien (et d’autres portant sur le même thème) de l’Épître aux Hébreux. Tout d’abord, Philon propose une lecture allégorique de la vie des patriarches, qui débouche sur un enseignement inspiré du platonisme concernant la destinée de l’âme humaine. Selon cette lecture, l’âme, qui est d’origine céleste, doit si elle est sage vivre le temps de son existence terrestre comme un exil, et aspirer à retrouver sa vraie patrie, qui est céleste . En lien avec Gn 47,4 (les Hébreux déclarant aux Égyptiens: «Nous sommes venus pour séjourner, non pour habiter»), Philon écrit ainsi: «En vérité, toute âme de sage a reçu le ciel pour patrie, la terre comme lieu de séjour; elle considère la maison de la sagesse comme sienne, celle du corps comme propriété d’autrui, chez qui aussi elle doit séjourner». Les patriarches et les Hébreux symbolisent donc les âmes des sages, qui doivent se détourner de la corporéité et des passions pour contempler les réalités intelligibles et célestes, c’est-à-dire rechercher «le divin et sa nature avec un amour indicible pour la science» ( Leg. III, 84).Dans son interprétation allégorique des migrations d’Abraham ou des Hébreux, Philon est proche de la lecture allégorique médio- ou néopla-tonicienne des voyages d’Ulysse comme tribulations de l’âme. Lien. |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12270 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Jeu 30 Juil 2020, 16:43 | |
| (J'ai raccourci le lien.)
Beaucoup de précisions et de références très utiles dans cet article, mais à mon avis aussi une erreur d'aiguillage qui tient au "thème" imposé d'entrée de jeu: la "Terre promise" n'a aucun intérêt en soi pour l'épître aux Hébreux, pas non plus la "Ville" ni le "Temple" (auquel est d'ailleurs préférée une "tente" purement scripturaire, et dans l'Ecriture même mobile, détachée de tout "lieu" fixe), sinon comme "ombres" de l'éternel.
Comme on l'a souvent remarqué, l'épître aux Hébreux se distingue surtout de Philon parce que son allégorie n'est pas morale: ce que les "ombres" représentent et signifient, ce ne sont pas des "vertus" idéales, mais un au-delà de toute "idée". On peut la juger plus "religieuse" pour autant que cet au-delà coïncide avec le nom de "Dieu" -- et encore: il faudrait tenir compte du fait que celui-ci y "meurt", au moins en tant que "testateur", pour faire place en lui-même à l'éternel-et-immuable, chapitre 9; on peut aussi y voir un pas vers le néo-platonisme où ce ne sera plus le "Bien", mais l'"Un", qui sera désigné comme epekeina tès ousias, au-delà de l'essence ou de l'étantité. |
| | | free
Nombre de messages : 9921 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Ven 31 Juil 2020, 11:16 | |
| En 11,10, deux précisions sont fournies sur la cité attendue par Abraham et par ses descendants, hommes et femmes de foi : elle a de « solides fondations » et « Dieu en est l’architecte et le constructeur ». On revient à la métaphore de l’architecture, utilisée déjà en 3,3-4 pour la comparaison entre l’œuvre de Moïse et celle de Jésus ; le but est de certifier la totale fiabilité et l’indestructibilité de la ville nouvelle. La référence aux « solides fondations », dont on ne voit pas très bien ce que cela peut signifier pour une cité céleste (voir l’image de la ville en Ap 21,10-21), correspond à l’un des avantages reconnus à Jérusalem, une place forte parfaitement construite (« une ville dont les parties sont liées », Ps 122,3). Dieu en est le technitès kaï dèmiourgos, c’est-à-dire « l’architecte et le constructeur ». Alors que Dieu est généralement décrit comme le créateur du monde présent, l’Épître lui attribue aussi la « construction » de la cité céleste. Au départ, Dèmiourgos signifie simplement artisan, et c’est le sens à retenir ici, mais on connaît l’importance donnée au démiurge dans la littérature philosophique et religieuse de l’Antiquité, en particulier le nom donné à la divinité créatrice du gnosticisme. C’est le seul emploi de ce terme dans le Nouveau Testament. https://www.cairn.info/revue-etudes-theologiques-et-religieuses-2015-2-page-145.htm
À cette conception du monde, correspond la représentation de l'architecte créateur de mondes : Platon écrit qu'un theos tektonikos (dieu démiurge) a édifié le monde dans le Timée (env. Ve s. av. J.-C.) ; le Dieu créateur est l'architecte du temple et le bâtisseur de la ville sainte de Jérusalem dans l'Ancien Testament (...) La première mention du démiurge – dieu organisateur et créateur du monde, éternel géomètre – est souvent attribuée à Platon dans le Timée. Dans la bible, une occurrence du mot demiourgos est associée à dieu en tant que constructeur. "Car il attendait la cité qui a de solides fondements, celle dont Dieu est l'architecte et le constructeur." Nouveau Testament, Hébreux, chapitre 11, verset 10. [url=file:///C:/Users/pollet fanny/Downloads/48_161223_demos16-Fantasme-demiurge_MEP.pdf]file:///C:/Users/pollet%20fanny/Downloads/48_161223_demos16-Fantasme-demiurge_MEP.pdf[/url]
Dernière édition par free le Ven 16 Sep 2022, 11:43, édité 1 fois |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12270 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Sam 01 Aoû 2020, 23:46 | |
| Lien de téléchargement pour le second article. Quant au premier article (Bénétreau, 2015), n'aurait-il pas déjà servi de base à ce fil ? Je ne l'y vois nulle part référencé, mais la série de questions abordées y ressemble beaucoup... Dans le schéma platonicien, l'"architecte" qui conçoit le modèle "idéel" ou "intelligible" contraste avec le "démiurge", simple artisan qui se contente de le copier (approximativement) en réalisant les "choses sensibles" ou "phénoménales"; aussi éloignées qu'elles soient de Platon, nos oppositions entre "intellectuel" et "manuel", "ingénieur" et "technicien", ou même entre "projet", "concept", "plan" et "réalisation", voire entre "science" et "technique" ou "théorie" et "pratique", en dérivent. Dans la mesure toutefois où l'épître aux Hébreux applique les deux termes à la "construction" de la Jérusalem céleste = idéelle, et non à celle d'une ville ou d'un temple "matériel", cette opposition ne tient plus, ou alors elle se décale (rappelons que dans Hébreux les "cieux" mêmes doivent passer avec tout ce qui s'y trouve, malgré la supériorité de leurs "types" et "paradigmes" sur les "antitypes", "hypodigmes" et "ombres" terrestres et temporels; ce qui appellerait aussi à distinguer en "Dieu", d'une part l'éternel absolu, immuable et ineffable, et d'autre part le nom, la figure, le personnage et l'acteur, fussent-ils "célestes"). Il n'y a pas beaucoup de sens à "lister" des "métaphores", "images", "figures de styles" et autres "tropes" sans s'interroger sur ce qu'on entend par là: dans un sens la "métaphore" est coextensive au langage (si l'on y regarde bien, on ne parle jamais que "par métaphore"), dans un autre son usage est infiniment diversifié, du plus artificiel, superficiel ou décoratif, dont on pourrait facilement, croit-on par une autre métaphore, "faire l'économie", au plus essentiel, indissociable de la "pensée" même, sans quoi celle-ci ne se penserait tout simplement pas. Ce qui en décide, c'est le rapport de chaque "métaphore" (etc.) à un "schéma directeur" (double métaphore !) -- médio-platonicien ou autre. "Ciel" et "terre", "type" et "antitype", ce sont aussi des "images" ou des "façons de parler", mais sans lesquelles on ne peut tout simplement pas penser ce qui se donne ici à penser -- sauf à leur substituer d'autres "métaphores" qui aboutiraient nécessairement à une pensée différente. |
| | | free
Nombre de messages : 9921 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Ven 18 Sep 2020, 10:45 | |
| "nous a parlé, en ces jours qui sont les derniers, par un Fils qu'il a constitué héritier de tout et par qui il a fait les mondes" (1,2)
“par lui il a aussi créé l’univers” Il est toujours difficile de déterminer avec certitude comment faut-il interpréter les termes apparentés. Il n’y a de chevauchement sémantique certain qu’entre synonymes. Le terme technique Grec référant à la création à partir de rien est ‘‘ktizō,’’ cependant dans le présent texte il est fait usage du terme ‘‘poieō’’ qui signifiait former quelque chose à partir d’une substance préexistante. L’auteur a-t-il employé ces termes de manière synonyme y a-il une distinction spécifique intentionnelle ? C’est douteux qu’une distinction technique ait été voulue car le contexte théologique réfère à la création par la parole orale (ex nihilo, cfr. Gen. 1:6,9,16,20,24,26, mais au chap. 2:7 Dieu forma l’homme). Voir le livre de John Walton intitulé ‘‘The Lost world of Genesis One’’[Le monde perdu de Genèse chapitre Premier].
Le terme “monde” est littéralement “les âges” (aiōnos). Cela peut référer à la terre (cfr. Matth.28:20) ou aux âges (le temps). Jésus est sans aucun doute le créateur de tous les deux (cfr. Jean 1:3;Col. 1:16; I Cor. 8:6). Apparemment, l’auteur du livre des Hébreux emploie les deux mots, ‘‘aiōnos’’ (cfr. 1:2; 6:5; 11:3) et ‘‘kosmos’’ (cfr. 4:3; 9:26; 10:5; 11:7,38), comme des termes synonymes. http://www.freebiblecommentary.org/pdf/fre/VOL10_french.pdf |
| | | le chapelier toqué
Nombre de messages : 2602 Age : 77 Date d'inscription : 31/08/2010
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Ven 18 Sep 2020, 21:19 | |
| J'imaginais et l'ai vérifié par la suite que la référence que tu cite, Free, provient de l'interprétations d'évangéliques.
L'on remarque la prudence de l'analyste qui pose des questions et y répond en citant des auteurs et leurs ouvrages. Ce n'est pas une leçon ou des consignes balancées aux lecteurs, mais plutôt un encouragement à chercher à réfléchir. |
| | | free
Nombre de messages : 9921 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Ven 25 Sep 2020, 16:27 | |
| "nous a parlé, en ces jours qui sont les derniers, par un Fils qu'il a constitué héritier de tout et par qui il a fait les mondes" (Hé 1,2).
Le Fils a créé les « aivw/naj ». Ce substantif a donné lieu à diverses interprétations. Sa signification est d’abord temporelle et selon les occurrences la traduction peut être « siècles », « période », voire même « éternité ». À l’époque chrétienne, il peut prendre une connotation spatiale et signifier le « monde » ou la « création ». Le pluriel est certainement intentionnel. Mais la question est de savoir comment l’interpréter. Pour les commentateurs qui choisissent de conserver la connotation spatiale, les « siècles » sont synonymes de « cosmos » et de « ta. pa,nta ». Le pluriel, dans ce cas-là, permettrait d’englober les aspects visibles et invisibles des choses créées. Pour S. Bénétreau, le pluriel permet de rassembler les notions spatiale et temporelle et il propose la traduction suivante : « par qui il a créé le monde et la succession des âges ». Et il l’interprète ainsi : « L’auteur évoque bien la création, mais une création perçue, dès le départ, dans son déploiement temporel. Christ est le créateur non pas d’un univers figé mais d’un ordre des choses qui se met en mouvement et qui comporte des âges ». Selon J.P. Meier, le pluriel « aivw/naj » permet d’englober à la fois le temps/monde présent (He 9,9 (le temps présent)) et le temps/monde futur (He 6,5 (le monde à venir)). L’univers est ainsi considéré comme une succession d’âges. Comme Fils héritier, le Christ règne sur le vieux monde voué à passer qu’il a créé au commencement et sur le monde céleste où se trouvera l’humanité au terme de son pèlerinage sur la terre. Cette interprétation n’est pas assurée. En effet le verbe « poie,w » est utilisé en He 12,27 uniquement pour les réalités créées. En résumé, le mot « aivw/naj » est à rapprocher de « pa,ntwn ». Il se comprend comme une totalité comprenant tous les siècles, toutes les régions de l’univers, tous les êtres célestes et terrestres. https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00961175/document |
| | | free
Nombre de messages : 9921 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Mar 29 Sep 2020, 16:22 | |
| "C'est par la foi qu'Abraham obéit à un appel en partant vers un lieu qu'il allait recevoir en héritage : il partit sans savoir où il allait. C'est par la foi qu'il vint s'exiler sur la terre promise comme dans un pays étranger, habitant sous des tentes avec Isaac et Jacob, héritiers avec lui de la même promesse. Car il attendait la cité qui a de solides fondations, celle dont Dieu est l'architecte et le constructeur" (11,8-10).
Notes : Hébreux 11:9 la terre promise : litt. la terre de la promesse, cf. 6.12n.
l’Épître aux Hébreux utilise l’expression «terre de la promesse»
|
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12270 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Dim 11 Oct 2020, 15:25 | |
| "La terre promise" (ou "le pays promis", nom + participe passé à valeur adjectivale, épithète) est en soi une traduction parfaitement acceptable de la construction nominale "la terre / le pays de la promesse", hébraïsme habituellement calqué dans le grec de la Septante -- à condition bien sûr de ne pas la charger et la surdéterminer par l'usage français subséquent de "la Terre promise" (avec majuscule) comme équivalent de "Canaan", "Palestine" ou "Israël": il suffit de lire le contexte pour voir qu'ici la "promesse" (v. 9bs, 11, 13, 17, 33, 39 etc.) ne se limite précisément pas à une "terre" ou un "pays" quelconque, ni à rien de "matériel", "terrestre", "temporel"; les Patriarches eux-mêmes ne s'arrêtent pas à de telles choses (ou lieux) mais visent déjà, comme les chrétiens destinataires, l'éternel. Sur les posts précédents, je ferai simplement remarquer que la première phrase de la Septante (Genèse 1,1) traduit l'hébreu br' non par ktizô (traditionnellement "créer") mais par le beaucoup plus courant poieô ("faire"), ce qui suffirait à déjouer toute distinction trop nette entre "faire" et "créer": le concept de "création ex nihilo" ne se trouve pas dans la Genèse, ni en hébreu ni en grec (les ténèbres et l'océan primordial que Dieu ne "crée" pas mais se contente de délimiter pour "créer", ce n'est pas exactement "rien", nihil), ni même dans le NT (ce qui s'en rapprocherait le plus, en Romains 4, concerne la "résurrection" et non la "création"); il faut en fait attendre la théologie du IIe siècle, dans le judaïsme phariséo-rabbinique comme dans l'Eglise "orthodoxe", pour qu'il soit affirmé explicitement (si logique qu'il apparaisse par ailleurs dans un monothéisme qui ne peut concevoir d'autre "origine" que "Dieu"). Pour ce qui est des "âges" ou "mondes" d'Hébreux 1,1ss, voir (p. ex.) ici. |
| | | free
Nombre de messages : 9921 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Mar 13 Oct 2020, 12:22 | |
| - Citation :
- Pour ce qui est des "âges" ou "mondes" d'Hébreux 1,1ss, voir (p. ex.) ici.
Narkissos, Sur ce même fil tu avais écrit : Je ne suis pas sûr, par ailleurs, que la pluralité des "âges" ou "mondes" ( aiôna au pluriel, comme en 1,2) se limite à l'opposition du "visible" et de l'"invisible", même si elle l'inclut -- ce qui est possible, car comme nous l'avons vu il y a peu, dans la logique de "dépassement" de l'épître aux Hébreux les "cieux" mêmes doivent être dépassés en tant qu'ils sont encore "faits à la main", fût-ce celle de Dieu (1,10ss; comme dans la tradition platonicienne les "idées" qui constituent pourtant l'essence même des choses ouvrent sur un "au-delà de l'essence" ou de l'"être", le "Bien" chez Platon et l'"Un" chez Plotin). Que penses-tu de ce commentaire déjà cité ? Le pluriel, dans ce cas-là, permettrait d’englober les aspects visibles et invisibles des choses créées. Pour S. Bénétreau, le pluriel permet de rassembler les notions spatiale et temporelle et il propose la traduction suivante : « par qui il a créé le monde et la succession des âges ». Et il l’interprète ainsi : « L’auteur évoque bien la création, mais une création perçue, dès le départ, dans son déploiement temporel. Christ est le créateur non pas d’un univers figé mais d’un ordre des choses qui se met en mouvement et qui comporte des âges ». Selon J.P. Meier, le pluriel « aivw/naj » permet d’englober à la fois le temps/monde présent (He 9,9 (le temps présent)) et le temps/monde futur (He 6,5 (le monde à venir)). L’univers est ainsi considéré comme une succession d’âges. Comme Fils héritier, le Christ règne sur le vieux monde voué à passer qu’il a créé au commencement et sur le monde céleste où se trouvera l’humanité au terme de son pèlerinage sur la terre. Cette interprétation n’est pas assurée. En effet le verbe « poie,w » est utilisé en He 12,27 uniquement pour les réalités créées. En résumé, le mot « aivw/naj » est à rapprocher de « pa,ntwn ». Il se comprend comme une totalité comprenant tous les siècles, toutes les régions de l’univers, tous les êtres célestes et terrestres. https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00961175/documentAutre question ... En Hé 2,5 (et 6,5) il est question d'un "monde à venir" ... A la première lecture, nous pourrions croire qu'il s'agit d'un monde qui n'est pas encore venu à l'existence ... Or il me semble que ce "monde à venir" est une autre dimension (pour employer un terme moderne) qui n'est pas encore accessible mais qui a existé depuis toujours ... Tu l'a peut-être déjà expliqué ...Mais comment comprendre la formule un "monde à venir" en corrélation avec un monde sans commencement ? |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12270 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Mar 13 Oct 2020, 14:04 | |
| Mon commentaire ( supra 12.3.2020) portait sur 11,3 ( aiôn au pluriel, comme en 1,2). Sur l'aspect irréductiblement "spatio-temporel" d' aiôn je suis d'accord (c'est à peu près ce que j'essayais de dire dans l'autre fil, 10.10.2020, non seulement sur l'usage "biblique" ou autre de ce terme grec mais sur les conditions générales de la "pensée" qui requièrent la distinction "théorique" d'un "espace" et d'un "temps" qu'il est pourtant impossible de séparer l'un de l'autre et de concevoir l'un sans l'autre -- Kant a à peu près tout dit là-dessus). La question de "l'âge-monde à venir" est plus complexe: comme on l'a vu c'est une formule commune à l'eschatologie juive (notamment pharisienne) et chrétienne (tout au moins dans les courants chrétiens portés sur l'eschatologie, cf. p. ex. Matthieu 12,32), qui s'entend a priori dans un sens temporel (futur, que l'on considère qu'il n'est pas encore là ou qu'il a déjà commencé). Mais son usage par l'épître aux Hébreux est beaucoup plus problématique, dans la mesure où celle-ci témoigne d'une tout autre notion de l'éternité: non pas seulement future mais antérieure à tout "âge-monde" et pour ainsi dire tangente à tout point du temps (Melchisédeq, Jésus, l'"aujourd'hui" qui est à la fois celui où l'on entend la parole de Dieu et celui de l'engendrement du Fils), ce qui dépasse (infiniment, c'est le cas de le dire) la perspective d'une eschatologie futuriste ordinaire. Par contre je ne vois pas vraiment dans l'épître aux Hébreux (ni dans le NT en général) l'idée d'un "monde sans commencement". L' aiôn sous son aspect temporel peut être conçu sans commencement, en "Dieu" (l'éternité passée, si l'on peut dire: il ne peut de toute façon pas être conçu autrement, l'idée d'un "commencement du temps" est une contradiction dans les termes), mais sous son aspect de "monde" distinct de "Dieu" il a bel et bien un commencement. Toutefois il ne s'ensuit pas que ce commencement doive être pensé comme "création ex nihilo" ou comme séparation d'avec "Dieu", il peut tout aussi bien l'être dans la continuité du divin éternel: engendrement, émanation, expansion, expression, manifestation, etc. |
| | | free
Nombre de messages : 9921 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Mer 21 Oct 2020, 14:23 | |
| "Après avoir autrefois, à bien des reprises et de bien des manières, parlé aux pères par les prophètes, Dieu nous a parlé, en ces jours qui sont les derniers, par un Fils qu'il a constitué héritier de tout et par qui il a fait les mondes" ((1,1-2).
"devenu d'autant supérieur aux anges qu'il a hérité un nom plus remarquable que le leur" (1,4)
"Ne sont-ils pas tous des esprits serviteurs, envoyés pour exercer leur ministère en faveur de ceux qui vont hériter le salut ?" (1,14)
Le verbe "hériter" et ses dérivés sont très présents dans l'épitre aux hébreux. Il est question que le Fils soit "héritier de tout" et qu'il hérite d'un nom plus remarquable que les anges. Le "tout du v 2 semble désigner tout l'univers créé, les mondes visibles et invisibles. Le Fils est investi du pouvoir et de l'autorité sur tout en vertu de sa filiation. Son autorité lui permet de décider du sort (disparition) de la création, du ciel et de la terre (1,11-12). Le terme "hériter" indique un transfert de "propriété" de pouvoir et de compétences.
Cette supériorité que la Fils a reçu ce traduit par le "nom" qu'il a reçu. Le "nom" qu'a hérité le Fils bien différent de celui des anges. De quel "nom" s'agit-il ? Le titre "grand prêtre" est-il le nom dont le Fils a hérité ? Est-ce un "nom" inconnu et mystérieux qui exprime le mystère du Fils dans sa relation à Dieu et au monde ? Un "nom" qui met en relief la dignité et la grandeur du Fils ?
Ce texte nous renvoi à Ph 2,10 : "pour qu'au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre et sous la terre". Les deux textes décrivent la souveraineté et et exalte l'honneur du Fils. Le "nom" hérité est à la mesure du statut du |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12270 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Mer 21 Oct 2020, 17:32 | |
| Voir aussi 6,12.17; 9,15; 11,7ss; 12,17 les autres occurrences de klèronomeô et de ses dérivés pour "hériter", "héritier", "héritage" dans les traductions traditionnelles. Dans la Septante, cette famille lexicale sert à traduire plusieurs termes hébreux qui, à côté de l'héritage proprement dit, peuvent évoquer le patrimoine, la propriété, la possession ou la jouissance d'un bien foncier ou non, l'installation, l'acquisition ou la conquête -- ce qui affecte forcément son usage "judéo-chrétien", même en dehors de toute citation ou réminiscence de textes de l'AT. Il s'ensuit qu'il ne faut pas systématiquement chercher dans tous ses emplois la notion précise d'héritage avec tout ce qu'elle implique (mort, filiation, succession, transmission, etc.): c'est le contexte immédiat (la phrase, la péricope) ou plus large (le livre, l'oeuvre) qui en décide. Des formules plus ou moins stéréotypées comme "hériter la terre, le royaume, la vie éternelle" peuvent s'entendre comme de simples "façons de parler", en (judéo-)grec comme en français, au sens d'"obtenir" ou d'"acquérir", sans qu'il y ait lieu d'insister sur le concept d'héritage. Il reste toutefois plausible que ce concept soit entendu plus strictement (quoique toujours métonymiquement) dans l'épître aux Hébreux qu'ailleurs, surtout si l'on en juge par son association à la notion de "testament" au chapitre 9 ( diathèkè entendue non comme "alliance", "pacte" ou "traité" en général, mais bien comme "testament" irrévocable d'un mort, fût-il "Dieu" en l'occurrence; cf. supra 24.3.2020, ici à partir du 21.2.2020, ou là). Cela peut valoir aussi pour le "nom": certes, des textes comme Philippiens 2 ou Jean 17 disent sensiblement la même chose, mais pas de la même manière: entre un nom "accordé gracieusement" ( kharizomai, Philippiens), "donné" ( didômi, Jean) et "hérité" ( klèronomeô, Hébreux), il est permis de percevoir des nuances, surtout si celui qui parle d'héritage n'en parle pas à la légère et convoque par ailleurs les notions connexes de la mort et du testament pour exprimer l'irrévocable (en rapport avec sa conception très particulière de l'éternité et de l'une fois pour toutes, je n'y reviens pas). |
| | | free
Nombre de messages : 9921 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Jeu 22 Oct 2020, 12:39 | |
| "Et encore, quand il introduit le premier-né dans le monde, il dit : Que tous les anges de Dieu se prosternent devant lui !" (Hé 1,6)
"et de l'assemblée des premiers-nés inscrits dans les cieux ; de Dieu, juge de tous ; des esprits des justes portés à leur accomplissement" (12,23)
Le titre "premier-né" est également récurrent dans l'épître aux Hébreux. En Hé 1,6 ce titre est associé à la gloire du Fils qui possède l'autorité sur la monde en l'associant à une idéologie royale (1,5-7 et 10). Ce titre renforce également les concepts d'héritier et de primauté (peut-être comme en Col 1,15 et 18 ?). Il exprime l'idée de la participation à la souveraineté divine.
En Hé 12,23, l'appellation : "l'assemblée des premiers-nés" semble désigner les fidèles de l'AT et les chrétiens. Les croyants reçoivent le statut de fils de Dieu et de frères du Christ. Selon Hé 3,1, ils ont en "partage une vocation céleste" dans l'esprit de Rm 8,29 :
"Car ceux qu'il a connus d'avance, il les a aussi destinés d'avance à être configurés à l'image de son Fils, pour qu'il soit le premier-né d'une multitude de frères". C'est en qualité de Fils "premier-né" que le Chris est introduit dans le monde habité afin que des hommes deviennent des fils glorifiés. N'oublions pas Hé 11,28 qui fait référence "aux premiers-nés des Israélites". |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12270 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Jeu 22 Oct 2020, 16:15 | |
| Au-delà des références et allusions intertextuelles qui nous échappent en partie (p. ex. Psaume 89,28, effectivement "royal", pour Hébreux 1,6, outre les spéculations sur l'Adam originel supérieur aux anges dont nous avons déjà beaucoup parlé, p. ex. ici), il y a une idée toute simple, tellement simple qu'il est facile de la perdre de vue, mais qui commande probablement toute pensée du temps ou de l'histoire -- spécialement antique, monothéiste ou moniste, mais pas seulement -- comme un horizon indépassable: cycle ou cercle, tout au moins circuit fermé, qui s'il n'est pas répétitif n'en fait pas moins coïncider le "commencement" et la "fin": alpha et oméga, premier et dernier, etc.; en régime monothéiste, de "Dieu-seul" à "Dieu-tout-en-tous", comme on en parlait récemment, quels que soient les détours et les complexités de l'histoire intermédiaire: la figure ouvrante, Dieu, Sagesse, Logos, Homme primordial, Fils unique ou premier-né par qu(o)i l'un donne sur le multiple est aussi celle qui ramène le multiple à l'un, sur le mode de la ré-union, du rassemblement, de la réconciliation ou de la récapitulation eschatologique: rien n'est à la fin qui ne soit aussi au commencement de quelque manière (ici l'assemblée des premiers-nés qui font écho au premier-né d'avant tout monde, ailleurs les élus en Christ avant la fondation ou le lancer du monde). Tout cela peut nous paraître très exotique, il reste que nous ne saurions pas penser une "histoire" sans la mettre en boucle d'une façon similaire, ne serait-ce qu'en rapportant sa fin à son commencement sur le mode du projet, de la cause ou de la possibilité. |
| | | free
Nombre de messages : 9921 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Jeu 22 Oct 2020, 16:47 | |
| "Car celui qui consacre et ceux qui sont consacrés sont tous issus d'un seul. C'est la raison pour laquelle il n'a pas honte de les appeler frères" (2,11)
rien n'est à la fin qui ne soit aussi au commencement ... Le fait que les croyants soient des frères du Christ par une origine divine commune implique un commencement commun qui explique ce retour au UN.
Notes : Hébreux 2:11issus d’un seul ou, peut-être, d’une même origine ; l’expression est diversement interprétée (Dieu ? Adam ? Abraham ? cf. 11.12 ; Es 51.2 ; Ez 33.24 ; Ac 17.26 ; Rm 5.12-21 ; 1Co 8.6 ; 15.22,45ss).
Paradoxalement le verset 14 établit cette fraternité à travers le partage de "la même condition", "le sang et la chair" et non d'une origine commune divine mais par la solidarité fraternelle par assimilation à la nature humaine. La chair du Christ sauve de l'esclavage de la mort et du diable. La chair du Christ et son sang sont le "chemin nouveau" qui donne "libre accès au sanctuaire" (10,19-20). |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12270 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Jeu 22 Oct 2020, 17:57 | |
| Pour le coup, je ne trouve pas ça si paradoxal: c'est bien parce que l'"origine", avec la "nature" ou l'"essence" qui s'ensuit, est foncièrement une et la même pour tous, en amont de toute distinction entre "dieu" et "homme" (relire ce qui précède jusqu'au v. 10), que le Fils originel peut accompagner les siens, "frères" ou "enfants" (v. 12s), jusqu'au terme de leur parcours dans une "condition" ("le sang et la chair") qui ne saurait lui être totalement étrangère, puisqu'elle provient de la même "origine": la fin de ce parcours se confondant avec son commencement dans une éternité en-deçà, au-dessus, en-dessous et au-delà de toute "histoire" temporelle, si j'ose ce pléonasme, par la mort qui passe "le voile de la chair" et son jeu d'"ombres". Si l'on n'y mêle pas le concept ultérieur de séparation métaphysique absolue entre "Dieu" et la "création", le "monde", la "matière" ou l'"homme", il n'y a là rien que de très logique -- et de parfaitement circulaire, comme l'est au fond toute logique. |
| | | free
Nombre de messages : 9921 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Dim 25 Oct 2020, 21:12 | |
| Aussi devait-il devenir en tout semblable à ses frères, afin d'être un grand prêtre compatissant et digne de confiance dans le service de Dieu, pour faire l"'expiation des péchés du peuple. Car du fait qu'il a souffert lui-même quand il a été mis à l'épreuve, il peut secourir ceux qui sont mis à l'épreuve" (2,17-18).
L'expiation est présentée comme la fonction principale du Christ en qualité de grand prêtre. Dans ce texte, il est question de devenir grand prêtre, ainsi Jésus est devenu grande prêtre au terme de l'expérience douloureuse qui l'a amené à l'accomplissement. Il y a un lien entre la solidarité humaine et le sacerdoce, Jésus devait devenir "en tout" semblable à ses frères, donc participer pleinement à la condition humaine. C'est là, peut être, une caractéristique de l'épitre aux hébreux, le sacerdoce repose sur cette exigence de solidarité humaine et non sur la séparation. L'expiation implique la délivrance de la sphère d'influence du diable (2,15). |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12270 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Dim 25 Oct 2020, 22:06 | |
| C'est une nécessité structurelle de la logique très particulière de l'épître aux Hébreux que tout ce qui se distingue au niveau des "ombres", personnages ou événements de l'histoire ou du récit mais aussi mots et concepts, actions et fonctions, se confonde dans l'éternité absolue de la référence: le Fils-Adam originel, Melchisédek ou Jésus sont en définitive le même, mais aussi bien le prêtre, la victime et les bénéficiaires, le processus d'habilitation et d'ordination du prêtre (teleioô etc., perfection-accomplissement, hagiazô etc., sanctification-consécration, et ainsi de suite) et l'exercice de son office (sacrifice, intercession) qui sont normalement successifs (il faut devenir prêtre avant d'agir valablement en prêtre). Tout cela ne renvoie qu'à un seul "événement éternel", si l'on ose dire car à la lettre un "événement éternel" est précisément un non-sens, autrement dit l'impensable et l'inexprimable. |
| | | free
Nombre de messages : 9921 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Dim 25 Oct 2020, 22:24 | |
| Car ce n’est pas à des anges qu’il a soumis la terre habitée à venir, dont nous parlons." (2,5)
La formule "terre habitée" est une spécificité et une caractéristique de la TMN ( voir : http://djep.hd.free.fr/LaReferenceBiblique/?Livre=58&Chap=2&Vers=5 ) , ce qui permet à la Watch d'insister sur l'aspect terrestre de l'espérance. or, il me semble que ce monde venir n'a rien à voir avec notre globe terrestre, puisque la finalité des de tous les croyants (selon Hébreux) c'est d'être dans la présence de Dieu.
Un extrait : En revanche, en 10,1 la loi possède « une ombre des biens à venir et non pas l’essence même des choses » : on retrouve l’idée d’une opposition entre deux mondes, le monde des esquisses et celui de « l’essence même des choses », mais c’est un monde « à venir ». On ne peut oublier, cependant, que les croyants participent déjà aux biens attendus, comme le montre 6,5 : « ils goûtent la bonne parole de Dieu et les puissances du monde à venir ». Martin Karrer formule ainsi cette tension : « le regard porté sur le ciel se croise avec l’attente de l’accomplissement à venir ». https://www.cairn.info/revue-etudes-theologiques-et-religieuses-2015-2-page-145.htm |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12270 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Dim 25 Oct 2020, 23:17 | |
| Formellement ce n'est pas faux: l'oikoumenè (cf. "oecuménique") dérive d'oikos, "maison" (d'où tous nous "éco-"), c'est un participe passif substantivé qu'on pourrait traduire littéralement "la construite" ou "la bâtie", à la rigueur "l'habitée", le nom féminin sous-entendu étant a priori la "terre" (gè, féminin aussi en grec). Mais c'est surtout à l'époque du NT une désignation courante de l'ensemble des territoires de l'empire (romain: emblématiquement en Luc 2, pour le décret de César Auguste). On pourrait traduire plus "fonctionnellement" "l'empire à venir", mais bien sûr "monde" convient parfaitement (cf. l'équivalent de "tout", ta panta, au v. 8).
Comme on l'a vu récemment à propos de l'aiôn, l'âge-monde (à venir) qui est ici un quasi-synonyme, la question majeure est d'apprécier l'usage particulier que l'épître aux Hébreux fait de la terminologie eschatologique commune: dans la plupart des eschatologies juives (notamment pharisienne) et chrétiennes l'"à-venir" (mellon, erkhomenon) est bien conçu dans un sens essentiellement temporel, comme un "futur", mais dans l'épître aux Hébreux l'accent et la perspective s'inversent: il ne s'agit pas d'insister sur le fait que l'"éternité" est "à venir", mais au contraire de montrer que l'"à-venir" n'est autre que l'éternel qui précède et surplombe tout monde-âge, qui était avant toute "histoire" et s'exprime tout au long de celle-ci, aussi bien dans le Melchisédek de la Genèse que dans la foi des anciens, dans les "ombres" du tabernacle et des sacrifices, dans l'"une-fois-pour-toutes" de Jésus à la fin des temps-mondes et dans l'"aujourd'hui" de la foi, de l'écoute et de l'obéissance des croyants, qui se confond avec l'"aujourd'hui" de l'engendrement du Fils. |
| | | free
Nombre de messages : 9921 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Dim 25 Oct 2020, 23:49 | |
| "tu as tout mis sous ses pieds. En lui soumettant tout, en effet, il n'a rien laissé qui ne lui soit soumis. Maintenant, certes, nous ne voyons pas encore que tout lui soit soumis" (2, Ce texte signifie-t-il que les croyants ne peuvent voir ou percevoir dans l'immédiat la réalité de cet "éternel qui précède et surplombe tout monde-âge, qui était avant toute histoire" ? |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12270 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. Lun 26 Oct 2020, 00:03 | |
| Ils ne le "voient" que dans le Christ (lire la suite)... |
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. | |
| |
| | | | La lettre aux Hébreux son contenu et son auteur éventuel. | |
|
Sujets similaires | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |