Etre chrétien ou pas?

apporter une aide et fournir un support de discussion à ceux ou celles qui se posent des questions sur leurs convictions
 
PortailPortail  AccueilAccueil  RechercherRechercher  Dernières imagesDernières images  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  
Le deal à ne pas rater :
Cdiscount : -30€ dès 300€ d’achat sur une sélection Apple
Voir le deal
-39%
Le deal à ne pas rater :
Ordinateur portable ASUS Chromebook Vibe CX34 Flip
399 € 649 €
Voir le deal

 

 les leçons du ciel

Aller en bas 
3 participants
Aller à la page : 1, 2  Suivant
AuteurMessage
Narkissos

Narkissos


Nombre de messages : 11940
Age : 64
Date d'inscription : 22/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeSam 09 Mai 2015, 17:48

Il (Yahvé) le (Abraham) fit sortir dehors (sic) et lui dit: Regarde donc le ciel et compte les étoiles, si tu peux les compter. Et il lui dit: Ainsi sera ta descendance (litt. ta semence). Genèse 15,4 (cf. 22,17; 26,4 etc.).

Levez les yeux en haut et regardez !
Qui les a créés, ceux-là ?
C'est celui qui fait sortir leur armée au complet.
Il les appelle tous par leur nom,
par son grand pouvoir et par sa force puissante:
il n'en est pas un qui fasse défaut.
Pourquoi dis-tu, Jacob,
pourquoi répètes-tu, Israël:
Ma destinée est cachée à Yahvé,
mon droit passe inaperçu de mon Dieu ?
Ne le sais-tu pas ?
Ne l'as-tu pas entendu ?
C'est Yahvé, le Dieu de pérennité,
qui crée les extrémités de la terre;
il ne s'épuise ni ne se fatigue;
son intelligence est insondable.
Il donne de la force à celui qui est épuisé
et il augmente la vigueur de celui qui est à bout de ressources.
Les adolescents s'épuisent, ils se fatiguent,
les jeunes gens finissent par trébucher,
mais ceux qui espèrent Yahvé renouvellent leur force.
Ils prennent leur essor comme les aigles;
ils courent et ne se fatiguent pas,
ils marchent et ne s'épuisent pas.
Isaïe 40,26ss.

Quand je regarde ton ciel, œuvre de tes doigts,
la lune et les étoiles que tu as mises en place,
qu'est-ce que l'homme, pour que tu te souviennes de lui,
qu'est-ce que l'être humain, pour que tu t'occupes de lui ?
Psaume 8,4s.

Dieu n'est-il pas haut dans le ciel?
Regarde la hauteur
(la tête) des étoiles, comme elles sont élevées !
Et tu dis: Qu'est-ce que Dieu connaît?
Les nuages sont un secret pour lui, il ne voit rien;
il chemine sur la voûte du ciel.
Eliphaz in Job 22,12ss.

Pas grand-chose de commun à ces quatre passages, sinon l'invitation au même mouvement, et au même moment: sortir (d'une tente, d'une maison, d'un temple ou d'une prison, d'une "situation", d'un "problème", d'une "perspective") et lever les yeux, la nuit, vers un ciel étoilé que les théologiens qualifieraient peut-être de "physique" ou de "matériel" mais qui ne se distingue généralement pas, dans les textes "bibliques", des "cieux" de la divinité.

Regarder le ciel, c'est, par rapport à n'importe quel problème "humain", fût-il "théologique", le hors sujet et la mise en abyme, la décontextualisation et le décadrage absolus, où toute mesure se perd dans l'incommensurable, tout calcul dans l'incalculable, toute maîtrise dans l'immaîtrisable; où tout "sens" et toute "valeur" se volatilisent ou s'effondrent dans le sans-fond. Expérience réelle et sensible pourtant, banale et redoutablement proche même de ceux qui ne la font jamais, et plus étrang(èr)e ainsi (unheimlich, avec ce que ce mot suggère d'inhospitalité, pas forcément hostile mais réfractaire à toute familiarité) qu'un "divin" imaginaire bâti et bordé de culture et de culte. Fascinante et vertigineuse à la fois. La diversité des cosmologies préalables, de l'astrologie antique à l'astronomie moderne, ne change d'ailleurs pas grand-chose à son effet.

D'un tel "dépaysement" l'homme revient, sans doute, à lui-même et à sa demeure, à sa nomination et à sa numération, à sa mesure et à ses calculs; au langage et à la représentation, avec des mots, des phrases et des leçons, mais très différentes selon le cas -- de la "foi" en des ressources insoupçonnées à une "sagesse" désabusée qui relativise tout, du "courage" à l'"indifférence". Reste que la leçon, quelle qu'elle soit, n'est pas assimilable, ni intégrable. Quand on croit l'avoir "comprise", il est temps de ressortir et de relever les yeux.
Revenir en haut Aller en bas
http://oudenologia.over-blog.com/
Narkissos

Narkissos


Nombre de messages : 11940
Age : 64
Date d'inscription : 22/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeLun 03 Oct 2022, 16:13

Je m'étais déjà étonné que ce post fût resté -- plus de sept ans maintenant -- sans écho; j'y repense aujourd'hui, curieusement, à partir des discussions sur l'épître aux Hébreux: quoi de plus extérieur, étranger, inassimilable, inappropriable, comme le "ciel", qu'une "éternité" dont on ne peut même plus penser qu'elle "existe", sinon au sens paradoxal de l'ek-sister ou de l'ek-stase, de ce qui reste à jamais dehors, hors de tout "soi" ? De fil en aiguille, j'ai envie d'y raccrocher d'autres mots, comme la "déclosion" de Jean-Luc Nancy, ou l'Ouvert (das Offene) de Rilke (cf. ici, traduction là).

Le ciel c'est l'ouverture sans fin -- les "cieux des cieux" ne suffisent pas à Yahvé en 1 Rois 8//, et les "cieux" qui figurent l'éternel en Hébreux doivent encore être dépassés en tant qu'ils ne sont que figure, spatio-temporelle, de ce qui par définition n'est jamais nulle part.
Revenir en haut Aller en bas
http://oudenologia.over-blog.com/
le chapelier toqué

le chapelier toqué


Nombre de messages : 2573
Age : 76
Date d'inscription : 31/08/2010

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeLun 03 Oct 2022, 17:05

Depuis le milieu des années 1990 (en 1995 très précisément) date de la découverte des premières exoplanètes  par les astronomes suisses Michel Mayor et Didier Queloz, les astrophysiciens n'ont de cesse de chercher de nouvelles "sœurs" de la terre.

Cependant ce ciel n'a pas encore révélé celle qui serait une jumelle de notre planète ou à tout le moins une proche parente. Ainsi même après des "fouilles" du ciel très poussées nous nous trouvons toujours seuls dans l'univers.

Notre désir de trouver des humains dans l'univers, mis à part nous bien entendu, notre questionnement quant à notre rôle exact tend à nous prouver que "Dieu" nous titille encore.
Revenir en haut Aller en bas
Narkissos

Narkissos


Nombre de messages : 11940
Age : 64
Date d'inscription : 22/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeLun 03 Oct 2022, 18:08

Du (ou de la) Solaris de Tarkovski (où que l'homme aille il ne cherche qu'un miroir) au Mars Attacks de Tim Burton (de la vie intelligente ailleurs, ça prouverait au moins qu'il y en ait quelque part), le filon aura été creusé dans tous les sens...

Il n'est évidemment pas besoin d'aller si loin pour se demander si on cherche l'autre, le différent, le même ou le semblable, chez soi ou en face, et même chez "Dieu" le cas échéant. La réponse reste ambiguë de part en part.
Revenir en haut Aller en bas
http://oudenologia.over-blog.com/
free




Nombre de messages : 9636
Age : 62
Date d'inscription : 21/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeMar 04 Oct 2022, 13:18

LE PHILOSOPHE ET LE CIEL 

Le Père Lagrange, il y a longtemps, offrait une explication plus que plausible de cet usage, qui troque le mot « Dieu » contre le mot « ciel », comme si celui-ci désignait le même objet que celui-là. C'est probablement une manière commode d'éviter ce à quoi la piété juive répugne : prononcer, sans détour, le nom de Dieu. Soit ! Il fallait un détour ! Mais pourquoi celui-là? Pourquoi, en d'autres termes, s'il faut dire Dieu sans dire « Dieu », choisir, pour le désigner sans le nommer, un mot qui nous renvoie à l'espace au-dessus de nos têtes, plutôt que l'un ou l'autre parmi les mille trésors que contient chaque langue? Pourquoi, justement, le ciel ? Ne demandons pas : en vertu de quel symbolisme? Car, alors, il faudrait encore expliquer l'invention du symbole. Demandons de suite: en vertu de quelle affinité? Au deuxième chapitre de sa Philosophia perennis, A. Huxley donne ainsi à entendre, en termes savants, que, si « l'être de Dieu est "aux cieux", (c'est que) la nature divine est autre (...) que la nature des créatures en qui Dieu est immanent ». L'explication ne manque pas de sens. Mais elle ne résout pas notre question. Elle la recule tout simplement. D'où viendrait, en effet, au mot « ciel » sa propriété d'évoquer l'altérité absolue ? 

Le paradoxe voudrait qu'on réponde qu'il tient cette propriété de la divinité de l'objet qu'il désigne à l'origine. Et cette réponse, dans le fait, est sans doute celle qui
satisfait le mieux. L'affinité du ciel et de Dieu, sur laquelle on s'interroge quand le ciel est devenu l'espace qu'on a dit, n'est que le souvenir de l'identité de l'un et de l'autre avant qu'on ne s'avise d'abolir cette identité. Il fut un temps où le ciel était Dieu, un temps, si l'on préfère, où était un dieu Ciel.

(...)

Sujétion, donc, de la physique aux dogmes de la plus ancienne théologie? Il peut sembler, encore que le Stagirite soit parfaitement conscient des croyances relatives au ciel, qu'il sait liées à la signification fondamentale du mot ouranos : «d'habitude, écrit-il, c'est avant tout l'extrémité et le haut que nous appelons ciel, là où réside aussi, disons-nous, le divin dans sa totalité ». Si préjugé il y a dans la doctrine du philosophe, il faudrait donc admettre que celui-ci ne s'est pas affranchi de la croyance évoquée à l'instant, laquelle jouerait, à son insu, le rôle de postulat dans ses recherches. À moins qu'il ne cautionne personnellement cette croyance afin de bâtir sur elle la physique du ciel ! La première hypothèse ne saurait être exclue a priori. Quant à la seconde, quelque invraisemblable qu'elle nous puisse sembler, elle s'est révélée a posteriori vérifiée au jugement d'un interprète aussi autorisé que P. Moraux. À vrai dire, selon Moraux, ce n'est pas, comme telle, la vieille croyance à la divinité du ciel qu'Aristote aurait adoptée pour asseoir ses thèses physiques, mais la forme nouvelle que lui aurait donnée Platon. Mais la nuance ne compte guère. Car, sous une forme ou sous une autre, l'opinion sur laquelle se fonderait le philosophe fournit un argument d'autorité, où la foi, sanctionnée ou non par Platon, hypothèque la recherche et l'oriente en un sens précis : « la religion cosmique et la théologie astrale, écrit Moraux, ont fourni à la cosmographie d'Aristote le principe de la perfection des êtres célestes, principe d'où le philosophe déduit plusieurs de ses thèses sur les qualités, la forme et les mouvements de l'univers, du ciel, des sphères et des astres ».

https://www.erudit.org/fr/revues/ltp/1987-v43-n2-ltp2128/400300ar.pdf
Revenir en haut Aller en bas
Narkissos

Narkissos


Nombre de messages : 11940
Age : 64
Date d'inscription : 22/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeMar 04 Oct 2022, 14:35

Lecture fort instructive (pour moi) sur son sujet principal (Aristote), mais aussi pertinente dans son préliminaire (en partie) "biblique" (chose assez rare pour un texte philosophique)...

Les énoncés théologiques de forme "spatiale" sont en effet les plus marquants: être (vivre, se mouvoir, Actes 17) "en" Dieu, "en" Christ, ou à l'inverse avoir Dieu, le Christ ou son esprit "en" soi, c'est le langage de prédilection de la piété ou de la mystique, qui se prête à tous les développements: juxtaposition des relations d'inclusion contraires dans le johannisme (X en Y et Y en X, commutativité paradoxale qui tourne à la transitivité, X en Y et Y en X, Y en Z et Z en Y => X en Z et Z en X), mais déjà l'AT fourmille d'expressions remarquables et remarquées, Yahvé "remplit" les cieux et la terre (Jérémie 23), la gloire ou la connaissance de Yahvé "remplit" la terre comme l'eau (le fond de) la mer (Isaïe 6; 11), etc. A cet égard on pourrait douter d'un quelconque privilège du "ciel", si celui-ci n'était comme la retraite ou la réserve où le divin se retire et d'où il (re-)vient -- sur la terre comme au ciel.
Revenir en haut Aller en bas
http://oudenologia.over-blog.com/
free




Nombre de messages : 9636
Age : 62
Date d'inscription : 21/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeMer 05 Oct 2022, 16:02

Cela n'a pas un lien direct avec ce fil mais je trouve l'article intéressant. 

a) Le Maître du Chaos

Dès son premier discours, Job déclare que la non-existence est préférable à la vie telle que Dieu la lui inflige (3,1-26). Il prend ouvertement le contre-pied du grand récit de Gn 1 lorsqu’il déclare, à propos du jour de sa naissance :

« Ce jour, qu’il soit ténèbre (ḥōšèk) ; que Dieu, de là-haut, ne le rappelle pas ; que la lumière ne brille pas sur lui. » (v.4)

En effet, la ténèbres (ḥōšèk, Gn 1,2) est l’une des caractéristiques majeures des représentations du Chaos, et le premier acte de la Création consiste à la repousser en faisant briller la lumière (v. 3), qui est l’un des attributs divins : il suffit qu’apparaisse l’éclat de la lumière de Dieu pour que le Mal soit vaincu (voir Ps 77,17 ; 97,3-6 ; 114,3 ; Ha 3,8-11). Job, quant à lui, préfère l’obscurité au jour : ce que Dieu offre à l’homme est plus épouvantable que le Chaos ténébreux. L’allusion aux Origines, confirmée par les motifs de la stérilité (v. 7 ; cf. Gn 1,11-13,20-31) et de l’obscurcissement des étoiles (v. 9 ; cf. Gn 1,14-19), est explicite au v. 8 : la nuit de la conception de Job est placée sous le signe de Yam et de Léviathan, incarnations mythiques du Mal6. A partir du v. 11, Job exprime son souhait d’échapper à son tourment en rejoignant sans délai le Shéol, « là où petits et grands se confondent » (v. 19), c’est-à-dire dans le lieu de l’indistinct, autre trait majeur du Chaos. A l’entendre, Dieu a établi un ordre dans l’univers, mais cet ordre est celui de la domination des méchants et des tortionnaires (v. 17-18), et donc le règne de l’oppression. La Création divine est pire que le Chaos : c’est un Chaos au carré.

Ces propos ne sont pas isolés. Sa condamnation de la Création et son aspiration à la mort, Job les réaffirmera en 6,8-10a, 11-12 et 16,13-16. En 23,17, il déclarera encore, dans la même ligne, que Dieu l’a « recouvert d’obscurité », alors qu’il est en théorie celui qui illumine et fait vivre.

https://books.openedition.org/pusl/7284?lang=fr
Revenir en haut Aller en bas
Narkissos

Narkissos


Nombre de messages : 11940
Age : 64
Date d'inscription : 22/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeMer 05 Oct 2022, 17:07

C'est intéressant en effet: à mon sens, tout le mal que se donnait Vermeylen (en 1985) pour désigner parmi les rédacteurs de Job un "auteur principal" (plus proche en définitive des amis de Job que de celui-ci) n'aboutit qu'à montrer l'irréductibilité du texte à une telle hiérarchisation des perspectives. Chaque voix aura été entendue, aucune ne "gagne" ni ne "perd" définitivement de façon à effacer les autres ou à être effacée par les autres, comme si elle avait tout dit ou comme si elle n'avait rien dit: c'est le grand mérite du livre de Job, de tout le canon hébreu le plus proche dans sa structure du théâtre grec, que d'illustrer cette résistance générale de l'écriture polyphonique à l'hégémonie du sens ou de l'idée... Un livre ne se résume pas plus à son dernier mot (morale, conclusion, bottom line) qu'à son premier, ni aux paroles de ses héros ou protagonistes, de son narrateur ou de son auteur -- même un personnage subalterne, même le méchant condamné et châtié peut y dire des choses inoubliables.

Par ailleurs, ce ne sont pas non plus les références au ciel (ou aux cieux) qui manquent, dans la bouche d'à peu près tous les personnages, y compris, pour finir, Yahvé dans la tempête (au hasard: 3,5.9; 7,9; 9,7ss; 11,8; 14,12; 15,15; 16,19; 20,6.27; 22,12ss; 25,2.5; 26,8ss; 28,24; 30,15; 31,26; 35,5; 36,28s; 37,3.11.15ss.21; 38,7ss.29ss.37; 41,11).
Revenir en haut Aller en bas
http://oudenologia.over-blog.com/
free




Nombre de messages : 9636
Age : 62
Date d'inscription : 21/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeJeu 06 Oct 2022, 13:16

Il déplace les montagnes sans qu'elles le sachent, il les renverse dans sa colère.
Il fait trembler la terre sur sa base, et ses colonnes sont ébranlées.
Il parle au soleil, et le soleil ne paraît pas ; il appose un sceau sur les étoiles.
Seul, il déploie le ciel, il marche sur les hauteurs de la mer.
Il fait la Grande Ourse, Orion et les Pléiades, et les Chambres du Sud.
Il fait des choses grandes et insondables, des choses étonnantes, sans nombre.
Il passe près de moi, et je ne le vois pas ; il disparaît, et je ne le comprends pas.
Qui ramènera ce qu'il arrache ? Qui lui dira : « Que fais-tu ? »
Dieu ne retire pas sa colère ; devant lui s'effondrent les appuis de Rahav.
Et moi, comment pourrais-je lui répondre ? Quelles paroles choisirais-je devant lui ? (Job 9,5-14)

Certes, Job connaissait déjà le pouvoir créateur de Dieu (cf. 9, 5-13); il en avait conclu qu’il était inutile de vouloir se défendre contre un adversaire trop puissant pour s’intéresser à sa cause (cf. 9, 14-20). Le point de vue exprimé dans les discours divins est différent. On peut le résumer ainsi : le monde est rempli de mystères dont Job ne connaît pas l’explication ni la raison d’être. Dieu seul peut embrasser du regard tout l’univers et il le gouverne selon une Sagesse qui échappe à l’homme. Le cas de Job entre dans cette catégorie des choses incompréhensibles parce que réservées à la science de Dieu.

Devant une telle immensité Job est réduit à reconnaître sa petitesse et à croire, malgré tout, en ce Dieu tout-puissant qui gouverne le monde.

J’étais celui qui voile tes plans
par des propos dénuée de sens.
Aussi as-tu raconté des œuvres grandioses
que je ne comprends pas
des merveilles qui me dépassent et que j’ignore …
Je ne te connaissais que par ouï-dire,
mais maintenant mes yeux t’ont vu.
Aussi je me rétracte
et je m’afflige sur la poussière et la cendre.
(42, 3.5-6).

Sur le plan intellectuel, cette finale n’est pas entièrement satisfaisante. Dieu a amené Job à la capitulation en lui faisant prendre conscience de sa petitesse et de sa fragilité ...

http://www.interbible.org/interBible/ecritures/exploration/2011/exp_110524.html
Revenir en haut Aller en bas
Narkissos

Narkissos


Nombre de messages : 11940
Age : 64
Date d'inscription : 22/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeJeu 06 Oct 2022, 14:26

Comme on l'a déjà remarqué, ce qui est assez frappant dans la rare "poésie cosmique" (et plus rarement encore astrale, si l'on excepte le soleil et la lune) de l'AT, à peu près indépendamment de son "contexte" (ici aussi bien dans un discours de Job que de Yahvé, on en a vu d'autres exemples il n'y a pas très longtemps dans les développements du livre d'Amos, en partie avec les mêmes constellations), c'est qu'elle est généralement au présent (c'est la meilleure traduction des participes hébreux qui échappent dans une certaine mesure à l'alternative des aspects temporels "accompli" / "inaccompli"), et qu'elle n'est même pas davantage du côté de la "création" (fût-elle "continue") que de la "destruction". Aux antipodes des idées tardives de création initiale, encore plus tardivement ex nihilo, qui sous-tendent toutes les oppositions classiques et modernes entre création et histoire, nature et culture, être et devenir, inné et acquis, déterminisme et liberté (etc.). Le(s) dieu(x) agi(ssen)t -- et éventuellement pâti(ssen)t -- tout le temps ou jamais...

Mais le "ciel" marque bien, par rapport à tous les horizons de la pensée, de l'action et de la passion humaines (cadre historique, linguistique, culturel, social, politique, moral, religieux, scientifique, technique) une ouverture, un décadrage, un recul ou une retraite (façon mouvement de grue, zoom ou travelling arrière au cinéma) qui relativise absolument (si l'on ose dire) les perspectives, les hiérarchies, les ordres d'importance ou de priorité. Cela fonctionne admirablement dans Job par rapport aux différentes notions de "justice" qui s'opposent, celle(s) des amis dans les répliques de Job et celle(s) de Job dans les discours de Yahvé: le ciel en définitive ne donne raison à personne, même s'il a l'air de prendre à tel ou tel moment le parti de tel ou tel, ne serait-ce que par son "indifférence" (et alors ce serait plutôt le parti de Job, paradoxalement justifié dans ses allégations parce que le dieu ne lui répond pas ou répond à côté de ses questions... pour finir, dans une ultime pirouette même si c'est un accident de rédaction, par lui donner explicitement raison quand il a renoncé). On peut se rappeler le leitmotiv de Kierkegaard à la fin d'Enten-Eller ("Ou bien... ou bien", ou "L'Alternative"): "devant Dieu nous avons toujours tort" (ce qui ne revient pas à dire que Dieu ait raison).
Revenir en haut Aller en bas
http://oudenologia.over-blog.com/
free




Nombre de messages : 9636
Age : 62
Date d'inscription : 21/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeJeu 06 Oct 2022, 15:16

"Car mes pensées ne sont pas vos pensées, vos voies ne sont pas mes voies— déclaration du SEIGNEUR. Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies et mes pensées au-dessus de vos pensées. Comme la pluie et la neige descendent du ciel et n'y reviennent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l'avoir fécondée et fait germer, sans avoir donné de la semence au semeur et du pain à celui qui a faim, ainsi en est-il de ma parole qui sort de ma bouche : elle ne revient pas à moi sans effet, sans avoir fait ce que je désire, sans avoir réalisé ce pour quoi je l'ai envoyée." (Es 55,8-9).

Le ciel incarne et symbolise la supériorité de Dieu, sur l'homme.
Revenir en haut Aller en bas
Narkissos

Narkissos


Nombre de messages : 11940
Age : 64
Date d'inscription : 22/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeJeu 06 Oct 2022, 15:57

Certes.

C'était à mes yeux un intérêt majeur de ton article sur Aristote (supra 4.10.2022) que de rappeler que l'espace et la physique antiques ne sont pas isomorphes, autrement dit que "haut" et "bas", "léger" et "lourd", etc., s'entendent comme des principes qualitatifs opposés (là où la physique moderne ne voit plus que du plus ou du moins de la même chose dans des directions différentes, et indifférentes). Il en est évidemment de même dans l'AT hébreu (ou araméen) et dans le NT grec (cf. "hauteur" et "profondeur" chez Paul et ses émules).

Cela dit, la "supériorité" a priori, axiale et axiologique, du haut sur le bas n'empêche pas les énoncés paradoxaux (du "Proto-" au "Trito-"Isaïe p. ex., cf. 2,12ss; 57,15).
Revenir en haut Aller en bas
http://oudenologia.over-blog.com/
free




Nombre de messages : 9636
Age : 62
Date d'inscription : 21/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeJeu 06 Oct 2022, 16:16

Qu’est-ce que l’homme dans l’infini ?

Le psalmiste interroge Dieu : « À voir le ciel, la lune et les étoiles, qu’est-ce que l’homme que tu en gardes mémoire ? » (Ps 8,4-5). Il nourrit la question de son expérience du monde qui, dans sa naïveté, correspond à l’expérience première que tout enfant a vécu. Le volume de son corps humain est insignifiant en comparaison avec les astres, mais il est en situation de maître par rapport aux autres vivants : d’abord ceux qu’il a domestiqué « brebis et bœufs », ensuite les « bêtes sauvages » qui le craignent (v. 8-9). Le psaume témoigne d’un sentiment contrasté de précarité et de pouvoir, proche du récit de la Genèse disant que l’homme a été créé « à l’image de Dieu, comme sa ressemblance » (1,26), c’est-à-dire en position de « seigneur » tout en étant serviteur du seul Seigneur de l’univers, dont l’immensité de l’œuvre atteste l’infinie grandeur et la toute puissance. La naissance de la science classique a porté le sentiment du contraste à des formes plus radicales. Dès le XVIIe siècle, les instruments d’observation et de calcul ont déchiré l’image d’un monde clos pour placer la terre dans un monde infini. L’infiniment grand devint encore plus vaste grâce au télescope et l’infiniment petit par le microscope. Le sentiment qui en a résulté fut tout à la fois d’effroi et d’admiration, comme en témoigne le texte bien connu de Pascal, invitant l’homme à revenir à soi pour considérer « ce qu’il est au prix de ce qui est » et posant la question : « Qu’est...

https://www.revue-christus.com/article/la-place-de-l-homme-dans-l-univers-3728


Pensée 73 Blaise Pascal

Que l'homme, étant revenu à soi, considère ce qu'il est au prix de ce qui est; qu'il se regarde comme égaré dans ce canton détourné de la nature; et que de ce petit cachot où il se trouve logé, j'entends l'univers, il apprenne à estimer la terre, les royaumes, les villes et soi-même son juste prix. Qu'est-ce qu'un homme dans l'infini ?

https://projects.iq.harvard.edu/samyabdoun/people/pens%C3%A9e-73-blaise-pascal#:~:text=Que%20l'homme%2C%20%C3%A9tant%20revenu,soi%2Dm%C3%AAme%20son%20juste%20prix.
Revenir en haut Aller en bas
Narkissos

Narkissos


Nombre de messages : 11940
Age : 64
Date d'inscription : 22/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeJeu 06 Oct 2022, 16:50

Bien vu, l'enchaînement de l'article tronqué à la "pensée" de Pascal (sur laquelle on peut voir aussi ce site, plus "technique" mais souvent instructif).

Sous toutes les réserves d'anachronisme qui doivent accompagner (ou éviter) ce genre de réflexion, on peut imaginer Pascal ravi à l'idée d'une physique relativiste dans un sens, quantique dans un autre, qui ne laisse plus guère à la "logique" ou à la "raison" communes, c'est-à-dire verbales et représentatives, que la conscience tantôt bonne et tantôt mauvaise d'une illusion viable et utile dans une étroite bande de "réalité" factice, entre ce qui est trop grand et trop petit pour elle et dont pourtant elle dépend aussi...

Il y avait déjà quelque chose d'assez subversif, et de difficilement maîtrisable, dans cette pensée que la transcendance de l'infini sur le fini se jouait aussi bien dans l'"infiniment petit" que dans l'"infiniment grand". Raison de plus pour Versailles de ne pas aimer Port-Royal...

Reste que bientôt quatre siècles plus tard nous sommes toujours tributaires des images de hauteur et de grandeur qui associent le pouvoir à la valeur (économique, morale, sociale, etc.).
Revenir en haut Aller en bas
http://oudenologia.over-blog.com/
free




Nombre de messages : 9636
Age : 62
Date d'inscription : 21/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeVen 07 Oct 2022, 12:13

Traduction, notes de lecture et structure

Si on laisse de côté le titre, le texte du Psaume 8 se présente comme une unité littéraire bien construite. Il s’agit d’un hymne célébrant la gloire de Yahvé dans la création. On notera au verset 4 l’absence inattendue du soleil. Beaucoup d’exégètes en ont conclu que le Psaume exprime une expérience nocturne. Cependant, aucun autre détail du Psaume ne le confirme.

SEIGNEUR (YHWH), notre Seigneur, que ton nom est magnifique sur toute la terre, toi qui te rends plus éclatant que le ciel !
Par la bouche des enfants, des nourrissons, tu as fondé une force, à cause de tes adversaires, pour imposer silence à l'ennemi vindicatif.
Quand je regarde ton ciel, œuvre de tes doigts, la lune et les étoiles que tu as mises en place,
qu'est-ce que l'homme, pour que tu te souviennes de lui, qu'est-ce que l'être humain, pour que tu t'occupes de lui ?
Tu l'as fait de peu inférieur à un dieu, tu l'as couronné de gloire et de magnificence.
Tu lui as donné la domination sur les œuvres de tes mains, tu as tout mis sous ses pieds,
moutons et chèvres, bœufs, tous ensemble, et même les bêtes sauvages,
les oiseaux du ciel et les poissons de la mer, tout ce qui parcourt les sentiers des mers.
SEIGNEUR (YHWH), notre Seigneur, que ton nom est magnifique sur toute la terre !
(Ps Cool.

Le centre, versets 5–6, définit plus précisément le rapport entre Dieu et l’homme: l’homme n’est que peu de chose, mais Dieu en a fait presque l’égal d’un dieu en le couronnant de gloire. Le centre explique la logique du deuxième bloc, qui le suit: ayant élevé l’être humain, Dieu peut maintenant le préposer à la création. Le centre éclaire aussi, de manière plus subtile, le premier bloc: c’est en tant qu’il a été visité par Dieu que l’être humain a pu devenir un instrument dans la lutte contre les ennemis ...

... Le mouvement de haut en bas

De par sa structure équilibrée, le Psaume intègre des éléments divers en une unité harmonieuse. Néanmoins, l’équilibre n’est pas parfait. On s’attend notamment à réentendre dans le dernier verset les deux stiques du premier verset. Cependant, après le premier stique, le poème s’arrête brusquement: « Que ton nom est magnifique sur toute la terre ! » L’asymétrie attire l’attention sur un mouvement qui parcourt le Psaume entier: il commence dans le ciel et s’achève sur la terre. La succession du premier bloc, du centre et du second bloc épouse bien ce mouvement: on parle d’abord de Dieu, ensuite de Dieu et de l’homme, et finalement de l’homme. On notera aussi que le mot « ciel »(...) apparaît trois fois avec des sens de plus en plus immanents: au verset 2, il s’agit d’un endroit éloigné, où se trouve la magnificence de Dieu; au verset 4, le ciel est visible à l’œil nu, c’est l’espace où se trouvent la lune et les étoiles; au verset 9, le ciel est le domaine des oiseaux: on peut presque le toucher. Finalement, au verset 10, comme cela a déjà été dit, le ciel disparaît du discours. L’asymétrie et le mouvement perturbent l’équilibre du Psaume, mais ne le détruisent pas. Équilibre et asymétrie coexistent au sein d’un même projet littéraire Le mouvement de haut en bas exprime un trait thématique central. La gloire de Dieu rayonne dans l’univers entier, y compris dans le ciel majestueux, mais son œuvre trouve sa finalité sur terre. Il y a un élément de surprise, on dirait presque de revirement, de volte-face. Alors que le ciel est l’habitat naturel de Dieu, et que la terre appartient plutôt à sa créature, Dieu délaisse le ciel et fait rayonner son nom sur la terre. Plusieurs autres éléments s’ordonnent autour de ce motif du revirement. Le Psaume évoque, en passant, les dieux, qu’il oppose aux êtres humains. Le couple dieu-homme rappelle le couple ciel-terre: les dieux vivent dans le ciel; les hommes, sur terre. Or, les deux couples sont mis en scène selon une dynamique analogue. Comme les dieux sont supérieurs en puissance et en gloire, on s’attend à ce qu’ils reçoivent le gouvernement. Mais en réalité, aucun rôle ne leur échoit. À leur place, c’est l’être humain que Dieu installe comme roide la création.

https://www.academia.edu/28905626/_Pour_mettre_fin_%C3%A0_l_ennemi_et_au_vindicatif_La_th%C3%A9matique_du_Psaume_8
Revenir en haut Aller en bas
Narkissos

Narkissos


Nombre de messages : 11940
Age : 64
Date d'inscription : 22/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeVen 07 Oct 2022, 15:29

Merci pour cet article (de Jan Joosten que nous avons déjà eu plusieurs fois l'occasion d'apprécier): il rejoint également nos discussions récentes sur l'épître aux Hébreux, puisque celle-ci cite longuement le Psaume 8 (en 2,6ss), qui y devient un élément important de sa "christologie adamique" ou "anthrop[o-log]ique" (à replacer bien sûr dans le cadre de sa philosophie médio-platonicienne et de sa méthode allégorique: il ne s'agit pas de spéculations "historiques" sur "Adam"). Evidemment il n'y a pas de Christ dans le Psaume, probablement pas non plus de référence à un "Adam" originel (même si la thématique est très proche de Genèse 1, ça ne décide pas dans quel ordre les textes sont écrits ni dans quel sens ils s'influencent, le cas échéant; et même dans Genèse 1 'adam reste un nom commun, "homme" ou "humain" générique ou collectif, embrassant tout genre et tout nombre: homme et femme, multipliez-vous ou devenez nombreux), le rapport envisagé est celui des hommes et des dieux en général (ceux-ci devenant des aggeloi, "messagers" ou "anges", dans la Septante du Psaume et donc dans la citation d'Hébreux, qui y voit tout son intérêt pour distinguer le "Fils" des "anges", tantôt au-dessus tantôt "un peu" au-dessous, en tant qu'"homme / fils de l'homme" précisément).

Du côté du "ciel" ou des "cieux" (šmym en hébreu étant toujours au pluriel, les textes ne jouent pas sur cette différence comme on peut le faire en grec ou en français), il est intéressant en effet d'observer la descente ou le dégradé: la gloire ou la louange de Yahvé est au-dessus (`l) des cieux (v. 2, en parallèle toutefois avec le "nom" qui est célèbre sur, dans ou par [b-] toute la terre); les cieux sont le lieu de la lune et des étoiles (v. 4; si le soleil n'est pas mentionné, c'est peut-être parce que Yahvé s'élevant au rang suprême devient aussi solaire, cf. le Psaume 104 proche de l'hymne égyptien à Aton/Atum; mais le suprême-solaire peut être aussi bien mésopotamien, Shamash, ou perse, Ahura-Mazda), des dieux aussi sans doute (v. 6), mais aussi, explicitement, des oiseaux (v. 9). Autrement dit les cieux montent haut (même si le divin peut s'élever encore plus haut), mais ils descendent assez bas, jusque dans le domaine soumis (aussi dans la Genèse) à l'"homme / fils de l'homme" ('nwš / bn-'dm, v. 4). Sait-on jamais où le ciel commence ou finit ?

A propos des "ennemis" (noter au v. 3 l'assonance entre ywnqym > ynq, "nourrissons", et mtnqm > nqm, "vengeur, vindicatif", etc.), le jeu des citations de l'épître aux Hébreux inviterait à un autre rapprochement formel: dans le Psaume 8 ce sont les animaux qui sont "sous les pieds" de l'homme / fils de l'homme, dans un sens analogue à la "domination" de Genèse 1; au Psaume 110 ce sont les "ennemis" ('yb, comme en 8,3b; d'où on rapproche parfois le nom de Job, 'Iyyov en hébreu, Ayoub en arabe) qui sont ou doivent être "sous les pieds" du roi-prêtre (comparer Hébreux 1,13; 2,8; 10,13).

Bien sûr, s'il y a quelque chose dans tous ces textes qui paraît désespérément "daté", surtout depuis une cinquantaine d'années, c'est bien cette admiration béate devant la "domination" de l'homme sur la terre (et même une part croissante, quoique toujours dérisoire, du "ciel"), qui vire au désastre (astres compris ou non) pour avoir trop bien marché, au-delà de ce qu'on pouvait imaginer pendant si longtemps...

---

Je change provisoirement de texte -- mais bien sûr on peut revenir au Psaume 8 ou à d'autres -- parce que nous avons évoqué récemment Proverbes 30, mais à peine les v. 1-4 qui ont aussi à voir avec le ciel. "Qui est monté / montera au ciel", c'est un topos de la littérature du Proche-Orient ancien (je me souviens d'une conférence passionnante de Karel van der Toorn à Vaux-sur-Seine sur ce sujet, il y a plus de trente ans) qui change de sens selon les contextes (comparer notamment Deutéronome 30,11ss) mais est quand même a priori l'expression d'un certain "pessimisme cognitif" (scepticisme, agnosticisme, sans y voir le quasi-athéisme des traditions philosophiques ultérieures, anciennes, classiques ou modernes): la volonté du ou des dieux n'est pas connaissable -- sauf évidemment si elle se révèle, et c'est ce qui alimentera le débat continu entre "sages" et "prophètes" puis "apocalypticiens" en dépit des changements de paradigme de part et d'autre.


Dernière édition par Narkissos le Ven 07 Oct 2022, 16:48, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas
http://oudenologia.over-blog.com/
free




Nombre de messages : 9636
Age : 62
Date d'inscription : 21/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeVen 07 Oct 2022, 16:42

LE LIVRE DES PROVERBES, LA SAGESSE, LA LOI ET LE PSAUTIER

En Pr 1, 22, est également mentionné le « savoir (d‘t) ». En Ps 19, 2-3 celui-ci ne s’acquiert pas seulement par la « Loi » mais encore par la contemplation des cieux et du firmament.

Les cieux racontent la gloire de Dieu,
et l’oeuvre de ses mains, le firmament l’annonce ;
le jour au jour (ywm lywm) en déverse (yby‘) le récit
et la nuit à la nuit (wlylh llyhlh) transmet le savoir (d‘t).
Revenir en haut Aller en bas
Narkissos

Narkissos


Nombre de messages : 11940
Age : 64
Date d'inscription : 22/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeVen 07 Oct 2022, 17:32

Lien. Cet article de B. Gosse rappelle utilement que la "torah" (twrh en transcription consonantique) ne renvoie pas toujours -- à vrai dire quasiment jamais, dans les textes de l'AT -- au corpus (aussi) dit du Pentateuque, encore moins à la "loi" comme partie supposée "législative" ou "juridique" de celui-ci (on voit mal un juriste, même passionné par son métier, écrire des poèmes d'amour au code pénal)... On a souvent souligné que dans les textes les plus anciens le mot torah désigne habituellement l'"instruction" (orale) du prêtre, qui relève de la tradition de sa corporation et requiert néanmoins une certaine créativité, casuistique (quelle règle appliquer dans tel cas) et/ou oraculaire (où le prêtre, pour se prononcer sur des cas singuliers, n'est pas loin du prophète ou du devin: éphod, ourim-toummim, etc.); il faut insister tout autant sur le fait que dans des textes plus récents (p. ex. Psaumes du Second Temple ou "couverture" des Proverbes, 1--9 / 31) la torah se connote ou se colore en fonction des intérêts de l'auteur et du milieu concerné (sapiential, liturgique, etc.). Chacun en somme voit la torah à sa porte, et cela prendra encore d'autres directions avec la tradition pharisienne et rabbinique et sa "loi orale", torah she-be`al pé(h), laïque et néanmoins rituelle.

Je pense par ailleurs que nous avions déjà discuté quelque part le Psaume 19 et ses deux parties ostensiblement séparées, sinon opposées, le "ciel" et la "loi" (torah plutôt sapientiale donc en l'occurrence), mais je ne vois pas où... (par contre je retrouve ça).

Sur le Psaume 8 (cf. l'échange précédent), j'avais oublié ce fil ouvert et abandonné entre-temps...
Revenir en haut Aller en bas
http://oudenologia.over-blog.com/
free




Nombre de messages : 9636
Age : 62
Date d'inscription : 21/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeMar 18 Oct 2022, 10:59

Elihou reprit :
Penses-tu être dans ton droit ? Peux-tu dire : « Je suis plus juste que Dieu ! »
Car tu dis : « Est-ce utile pour toi ? Que me sert-il de ne pas pécher ? »
C'est moi qui vais te répondre, à toi et à tes amis avec toi.
Considère le ciel et vois ! Regarde les nuées : comme elles sont élevées au-dessus de toi !
Si tu pèches, quel tort lui causes-tu ? Quand tes transgressions se multiplieraient, que lui ferais-tu ?
Si tu es juste, que lui donnes-tu ? Que reçoit-il de toi ?
Ta méchanceté ne peut nuire qu'à un homme comme toi, ta justice n'est utile qu'à un être humain.
On crie à cause de la multitude des oppresseurs, on appelle au secours à cause de la violence d'un grand nombre ;
mais personne ne dit : « Où est Dieu, lui qui m'a fait, lui qui inspire des psaumes pendant la nuit,
lui qui nous instruit plus que les bêtes de la terre, qui nous donne plus de sagesse qu'aux oiseaux du ciel ? »
Alors on crie, mais il ne répond pas, à cause de l'orgueil des mauvais.
Vraiment, c'est inutile : Dieu n'entend pas, le Puissant ne le voit pas !
Mais c'est toi qui dis que tu ne le vois pas, que ta cause est devant lui, que tu l'attends !
Maintenant, parce que sa colère n'intervient pas et qu'il ignore les pires révoltes,
Job ouvre la bouche pour des futilités, il abonde en propos dépourvus de connaissance. (Job 35)


La transcendance et la providence divines (chap.35)

Au chap.35, Élihou revient sur la justice divine que Job incrimine erronément, car Dieu demeure inaccessible et le péché ne l’atteint pas. Mais faut-il pour cela conclure à son indifférence ? En fait, Élihou ne pousse pas assez loin sa réflexion, car il se limite à déclarer que les conséquences du péché n’atteignent qu’autrui, alors que le lecteur sait que Dieu prête attention à « son serviteur Job, craignant Dieu et s’écartant du mal ». Job disait, toujours d’après son interlocuteur, que Dieu n’entend pas l’homme éprouvé, et il répond que ce dernier s’enferme dans sa propre souffrance, sans percevoir le lieu où siège le souverain Juge, lequel invite Job à lui adresser sa prière et à se convertir. Il reproche encore à Job son incohérence en refusant de faire amende honorable et de s’en remettre à Dieu. Comme si Job ne comprenait rien à la transcendance absolue de Dieu et à sa providence !

https://www.forumsaintmichel.be/audio/2013_rader_job/Job%202012-13.pdf
Revenir en haut Aller en bas
Narkissos

Narkissos


Nombre de messages : 11940
Age : 64
Date d'inscription : 22/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeMar 18 Oct 2022, 12:15

Du côté du ciel (ou des cieux), ça ressemble assez à la tirade d'Eliphaz au chapitre 22 (cf. post initial)...

Le ciel est plurivoque et équivoque, il y a autant de "leçons" du ciel que de regards portés vers lui, et comme chacun l'a juste au-dessus de sa tête il n'y a pas de raison qu'une leçon l'emporte sur une autre: si le livre de Job l'illustre si bien, c'est parce que c'est le plus manifestement "polyphonique" (et théâtral) du canon biblique (plusieurs voix, plusieurs personnages, plusieurs discours, plusieurs "logiques", sans qu'apparaisse nettement au cours de la lecture, ni même à la fin pourvu qu'elle se prolonge en réflexion, qui a "raison" ou "tort"). On peut penser au fragment 93 d'Héraclite (d'après Plutarque): "Le maître (anax = Apollon) dont l'oracle est à Delphes ne dit (legei) ni ne cache (kruptei), il fait signe (ou signifie, sèmainei)." "Signes (sèmata, sèmeia) du ciel" (cf. Marc 8,11// etc.), en-deçà et au-delà de toute "signification" et de tout "sens", qui est affaire d'interprétation dans tous les sens du terme, de la divination à l'art en passant par toute sorte de "traduction", de tradition et de trahison.
Revenir en haut Aller en bas
http://oudenologia.over-blog.com/
free




Nombre de messages : 9636
Age : 62
Date d'inscription : 21/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeMer 19 Oct 2022, 15:41

Citation :
"Signes (sèmata, sèmeia) du ciel" (cf. Marc 8,11// etc.), en-deçà et au-delà de toute "signification" et de tout "sens", qui est affaire d'interprétation dans tous les sens du terme, de la divination à l'art en passant par toute sorte de "traduction", de tradition et de trahison.

Alliance de Noé : comme s'il regrettait la malédiction du déluge, Dieu se demande pardon à lui-même et bénit tout vivant; mais le signe de cette alliance est furtif, météorique

Après le déluge, Dieu semble regretter ce qu'il a fait. Il reconnaît avoir commis une faute, une punition collective excessive. Ce n'est pas aux hommes ni aux animaux qu'il demande pardon, mais à lui-même. Il se promet de ne plus jamais recommencer, et décide de conclure une alliance avec Noé. Le signe qu'il choisit alors pour symboliser cet alliance, l'arc-en-ciel (Gn 9:13-17), est assez particulier. C'est un signe intermittent, furtif, météorique, un phénomène qui apparaît dans l'atmosphère sans jamais se stabiliser. On ne sait pas d'où il vient. Il est bref, rapide, passager, "peut-être aussi coupable et clandestin qu'un voleur" écrit Derrida (p185).

Sur cette suite (malédiction / sanction / pardon / bénédiction), on peut faire quelques observations :

 si Dieu demandait pardon à autrui (aux hommes, aux animaux exterminés), il se déchargerait sur eux de la faute. Il se mettrait dans leur dépendance pour obtenir d'eux l'absolution. En tant que Dieu souverain, il ne peut que s'abstenir.

- et pourtant ce Dieu souverain se repent, ou plutôt il se rétracte, se replie sur lui-même. Reconnaissant sa faute, il en accepte la responsabilité en se pardonnant lui-même. C'est alors que, en plus, il promet à tout vivant de ne pas recommencer. Cette promesse d'alliance est un don, une compensation. Ni sa faute, ni le mal qu'il a fait, ni celui des hommes, ne sont détruits. La dette n'étant pas soldée, c'est un autre mouvement qui s'enclenche : la malédiction est suspendue, elle se transforme en bénédiction.

- c'est la signification de l'arc-en-ciel : tout cela ne peut être que furtif, provisoire [en vérité, Dieu peut toujours changer d'avis]. Si même le Dieu souverain, en son for intérieur, n'est pas sûr de pouvoir se pardonner lui-même, c'est que le pardon est impossible.

- le Dieu de la bible ne cesse de revenir sur lui-même, de se rétracter, de s'interroger sur la création. Ces "rentrées en soi", écrit Derrida (p194), ce redoublement, cette "rétractation de rétractation", ce "repentir de repentir", c'est l'axiome absolu d'un Dieu à la fois fini et infini, qui conduit au questionnement de la théologie négative.

- peu après cette alliance, Noé, le père, se mettra à nu devant ses fils (Gn 9:22-24). On pourrait, comme le fait Derrida (p202), rapprocher cette mise à nu de l'inconditionnalité, de la pureté absolue de l'alliance.

https://www.idixa.net/Pixa/pagixa-1705041830.html
Revenir en haut Aller en bas
Narkissos

Narkissos


Nombre de messages : 11940
Age : 64
Date d'inscription : 22/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeMer 19 Oct 2022, 17:26

Pour rappel, le verbe nhm se traduit aussi bien par "(se) consoler" (Genèse 5,29; 24,67; 27,42; 37,35; 38,12; 50,21 etc.) que par "se repentir, regretter, changer d'avis, d'attitude, d'humeur" etc. (6,6s, LXX thumoô, cf. "cyclothymique", etc.): le "pardon" n'est peut-être pas loin (ça me rappelle, sur un autre registre, Achille Talon: "je me pardonne car je suis généreux"), mais il faudrait préciser que ce n'est ni le vocabulaire de l'"expiation" sacrificielle (kpr etc.), ni celui du "pardon" informel (slh etc.) ou de la "grâce" extrajudiciaire plus proche de la "pitié" ou de la "compassion" (hnn, rhm, etc.). Dans le récit du déluge, c'est surtout la création (de l'homme et des animaux) que Yahvé "regrette" au chapitre 6, et le verbe ne revient pas dans les formules en "plus jamais" (8,21; 9,11.15, [ysp]... `wd): bien que celles-ci répondent manifestement, et pour le même "motif" (le coeur de l'homme est mauvais dès sa jeunesse), à ce (premier) regret, elles sont plutôt à la lettre l'effet de l'apaisement (propitiation) dû à l'agréable odeur du sacrifice... (8,20s); comme on l'a souvent expliqué par ailleurs, en-deçà de toute "intention" rédactionnelle cela résulte aussi de la concentration sur un seul acteur divin de rôles traditionnellement attribués par la narration polythéiste à des dieux différents (cf. Atrahasis-Gilgamesh, où ce ne sont pas les mêmes qui prennent l'initiative de détruire et de sauver, même si le récit aboutit -- par le sacrifice -- à une certaine harmonie des dieux, retrouvée)...

L'économie du "signe" ('wt-'ôth / sèmeion) dans la Genèse est intéressante également, puisque ce sont d'abord les astres comme signes des temps et des fêtes saisonnières (1,14), puis la marque de Caïn (4,15), ensuite l'arc(-en-ciel, 9,12ss), enfin la circoncision (17,11); les deux derniers étant d'"alliance" (bryt-berith / diathèkè), le premier et le troisième plus "célestes" que les autres ("firmament" ou "nuée", rqy`-raqia` / `nn-`anan).
Revenir en haut Aller en bas
http://oudenologia.over-blog.com/
free




Nombre de messages : 9636
Age : 62
Date d'inscription : 21/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeJeu 20 Oct 2022, 12:56

L’autre côté du ciel (Sujet peut-être HS mais intéressant). 

Tous les hommes se font une notion des dieux et tous en tant qu’ils sont, Grecs ou Barbares, qui croient en l’existence des dieux, s’accordent à localiser la divinité dans la région la plus haute, rattachant à l’immortel (le ciel incorruptible) ce qui est immortel et regardant toute autre supposition comme inadmissible.» Aristote, De Caelo, I, 3

L’autre côté du ciel : cet intitulé est chez Simone Weil une expression platonicienne qui introduit directement dans cette région du surnaturel qui requiert notre attention. C’est être, d’entrée de jeu, confrontés à ce monde invisible, imperceptible qui double, à notre insu, le monde apparent dans lequel nous existons. Ceci pourrait immédiatement faire fuir rationalistes et scientistes et tous ceux que le moindre relent d’ésotérisme ou d’occultisme exaspère vite. Pourtant le risque d’investigations fumeuses est considérablement atténué puisqu’il s’agit d’une philosophe qu’on sait tellement éprise des réalités terrestres les plus concrètes. Il convient alors de se demander comment le surnaturel s’intègre dans la pensée de celle qui affirme ne croire qu’aux vérités que seul le corps peut authentifier.

Disons tout de suite que le surnaturel est entré dans la vie et la pensée de Simone Weil, pour ainsi dire, tout naturellement dès que, très adroitement pilotée par le génie éducatif de sa mère, elle a fait du grec. Et le grec, elle l’a appris, jeune lycéenne, grâce aux leçons particulières d’un professeur du lycée Saint-Louis, Charles Brun qui enchantait la mère et la fille, par son enseignement du Criton et du Phédon ...

... La connaissance surnaturelle qu’elle reçoit de Platon révèle qu’il y a deux mondes, deux ordres de réalité : le monde d’ici-bas entièrement soumis à une implacable nécessité et un autre monde, invisible, celui qui se trouve de « l’autre côté du ciel », le monde du Bien absolu qui, en termes chrétiens, est le royaume des cieux. En février 1942, à Marseille, elle écrit, à la fin de l’article sur l’inspiration occitanienne qu’elle confie aux Cahiers du Sud : « Si le XVIIIème siècle avait lu Platon, il n’aurait pas nommé  lumière  des connaissances et des facultés simplement naturelles. L’image de la caverne fait manifestement apercevoir que l’homme a pour condition naturelle les ténèbres, qu’il y naît, qu’il y vit, et qu’il y meurt s’il ne se tourne pas vers une lumière qui descend d’un lieu situé de l’autre côté du ciel. » (Oeuvres complètes, éd. Gallimard, C IV 2, p. 424)

Quand Simone Weil apprend de Platon que « ce monde n’est pas tout, qu’il y a quelque chose de meilleur et qu’il faut chercher» (OC VI 2, p. 77), c’est, pour elle, l’origine d’une véritable vocation. Elle va se donner la tâche écrasante, surhumaine, de découvrir cette autre dimension surnaturelle au beau milieu de cette complète immersion physique, sensible, qui nous englue, nous emprisonne dans une existence unidimensionnelle. Cette révélation platonicienne d’un autre ordre de réalité, Simone Weil la met à l’épreuve dans tout ce qu’elle étudie et dans tout ce qu’elle vit. Elle la rencontre aussi très précisément dans toutes les expressions spirituelles des religions, des mythes, des contes de toutes les civilisations, sans en excepter la science et les mathématiques. Cependant, c’est dans le christianisme qu’elle trouve le mode d’expression le plus adapté à sa sensibilité compassionnelle.

https://cheminstraverse-philo.fr/philosophes/simone-weil/lautre-cote-du-ciel-2/
Revenir en haut Aller en bas
Narkissos

Narkissos


Nombre de messages : 11940
Age : 64
Date d'inscription : 22/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeJeu 20 Oct 2022, 14:51

Article magnifique du début à la fin -- je retrouve toujours Simone Weil avec beaucoup d'émotion; même pas hors-sujet à mon goût (ou alors hors-sujet absolu et paradoxal, plus pertinent à tout "sujet" que lui-même), si ce que dit le "ciel" c'est toujours le dépassement, la transcendance, l'au-dessus ou l'au-delà, l'ouverture et la déclosion (cf. supra 3.10.2022), même de tout "ciel" dont on croirait savoir ce que c'est et que c'est quelque chose... epekeina tès ousias, au-delà de l'être, de l'étant, de l'étantité, le "bien" ou le "bon" (to agathon, neutre) selon Platon, l'"un" (to hen, idem) selon Plotin...

Mutatis mutandis, il se passe à peu près la même chose avec les "cieux des cieux" bibliques (1 Rois 8 etc.): formule "superlative" pour les grammairiens, comme "cantique des cantiques", "roi des rois" ou "seigneur des seigneurs", même pas spécifiquement hébraïque ou sémitique puisque c'est aussi bien perse (indo-européen). Mais ce qui se joue logiquement dans un "superlatif" ou un "comparatif absolu" est plus complexe qu'il n'y paraît à première vue: le roi des rois c'est le plus grand ou le plus haut (de la catégorie) des rois, le plus "roi" des "rois" si l'on veut, mais aussi bien l'au-delà de toute royauté, tout autre chose qu'un "roi" (mais alors quoi ?), voire "le contraire d'un roi" (mais qu'est-ce que ça veut dire ?) et qui modifie en retour l'en-deçà, en transformant les "rois" en "sujets", les "seigneurs" en "serviteurs" et les "maîtres" en "esclaves" -- de même les "cieux" autant qu'ils soient deviendraient les "terres" ou les "mondes souterrains" d'un "ciel des cieux", ou celui-ci tout autre chose qu'un "ciel". Tous les concepts s'affolent à la limite ou à l'approche de la limite (c'est aussi le sub-lime de l'esthétique kantienne), dans les parages d'un au-delà qu'ils devinent renversant sans jamais y accéder et sans qu'ils aient donc, stricto sensu, rien à en dire.

Car à la lettre l'a-porie est là: "on" ne passe pas, aucun "sujet" ne passe, dans cet au-delà ou cette "transcendance" que l'"immanence" doit pourtant postuler, hors d'elle, ne fût-ce que pour se comprendre comme telle. Mais que le ciel ou les cieux en tout genre (physiques, métaphysiques) nous rappellent, comme une possibilité de l'impossible, chaque fois que notre horizon nous paraît clos -- et c'est encore une "grâce" de cet au-delà que de temps à autre il nous paraisse clos, alors qu'il nous est le plus souvent totalement impensé.
Revenir en haut Aller en bas
http://oudenologia.over-blog.com/
free




Nombre de messages : 9636
Age : 62
Date d'inscription : 21/03/2008

les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitimeJeu 20 Oct 2022, 15:40

"Le ciel étoilé au-dessus de moi, la loi morale en moi." Kant
   
Emmanuel KANT
 
C’est dans la Critique de la raison pratique (1788) que Kant (1724-1804) écrit : « Deux choses remplissent le cœur d’une admiration et d’une vénération toujours nouvelles et toujours croissantes [...] le ciel étoilé au-dessus de moi et la loi morale en moi. » Ainsi l’homme appartient-il à deux mondes ; le monde naturel et le monde moral, le monde du déterminisme et le monde la liberté.

Dans la phrase : « Le ciel étoilé au-dessus de moi et la loi morale en moi », le ciel étoilé représente la légalité et la nécessité du monde extérieur, du monde offert aux sens, et la loi morale en moi « commence au moi invisible », « et élève infiniment ma valeur ». L’homme est ainsi soumis à une double légalité, naturelle d’une part, morale de l’autre.

https://philoforever.blog4ever.com/le-ciel-etoile-au-dessus-de-moi-la-loi-morale-en-moi-kant
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





les leçons du ciel Empty
MessageSujet: Re: les leçons du ciel   les leçons du ciel Icon_minitime

Revenir en haut Aller en bas
 
les leçons du ciel
Revenir en haut 
Page 1 sur 2Aller à la page : 1, 2  Suivant
 Sujets similaires
-
» ESPERANCE: LE CIEL OU LA TERRE ?
» Jésus le vrai pain du ciel.
» Alors je vis le ciel ouvert ... Apocalypse 19
» Que chacun use de violence pour entre au ciel! Luc 16:16
» Après cela, je vis une porte ouverte dans le ciel. Apocalypse 4/5

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Etre chrétien ou pas? :: UN JOUR, UN VERSET-
Sauter vers: