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| Semaine sainte | |
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Auteur | Message |
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Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Semaine sainte Ven 12 Avr 2019, 12:48 | |
| En marge de ceci qui est plutôt méditatif, j'ouvre ce fil pour y regrouper, en vrac, quelques remarques, réflexions ou liens relatifs à la "Semaine sainte". Du point de vue littéraire, le schéma chronologique et narratif de la "Semaine sainte" ou "pascale" résulte, comme beaucoup de séquences liturgiques (p. ex. l'Avent et Noël, de l'annonciation à Nazareth [selon Luc] à la naissance à Bethléem, des bergers de Luc aux mages de Matthieu), d'un "effet synoptique": ce sont non seulement les trois évangiles dits synoptiques (Matthieu-Marc-Luc), mais aussi le quatrième "canonique" (Jean), qui se trouvent ainsi "mixés" ensemble et "ré-ordonnés" en retour. C'est donc un schéma intertextuel dont l'exégète doit plutôt se méfier dans le détail, pour ne pas le plaquer indûment sur chaque texte particulier. Mais c'est aussi un effet général qui semble avoir été visé par les rédactions évangéliques, avec une attention inhabituelle quoique inégale au marqueurs temporels (passage des jours, des nuits, des heures). Ainsi dès Marc qui sépare ostensiblement l'entrée "triomphale" à Jérusalem (= dimanche des Rameaux, selon le schéma synthétique) de la "purification du temple" (tout à fait séparée de la Passion par Jean, chap. 2) par le battement d'une nuit (Marc 11,11) qu'omettront en revanche Matthieu et Luc. Le passage au jour suivant (= du lundi au mardi) est lui aussi marqué (v. 19s), mais ensuite la chronologie se perd dans une série de controverses et de discours (11,20--13) avant de reprendre sous la forme d'un compte à rebours ("deux jours avant la Pâque et la fête des Pains azymes, l'onction à Béthanie, 14,1ss). On saute ensuite (14,12) au "premier jour de la fête des Pains azymes" identifié à l'immolation de la Pâque (jour de la crucifixion pour Jean) -- qui devrait logiquement correspondre au surlendemain de l'onction, mais que le schéma traditionnel traite plutôt comme un lendemain (onction mercredi soir, repas de Pâque et Cène jeudi soir); sur la fin de la séquence hebdomadaire (vendredi-parascève, samedi-shabbat, dimanche-premier/huitième jour), tout le monde s'accorde (mais pas sur l'année, puisque le quatrième évangile fait coïncider la Pâque et le vendredi...). Toutes ces considérations de chronologie narrative (qui seraient encore compliquées par un examen précis de Matthieu, de Luc et de Jean) n'ont évidemment guère d'intérêt par rapport au(x) récit(s) proprement dit(s) -- dont nous pouvons désormais parler ici, quitte à renvoyer à ce qui a déjà été dit ailleurs de tel ou tel épisode. Il était cependant (relativement) intéressant de remarquer que si le schéma précis de la "Semaine sainte" est artificiel et douteux, il y a bien dans les évangiles un effet de cadrage chronologique, bien que le cadre varie d'un évangile à l'autre... |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Ven 12 Avr 2019, 14:25 | |
| - Citation :
- Toutes ces considérations de chronologie narrative (qui seraient encore compliquées par un examen précis de Matthieu, de Luc et de Jean) n'ont évidemment guère d'intérêt par rapport au(x) récit(s) proprement dit(s) -- dont nous pouvons désormais parler ici, quitte à renvoyer à ce qui a déjà été dit ailleurs de tel ou tel épisode. Il était cependant (relativement) intéressant de remarquer que si le schéma précis de la "Semaine sainte" est artificiel et douteux, il y a bien dans les évangiles un effet de cadrage chronologique, bien que le cadre varie d'un évangile à l'autre...
La semaine sainte ("même avec un schéma artificiel") est un moyen de faire vivre le "souvenir" des différentes étapes qui ont amenées le Christ à sa mort et à sa résurrection (le programme de lecture (récent) de la Watch pendant la semaine qui précède le mémorial est une autre façon de vivre une "semaine sainte"). Je trouve que cette tradition permet au croyant de vivre les derniers jours du Christ, de méditer sur l'évènement de pâques et vivre une semaine intense en émotion. Une information sur la semaine sainte : Qu’est-ce que le Dimanche des rameaux ?Six jours avant la fête de la Pâque juive, Jésus vient à Jérusalem. La foule l’acclame lors de son entrée dans la ville. Elle a tapissé le sol de manteaux et de rameaux verts, formant comme un chemin royal en son honneur. C’est en mémoire de ce jour que les catholiques portent des rameaux (de buis, d’olivier, de laurier ou de palmier, selon les régions. Ces rameaux, une fois bénis, sont tenus en main par les fidèles qui se mettent en marche, en procession : marche vers Pâques du peuple de Dieu à la suite du Christ."La foule nombreuse venue pour la fête apprit que Jésus venait à Jérusalem ; ils prirent les rameaux des palmiers et sortirent à sa rencontre et ils criaient : Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur !" Ces paroles sont chantées comme antienne d’ouverture au lieu où les fidèles se sont réunis : après une brève allocution, le célébrant bénit les rameaux et l’on lit le récit évangélique de l’entrée messianique de Jésus avant de se rendre en procession jusqu’à l’église.La tradition chrétienne veut que l’on emporte, après la messe, les rameaux bénits, pour en orner les croix dans les maisons : geste de vénération et de confiance envers le Crucifié. Qu’est-ce que le Jeudi Saint ?Jésus prend son dernier repas avec les douze Apôtres dans la salle dite du « Cénacle ». Saint Paul et les évangélistes Marc, Luc et Matthieu rapportent les récits de la Cène au cours de laquelle, en prenant le pain et le vin, le Christ rend grâce et offre son Corps et son Sang pour le salut des hommes. Au cours de ce repas, Jésus va se mettre à genoux devant chacun de ses disciples et leur laver les pieds. Il prend la tenue de serviteur et dit : « C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez vous aussi comme j’ai fait pour vous. » Au cours de la messe célébrée avec solennité, on répète le geste du lavement des pieds."Demeurez ici et veillez avec moi."Après ce repas de la Cène, l’heure de l’épreuve approchant, le Christ se rend au jardin des Oliviers avec les apôtres pour veiller et prier.Le Jeudi Saint, l’Église célèbre la messe « en mémoire de la Cène du Seigneur », puis le Saint Sacrement est déposé au « reposoir », l’autel est dépouillé, la croix est enlevée et voilée. Tout ce dépouillement : le Christ est entré dans sa passion, dépouillé de tout. C’est une nuit d’adoration, les fidèles s’unissent à la prière du Christ ce soir-là, en veillant auprès du Saint-Sacrement (le pain et le vin consacrés au cours de la messe) jusque tard dans la nuit https://eglise.catholique.fr/approfondir-sa-foi/la-celebration-de-la-foi/les-grandes-fetes-chretiennes/careme-et-paques/semaine-sainte-paques/435041-jeudi-saint/ |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Ven 12 Avr 2019, 15:01 | |
| Le programme de lecture de la Watch, s'il existe toujours, remonte à près de quarante ans, j'en ai gardé un fort souvenir (cf. l'autre fil). Concernant les "Rameaux" -- qui évoquent davantage Soukkoth (fête des Huttes ou des Cabanes) et l'automne que la Pâque et le printemps -- on peut noter que le mot "Hosanna", transcription approximative de l'hébreu hoshia` na', ne signifie rien en grec et n'est déjà plus très bien compris des évangélistes, qui préfèrent ici, comme dans quasiment toutes les transcriptions de l'hébreu ou de l'araméen, la formule étrangère et mystérieuse... il vaut donc mieux le transcrire aussi en français, "hosanna", que le traduire (p. ex. "sauve", comme dans la Septante du psaume 118=117,25s, sôson, que précisément les évangélistes n'ont pas suivie sur ce point). A propos de la Cène, je repensais à ce logion (Marc 14,25//) qui s'ajoute aux formules pauliniennes de 1 Corinthiens 11 et que je trouve très touchant, quelle que soit la façon dont on l'interprète: Amen, je vous le dis, je ne boirai plus du produit de la vigne jusqu'à ce jour où je le boirai nouveau dans le royaume du dieu.Autres liens relatifs à cette "semaine", à mesure que je me les rappelle: l'onction, l'arrestation |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Ven 12 Avr 2019, 15:48 | |
| - Citation :
- A propos de la Cène, je repensais à ce logion (Marc 14,25//) qui s'ajoute aux formules pauliniennes de 1 Corinthiens 11 et que je trouve très touchant, quelle que soit la façon dont on l'interprète: Amen, je vous le dis, je ne boirai plus du produit de la vigne jusqu'à ce jour où je le boirai nouveau dans le royaume du dieu.
Jésus donne un rendez-vous à ses disciples, il sera de nouveau présent auprès des siens et il partagera avec eux un banquet céleste, en attendant "l’absent" est présent au milieu des siens à travers le partage du pain et du vin dans l’espérance d’une communion nouvelle.
Sur le chemin d'Emmaüs (Luc 24, 28 ss) est aussi un très beau texte :
"Lorsqu'ils approchèrent du village où ils allaient, il parut vouloir aller plus loin. Mais ils le pressèrent, en disant : Reste avec nous, car le soir approche, le jour est déjà sur son déclin. Il entra, pour demeurer avec eux. Une fois installé à table avec eux, il prit le pain et prononça la bénédiction ; puis il le rompit et le leur donna. Alors leurs yeux s'ouvrirent et ils le reconnurent ; mais il disparut de devant eux. Et ils se dirent l'un à l'autre : Notre cœur ne brûlait-il pas en nous, lorsqu'il nous parlait en chemin et nous ouvrait le sens des Ecritures ? "
Notons qu'il n’y a pas de repas, Jésus prend le pain prononce une bénédiction, le rompt et le distribue mais personne ne mange, la fraction du pain a permis aux disciples de reconnaître la présence de Jésus, un Jésus qui disparaît. Les disciples lui avaient dit : "Reste avec nous" mais Jésus doit partir. Ce récit corrobore celui de Luc 22,16 : "je vous le dis, je ne la mangerai plus jusqu'à ce qu'elle soit accomplie dans le royaume de Dieu.", la Cène (à ce stade) reste toujours son dernier repas.
La présence et l'absence de Jésus dans l'attente du banquet céleste seront au "menu" des disciples. - Citation :
- Autres liens relatifs à cette "semaine", à mesure que je me les rappelle:
l'onction, l'arrestation Lundi saintIl n’y a pas de liturgie particulière ce jour-là. Dans le récit de la Semaine sainte, Jésus rend visite à ses amis de Béthanie et Marie le parfume d’huile précieuse, comme pour le préparer à son ensevelissement. Pendant la messe chrismale (du grec “ khrisma “ signifiant “huile”), l’évêque réunit autour de lui les prêtres du diocèse et consacre les huiles saintes qui seront utilisées pour les sacrements durant l’année à venir. Chaque paroisse reçoit alors sa provision annuelle d’huiles. Un plein de carburant liturgique. Cette messe est traditionnellement célébrée le Jeudi saint au matin mais elle peut également avoir lieu les jours qui précèdent.Vendredi saintJésus est amené devant Ponce Pilate puis il est condamné à mort. Il porte sa croix avant d’être crucifié sur un lieu que l’Évangile nomme « Golgotha », c’est-à-dire « lieu du crâne ». Ce jour-là, aucune messe n’est célébrée. Le Chemin de Croix nous permet de revivre les événements de la Passion de Jésus et de réfléchir au sens de ces événements.Lors de l’Office de la Croix, généralement célébré entre 12h00 et 15h00, on lit le récit de la Passion et on propose aux fidèles de s’avancer pour vénérer la Croix en la touchant ou en l’embrassant. On peut également recevoir la communion car des hosties, consacrées le Jeudi saint, ont été réservées à cet effet. Une collecte pour la Terre sainte permet de rassembler des fonds pour les chrétiens du Moyen-Orient. Le Vendredi saint est un jour de jeûne et d’abstinence.https://fr.aleteia.org/2018/03/25/petit-guide-de-la-semaine-sainte/ |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Ven 12 Avr 2019, 16:18 | |
| Hélas! l'antidocétisme de Luc-Actes (Luc 24,41ss; Actes 10,41) flanque tout par terre... (Tu as peut-être consulté ceci.) Une phrase simple et émouvante dans son contexte narratif (je parle de Marc 14,25//) devient ainsi un casse-tête dogmatique insoluble (quand, où, comment "Jésus" boira ou mangera-t-il quoi, au juste ?). Et, de fait, on ne peut la comprendre "simplement" que dans la perspective d'une eschatologie "naïve", "au premier degré": future, réelle, proche, terrestre, matérielle (comme 9,1 sans la "transfiguration"; cf. encore 13,30ss; 14,62 etc.) -- c.-à-d. aussi erronée, non seulement à nos yeux mais déjà aux yeux des évangélistes qui témoignent également d' autres eschatologies (lointaines, spiritualisées ou actualisées). On peut toujours en repousser l'échéance de siècle en millénaire, l'interpréter comme une métaphore spirituelle ou sacramentelle, mais elle y perd l'évidence de sa simplicité, ne serait-ce que par l'embarras du choix des interprétations... Si en revanche, dans la ligne de Marc ou même de Matthieu (qui en rajouterait plutôt dans l'eschatologie proprement incroyable, cf. 10,23; 24,29ss, "aussitôt"; 26,64, "dès maintenant"; 27,51ss -- tout en multipliant par ailleurs les références au "retard de la parousie"), on ne présuppose pas un "Jésus" omniscient ni infaillible (comme il l'est assurément chez Jean, mais là il se garde bien de dire des choses pareilles), toutes ses paroles, à défaut d'exactitude prédictive ou théologique, retrouvent leur pathétique (non seulement les espérances illusoires, mais aussi l'angoisse de Gethsémané ou le cri d'abandon de la croix qui ne sont plus du "chiqué"). Je repense à la fameuse formule de Loisy, "Jésus attendait le royaume de Dieu, et c'est l'Eglise qui est venue" -- phrase d'ailleurs moins iconoclaste qu'il n'y paraît, car il l'entendait en bonne part et en bon catholique: "l'Eglise" à ses yeux c'était mieux que "le royaume de Dieu", tout au moins dans sa version pré-chrétienne qui était encore celle de Jésus; ça ne l'a pas empêché (Loisy, pas Jésus) d'être excommunié. Reste qu'avec ou sans "suite ecclésiastique" (explicite dans Luc-Actes, implicite ailleurs), Marc ou Matthieu ne peuvent guère se lire comme "évangile", c.-à-d. "bonne nouvelle", sans que le "bon" passe par une histoire d'échec, d'erreur et d'errance plus ou moins dramatique et pathétique. (Sur le "banquet du royaume", cf. aussi Matthieu 8,11; Luc 13,28ss; 14,15; 22,30 -- a contrario Romains 14,17 -- et tous les récits et paraboles de repas, y compris la Cène, qui s'y rattachent plus ou moins directement.) --- D'après Wikipedia (je ne connais pas grand-chose à la liturgie catholique, mais l'idée d'un jour sans messe m'a intrigué) il y a bien une "communion" le Vendredi-Saint, mais avec des hosties consacrées la veille... |
| | | le chapelier toqué
Nombre de messages : 2607 Age : 77 Date d'inscription : 31/08/2010
| Sujet: Re: Semaine sainte Sam 13 Avr 2019, 14:19 | |
| En lisant votre dialogue, Free, Narkissos, il m'est revenu à l'esprit des souvenirs de mon enfance/adolescence lorsque j'allais à la messe pendant la semaine sainte.
Ce qui se passait dans le courant du vendredi saint m'a toujours impressionné. En effet, en plus du texte biblique largement repris et lu depuis la chaire, tout le lent processus ordonnancé par le ou les prêtres présent(s) à cette occasion donnait à cette célébration une force particulière pendant laquelle une très forte émotion émanait non seulement des officiants mais également des croyants présents.
Si la porte de l'église s'était ouverte à ce moment-là et qu'un homme barbu en robe de coton était apparu soudainement personne n'aurait vraiment été surpris. C'est du moins ce que j'ai ressenti dans ces moments là. |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Sam 13 Avr 2019, 16:34 | |
| Dans le Sud de l'Europe -- tout au moins plus qu'au Nord ! -- la liturgie sort de l'église: processions, chemin de croix... (cf. la Saeta de Machado sur l'autre fil). La Passion évangélique, et plus précisément le Vendredi-Saint, est une véritable scène de fin du monde, une "uchronie" avant la lettre -- déjà chez Marc (15,33ss) avec les ténèbres (l'incompatibilité astronomique d'une "éclipse solaire normale" avec la pleine lune de la Pâque échappait sans doute moins aux Anciens tant soit peu instruits qu'à la plupart des lecteurs modernes !), a fortiori chez Matthieu (27,45ss) avec le tremblement de terre et la résurrection générale (littéralement incroyable) que Luc s'empressera d'oublier (Jean abandonnera même les ténèbres, il ne reste fort logiquement chez lui plus rien de "cosmique", rien que des "signes" accessibles aux seuls croyants, comme le sang et l'eau). On peut aussi noter qu'en Marc, à part le centurion de service à qui est réservée la confession abyssale "cet homme était fils de dieu" (15,39), seules des femmes restent au moment crucial (c'est le cas de le dire), et "de loin" (v. 40) -- idem chez Matthieu, à peu de choses près ("celui-ci" au lieu de "cet homme", 27,54); Luc y ajoute déjà des "connaissances" ( gnôstoi, masculin, 23,49), et Jean naturellement le "disciple bien-aimé" (19,26s.35). |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Lun 15 Avr 2019, 11:37 | |
| Les quatre évangiles donnent à la Cène un cadre dont Paul ne dit rien. Ils situent le repas à l’occasion de la Pâque juive, en font un repas d’adieu[14] et précisent l’identité des convives : outre Jésus, ce sont les disciples (Mt 24,7, Mc 14,12 et Jn 13,5), « les Douze » (Mc 14,17) ou « les apôtres » (Lc 22,14), sans que ces différences ne paraissent significatives. Les évangiles synoptiques localisent le repas à Jérusalem (littéralement « dans la ville », εἰς τὴν πόλιν, Mt 26,18, Mc 14,13 et Lc 22,10)[15]. Mais sur d’autres aspects de ce repas, les évangiles ne sont pas unanimes. Les récits présentent des différences dans leur contenu, certaines légères, d’autres substantielles[16]. À commencer, évidemment, par celui de Jean dont il serait trop long de montrer toutes les particularités. Mais même les différences entre les évangiles de Matthieu, de Marc et de Luc peuvent être notables. Chacun insère dans sa narration des épisodes qui lui sont propres (Luc inclut dans le dernier repas, une controverse sur la hiérarchie parmi les apôtres, Lc 22,24-30) ou qu’ils partagent (Matthieu et Marc racontent un autre repas au cours duquel une femme parfume les pieds de Jésus, Mt 26,6-13 et Mc 14,3-9). Et quand ils s’accordent sur un événement, ils peuvent l’exprimer de manière différente : en Matthieu et en Marc, Jésus dit du bien du pain (εὐλογήσας, Mt 26,26 et Mc 14,22) tandis qu’il est reconnaissant pour la coupe (εὐχαριστήσας, Mt 26,27 et Mc 14,23)[17]. En Luc, il se montre reconnaissant pour l’une et pour l’autre (εὐχαριστήσας, en Lc 22,17.19). https://www.erudit.org/fr/revues/theologi/2015-v23-n1-theologi03170/1040864ar/ - Citation :
- (Sur le "banquet du royaume", cf. aussi Matthieu 8,11; Luc 13,28ss; 14,15; 22,30 -- a contrario Romains 14,17 -- et tous les récits et paraboles de repas, y compris la Cène, qui s'y rattachent plus ou moins directement.)
La théologie contemporaine, fortement sensibilisée à la causalité réciproque entre Eucharistie et Eglise (« C'est l'Eglise qui fait l'Eucharistie, mais c'est aussi l'Eucharistie qui fait l'Eglise », H. de Lubac), n'a pas suffisamment exploré jusqu'ici un des aspects de cette mystérieuse interaction : sa dimension eschatologique. Une réaction en ce sens s'amorce. Elle s'autorise parfois de la parole de Jésus à la Cène : « En vérité, je vous le dis, je ne boirai plus désormais de ce produit de la vigne, jusqu'au jour où j'en boirai avec vous du nouveau dans le Royaume de mon Père » (Mt, 26,29 et par.). Dans quelle mesure cette affirmation est-elle effectivement un équivalent du « donec veniat » paulinien (cf. 1 Co, 11,26) ? Quelle est la nature de l'opposition que Jésus semble y établir entre la Cène et le Banquet eschatologique ? Que nous révèle cette parole sur la conscience messianique de Jésus ? Pour répondre à ces questions le P. Lebeau nous propose une étude magistrale du logion, de son arrière-fonds biblique, de son genre littéraire, du sens que lui confère la théologie des synoptiques et de l'intelligence qu'en ont eue les Pères de l'Eglise.
L'expérience, liturgique des « sacrifices de communion », les évocations u Festin eschatologique et du Banquet de la Sagesse trouvent une sorte d'aboutissement dans la commensalité avec le Messie, qu'annoncent les Paraboles d'Henoch (1 Hén., 62,13-14) et à laquelle Jésus manifestement se réfère. Ce partage de la table avec le Messie signifie l'intimité définitive qui unira Dieu et son Peuple dans le Royaume eschatologique. Intimité pleine de joie : le symbolisme du vin associé par la Bible à celui du Banquet l'indique. Aussi les quatre coupes qui jouent un rôle essentiel dans le rituel pascal depuis le début du 1er siècle avant Jésus-Christ soulignent-elles l'anticipation des derniers temps dans la célébration festive. De même à Qumram l'usage quotidien du vin, qui ne figurait sur la table des juifs que les jours de fête, souligne le fait que les repas de communauté sont pris, dans une perspective de commensalité sacrée, comme inauguration du repas messianique. Dans l'un et l'autre cas l'usage du vin a donc un sens théologique : goûter dès maintenant au vin c'est anticiper sur l'accomplissement messianique, c'est intégrer peu ou prou à sa pensée une nuance de realized esehatology. Inversement, si les rékabites, les naziréens et, peut-être, les thérapeutes d'Egypte rejettent l'usage du vin, il faut voir là un élément de leur style de vie qui exprime tout entier la conviction qu'ils sont encore pleinement étrangers et pèlerins en ce siècle, en marche par un nouvel Exode vers un accomplissement que rien ne permet d'anticiper.
En une deuxième partie l'A. situe la parole eschatologique dans l'enseignement de Jésus lui-même. Comme l'avaient déjà suggéré M. Thurian et J. Jeremias, la structure littéraire de notre logion invite à y voir bien plus qu'un mot d'adieu accompagné d'une prophétie du Royaume, ou que l'expression d'une espérance. Jésus prend un engagement solennel, il fait un vœu d'abstinence de vin comparable à celui des nazirs. En effet, à la veille de la Passion, le temps des signes anticipatifs du Royaume est révolu pour Jésus. Durant son ministère public, à l'opposé du Baptiste, il mangeait et buvait avec les disciples et les pécheurs pour manifester qu'en lui, ccîkojiczaiXsta (Origène), le Royaume était déjà inauguré. Désormais, en une démarche analogue à celle des nazirs, il invite les siens à se tourner avec lui vers l'accomplissement définitif des promesses.
En définitive le logion doit se comprendre dans la perspective des étapes successives de l'histoire du salut : temps d'Israël, temps du Christ, temps de l'Eglise, telles que H. Conzelmann les a bien mises en évidence dans la théologie lucanienne. Le repas de la Cène avec l'institution de l'Eucharistie appartient au temps du Christ. Le temps de l'Eglise ne s'ouvre qu'avec l'effusion de l'Esprit à la Pentecôte. Ainsi le logion comporte indéniablement « une opposition dynamique entre deux moments distincts de l'histoire du salut. Mais les termes de cette opposition ne sont point la Pâque légale et le rite eucharistique . . . Jésus réfère ici l'une à l'autre, en les opposant comme relevant de deux éons distincts, l'institution de l'Eucharistie en ce repas où s'achève la commensalité terrestre de Jésus avec les siens et l'Eucharistie de l'Eglise, auréolée de la gloire de l'Esprit et anticipation de la commensalité définitive avec le Fils de l'Homme au dernier jour» (p. 124). Pour établir sa thèse l'A. montre en particulier comment le Nouveau Testament et l'ancienne tradition patristique et liturgique considéraient l'Eucharistie, et très spécialement la coupe eucharistiée, comme l'aliment spirituel qui à la fois présuppose et réalise l'effusion de l'Esprit dans le temps de l'Eglise.
Cette analyse débouche sur une conclusion théologique importante : Jésus a fondé l'Eucharistie, comme le Baptême, comme les autres institutions de l'Eglise, durant sa vie terrestre, mais « il leur communique leur efficacité par sa mort et sa résurrection, (et) il leur donne d'être exercés à la Pentecôte », car ils relèvent « d'un ordre auquel seul l'Esprit donne accès » (J. Daniélou, cité par l'A., p. 140-141). https://www.persee.fr/doc/rscir_0035-2217_1971_num_45_1_2605_t1_0093_0000_2 |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Lun 15 Avr 2019, 15:15 | |
| Recension très instructive, malgré quelques problèmes de scan (qui transforment notamment "patristique" en "patriotique" !). Il faut la lire jusqu'au bout pour voir combien l'interprétation de ce logion (toujours Marc 14,25//) a divisé les Pères de l'Eglise, en particulier avec l'introduction du paramètre "millénariste".
A part ça, on constate toujours que le schéma (pseudo-)historique de Luc-Actes domine l'exégèse (ça a à peine changé depuis les années 1960): comme si l'on ne pouvait pas commenter Marc, Matthieu ou Jean sans parler de "la Pentecôte" (qui est pourtant une exclusivité des Actes)... |
| | | free
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| Sujet: Re: Semaine sainte Lun 15 Avr 2019, 15:33 | |
| L’onction à Béthanie dans le contexte de la semaine sainte
L’évangile du lundi saint est l’épisode de l’onction à Béthanie (Jn 12, 1-11). Pourquoi un tel choix ? Qu’apporte cette lecture en ce début de la semaine sainte ?
L’onction de Jésus dans l’évangile de Jean
Chacun des évangiles mentionne une onction de Jésus. Chez Matthieu (Mt 26, 6-13) et Marc (Mc 14, 3-9) la scène a lieu à Béthanie chez Simon le lépreux, peu après l’entrée messianique à Jérusalem. Une femme vient verser sur la tête de Jésus le contenu d’un Du latin vas : « récipient ». On appelle « vases sacrés » les principaux récipients utilisés dans la liturgie : le calice et la patène, le ciboire, [...] vase d’albâtre. Les disciples sont indignés par ce gaspillage, car la somme représentée par ce parfum (300 deniers[1], précise Marc) aurait pu être distribuée aux pauvres. Mais Jésus interprète ce geste comme une bonne œuvre qui anticipe son ensevelissement. Le récit de Luc (Lc 7, 36-50) se déroule bien avant la Passion. Jésus se trouve à table chez un pharisien nommé Simon. Une femme pécheresse survient et se tient aux pieds du Seigneur qu’elle arrose de ses larmes, essuie de ses cheveux, embrasse et oint de parfum. Ce geste est interprété par Jésus comme un signe d’amour lié au pardon des péchés.
La version johannique semble puiser à ces deux traditions, tout en précisant le nom de la verseuse (Marie de Béthanie) et le poids du parfum (une livre, c’est-à-dire environ 320 g). Comme chez Matthieu et Marc, l’onction a lieu au moment de la Passion (mais cette fois avant l’entrée à Jérusalem). Cependant, comme chez Luc, ce n’est pas sur la tête de Jésus, mais sur ses pieds, qu’elle s’effectue. L’onction sur la tête fait penser à celle des rois d’Israël et revêt donc une portée messianique. Mais l’onction sur les pieds est beaucoup plus inattendue, car ce sont les pieds d’un mort qui reçoivent habituellement ce traitement.
Un récit préliminaire à la Passion johannique
Chez Jean, l’onction à Béthanie intervient avant le récit proprement dit de la Passion, qui ne s’ouvre véritablement qu’au chapitre 13 avec la scène du lavement des pieds. Jésus vient de ressusciter Lazare – dernier des sept signes qui structurent la première partie du récit johannique. Après notre passage, il fera son entrée à Jérusalem (Jn 12, 12-19) pour y annoncer solennellement sa passion et sa mort (Jn 12, 20-36) et le « livre des signes » se terminera par un discours conclusif. A partir du chapitre 13 commence le « livre de l’heure » où Jésus, après un long discours d’adieu (Jn 13-17) entre dans sa passion pour donner librement sa vie et traverser la mort (Jn 18-20). Le choix de ce début du chapitre 12 pour ouvrir la semaine sainte n’est donc pas le fruit du hasard. Il inaugure une série chronologique cohérente. Nous sommes six jours avant la Pâque (Jn 12, 1) qui, d’après la chronologie du quatrième évangile, tombe cette année-là un samedi (Jn 19, 31). Les anciens comptant chaque jour entamé comme un jour entier, notre scène se déroule donc un lundi. L’entrée messianique à Jérusalem aura lieu « le lendemain » (Jn 12, 12), le dernier repas « avant la Pâque » (Jn 13, 1), et la mort de Jésus le jour de la Préparation (Jn 19, 31), c’est-à-dire le vendredi après-midi, au moment même où l’on égorge l’agneau pascal.
Une semaine sous le signe du corps, du repas et du parfum
Notre récit introduit trois motifs qui joueront un rôle capital tout au long de la semaine sainte : Dès le départ, l’attention est focalisée sur le corps de Jésus. C’est lui qui est, en quelque sorte, le lieu liturgique de la semaine sainte. Auprès de lui, contrairement à Judas qui intervient en discréditant le geste de l’onction, les trois personnages positifs auxquels le lecteur est invité à s’identifier restent muets. La semaine sainte, elle aussi, est un temps de silence. Mais ce silence n’en est pas vraiment un, car, devant le corps de Jésus, le corps du croyant parle à son tour. Chacun des trois personnages exprime en effet une posture différente devant le corps du Christ : Marthe se consacre toute entière à son service (littéralement, elle assure la « diaconie »), Marie l’honore de tout son être, Lazare communie avec lui dans un même repas comme Jésus le fera avec ses disciples après sa Résurrection. Cette communion entre Jésus et Lazare ira d’ailleurs bien plus loin, puisque les grands prêtres, voyant les foules confluer vers Jésus, décident de faire mourir aussi Lazare qui devient donc, à peine ressuscité, le modèle du martyr chrétien !
Le deuxième motif important est celui du repas. Sa signification est ambigüe puisqu’il s’agit à la fois d’un repas de retrouvailles avec un ressuscité, Lazare, et d’un repas d’adieu avec un futur crucifié, Jésus, dont l’onction des pieds évoque clairement la mort. Le repas du lundi saint est à la fois une anticipation de la Cène et du repas pascal où Jésus, à son tour fêtera ses retrouvailles avec ses disciples. Dans l’évangile de Jean, mort et Résurrection constituent un seul et même événement. On peut aussi rapprocher l’onction des pieds de Jésus, relatée ici, du lavement des pieds au soir du jeudi saint. Cette fois (Jn 13, 1-15) c’est Jésus qui s’abaissera en déposant son vêtement (comme il déposera[2] sa vie) pour laver les pieds de ses disciples, anticipant ainsi symboliquement le geste de sa vie donnée.
Enfin, il est capital de noter qu’en ce début de la semaine sainte, toute la maison de l’Église est déjà remplie de parfum. Le soir du vendredi saint ce parfum sera versé bien plus abondamment encore (100 fois plus !) pour ensevelir le corps du crucifié (Jn 19, 39). Privilégiant ce qui est gratuit, superflu et démesuré, comme le souligne Alain Marchadour[3], le geste de Marie nous invite à perdre à notre tour quelque chose de précieux pour que le Christ en soit honoré. Cette onction est d’ailleurs aussi la nôtre puisque, depuis le jour de leur baptême, les chrétiens respirent la bonne odeur du Christ. Après avoir traversé les eaux de la mort et avant de recevoir la lumière du ressuscité, ils ont été marqués du saint chrême. C’est cette huile parfumée que l’évêque va justement consacrer cette semaine au cours de la messe chrismale, et qui servira en particulier pour les baptêmes, les confirmations et l’ordination des prêtres. Une huile pour être imprégnés de la dignité du Christ. Mais aussi un parfum, pour que se répande, bien au-delà de la maison, la bonne odeur de l’Évangile. https://liturgie.catholique.fr/accueil/annee-liturgique/du-careme-au-temps-pascal/la-semaine-sainte/17872-lonction-a-bethanie-dans-le-contexte-de-la-semaine-sainte/ |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Semaine sainte Lun 15 Avr 2019, 16:39 | |
| Pour rappel... Il faut beaucoup se discipliner pour lire un texte comme celui-là (Jean 12) sans lui superposer mentalement ses "parallèles"... L'une des difficultés de détail réside dans la formule habituellement retenue au v. 7: (pour) qu'elle le garde (variante à peine facilitante de l' Alexandrinus: elle l'a gardé) pour le jour de mon ensevelissement -- comme si le parfum répandu était en même temps gardé, à moins qu'il n'ait pas été entièrement répandu (ce qui serait exclu chez Marc où le vase est brisé). On peut aussi rappeler qu'il y a entre les deux grandes sections du quatrième évangile (la rupture étant à la fin du chapitre 12) une sorte de transfert du personnage de Lazare (que Jésus aimait, chap. 11) au "disciple que Jésus aimait" (qui apparaît au chap. 13). |
| | | free
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| Sujet: Re: Semaine sainte Mar 16 Avr 2019, 12:24 | |
| Ensuite Jean nous raconte l'onction à Béthanie. Celle-ci apparaît comme une parabole de son ensevelissement. Jean semble bien avoir renversé ici l'ordre d'une séquence plus primitive qui racontait d'abord l'onction, ensuite la résurrection de Lazare. De fait, au début du chap. 1 1, Lazare est appelé le frère de cette Marie qui oignit le Seigneur (v. 2) alors même que ce dernier événement n'a pas encore été raconté. D'autre part, Matthieu et Marc (Luc a un récit similaire, mais ailleurs) rapportent d'abord l'accueil triomphal, puis l'onction. Les deux épisodes y sont d'ailleurs séparés par la section apocalyptique. On peut donc penser que la séquence mort-résurrection de Lazare, onction et accueil triomphal a été voulue par Jean. Il relie par ailleurs l'onction au chap. 11 en la situant dans la maison de Lazare et en identifiant la femme comme Marie, soeur de Lazare. De la même manière, nous l'avons déjà noté, il reliera l'accueil triomphal au chap. 11 par les mentions répétées du nom de Lazare.
Dans son récit de l'onction, Jean semble emprunter à la fois à la tradition marcienne et à la lucanienne. A la première (Me 14, 3-9), il puise la mention de Béthanie, l'expression «nard authentique de grand prix», la mention des 300 deniers, des pauvres, l'allusion à la sépulture, l'indignation des disciples que Jean attribue d'ailleurs à Judas seul, en noircissant sa réaction, ce qui est dans la ligne de son évangile (cf. 6, 70; 13, 2.27). De la seconde, il semble avoir retenu l'onction des pieds plutôt que celle de la tête et la mention des cheveux. L'onction de la tête peut s'expliquer comme un rite d'accueil, mais aussi comme une préparation à la sépulture. Le premier sens paraît présent chez Mc-Mt bien que Jésus oriente l'explication du geste vers la seconde signification. Le rite de la sépulture n'est pas seulement un rite social, mais une œuvre de charité comparable et même supérieure à l'aumône dans la tradition rabbinique. C'est pourquoi Jésus se compare aux pauvres et souligne l'importance du geste de la femme à son égard puisque, à la différence des pauvres, il ne sera pas toujours là.
L'onction des pieds, par contre, s'explique plus mal. Brown l'attribue à une confusion d'épisodes au stade de la tradition orale. L'onction des pieds ne peut avoir de valeur que comme partie d'une onction de tout le corps pour la sépulture. Le récit paraît donc, davantage que chez les synoptiques, une parabole de l'ensevelissement, comme la mort de Lazare préfigurait la mort de Jésus. A noter que chez Jean, la femme ne brise pas le flacon comme chez Marc et que Jésus a cette remarque curieuse au v. 7, à propos du parfum : « Laisse-la, afin qu'elle le garde pour le jour de ma sépulture». Brown traduit : «Leave her alone. The purpose was that she might keep it for the day of my embalming», c'est-à dire: «elle avait gardé le parfum jusqu'à maintenant pour embaumer Jésus». Cependant, il semble que cette traduction ne souligne pas assez le lien entre l'onction d'aujourd'hui et l'onction future pour la sépulture, ce qu'une traduction purement littérale manifeste mieux.
Ce lien avec l'ensevelissement futur apparaît encore à d'autres détails. En effet, Jean est le seul à mentionner que Marie oint Jésus avec une livre de parfum. En 19, 39, Jésus sera enseveli avec cent livres de parfum, également une notation propre à Jean. Bien que les noms des parfums ne soient pas exactement les mêmes, il faut souligner que Jean est le seul évangéliste à raconter l'ensevelissement avec des parfums36. Matthieu n'en parle pas. Marc et Luc rapportent qu'après que Jésus ait été enseveli (sans parfums), les femmes achetèrent (Me 16, 1) et préparèrent le parfum, mais n'en oignirent pas Jésus, car c'était le sabbat (Le 23, 56). Notons enfin que Jésus, dans le quatrième évangile, est enseveli avec des bandelettes (: 19, 40; 20, 5-7) et un suaire (20, 7). Pour les synoptiques, Jésus est simplement enveloppé dans un linceul. Or Lazare aussi avait été enseveli avec bandelettes et suaire. Le vocabulaire n'est pas le même pour les bandelettes. Encore une fois, Jean ne s'attache pas à une similitude exacte de vocabulaire, mais il est toutefois suggestif que la réalité des bandelettes et du suaire n'apparaissent qu'en Jean et s'applique à Lazare et à Jésus. https://www.persee.fr/doc/thlou_0080-2654_1982_num_13_1_1893
Dernière édition par free le Mar 16 Avr 2019, 14:54, édité 1 fois |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Mar 16 Avr 2019, 14:40 | |
| Très bonne étude -- on peut évidemment regretter la complexité que requiert le démêlage de l'intertextualité de textes qui pris séparément sont tous relativement simples, mais on n'y échappe pas pour autant. Et de fait il y a forcément pour le lecteur des quatre évangiles canoniques (au moins !) une alternance entre le moment comparatif, complexe par définition, et le retour à la simplicité de chaque texte que l'on goûte d'autant mieux qu'on est passé par la comparaison et qu'on le distingue des autres. |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Mar 16 Avr 2019, 15:14 | |
| J'avoue que je préfère la version de l'évangile de Luc (7, 36 ss) et notamment la réponse poétique que Jésus fait à Simon :
"Puis il se tourna vers la femme et dit à Simon : Tu vois cette femme ? Je suis entré chez toi, et tu ne m'as pas donné d'eau pour mes pieds ; mais elle, elle a mouillé mes pieds de ses larmes et les a essuyés avec ses cheveux. Tu ne m'as pas donné de baiser, mais elle, depuis que je suis entré, elle n'a pas cessé de m'embrasser les pieds. Tu n'as pas répandu d'huile sur ma tête ; mais elle, elle a répandu du parfum sur mes pieds. C'est pourquoi, je te le dis, ses nombreux péchés sont pardonnés, puisqu'elle a beaucoup aimé. Mais celui à qui l'on pardonne peu aime peu. Et il dit à la femme : Tes péchés sont pardonnés."
Je trouve que l'Eglise catholique avec la "semaine sainte" propose une célébration à la hauteur de l'évènement, loin d'un rituel formaliste. Mes souvenirs de Ex-TdJ me donnent le sentiment que chez la Watch, la commémoration est surtout un moyen de connaitre le nombre de membres "oints" et de pouvoir comptabiliser éventuellement une assistance record. |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Mar 16 Avr 2019, 16:51 | |
| La version de Luc, bien sûr, sort aussi du cadre de la "Semaine sainte" (et, logiquement, de toute référence directe à la mort et à l'ensevelissement du Christ).
La Semaine sainte catholique est sans doute assez différente en Espagne et en Pologne, mais toutes les Eglises "historiques" (aussi orientales et même protestantes au Nord de l'Europe) ont évidemment l'avantage culturel de siècles de traditions populaires qui leur donnent un caractère sensible (goûts, parfums, formes, couleurs, musiques), par rapport à quoi les "sectes" plus récentes paraissent ternes et indigentes (mais dans une certaine mesure c'est bien ce qu'elles cherchent, se distinguer de leur "culture"). Le "Mémorial" jéhoviste pousse les choses jusqu'à la caricature en écartant le happy ending de Pâques; c'est en théorie un "jeudi-saint" et un "vendredi-saint" à la fois, à la faveur du comput qui fait débuter les "jours" au coucher du soleil, mais l'accent porte beaucoup moins sur le tragique du Vendredi-saint que sur le simulacre d'une Cène à laquelle presque personne ne participe... (malgré les augmentations récentes, dont je n'imagine pas la comptabilité officielle très enthousiaste). Reste la pleine lune, impassible (par temps clair).
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En ce qui concerne le déplacement de péricopes hors du "cadre" de la "Semaine sainte" (comme l'onction en Luc 7), le plus spectaculaire est probablement celui de la purification du temple que Jean transfère au tout début de son évangile (chap. 2, avec une ironie supplémentaire: "Jésus" y assume à peu de chose près la parole sur la destruction du temple que lui prêtaient les "faux témoins" des Synoptiques !): le seul acte vraiment public de "Jésus" qui, dans les Synoptiques, offrait un minimum de vraisemblance politique au récit de la Passion (et spécialement d'une crucifixion romaine) s'en trouve ainsi complètement déconnecté. Tout le drame n'a plus d'autre explication que le seul "amour" divin, pleinement assumé par le Christ (je me défais de mon âme), et le mode même de l'exécution (crucifixion) devient providentiellement un pur symbole (= "élevé de la terre", 3,14; 8,28; 12,32ss; cf. 18,31ss).
Parmi de nombreux autres déplacements remarquables, on peut penser au "miracle négatif" du figuier (Marc 11//) que Luc non seulement retire du cadre de la "Semaine sainte" mais transforme en "parabole" (chap. 13). Mais si l'on y regarde de plus près la version de Marc est tout à fait unique, parce que la malédiction du figuier a lieu entre l'"entrée à Jérusalem" et la "purification du temple", elle-même retardée par un contretemps (c'est trop tard), auquel la "désynchronisation" du figuier (dont la saison ne coïncide pas avec la faim de Jésus !) fait un certain écho. Le dessèchement du figuier n'est constaté que le lendemain (après la purification du temple), avec la fameuse leçon sur la "foi de dieu"... C'est déjà tout autre chose chez Matthieu (21) où l'on a le même jour entrée et purification du temple, et le lendemain malédiction et dessèchement instantané du figuier.
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Les lectures de la Semaine sainte, qu'on suive chaque année un évangile différent en se donnant une petite chance d'oublier les autres, au moins dans le détail, ou qu'au contraire on cherche la comparaison systématique des quatre récits dans une "synopse", aboutissent à un curieux effet d'"histoire" (qui me rappelle la distinction heideggerienne, pourtant passablement différente, de l'historisch et du geschichtlich, ce qu'on traduit souvent par "historique" ou "historiographique" d'une part et "historial" ou "événementiel" de l'autre). Il y a "effet (littéraire ou poétique) d'histoire" en ce sens qu'on n'a pas l'impression de lire quatre histoires différentes, mais une seule, alors même que rien ne concorde dans le détail. Et cet effet d'histoire est tout différent de l'histoire qu'un historien se mettrait en devoir de "reconstruire" à partir des quatre récits, choisissant tantôt l'un, tantôt l'autre, en inventant le plus souvent un cinquième qui permettrait de rendre compte au moins mal des quatre mais ne correspondrait effectivement à aucun d'entre eux. On pourrait parler d'effet holographique (effet de "totalité" et de "réalité", de "relief" en 3D ou 4D, obtenu précisément par le rapport des différences entre elles à partir d'un certain "point de vue"). Artificiel en un sens, mais dans un autre éminemment concret, parce qu'il renvoyait à une réalité trop banale pour faire de l'"histoire" sans ce genre d'artifice: des crucifixions au Ier siècle il y en a eu par dizaines de milliers, avec à chaque fois du "corps" et du "sang" bien "réels" et "cruels", mais trop nombreuses justement pour en faire une, significative et décisive.
Jugement, mort et résurrection conjoints de "Dieu" et de "l'homme", à la faveur de l'ambiguïté du "Fils de l'homme" qui est à la fois un personnage unique, divin et surhumain, dans la veine de Daniel 7 et d'Hénoch, et "n'importe qui" selon le sens ordinaire de la locution hébraïque ou araméenne. Ce que résume à sa manière l'ecce homo (idou [ho] anthrôpos) johannique (Jean 19,5, d'ailleurs omis par P66). L'"histoire" de "Dieu" et de "l'homme" n'en font qu'une. |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Ven 19 Avr 2019, 12:28 | |
| Autre lien on ne peut plus pertinent pour un Vendredi-Saint (l' unique "parole de Jésus en croix" pour Marc et Matthieu, hormis le cri sans parole qui lui fait écho; réduite à l'une des "sept paroles" dans le mixage général des quatre évangiles, qui masque aussi son absence dans Luc et Jean). Et celui-ci pour demain -- la manne, dit-on, se gardait pour ce lendemain-là. |
| | | le chapelier toqué
Nombre de messages : 2607 Age : 77 Date d'inscription : 31/08/2010
| Sujet: Re: Semaine sainte Ven 19 Avr 2019, 19:41 | |
| l'église orthodoxe célébrera Pâques avec quelques jours de retard sur le calendrier des autres églises chrétiennes.
C'est une fête importante: la lumière éclaire l'obscurité. La résurrection de Jésus est mise en valeur au sein de cette église. C'est sans doute sa plus grande fête religieuse. |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Dim 21 Avr 2019, 11:47 | |
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| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Lun 22 Mar 2021, 17:18 | |
| Origine biblique Le dimanche des Rameaux célèbre l'entrée triomphale de Jésus-Christ à Jérusalem2. Dans la tradition juive, les rameaux de palmier et le mot « Hosanna » évoquent la fête des récoltes, Souccot, mentionnée dans le Lévitique. Les quatre Évangiles canoniques (Mt 21,1 - 9, Mc 11,1 - 10, Lc 19, 28 - 40, Jean 12, 12 - 15) racontent que, peu avant la fête de la Pâque juive, Jésus décide de faire une entrée solennelle à Jérusalem. Il organise son arrivée en envoyant deux disciples chercher à Bethphagé un ânon (en Matthieu, Jésus précise que l'ânon se trouve avec sa mère l'ânesse, détail qui ne se retrouve pas en Marc et en Luc). Il entre à Jérusalem sur cette monture et se manifeste publiquement comme le messie que les Juifs attendaient. C'est une monture modeste, comme l'avait annoncé le prophète pour montrer le caractère humble et pacifique de son règne. Une foule nombreuse venue à Jérusalem pour la fête l'accueille en déposant des vêtements sur son chemin et « en agitant des branches coupées aux arbres », ou rameaux. https://fr.wikipedia.org/wiki/Dimanche_des_Rameaux
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| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Lun 22 Mar 2021, 22:30 | |
| Ah oui, c'est bientôt, et bien tôt cette année... Sur les rameaux et l' hosanna, cf. supra 12.4.2019. En ce qui concerne les deux ânes, outre la tendance à la duplication chez Matthieu dont on parlait encore récemment (deux possédés, deux fois deux aveugles au lieu d'un, etc.; cf. ici 20.3.2021), c'est aussi un effet de la citation formelle de Zacharie (qui inspire sans doute déjà le récit de Marc mais n'est expressément cité que chez Matthieu et Jean), dont le parallélisme poétique (un âne // le petit d'une ânesse, désignant le même animal) n'est plus compris comme tel -- ce qui, au pied de la lettre, obligerait Jésus à une acrobatie (monter deux ânes à la fois): cf. Matthieu 21,1ss. Comme je ne vois rien à ajouter sur ce genre de détail à ce qui a été dit plus haut (et dans les références extérieures qui y sont indiquées), je me contenterai d'une généralité de ton: la tragicomédie de la Passion divino-humaine commence comme elle finit, se déclenche comme elle se dénoue, dans la joie, ce qui n'ôte rien à son pathos central, bien au contraire. --- Réflexion marginale, mais tout de même de circonstance: plus le christianisme se crispe sur une interprétation historicisante de son "mythe" central, en refusant précisément de reconnaître ce qu'il a de "mythique", plus elle le banalise et le vide de son sens à l'instar de n'importe quel "événement" du passé qui s'éloigne, comme on dit, à défaut d'être mythifié et ritualisé. Avec en l'occurrence des inconvénients plus que fâcheux, comme l'antisémitisme: comment ne pas mépriser un peuple qui aurait reconnu et rejeté son messie, voire son dieu ? Si en revanche on reconnaît dans le "mythe" chrétien, autrement dit "judéo-païen", une expression -- unique et originale, contingente ou providentielle autant qu'on voudra mais expression quand même -- d'une mythologie et d'une religion immémoriales (dont les traces historiques remontent au moins au Dumuzi-Tammuz sumérien en passant par Yahvé, Baal-Adonis, Dionysos, Osiris, Attis et.), qui les a sans doute appauvries mais leur a aussi permis de (se) survivre, on n'a plus besoin de "coupables" historiques et en général on comprend mieux de quoi on parle. |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Mar 23 Mar 2021, 15:43 | |
| Le mot hoshanna est composé de l'impératif Hifil (deuxième personne masculin singulier) du verbe "sauver" (racine yod-shin-ain) et d'une particule de déprécation ou d'insistance (nah, "s'il-te-plait", "de grâce"). Il est donc proche de l'exclamation hoshya nah ( « De grâce, secours-nous ») de Psaumes 118:25, que les Juifs lancent à Dieu lors du Hallel, qui est lu à la néoménie, lors des trois festivals bibliques (Pessa'h, Chavouot et Souccot) et des 8 jours de Hanoucca (les sionistes religieux le récitent également lors de la fête d'indépendance d'Israël) ...
... Au Ier millénaire, Hosanna est devenue une exclamation de joie et un mot synonyme de bienvenue3. Un exemple est lors de l'entrée de Jésus à Jérusalem, le jour des Rameaux4, au cours duquel des gens prennent des branches de palmier pour l’accueillir en disant Hosanna. Divers commentaires ont été faits pour expliquer que cette cérémonie, si ressemblante à celle des Hoshaanot de Souccot (un festival d'automne), ait lieu aux alentours de la Pâque (un festival de printemps). Dès le XIXe siècle, quelques biblistes critiques ont soutenu qu'il s'agit d'une erreur, et que les faits se sont passés à Souccot, mais on considérait comme plus probable à l'époque que la cérémonie décrite ait été en usage auprès des Juifs lors de toute cérémonie joyeuse, et que le terme de Hoshana avait perdu son sens originel bien avant les événements décrits dans les Évangiles. https://fr.wikipedia.org/wiki/Hosanna#cite_ref-2 |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Mar 23 Mar 2021, 16:32 | |
| Sur les sujets religieux Wikipédia (francophone) n'en finit pas de me surprendre (quelquefois en bien, p. ex. sur Dumuzi que j'évoquais dans mon post précédent, mais pas ici)... Le (faux) sens de "bienvenue" est précisément celui qu'impliquent les évangiles, en "traduisant" en grec eulogèmenos ho erkhomenos, "béni celui qui vient", qui correspondrait à l'hébreu baroukh ha-bâ (c'est encore comme ça qu'on dit "bienvenue" en hébreu moderne; aucun rapport donc avec hosanna). Bien entendu, "celui qui vient" est aussi un titre eschatologique ("messianique" entre autres, puisque c'est aussi Elie qui "vient"; intégré à l'interprétation du nom divin selon Exode 3 dans l'Apocalypse, celui qui est, qui était et qui vient; cf. p. ex. ici 1-14.12.2020). Le mélange des éléments de la Pâque (printemps) et de Soukkoth (fête des Huttes ou des Cabanes, ou encore des Récoltes, en automne) dans les récits de la Passion est bien connu, mais cela ne rend pas les traits mineurs (ceux de l'automne) plus "authentiques", au sens d'"historiques", pour autant. |
| | | le chapelier toqué
Nombre de messages : 2607 Age : 77 Date d'inscription : 31/08/2010
| Sujet: Re: Semaine sainte Mer 24 Mar 2021, 21:35 | |
| Petite blague que vous connaissez peut-être.
De quoi est mort Jésus ? Réponse : de tuberculose.
La foule criait : "Au sana (sanatorium). |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Jeu 25 Mar 2021, 11:15 | |
| Eh oui, le temps des "petites blagues" qui ont émaillé notre jeunesse, tous milieux confondus (religieuses ou antireligieuses, mais aussi celles qu'on qualifierait aujourd'hui de stéréotypes racistes, sexistes, homophobes et autres), semble bien révolu, on n'y a pas beaucoup perdu ni gagné non plus, et selon la logique de toute "révolution" il reviendra sans doute...
Dans mes souvenirs celle-ci est associée à Jésus pilote de course, qui entre en Triumph à Jérusalem (dans le genre automobile d'après-guerre il y avait aussi la "fuite dans les Jeeps"). |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Semaine sainte Jeu 25 Mar 2021, 11:31 | |
| Oser la Résurrection, par le théologien protestant Élian Cuvillier
Mais revenons à la Résurrection. La proclamation « Christ est ressuscité » ne se présente pas comme la solution à cet échec mais au contraire comme sa validation en même temps que son interprétation créatrice. Proclamer la résurrection du Christ, c’est en effet affirmer que l’échec de la Croix est porteur d’une puissance de vie inattendue en même temps qu’insoupçonnée. Ce n’est pas un messie glorieux qui est vainqueur du mal et de la mort mais un messie crucifié. C’est Jésus, « le crucifié » (Mc 16,7) qui est ressuscité, pas un « super héros » qui n’aurait connu qu’une apparente défaite. La résurrection du Christ est ainsi en discontinuité avec les attentes religieuses traditionnelles — celles de sauveurs tout-puissants — qui viennent se briser sur le bois de la Croix. De ces attentes religieuses, la résurrection du Christ propose une nouvelle interprétation, une nouvelle reconfiguration. L’apôtre Paul a tout particulièrement laissé travailler en lui la puissance créatrice de l’échec que constitua la crucifixion de Jésus (cf. 1 Co 1,18-25 ; cf. 1 Co 2,2. Paul utilise d’ailleurs un terme grec, dunamis pour parler de cette « puissance » qu’il faudrait peut-être traduire « dynamique ») ...
... Un autre élément que souligne la foi pascale, c’est que, en Christ, Dieu est solidaire de l’homme dans sa misère native. L’échec de la Croix relu à la lumière de la foi pascale selon laquelle Dieu a relevé un crucifié d’entre les morts fait naître une nouvelle manière de penser Dieu. À la Croix, Dieu se révèle, non sous la marque de la force mais sous le masque de la faiblesse et de la mort. C’est pourquoi l’échec de la Croix peut-être compris à la fois comme une déconstruction des images classiques de Dieu et une ouverture décisive dans l’impasse et la fermeture de l’existence humaine. La proclamation pascale rend compte d’une rupture et d’une refondation de l’histoire personnelle des croyants qui a prétention à l’universalité. Les disciples deviennent les témoins d’une vérité universelle parce que singulière : ce qui fut décisif pour eux peut l’être pour chaque être humain. https://www.reforme.net/paques/2020/04/12/oser-la-resurrection-par-le-theologien-protestant-elian-cuvillier/
La célébration ou la commémoration de la résurrection de Jésus me semble aussi importante que celle de sa mort. |
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