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| Le résurrection : où, quand, comment ? | |
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Auteur | Message |
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Narkissos
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Dim 21 Avr 2024, 10:55 | |
| Pour répondre à ta question, c'est le verbe allassô, dérivé d' allos, "autre" (qui peut marquer une différence moindre que heteros quand on veut les distinguer, p. ex. "autre du même genre" vs. "autre d'un autre genre"; mais le plus souvent ils sont interchangeables), soit: "rendre ou devenir autre" (comme ändern > ander en allemand). C'est le terme le plus simple et le plus vague possible, encore plus que "changer" en français qui implique au moins étymologiquement l'idée d'échange ou de substitution de ceci contre cela; ce n'est pas "trans-former" ni "trans-figurer" qui traduisent plus exactement les dérivés de morphè ( metamorphoô -> métamorphose) ou de skhèma ( meta-skhematizô, etc., cf. schème ou schéma), "forme" ou "figure", dont nous avons beaucoup parlé ailleurs -- bien que tous ces termes fonctionnent souvent, en grec comme en français, comme des (quasi-)synonymes. Nous avons déjà apprécié G. Antier, dans la suite du regretté J.D. Causse... En 2004, si je ne m'abuse, il n'avait que 24 ans et son usage des références et des catégories psychanalytiques (Lacan), philosophiques (Badiou) ou littéraires (Bobin) était encore un peu raide, voire mécanique, pour ne pas dire scolaire... mais c'était enthousiaste et prometteur. Du point de vue exégétique, le rapport de 1 Corinthiens 15 aux textes précédents de l'"épître" ne me semble pas si simple: certes, l'ensemble paraît décousu parce qu'il change sans cesse de "sujet" ( topic, thème), ce qui s'explique habituellement par le fait que l'"auteur" répondrait, tantôt à une lettre de (certains de) ses destinataires (cf. 7,1), tantôt à des rapports de tiers (inclus ou non dans les destinataires, 1,11 etc.). Mais les différences formelles, thématiques et conceptuelles du chapitre 15, à commencer par la "confession de foi" traditionnelle (reçue et transmise, à comparer avec la révélation directe et personnelle que "Paul" revendique ailleurs, en Galates 1 p. ex.) et la liste des "apparitions" qui semble avoir subi de nombreux ajouts, distinguent le chapitre de tout ce qui le précède (en le rapprochant au contraire, p. ex., de 1 Thessaloniciens 4). Si "Jésus-Christ crucifié" était le thème original des chapitres 1 et 2, au chapitre 15 on a un "Christ mort pour nos péchés selon les Ecritures" (lesquelles ?), selon une formule ostensiblement traditionnelle, ce qui n'est pas tout à fait la même chose... Le concept de "résurrection" n'a jamais été évoqué auparavant sous cette forme (le substantif anastasis, distinct du verbe egeirô, "éveiller" ou "réveiller", à la rigueur "relever", reste rarissime dans le "corpus paulinien", Romains 1,4; 6,5; Philippiens 3,10; 2 Timothée 2,18 ), et celui de "corps" ( sôma) est employé de façon quasiment opposée au chapitre 12 (Christ = un seul corps et un seul esprit, communautaire, vs. des corps "spirituels" ou "pneumatiques", multiples et "individuels"). Sur le fond -- cela concerne toute l'"école (protestante) de Montpellier", comme l'appelait Cuvillier, depuis Ansaldi -- autant une lecture psychanalytique de l'eschatologie peut être pertinente, autant la réduction de l'eschatologie et de la théologie en général à une psychologie, surtout prescriptive (ce que le "sujet" doit faire pour être un "bon sujet", en somme), me paraît problématique. Par coïncidence, je suis en train de relire un recueil de courts textes de Deleuze ( Pourparlers) qui me rappelle sa verve anti-lacanienne (moins contre le maître que contre ses disciples, qui étaient nombreux à l'époque).
Dernière édition par Narkissos le Dim 21 Avr 2024, 11:36, édité 1 fois |
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Dim 21 Avr 2024, 11:32 | |
| Le corps humain à la lumière du corps du Christ ressuscité chez Thomas d’Aquin Étienne Vetö
I. La vérité du corps humain
1) La chair ressuscitée comme accomplissement de l’hylémorphisme
Thomas conceptualise le donné révélé en le resituant dans le cadre aristotélicien : la chair ressuscité perfectionne et accomplit le rapport de forme à matière qui est celui de l’âme et du corps. En effet, dans la vie présente, quoique informé par l’âme, proportionné à elle, nécessaire, le corps n’en est pas moins, comme plus généralement la matière, ce qui résiste, limite et fait obstacle à l’opération de l’âme. En revanche, chez le Christ ressuscité et chez tous ceux qui sont conformés à lui par la résurrection, l’information se fait sans obstacle. La forme domine entièrement sa matière, l’esprit se soumet entièrement le corps : « C’est la condition du corps glorieux [du Christ] d’être ‘spirituel (spirituale)’, c’est-à-dire soumis à l’esprit. » . « Corps spirituel », au sens large de l’expression, signifie corps traversé de part en part par l’esprit, entièrement pénétré de l’âme . Cela se produit avant tout grâce à l’union de l’âme à Dieu dans la vie bienheureuse. De fait, alors qu’elle n’était tout simplement pas à même d’exercer son rôle à la perfection dans sa vie terrestre, elle reçoit de la visio une puissance nouvelle qui lui permet cette domination totale sur sa matière : « Puisque l’âme se trouvera au sommet de la noblesse et de la puissance – étant donnée qu’elle sera unie au premier principe des choses –, elle conférera au corps qui lui sera divinement uni [ses qualités nouvelles], l’ayant totalement en son pouvoir (totaliter ipsum sub se continendo). »
Une autre manière pour Thomas de développer ce point est de souligner que le composé humain, habituellement tiraillé, voire divisé en lui-même, a enfin atteint l’unité plénière. En effet, c’est la forme qui est la « cause unifiante (uniens) » de sa matière . Ainsi, plus la forme peut exercer sa fonction, plus la réalité dont elle est la forme est une et unie en elle-même : « Plus la forme l’emporte sur la matière, plus le composé qui en est formé avec la matière est un. » . Or l’âme unie à Dieu dans la vision de gloire s’en trouve elle-même parfaitement unie en elle-même, ses facultés sont orientées et ordonnées par l’union intime à Dieu, source de toute unité et fin de toutes ses opérations, et elle peut unifier à son tour sa matière. Le corps ressuscité est le corps d’une personne en pleine unité avec elle-même.
Le destin du corps, sa vérité profonde, révélés par la résurrection du Christ, est d’être amené à l’accomplissement de son information par l’âme et de son union à elle, selon le schéma hylémorphique. Or le corps ne peut pas ne pas en être profondément transformé. Déliée de toute entrave, l’opération de l’âme peut rejaillir sans obstacle sur le corps et à travers lui. C’est le cas chez le Christ : « L’âme fit rejaillir aussitôt sa gloire sur le corps qu’elle avait repris à la résurrection ; et c’est ainsi que ce corps est devenu glorieux » . C’est donc aussi ce qui adviendra pour l’homme, et Thomas de citer Augustin : « [Dieu] a doté l’âme d’une nature si puissante, pour que sa béatitude […] rejaillisse aussi sur la nature inférieure, qui est le corps ». C’est pourquoi le corps sera transformé, transfiguré, dans sa manière d’être et dans ses opérations : « [Le corps] sera en effet totalement soumis à l’âme, non seulement pour ce qui concerne l’être, mais aussi pour ce qui concerne les actions et les passions, les mouvements et les qualités corporelles ».
2) Les « dots » : perfection d’être, de vie et d’agir
Les nouvelles modalités d’être du corps dans la vie de gloire sont le plus souvent déterminées par Thomas par ce qu’il nomme les « dots » . Il s’agit de qualités qui vont pour ainsi dire « découler de l’âme sur le corps » , et dont la liste habituelle comprend quatre termes : la subtilité, l’incorruptibilité ou l’impassibilité, l’agilité et la clarté. Quoique Thomas les reçoive de la lecture des Écritures, il les analyse chaque fois selon la même logique, comme le fruit de la parfaite domination d’une âme en union plénière avec le corps.
La dot de la subtilitas concerne la substance même du corps, dont les propriétés de la matière sont transformées, « spiritualisées », par la complète pénétration de l’âme. Nous avons vu que la notion de « spiritualité » peut parfois désigner la condition générale du corps glorieux, mais en un sens restreint elle vise plus précisément la dot de la subtilité – c’est le cas, par exemple, de la lecture thomasienne du verset : « Semé corps animal, il ressuscitera corps spirituel » (1 Co 15, 44a). Thomas ne donne aucun exemple de cette dot, mais l’enjeu est clair : par la qualité de son union avec l’âme, le corps ressuscité reçoit le type de corporéité et de matière le « plus noble » et le « plus parfait » possible.
La parfaite unité du corps et de l’âme implique que le corps glorieux n’est pas seulement parfait quant à sa substance, mais aussi quant à sa possession de la vie : « Semé dans la corruption, il ressuscitera dans l’incorruptibilité » (1 Co 15, 42b). L’union de l’âme et du corps est si forte que le corps en devient incorruptible. En effet, l’âme est tellement maîtresse du corps dans son actuation de l’être et de la vie que rien ne peut plus les séparer : « L’âme dominera tellement [le corps] dans la mesure où elle lui donnera la vie, et rien ne pourra empêcher cette communication de vie. » . De même, le corps ressuscité est impassible, en deux sens : il ne peut subir aucune souffrance , et il ne peut pâtir d’aucune difformité ou défaut. Logiquement, puisque rien ne peut plus porter atteinte à la parfaite information du corps, rien ne peut y produire quelque chose de contraire à ce que lui communique sa forme.
Une troisième dot est ce que les médiévaux nomment l’« agilité », c’est-à-dire la capacité qu’a le corps ressuscité de se déplacer presque instantanément d’un point à un autre. C’est une des explications possibles des apparitions et disparitions du Christ au milieu de ses disciples. Il ne s’agit pas, dans l’esprit de Thomas, d’une transformation des ressuscités en des super-héros avant la lettre, ni d’une téléportation digne d’un personnage de science-fiction. Il faut plutôt comprendre qu’il n’y a plus de distance entre ce que l’âme peut désirer, vouloir ou rêver, et ce qu’elle réalise effectivement en son corps : celui-ci réussit enfin à se conformer sans résistances aux opérations de celle-là . Si le corps terrestre est « faible, lent et ne se meut pas facilement sous l’impulsion de l’âme » , Thomas affirme avec Paul que, « semé dans la faiblesse, il ressuscitera dans la puissance » (1 Co 15, 43b).
Notons que ces dots sont préfigurées par les qualités du corps dans la vie présente. Par exemple, l’impassibilité et l’agilité ne sont finalement qu’une forme accomplie de la force et la vigueur conférées par l’âme dès ici-bas :
[L’âme] conserve [le corps] de la corruption, aussi voyons-nous les hommes qui sont d’une nature vigoureuse souffrir moins de la chaleur et du froid. Quand donc l’âme sera très parfaite, elle conservera le corps tout à fait impassible. […] Elle lui donne le mouvement, et avec d’autant plus d’aisance que la puissance de l’âme aura été plus forte sur le corps. Et c’est pourquoi, quand l’âme sera au terme de sa perfection, elle donnera au corps l’agilité.
Quoique le destin du corps humain dépasse de loin ce que pouvait concevoir Aristote, il s’agit là pour Thomas d’une confirmation de sa lecture hylémorphique de la chair ressuscitée. La vérité du corps humain est l’union parfaite à l’âme au point d’être matière spiritualisée, sans que rien ne puisse porter atteinte à leur communion ni son information par l’âme, et la capacité à se mouvoir en parfaite synergie avec celle-ci.
https://www.cairn.info/revue-des-sciences-philosophiques-et-theologiques-2016-1-page-97.htm |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Dim 21 Avr 2024, 12:22 | |
| La scolastique du XIIIe siècle, toute requinquée par la redécouverte d'Aristote avant la peste noire, ne manquait pas d'imagination...
Il faut peut-être expliciter, à défaut de dissiper, une confusion à peu près inévitable pour le lecteur moderne: dans un "hylémorphisme" (de hulè = "matière", au sens premier "bois" du point de vue du sculpteur, du charpentier, de l'ébéniste, et morphè = "forme"), qu'il soit aristotélicien ou scolastique et notamment thomiste, la "forme" in-forme la "matière" dans un sens à peu près opposé à notre idée de "forme" opposée au "fond", à l'essence ou à la substance, comme le moule sur la pâte. Pour nous la forme c'est l'extérieur, la surface, l'apparence qui peut changer (trans-formation, trans-figuration) sans que l'intérieur, le fond, l'essence, la substance ou le sujet (subjectum) change (soit ce qu'un aristotélicien appellerait plutôt "accident", sumbèbèkon); dans un hylémorphisme c'est au contraire l'intérieur, l'esprit, l'âme, la puissance (dunamis) et/ou l'"énergie-acte" (energeia / actus) qui in-forme une "matière" en elle-même informe.
Par ailleurs, la tradition catholique et orthodoxe s'est décisivement écartée de la terminologie paulinienne (notamment celle de 1 Corinthiens 15) en confondant le "corps" (sôma, corpus) avec la "chair" (sarx, caro), dans la "résurrection de la chair", alors que "Paul" excluait au contraire la "chair" et le "sang" du "royaume de Dieu" (v. 50). On peut toujours arguer que "la chair et le sang" ce n'est pas la "chair" toute seule (j'ai entendu des "évangéliques" expliquer sans rire que le corps de Jésus au ciel avait de la "chair" mais pas de "sang"), il devient singulièrement compliqué de concilier le dogme et le Nouveau Testament, sans parler de penser effectivement quelque chose sous les mots qu'on récite.
En repensant à Deleuze (cf. mon post précédent), je me dis que malgré son athéisme il aurait dû être ravi par toutes ces spéculations scolastiques (il s'est d'ailleurs beaucoup intéressé à Duns Scot en début de carrière): devenir autre, divin, spirituel, stellaire, un et/ou plusieurs, n'importe quoi d'autre que ce qu'on est au sens statique de l'essence et de l'identité, sans cesser d'être ce qu'on devient, résurrection, transfiguration, transformation, au même titre que la réincarnation hindoue ou bouddhiste si celle-ci n'était pas perçue comme un mal, cela résonne remarquablement avec tous les "devenirs" schizoïdes de Deleuze, jusqu'au "corps sans organe" d'Artaud -- à condition de ne pas disqualifier de telles idées en les qualifiant d'"imaginaires" ou de "fantasmatiques", mais rien n'oblige à entendre de tels adjectifs dans un sens péjoratif. |
| | | free
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Lun 22 Avr 2024, 00:15 | |
| 42Ainsi en est-il de la résurrection des morts. Semé périssable, on se réveille impérissable. 43Semé dans le déshonneur, on se réveille dans la gloire. Semé dans la faiblesse, on se réveille dans la puissance. 44Semé corps naturel, on se réveille corps spirituel. S'il y a un corps naturel, il y a aussi un corps spirituel.45C'est pourquoi il est écrit : Le premier homme, Adam, devint un être vivant, naturel. Le dernier Adam, lui, est devenu un esprit qui fait vivre. 46Ce n'est pas le spirituel qui est premier, c'est le naturel ; le spirituel vient ensuite. 47 Le premier homme, tiré de la terre, est fait de poussière. Le deuxième homme vient du ciel48Tel est celui qui est fait de poussière, tels sont aussi ceux qui sont faits de poussière ; et tel est le céleste, tels sont aussi les célestes. 49Et de même que nous avons porté l'image de celui qui est fait de poussière, nous porterons aussi l'image du céleste. (1 Co 15,42-49).
Le v 44 : "Le premier homme, Adam, devint un être vivant, naturel. Le dernier Adam, lui, est devenu un esprit qui fait vivre". Le dernier Adam "devient" un "esprit", ce qui peut laisser penser qu'initialement, il n'était pas un "esprit", et que c'est peut-être le "premier Adam" qui s'est transformé en "esprit" : "46Ce n'est pas le spirituel qui est premier, c'est le naturel ; le spirituel vient ensuite", mais la suite infirme cette compréhension, puisque le texte indique : "47 e premier homme, tiré de la terre, est fait de poussière. Le deuxième homme vient du ciel". Le texte me semble paradoxal ... Il me semble que nous en avions déjà discuté mais je ne retrouve pas le fils et j'ai oublié l'explication qui avait été donné.
Le texte établit que le premier Adam, par son caractère psychique, est vivant : c’est une « âme » qui vit ; le second Adam, par son caractère spirituel, donne la vie: c’est un souffle qui fait vivre. Le corps animé se transforme : du réceptacle passif de la vie terrestre (comme Adam en Genèse), il devient l’agent de la vie divine, céleste, sans commune mesure avec la vie terrestre, parce que rempli de souffle (La mise en discours de l’humain chez saint Paul et ses interprétations anthropologiques en christianisme Relecture de 1Co 6,12-20 ; 1Co 2,10–3,4 et 1Co 15,35-53). |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Lun 22 Avr 2024, 01:42 | |
| Il me semble que tu cites en partie ceci (que nous avons peut-être déjà vu ailleurs).
Le (verbe) "devenir" (gi[g]nomai) vient directement de la version grecque de Genèse 2,7, kai egeneto ho anthrôpos eis psukhèn zôsan, "et l'homme devint une âme vivante". Ce qui est plus difficile à percevoir et à traduire en français, c'est le rapport entre l"âme" (psukhè, psyché) et le "naturel" qui traduit psukhikos: on pourrait se contenter de transcrire "psychique", ou calquer "animal" d'après le latin (psukhè = anima), mais cela prêterait à confusion par rapport à l'usage ordinaire de ces termes en français (il ne s'agit ni de "psychologie" ni de "zoologie", bien que tous ces termes dérivent aussi du grec). On dit "naturel", faute de mieux, mais cela n'a aucun rapport avec la "nature" qui traduit habituellement phusis, d'où "physique"... Quoi qu'il en soit il y a bien une continuité de l'"homme" ('adam-anthrôpos) entre le "premier" et le "second" ou "dernier": il ne s'agit pas de la comparaison de deux personnages indépendants, mais des potentialités de la même "figure" qui s'actualisent successivement, d'abord comme psychique-animal-naturel-terrestre, ensuite comme pneumatique-spirituel-céleste. |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Lun 22 Avr 2024, 08:00 | |
| Le « corps » (σῶμα) entre « chair » (σάρξ) et « esprit » (πνεῦμα) Lecture de quelques textes de l’apôtre Paul (2 Co 12,1-10; 1 Co 6,12-20; 1 Co 15,35-50; Ga 5,13-25; Rm 8,1-17)
14Cette fois, Paul a affaire avec une frange de Corinthiens qui mettent en doute la conviction la plus centrale du christianisme naissant : la foi en la Résurrection des morts. Paul répond ici à une objection, supposée ou réelle, exprimée sous la forme de deux questions contiguës au v. 35 : « Mais, dira-t-on, comment les morts ressuscitent-ils ? Avec quel corps reviennent-ils ? » Après avoir, au début du chapitre 15, posé le principe de la résurrection des morts, il lui faut en effet aborder les modalités pratiques. Paul établit tout d’abord une comparaison entre la résurrection des morts (v. 42a) et ce qui était évident pour l’homme de l’Antiquité : le processus de la germination (v. 36-38), la différence entre la chair des hommes, des bêtes, des oiseaux et des poissons (v. 39) et entre l’éclat des corps terrestres et celui des corps célestes (v. 40-41). Sous la forme de quatre antithèses de même construction (v. 42b.43a.43b.44a), il en déduit l’idée d’un passage discontinu entre le « corps animal » et le « corps spirituel », à savoir entre le corps terrestre et le corps résurrectionnel. Paul passe alors du domaine de l’observation empirique au texte biblique (v. 44b-49). Il construit au v. 45 une nouvelle antithèse entre Adam et Christ en ajoutant dans sa citation de Gn 2,7 les mots « premier » et « Adam » ; il calque ensuite l’affirmation du v. 45b sur la phrase ainsi obtenue. Un contraste est ainsi posé entre l’« être animal doué de vie » et l’« être spirituel donnant la vie ». La raison précise qui a poussé l’apôtre à insister au v. 46 sur l’antériorité de « l’être animal » par rapport à « l’être spirituel » est discutée ; en tout cas, le v. 47 reprend la distinction posée au v. 45 en insistant sur l’origine différente d’Adam et du Ressuscité, terrestre pour le premier, céleste pour le second. C’est par un simple « de même » qu’est introduite au v. 49 l’application de l’antithèse : ceux qui ont reçu l’Évangile et qui y restent attachés vivent dans un entre-deux ; après avoir porté l’image de l’homme terrestre – emploi du passé –, ils porteront l’image de l’homme céleste – emploi du futur19.
Pour Paul, il n’y a donc pas de résurrection sans mort, donc pas l’idée d’une immortalité du corps et encore moins d’une âme séparée du corps. En même temps, ce que le croyant est maintenant n’est pas ce qu’il sera plus tard. La résurrection verra donc le corps du croyant semé corruptible renaître incorruptible ; corps animal devenir corps spirituel ; animal (âme) doué de vie vs esprit qui fait vivre. Le premier c’est l’animal (ce que nous sommes) le second c’est le spirituel (ce que nous sommes en devenir). La chair et le sang ne pouvant hériter le Royaume de Dieu, l’idée est celle d’une rupture entre le monde et le royaume et une transformation qui permet de passer de l’un à l’autre. Mais sans doute, le lieu de basculement n’est-il pas seulement eschatologique. Il est anticipé dans l’affirmation du v. 45 : c’est la résurrection du Christ (le dernier Adam) qui fait vivre. Ainsi dans l’expérience christique, le croyant passe d’animal vivant à sujet vivant. La résurrection du Christ apparaît alors comme expérience de la naissance d’un sujet vivant au cœur d’un monde et dans un corps marqués par la mort. C’est le Christ qui est la figure en arrière-plan du passage. Le propos de Paul n’est pas lié à une spéculation métaphysique mais naît de l’expérience pascale singulière (et communautaire : cf. 1 Co 15, 1ss) qui opère une relecture de la réalité et des discours (religieux et philosophiques) sur la réalité.
https://journals.openedition.org/cerri/1255#tocto3n1 |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Lun 22 Avr 2024, 10:54 | |
| Sur cet article, voir aussi (entre autres ?) ici 27.5.2021 (Cuvillier appartient également à "l'école de Montpellier", très influencée par Lacan -- si je me souviens bien, c'est même chez lui que j 'ai lu la formule -- mais il est plus exégète qu'Antier). Tout dépend ce qu'on entend par "origine": le premier est certes "de la terre" ( ex gès) au sens de l'origine "matérielle", argileuse ou poussiéreuse ( khoikos), mais dans la Genèse ça ne suffit pas à faire de lui une "âme vivante" ( nephesh hayya / psukhèn zôsan), il y faut justement le souffle divin, quoique le grec comme l'hébreu distinguent le vocabulaire ( neshama et non rouah / pnoè et non pneuma); de même le second-dernier "du ciel" ( ex ouranou). Même si 1 Corinthiens 15 évite cette partie du verset dans la citation, pour laisser tout "l'esprit" au second-dernier, il n'ignore évidemment pas que le "premier" vient aussi de "Dieu", qu'il est déjà "spirituel" à sa manière, et que selon le premier récit il est son image, toutes choses qui vont s'accomplir dans le "second-dernier". L'"origine" est donc tout aussi divine pour l'un que pour l'autre, à vrai dire c'est le même qui se "réalise" successivement dans des sens ou des directions opposés, ou du moins différenciés. Cf. par exemple v. 20, c'est du même "homme" ( di'anthrôpou -- il n'est pas dit d'un autre homme !) que viennent la mort et la résurrection des morts... Dans mon post précédent j'ai oublié de préciser -- c'était tard, ou tôt -- qu'au v. 45 le verbe "devenir" n'est pas répété, seule la préposition ( eis) l'est: il est en quelque sorte "facteur commun" des deux propositions, c'est encore plus clair en grec où le verbe précède les sujets -- devint le premier homme Adam une âme vivante, le second Adam un esprit vivifiant. C'est encore une façon d'insister sur la continuité de l'un à l'autre, ou d'un aspect à l'autre du même... |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Lun 22 Avr 2024, 12:58 | |
| "Aussi nous soupirons dans cette condition ; nous souhaitons vivement revêtir notre domicile céleste par-dessus l'autre, s'il est vrai qu'une fois vêtus nous ne serons pas trouvés nus. Car, tandis que nous sommes dans cette tente, nous soupirons, accablés, parce que nous voulons, non pas nous dévêtir, mais nous revêtir, pour que le mortel soit englouti par la vie" (2 Co 5,2-4 - NBS).
"Dans cette maison* terrestre, nous gémissons et nous désirons vivement revêtir celle qui est pour nous et qui vient du ciel, afin que, lorsque nous l’aurons revêtue, nous ne soyons plus nus. Oui, nous qui sommes dans cette tente, nous gémissons, accablés, parce que nous ne voulons pas nous dévêtir de celle-ci, mais que nous voulons aussi revêtir l’autre+, pour que ce qui est mortel soit englouti par la vie" (2 Co 5,2-4 - TMN).
La NBS, la TOB et la BdJ emploient l’expression « par-dessus l'autre » mais de nombreuses traductions ne le font pas, cette formule apparait-elle dans les manuscrits ou est-elle le résultat d’une lecture qui lit le verset 2 à la lumière du verset 4 (« non pas nous dévêtir, mais nous revêtir ») ? |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Lun 22 Avr 2024, 13:39 | |
| C'est peut-être une légère surtraduction, mais à mon sens une traduction plausible, du (premier) préfixe du verbe (sur-)composé ep-en-duomai (v. 2 et 4), d'après la préposition epi prise au sens propre et local (quoique métaphorique) de "sur", comme dans notre "sur-vêtement"... Il est vrai que le contexte conforte cette interprétation (double métaphore: de la nudité et du vêtement, de la tente provisoire et de la demeure permanente, comme dans l'histoire "biblique" ou "sainte" de la tente-tabernacle qui précède le temple de Salomon qu'elle préfigure avant de s'y intégrer), mais elle se justifie également au plan lexical.
Il y a surtout un problème textuel au v. 3, puisque certains manuscrits lisent en-duomai (vêtir, revêtir, sans "sur-") et d'autres ek-duomai (dé-vêtir), le même qui est opposé à ep-en-duomai au v. 4: nous ne voulons pas être dévêtus mais survêtus... Au v. 3 donc, on pourrait aussi bien lire: si tant est que, dévêtus, nous ne ser(i)ons pas trouvés nus (ce qui reste ambigu, mais autrement). C'est d'ailleurs la leçon que retient Nestle-Aland 27, je ne me souviens plus si la NBS a eu une raison exceptionnelle de ne pas la suivre ou si je l'ai tout simplement ratée à la révision et à l'annotation... |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Mer 24 Avr 2024, 10:19 | |
| - Citation :
- Dans Romains, le thème de la résurrection est largement actualisé. Le chrétien, baptisé dans la mort du Christ, vit d'ores et déjà de la "vie nouvelle" de sa résurrection. L'horizon eschatologique ne disparaît pas mais il passe à l'arrière-plan. Ce qui passe sur le devant de la scène, c'est une problématique "existentielle" avant la lettre, quoique de forme juridique: sur quel terrain, dans quel domaine, sous quelle juridiction, sous quel règne, sous quel régime, sous quel maître se place-t-on? Celui de la chair, de la loi, des oeuvres, du péché et de la mort, ou bien celui de l'Esprit, de la grâce, de la foi, de la justice et de la vie? C'est dans cette perspective qu'il faut situer les arguments évoquant la mort comme "salaire (par opposition au don gratuit) du péché", ou aussi la célèbre formule (détournée par la Watchtower) du chapitre 6, comme quoi "celui qui est mort est quitte (litt. "justifié") du péché": la pointe de l'argument, comme le contexte le montre bien, c'est que celui qui a anticipé sa propre mort dans l'union à la mort du Christ se trouve ainsi juridiquement dégagé du règne du péché et qu'il relève désormais d'un autre règne (comparer 7,1-4 qui développent cette idée de la mort libératrice à partir d'une autre illustration juridique, celle de la femme dégagée de la loi de son mari par la mort de celui-ci).
Isaac et la foi en la résurrection des mortsMichel Remaud2 – L’Épitre aux RomainsLe second passage sur lequel il nous faut nous arrêter se trouve dans l’Épître aux Romains :Il est notre père devant Celui en qui il a cru, le Dieu qui fait vivre les morts et appelle à l’existence ce qui n’existe pas. Espérant contre toute espérance, il crut et devint ainsi le père d’un grand nombre de peuples (Gn 17,5) selon la parole : Telle sera ta descendance (Gn 15,5). Il ne faiblit pas dans la foi en considérant son corps — il était presque centenaire — et le sein maternel de Sara, l’un et l’autre atteints par la mort. Devant la promesse divine, il ne succomba pas au doute, mais il fut fortifié par la foi et rendit gloire à Dieu, pleinement convaincu que, ce qu’il a promis, Dieu a aussi la puissance de l’accomplir. Voilà pourquoi cela lui fut compté comme justice (Gn 15,6) - Rm 4,17-22, traduction de la T.O.B.Ici, la foi d’Abraham porte sur la possibilité d’avoir une descendance, compte tenu de son âge et de celui de Sara, mais la référence à la résurrection est triplement présente. D’abord par la formule « le Dieu qui fait vivre les morts » qui, remarquons-le, correspond littéralement à celle qui est employée dans la deuxième des Dix-huit bénédictions. Ensuite, par la mise sur le même plan de la résurrection et de la naissance : « le Dieu qui fait vivre les morts et appelle à l’existence ce qui n’existe pas » — formule sur laquelle nous allons revenir. Enfin, par le commentaire sur le corps d’Abraham et le sein de Sara, « l’un et l’autre atteints par la mort ». Par cette formule quelque peu dramatique, Paul souligne qu’en venant au monde, Isaac est déjà arraché à une situation de mort, comme il le sera une seconde fois sur le Moria.Dans ce contexte, l’allusion à Dieu « qui fait vivre les morts » n’était pas indispensable à l’argumentation : puisqu’il s’agissait seulement de la naissance d’Isaac, il aurait suffit de dire que Dieu peut appeler à l’existence ce qui n’existe pas. La conjonction dans une même phrase de ces deux manifestations de la puissance divine qui fait vivre les morts et appelle à l’existence ce qui n’existe pas peut être mise en parallèle avec un passage du Talmud qui rapporte un débat entre un pharisien et un sadducéen sur la question de la résurrection des morts. « L’hérétique dit à Guebiha ben Pessissa : “Malheur à vous, pécheurs, qui dites que les morts [re] vivent ! Les vivants meurent, les morts [re]vivent-ils ?” Il lui répliqua : “Malheur à vous, pécheurs, qui dites que les morts ne [re] vivent pas ! Ceux qui n’existaient pas viennent à la vie, et ceux qui ont déjà existé ne [re]vivraient pas !” ».Au sadducéen qui objecte qu’on ne voit jamais revivre des morts alors qu’on voit mourir les vivants, le pharisien répond qu’il n’est pas plus difficile, pour le Créateur, de rendre la vie à ceux qui l’ont déjà eue que de la donner à ceux qui n’ont jamais existé. Quelle que soit la valeur de l’argument, on ne peut que remarquer la similitude entre ce passage et celui où Paul établit une symétrie entre naissance et résurrection, l’une et l’autre objet de la puissance de Dieu. Ce rapprochement entre naissance et résurrection était déjà présent implicitement dans la deuxième des ẖarizot citées ci-dessus où il est dit qu’« Anne n’a été visitée que grâce à la prosternation ». Une naissance miraculeuse est insérée ici dans une série de textes tendant à fonder sur l’Écriture la foi en la résurrection des morts. Or, un passage du Talmud affirme que « à Rosh-hashana furent visitées Sara, Rachel et Anne ». Ce texte témoigne ainsi d’une tradition mettant la naissance miraculeuse d’Isaac en parallèle avec celle de Samuel, présentée dans notre midrash comme l’œuvre de la « puissance de Dieu » qui ressuscite les morts.Replongés dans le contexte de la tradition juive ancienne, les deux passages des Épîtres aux Romains et aux Hébreux que nous avons examinés font apparaître Isaac, arraché deux fois à une situation de mort, dans sa naissance et sur le mont Moria, comme le bénéficiaire par excellence du don de la vie par la puissance de Dieu.https://www.cairn.info/revue-nouvelle-revue-theologique-2010-4-page-529.htm#re27no27 |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Mer 24 Avr 2024, 11:08 | |
| Pour le contexte de ta première "citation" (dont je ne me souvenais évidemment plus), voir supra 21.5.2010 -- à peu près contemporaine, donc, de l'article qui suit... Article très instructif sur la tradition rabbinique, c'est-à-dire post-pharisienne: l'opposition des sadducéens et des pharisiens sur la "résurrection" est bien connue, quoique de façon un peu caricaturale, par le NT (Synoptiques et Actes), mais elle ne se cantonnait pas à ces deux groupes: comme cela ressort l'ensemble de la littérature juive de la fin du Second Temple, en hébreu, en araméen ou en grec (Qoumrân, Hénoch, Testaments, Philon, etc.), il y en avait beaucoup d'autres à y croire et à ne pas y croire, ou à l'envisager autrement... C'était une notion ouverte, non seulement à l'adhésion ou au rejet, mais à l'interprétation tous azimuts. Au-delà de l'histoire d'Isaac sacrifié (et ressuscité) ou presque, que nous avons sûrement déjà évoquée au sujet de l'épître aux Hébreux ou de l'épître aux Romains (voir aussi ici et encore récemment là, 22.3.2024), on notera l'appendice sur la "rosée" qui complètera utilement des remarques récentes sur l'"aurore" des récits de la résurrection, ou de "Pâques" (Isaïe 26, mais aussi Psaume 110; cf. ici 31.3.2024). A ce propos, on peut rappeler également que beaucoup d'allusions à la "résurrection" dans le NT passent inaperçues dans les traductions françaises, du moins sans les notes, parce que les verbes correspondants ( egeirô, anistèmi, éveiller, réveiller, lever, relever) sont traduits, selon le contexte, par d'autres termes, comme "susciter" qui malgré la parenté et l'assonance ne fait pas forcément penser à "ressusciter": le rapport est pourtant explicite, par exemple dans les discours des Actes où "susciter" un roi ou une descendance (à David, Abraham, etc.; cf. egeirô13,22s.33.37) est directement connecté à la "résurrection" de Jésus -- outre les récits de miracles, même quand il ne s'agit pas de résurrections: malades, infirmes, grabataires invités à se (r)éveiller et/ou à se (re-)lever; la résonance, écho ou harmonique, de la "résurrection" fonctionne directement quoique subtilement en grec, mais en français elle ne peut passer que par l'artifice laborieux des notes de traduction... On peut enfin remarquer que l'argument synoptique présenté expressément "pour la résurrection" et "contre les sadducéens" passe bien, dans la Torah, par le dieu d'Abraham, le dieu d'Isaac et le dieu de Jacob, dieu de vivants et non de morts dans la parole à Moïse au buisson ardent (ce qui n'arrange pas beaucoup l'idée d'une résurrection future ou eschatologique, outre que la référence aux anges s'opposerait plutôt à l'idée de "résurrection corporelle"; autrement dit, l'argument fonctionnerait aussi bien, sinon mieux, dans un sens anti-pharisien), mais sans mentionner le sacrifice ou "ligature" d'Isaac. L'association de la "création" à la "résurrection" est un leitmotiv du Coran et de l'islam, comme des textes rabbiniques, mais comparativement elle est plutôt rare dans le NT... |
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Mer 24 Avr 2024, 13:00 | |
| LA RÉSURRECTION DES CROYANTS SELON L'ÉPÎTRE AUX COLOSSIENS
Andreas Dettwiler
Dans Colossiens, la résurrection des croyants est l'affirmation qui exprime le plus clairement la radicale nouveauté de 1 'existence croyante: les croyants, par l'acte de la foi, sont déjà ressuscités (Col2, 12; 3, 1)! Pour le lecteur attentif, cette expérience, ancrée dans l'acte du baptême, soulève pourtant la question suivante : quelle est la relation entre 1' eschatologie colossienne et l'eschatologie des écrits qui proviennent (incontestablement) de Paul? En effet, dans Rm 6, 3-11- texte auquel Col2, 12 fait implicitement référence, Paul est plus nuancé; il crée une sorte d'asymétrie entre le sort du Christ et celui des croyants: seul le Christ a déjà franchi définitivement le seuil de la mort; la prédication de la mort et de la résurrection du Christ n'implique précisément pas la résurrection des croyants. Si nous ne voulons pas-un peu hâtivement, pour des raisons d'harmonisation apologétique affaiblir la spécificité de l'affirmation de Col 2 et 3, la question suivante se pose: L' auteur de Colossiens, dans sa compréhension de l' existence croyante, a-t-il dépassé une limite théologique chère à la pensée de Paul ? Autrement dit: ce disciple inconnu, probablement responsable de la rédaction de Colossiens, est-il fidèle au message de Paul? Ou bien se pourrait-il que la question de la fidélité à la tradition (dans notre cas: la pensée paulinienne) doive être déplacée et posée à un autre niveau que celui de la reprise exacte de telle ou telle conception? En tous cas Colossiens, en particulier par sa conception eschatologique, constitue un exemple fort intéressant de réception de la théologie paulinienne, qui mérite d'être analysé de plus près.
3. La conception eschatologique de Colossiens
3.2. Colossiens 2, 12: la mort et la résurrection des croyants dans le baptême
L'affirmation de la résurrection des croyants déjà dans le temps présent fait partie du contexte argumentatif de Colossiens 2, 9-15, qui a pour but de rappeler à la communauté-destinataire le fondement de son identité chrétienne : elle a déjà accès à la plénitude du salut. Dans le cadre de cette explicitation à la fois christologique et sotériologique, l'auteur actualise le langage du baptême pour décrire la radicale nouveauté de l'identité chrétienne (v. 11-13) et parvient à l'affirmation suivante (v. 12): «[ ... ]ensevelis avec lui (le Christ) dans le baptême, en lui10 encore vous avez été ressuscités par la foi en la force de Dieu, qui l'a ressuscité des morts».
Dans le cadre de notre étude, nous nous limiterons à la discussion de trois aspects. Premièrement, les liens entre Col 2, 12 et Rm 6, 4ss sont particulièrement
étroits. Dans le Nouveau Testament, ces deux passages sont les seuls à interpréter le baptême comme un« être enseveli avec le Christ». En outre, les deux passages mettent en lumière la participation des croyants à l'événement de la résurrection du Christ. L'observation des liens intertextuels permet la mise en évidence d'une singularité. En Colossiens 2, un lien symétrique s' établit entre le destin du Christ et celui des croyants: la mort et la résurrection du Christ se reflètent dans le destin des croyants. L'accent en Colossiens 2, 12 porte sur l'affirmation de la résurrection: le verbe principal est« vous avez été ressuscités», sunegerthète, et non pas le participe« ensevelis», suntafentes ; le v. 13 soulignera cette accentuation. En Rm 6, 4ss, par contre, Paul crée une différenciation temporelle entre la résurrection du Christ et celle des croyants. Certes, chez Paul également, les croyants participent déjà à la force de résurrection du Christ. Néanmoins, Paul n'utilise jamais le langage de la résurrection pour désigner l'identité des croyants dans le présent (dans les écrits proto-pauliniens, 1 'affirmation qui s'en rapproche le plus est à mon avis Rm 6,13). Pour les croyants, la résurrection des morts reste un acte à venir.
Pour mieux comprendre le déplacement théologique qui se joue entre Rm 6 et Col2, deux remarques supplémentaires s'imposent. D'une part, Col 2 fait preuve d'un processus de spiritualisation: chez Paul, l'espérance en la résurrection des croyants à la fin des temps s'insère entièrement dans l'eschatologie apocalyptique de l'époque; en Colossiens, le topos traditionnel de la résurrection des morts est spiritualisé. Seule cette spiritualisation permet une application de ce topos à la vie des croyants dans le présent de la foi. D'autre part, on a parfois émis l'hypothèse selon laquelle Col 2, 12 reprendrait une tradition pré-paulinienne à l'arrière-plan de Rm 6, 4ss. Cette tradition pré-paulinienne aurait témoigné d'une compréhension enthousiaste du baptême, dans la mesure où elle aurait conclu du kérygme de la mort et de la résurrection du Christ que la résurrection des croyants avait déjà lieu dans le présent. Ainsi Paul aurait secondairement introduit la différenciation temporelle entre la résurrection du Christ et celle des croyants, afin d'accentuer la« réserve eschatologique » pour combattre une compréhension enthousiaste du baptême et de l'existence chrétienne. Bien qu'une telle hypothèse ne soit pas impossible, je la considère avec prudence. La reconstruction précise de la tradition pré-paulinienne reste hypothétique. De plus, en Rm 6, Paul ne traite pas prioritairement de l'enthousiasme chrétien. Il désire plutôt montrer à son interlocuteur judéo-chrétien (voir la question critique en Rm 6, 1) que sa compréhension de la justification par la foi ne mène pas à 1' anarchie éthique, mais constitue précisément le fondement d'un comportement éthique authentique (voir« le service de la justice »: Rm 6, 15ss). Col 2, 12 constitue donc très probablement un processus de réception basé directement sur le texte de Rm 6, et non pas l'actualisation d'une prétendue tradition pré-paulinienne.
Deuxièmement, si notre comparaison entre Rm 6 et Col 2 est correcte, Il s'ensuit qu'en Colossiens la« réserve eschatologique », constitutive pour la sotériologie paulinienne, est considérablement affaiblie. On pourrait contester cette conclusion en soulignant que Col 2, 12, à l'instar de Rm 6, 8, parle de la foi(« en lui encore, vous avez été ressuscités par la foi en la force de Dieu»). Certes, cette référence permet d'écarter une fausse compréhension du baptême dans le sens d'un sacramentalisme massif ; et Col 3, 5ss montrera que la nouvelle identité «résurrectionnelle » des croyants ne fait pas abstraction de la dimension éthique. Néanmoins, à mon avis, la référence à la foi en Col2, 12 n'a pas pour fonction de réintroduire la« réserve eschatologique» au sens des écrits proto-pauliniens (donc d'insister sur le« pas encore» de l'existence chrétienne); elle vise plutôt à souligner la certitude en la force salutaire de Dieu - ce Dieu qui, comme le dit Colossiens en accord avec le christianisme primitif, « a ressuscité Jésus d'entre les morts ».
Troisièmement, reste la question de savoir pourquoi l'auteur de Colossiens a entrepris une relecture sotériologique qui propose une résurrection spirituelle des croyants dans le présent de la foi. À cette interrogation, nous pouvons répondre de deux manières différentes: soit à un niveau proprement théologique, soit à un niveau communicationnel. Observons tout d'abord que la sotériologie de Colossiens, qui accentue l'expérience du salut dans le temps présent, émane de la conception christologique qui domine Colossiens et dont le texte de référence est l'hymne au Christ de 1, 15-20. Ce texte met en scène la seigneurie universelle de Christ qui, dans la perspective de la foi, constitue une réalité déjà entièrement présente (voir aussi Col2, 9-10, où le lien entre la christologie et la sotériologie colossiennes est particulièrement instructif). À un niveau plutôt communicationnel ou rhétorique, nous supposons que la conception de Colossiens, qui accentue l' expérience et la certitude du salut dans le temps présent, constitue un excellent moyen d'attaquer la« philosophie» de Colosses. Ce courant de pensée défend un concept sotériologique alternatif dont un des points principaux semble être la soumission à une pratique ascétique rigoureuse et conséquente. Dans ce contexte polémique, l'effort rhétorique principal de Colossiens consiste à démontrer qu'une telle pratique religieuse, caractérisée par une attitude du « pas encore », est non seulement erronée, mais aussi anachronique: par l'appartenance à la seigneurie du Christ dans le baptême, les croyants participent en effet déjà pleinement au salut. Le système de sécurité religieuse offert par la « philosophie » colossienne est ainsi dénoncé comme caduc et dépassé.
Lire aussi : 3.3. Colossiens 3, 1-4: l'orientation des croyants ressuscités vers ce qui est « en haut »
Lien de téléchargement.
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| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Mer 24 Avr 2024, 14:22 | |
| Les particularités des "deutéro-pauliniennes", Colossiens-Ephésiens, et des textes johanniques, en matière de "résurrection" et d'"eschatologie réalisée" ou "présente-éternelle" ont été évoquées dès le début de ce fil, p. ex. 28.10.2008 (ça ne nous rajeunit pas). Voir aussi ici (avec un autre article de Dettwiler, dont le lien ne fonctionne plus). Dans le même genre, on a vu que dans la perspective médio-platonicienne de l'épître aux Hébreux la notion même de résurrection devenait inutile. Dans les textes qui s'y réfèrent, elle prend de plus en plus valeur de métaphore ou de métonymie d'un "mystère" présent et éternel, mais dont il faut surtout rappeler, par rapport à nos habitudes de lecture "individualiste(s)", qu'il est aussi "cosmique" (c'est la totalité du monde, les cieux, la terre, les enfers, qui sont en jeu) et "communautaire" (le glissement du "cosmique" à l'"ecclésial" est particulièrement sensible de Colossiens à Ephésiens). En ce qui concerne la résurrection, le déplacement du futur eschatologique au passé du mythe christique et au présent du rite ecclésial suppose évidemment que la "mort" soit elle-même anticipée, jouée d'avance, et sur la croix et dans le "sacrement" (baptême, eucharistie). L'article de Dettwiler combine à mes yeux tous les défauts d'une analyse thématique et systématique, qui traite les textes d'après les catégories "régionales" d'une théologie dogmatique (ici "eschatologie", comme on l'a vu récemment de la "pneumatologie" ou de la "sotériologie", du "pré-" et du "post-pascal", sur Jean 13--16), et d'une analyse exégétique qui rapporte prioritairement les textes à un "auteur" et à une "intention". Ainsi on peut aplatir toutes les différences entre les textes pauliniens présumés "authentiques" (alors qu'entre 1 Corinthiens et Romains il y a déjà de nombreux déplacements, notamment d'une "résurrection" qui reste "eschatologique" en 1 Corinthiens 15 et qui est déjà intégrée dans le mythe-rite en Romains 6) pour les opposer comme un bloc monolithique (LA théologie de Paul) au "deutéro-paulinien", dont on minimisera semblablement les déplacements "internes" (de Colossiens à Ephésiens notamment). Mais c'est moins le défaut, si c'en est un, de Dettwiler que de toute sa discipline, et visiblement ça n'a pas beaucoup changé depuis vingt ans. |
| | | free
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Jeu 25 Avr 2024, 13:46 | |
| Parousie et Résurrection Maurice Goguel
La première a son expression la plus nette dans le chapitre 15 de la première épitre aux Corinthiens (1). L'homme qui est chair et sang, ne peut pas hériter du Royaume de Dieu. Il doit donc subir une transformation. Pour ceux qui seront morts avant le retour du Seigneur et dont Paul se représente qu'ils resteront jusque-là dans un état d'anéantissement provisoire, cette transformation consistera en ceci, qu'au dernier jour ils ressusciteront avec un corps qui ne sera plus terrestre et psychique, mais céleste et spirituel, dont la nature, par conséquent, sera autre et qui aura comme attributs, non plus la corruptibilité, l'humilité, la faiblesse, mais l'incorruptibilité, la gloire et la puissance. Les autres seront instantanément transformés quand le Seigneur paraîtra, non pas seulement quand les puissances démoniaques auront été anéanties, mais dès que le Christ reviendra pour leur livrer le dernier combat qui se terminera par sa victoire définitive et par la remise de la royauté au Père (I Cor., 15, 24-28), c'est-à-dire par l'établissement du règne de Dieu et la disparition complète de l'économie actuelle. Ainsi, ceux qui appartiennent au Christ seront définitivement affranchis de la domination que les puissances mauvaises exercent encore sur eux entre le moment de la mort et de la résurrection du Christ et celui de son retour.
Ailleurs, sans nier la parousie, Paul ne la fait pas intervenir comme cause de l'achèvement de la rédemption. Par là, il la rend pratiquement inutile, du moins en ce qui concerne le sort des élus (1). Dans la seconde épître aux Corinthiens, il développe l'idée que, dans l'homme» s'opposent deux éléments qu'il appelle l'homme extérieur et l'homme intérieur. Le premier correspond à ce qu'ailleurs (1 Cor,, 15, 50). Paul appelle la chair et le sang, c'est la personnalité humaine telle qu'elle est constituée par le fait qu'elle descend d'Adam, c'est-à-dire en tant qu'elle est dominée par les puissances du péché et de la chair (2) et par là vouée à l'anéantissement. Mais Paul envisage ici une destruction progressive de cet homme extérieur, la mort en marquant seulement le terme ultime. A mesure que l'homme extérieur se détruit, l'homme intérieur grandit. Il a pour caractères la gloire, la puissance et l'incorruptibilité. Il appartient à l'ordre des réalités qui ne se voient pas mais qui sont éternelles. Le croyant qui sent naître et se développer en lui cette personnalité nouvelle aspire au moment où elle pourra s'épanouir hors des entraves que constitue la vie de l'homme extérieur, Sur cette image des deux hommes, Paul en greffe une autre, celle de deux demeures, l'une terrestre, provisoire et vouée à l'anéantissement, c'est le corps charnel; l'autre céleste, éternelle et créée par Dieu, c'est le corps spirituel. Le croyant aspire au moment où il quittera sa demeure provisoire pour entrer dans celle que Dieu lui donnera, en d'autres termes où il quittera son corps pour aller avec le Seigneur, ou encore où il cessera de vivre par la foi, c'est-à-dire par l'espérance, pour vivre par la vue. Cette transformation n'est pas le passage brusque à un état qui n'aurait, en aucune mesure, existé auparavant. Il y a développement de quelque chose qui existe déjà dans la vie actuelle mais qui ne peut pas s'y épanouir librement. Ce quelque chose c'est une création de Dieu puisqu'il est dit que celui qui nous a disposés pour cela c'est Dieu qui nous a donné les arrhes de son Esprit. (II Cot., 5, 5.)
L'existence dans le corps physique apparaît ainsi comme un obstacle à la vie avec le Seigneur. Elle empêche la complète accession à la vie céleste. Il y a cependant dans le croyant plus que l'espérance, plus même que la garantie du salut. Ce salut est déjà réalisé, mais partiellement seulement. Il l'est puisque l'homme intérieur existe et croit de jour en jour. En d'autres termes, le salut et non pas seulement la justification est une réalité actuelle qui se développe et s'affirme de jour en jour.
Dans le texte où sont exposées ces idées, il n'y a absolument rien qui suggère ou même qui autorise à concevoir l'idée qu'entre la croissance de l'homme intérieur dans l'économie actuelle et son épanouissement dans une autre» il puisse y avoir la moindre interruption. Une telle idée est directement exclue par l'affirmation que le dépouillement du corps actuel a pour effet que ce qui est mortel sera noyé par la vie (5, 4) et tout autant par cette autre affirmation que sortir de ce corps c'est aller avec le Seigneur (5, 6).
https://www.persee.fr/doc/rhpr_0035-2403_1930_num_10_4_2778 |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Jeu 25 Avr 2024, 14:44 | |
| La théologie et l'exégèse protestantes, libérales, étaient plus audacieuses au début du XXe siècle (ici Goguel 1930) qu'elles ne le sont devenues ensuite. Leur forme de naïveté, telle qu'elle saute aux yeux à près d'un siècle de distance, consistait à historiciser et à psychologiser sans scrupule ni vergogne: dès qu'on arrive à construire une histoire psychologiquement vraisemblable de Jésus, de ses disciples, de Paul, tous entendus comme des personnages historiques et des personnes réelles, à partir d'éléments puisés arbitrairement et indifféremment dans les évangiles ou dans les Actes, le tour est joué. Le soupçon que le vraisemblable ne soit pas le vrai, ni même le plus probable, n'effleure quasiment personne. Goguel perçoit très bien que dans le christianisme la notion de "résurrection" glisse du futur absolu ("eschatologique", dernier comme son nom l'indique, ainsi qu'en témoigne encore l'Apocalypse de Jean qui la place entre deux mondes, après l'enroulement ou le pliage, comme on dit à Lyon -- pour "ranger", par exemple un étalage sur le marché, on "plie" -- des cieux et de la terre, et avant le déploiement de "nouveaux cieux" et d'une "nouvelle terre" désormais sans histoire) au passé mythique présumé historique, la résurrection du Christ comme fait accompli (non sans précédent pourtant, dans ses propres "miracles" eux-mêmes inspirés des cycles d'Elie et d'Elisée); et qu'entre les deux la "distance" ne peut plus que croître indéfiniment, appelant des "actualisations" ecclésiastiques, myst(ér)iques, gnostiques, charismatiques, qui compromettent autant le passé que l'avenir imaginaires en prétendant les "actualiser" (au double sens de "rendre présent" et de "réaliser"). La réaction théologique, néo-orthodoxe, dialectique ou existentielle (je pense aux Barth, Bultmann, Tillich, Brunner et quelques autres) a finalement été plutôt philosophique ou métaphysique, qui consistait à sublimer la résurrection du Christ, à l'ériger en hyper-événement, non historique au sens banal mais plus qu'historique, méta- ou trans-historique, en se servant ou non des distinctions que Heidegger pratiquait de son côté entre historisch et geschichtlich (historique-historial... au-delà [!] de la traduction c'est toujours le même schéma, ou le même ressort du "dépassement", de l' epekeina platonicien à l' Aufhebung hegelienne, quand même de part et d'autre on déniait catégoriquement cet héritage). C'était au fond recréer du "mythe", ou de la " poésie", là même où le logos philosophique ou théo-logique prétendait s'en distinguer radicalement... la meilleure démonstration, en somme, qu'on ne peut absolument pas s'en passer. Du point de vue "biblique", le plus gênant pour ce schéma-là, c'est que les textes du NT qui tendent à "historiciser" la résurrection du Christ en la datant et en la racontant avec de plus en plus de détails, fussent-ils contradictoires (évangiles, Actes, Pastorales, contrairement au premier "paulinisme") ne font rien pour la distinguer des autres "résurrections" (d'enfants ou d'esclaves, sur le modèle Elie-Elisée, de Lazare, ou même générale dans Matthieu...), ils tendent au contraire à la ramener au même niveau que les résurrections-miracles précédents. La résurrection du Christ n'est plus "unique", elle n'est même plus "première" en un sens "historico-mythique" comme le voulait 1 Corinthiens 15. |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Lun 13 Mai 2024, 15:53 | |
| Un dilemme théologiquePaul croyait-il en un “état intermédiaire”?Un Catéchisme de l’Église catholique déclare: “Pour ressusciter avec le Christ, il faut mourir avec le Christ, il faut ‘quitter ce corps pour aller demeurer auprès du Seigneur’ (2 Co 5,:. Dans ce ‘départ’ (Ph 1,:23) qu’est la mort, l’âme est séparée du corps. Elle sera réunie à son corps le jour de la résurrection des morts.” Cependant, les versets donnés ici en référence signifient-ils que l’apôtre Paul enseignait que l’âme survit à la mort du corps et attend ensuite le “Jugement dernier” pour être réunie au corps?En 2 Corinthiens 5:1, Paul évoque sa mort et parle d’une “maison terrestre” qui serait ‘dissoute’. Pensait-il au corps que quitterait son âme immortelle? Non; Paul croyait que l’homme est une âme, non pas qu’il possède une âme (Genèse 2:7; 1 Corinthiens 15:45). Paul, tout comme ses compagnons chrétiens du Ier siècle, était oint de l’esprit et son espérance était “réservée dans les cieux”. (Colossiens 1:5; Romains 8:14-18.) Par conséquent, son ‘désir ardent’ était d’être ressuscité dans les cieux en tant que créature spirituelle immortelle au moment fixé par Dieu (2 Corinthiens 5:2-4). Au sujet de son espérance il écrivit: “Tous nous serons changés, (...) durant la dernière trompette. Car la trompette sonnera, et les morts seront relevés incorruptibles, et nous, nous serons changés.” — 1 Corinthiens 15:51, 52.En 2 Corinthiens 5:8 Paul déclare: “Nous avons bon courage et nous aimons mieux nous trouver loin du corps et élire domicile auprès du Seigneur.” Certains croient que ces paroles font allusion à une attente, un “état intermédiaire”. Ils se réfèrent à la promesse que Jésus a faite à ses fidèles disciples de s’en aller pour leur préparer une place où ‘il les accueillerait auprès de lui’. Mais à quel moment ces perspectives deviendraient-elles réalité? Le Christ a dit que ces choses auraient lieu quand il ‘reviendrait’, lors de sa présence future (Jean 14:1-3). De même, en 2 Corinthiens 5:1-10 Paul a affirmé que l’espérance commune aux chrétiens oints de l’esprit était d’hériter une demeure céleste. Cela se réaliserait non pas grâce à la prétendue immortalité de l’âme, mais au moyen d’une résurrection au cours de la présence du Christ (1 Corinthiens 15:23, 42-44). L’exégète Charles Masson en conclut que 2 Corinthiens 5:1-10 “s’entend donc bien sans qu’il soit nécessaire de recourir à l’hypothèse de l’‘état intermédiaire’”.En Philippiens 1:21, 23, Paul affirme: “Dans mon cas, vivre, c’est Christ, et mourir, un gain. Je me sens pressé par ces deux choses; mais ce que je désire vraiment, c’est la libération et être avec Christ, car, évidemment, c’est de beaucoup préférable.” Paul se réfère-t-il ici à un “état intermédiaire”? Certains le pensent. Toutefois, Paul dit qu’il se sentait pressé par deux possibilités: la vie ou la mort. “Mais ce que je désire vraiment, a-t-il ajouté en mentionnant une troisième possibilité, c’est la libération et être avec Christ.” Une “libération” pour être avec Christ immédiatement après sa mort? Eh bien, comme nous l’avons déjà vu, Paul croyait que les chrétiens oints fidèles seraient ressuscités pendant la présence du Christ. Par conséquent, il devait avoir à l’esprit les événements de cette période.Cela ressort de ce qu’il exprime en Philippiens 3:20, 21 et en 1 Thessaloniciens 4:16. Une “libération” pendant la présence de Christ Jésus permettrait à Paul de recevoir la récompense que Dieu lui avait préparée. Les paroles suivantes, adressées au jeune Timothée, montrent que telle était bien son espérance: “Dès maintenant m’est réservée la couronne de justice qu’en récompense le Seigneur, le juste juge, me donnera en ce jour-là, et non seulement à moi, mais encore à tous ceux qui ont aimé sa manifestation.” — 2 Timothée 4:8.https://wol.jw.org/fr/wol/d/r30/lp-f/1995167Je trouve difficile de répondre à une question concernant un “état intermédiaire” quand on ne sait pas exactement à quoi correspond cette notion.
Dernière édition par free le Lun 13 Mai 2024, 16:45, édité 2 fois |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Lun 13 Mai 2024, 16:07 | |
| Tu résumes brillamment l'aporie: il est tout aussi absurde de dire oui ou non, ça existe ou ça n'existe pas, à / de quelque chose dont on n'a pas défini l'essence ou la signification, ce que c'est ou ce que ça veut dire... En l'occurrence, quand la Watch parle de morts "inconscients", mais "présents dans la mémoire de Dieu", c'est aussi un "état intermédiaire", que ça lui plaise ou pas; et qu'on appelle "âme", "personne", "sujet" ou "identité", "mémoire" ou "personnalité" ce qui passerait du "mort" au "ressuscité", ça ne saurait être conçu ou imaginé autrement que comme "quelque chose", même si ce quelque chose est une "abstraction". D'ailleurs, si je me souviens bien, il fut un temps où la Watch sabordait son propre discours globalement "abstrait" sur la mort en précisant que le "Sheol" n'était pas un "symbole" (mais je n'en retrouve plus trace dans la "bibliothèque en ligne")... Bien entendu, le Qohéleth qu'on peut opposer à l'"immortalité" ou à la simple "survie de l'âme", ou plus exactement encore à l'idée d'une "conscience dans la mort", s'opposerait tout autant à l'idée d'une "résurrection". Mais même la mort "néant" ou "presque rien" il l' imagine, comme d'ailleurs tout un chacun ne peut qu'imaginer ce qu'il est quotidiennement (ou presque) durant son sommeil, hormis les souvenirs reconstruits de rêve ou de cauchemar, ou mieux encore le monde d'avant sa naissance ou ce qui se passe dans la pièce d'à côté... Nous nous rappelions récemment (Nodet-Wohlman, 8.5.2024) l'association traditionnelle de Qohéleth à la vieillesse de Salomon, indépendamment de toute prétention historico-littéraire elle garde une certaine vraisemblance psychologique. Autant la pensée de la mort, en général, est insupportable à un être jeune, qui est d'autant plus enclin à croire n'importe quoi à son sujet pour éviter de la regarder en face, autant elle devient une évidence naturelle, simple, tranquille et paisible avec l'âge, à mesure que concrètement elle s'approche (thème bergmanien par excellence); évidence malheureusement incommunicable d'une génération à l'autre, alors que l'imaginaire de la mort, qui en démultiplie l'effroi et la fascination, est au contraire ce qu'une culture transmet le plus volontiers -- quand même les vieux ont depuis longtemps cessé de croire ce qu'ils continuent de raconter à leurs petits-enfants. |
| | | free
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Mar 14 Mai 2024, 10:49 | |
| Mangeons, buvons, car demain nous mourrons (Saint Paul, 1 Cor., XV, 32) Jean Salem 9. « Si les morts ne ressuscitent pas, alors mangeons et buvons car demain nous mourrons »12 : c’est bien là, au premier examen, ce que paraît déclarer l’apôtre en son nom. Et c’est ce très invraisemblable alors13 qui risque de nous acheminer vers une conséquence bien peu glorieuse : « s’il n’y avait pas la résurrection, alors, paraît déclarer Paul, nous pourrions vivre comme de grossiers épicuriens », comme des hédonistes, comme des viveurs constamment taraudés par l’angoisse et courant sans cesse au plaisir pour faire la nique au temps qui passe. Pareille idée, après tout, ne constituerait pas un hapax dans l’ensemble du Nouveau Testament : saint Paul lui-même ne déclare-t-il pas devant les docteurs de l’Aréopage que si « Dieu fait maintenant savoir aux hommes d’avoir tous et partout à se repentir », c’est essentiellement parce qu’Il a « offert à tous une garantie en ressuscitant un homme d’entre les morts »14. 10. Tâchons maintenant de découvrir quel fut le passé de cette devise qu’on nous dit être celle des impies. Nous savons qu’à la différence d’Épicure, les disciples d’Aristippe de Cyrène (vers 435 / 350 av. J.-C.) n’avaient « pas rougi », pour parler comme Cicéron, de nier qu’il existât un plaisir en repos15 ni « de placer le souverain bien dans le plaisir que les épicuriens appellent cinétique, en mouvement16 ». C’est que les Cyrénaïques, les premiers, avaient formulé l’accusation selon laquelle ce plaisir dont parle Épicure correspond à l’état d’un homme endormi, voire à celui d’un pur cadavre, νεϰροῦ ϰατάστασις17. Il y aurait là, pour pasticher le Calliclès du Gorgias, un plaisir comparable à celui des pierres, ou bien à celui d’une dent qui ne souffre pas18. 11. Nous tenons là deux lignes divergentes du matérialisme hédoniste : et quoi qu’en aient pensé les Pères de l’Église, Épicure ne fut pas un voluptueux inquiet. Pour lui, il ne s’agit pas tant de nous inciter à cueillir « dès aujourd’hui les roses de la vie »19 que de nous inviter à suspendre en quelque façon le vol du temps qui passe – pour parler comme Lamartine. Sa visée consiste à nous faire échapper à l’excitation cyclothymique qui sans cesse étreint l’insensé, à la structure pathologique, maniaco-dépressive, du désir infini, qui fait qu’après de grands élans, de grands passages euphoriques, nous sommes l’objet de grandes « déprimes » jusqu’à ce que le désir, à nouveau, nous relance. On découvre ainsi ou l’on redécouvre qu’une tradition que j’appellerais anacréontique, celle d’Omar Khayyam, celle du faux épicurisme des poètes de la Pléiade, a tout autant voix au chapitre lorsqu’il s’agit de méditer en athée sur les mobiles de l’agir humain ou sur la possibilité d’être heureux. Ainsi touchons-nous ici au caractère problématique et à l’inévitable complexité d’une théorie matérialiste du plaisir. Cette nostalgie de l’heure qui fuit, cette hâte vers la jouissance qu’induit le constant souci de la mort, on la trouve chez les poètes du vin et des jeunes garçons, on la rencontre encore dans l’œuvre d’Horace et chez bien des libertins du siècle de Louis XIV : aussi avons-nous quelque chance de glaner chez tous ces auteurs des occurrences du Manducemus et bibamus, cras enim moriemur ! Mais il convient au préalable que nous indiquions quels sont dans l’Ancien Testament les antécédents de la formule que nous étudions. Car on ne compte pas moins de quarante-six citations du Testament hébraïque dans la Première aux Corinthiens20 ; et saint Paul se plaît à faire ressortir ce qu’il tient pour une mystérieuse concordance entre la nouvelle loi et l’ancienne. Or il y a dans la Sagesse (II, 5- un certain Discours des impies, dans lequel s’exprime déjà l’hédonisme que l’Épître aux Corinthiens vitupère : 5 Oui, nos jours sont le passage d’une ombre ; la mort ne retourne point sur ses pas, le sceau est apposé : nul ne revient. 6 A l’œuvre donc ! Jouissons des biens véritables, usons des créatures avec l’ardeur de la jeunesse. 7 Enivrons-nous de vins exquis et de parfums ; ne laissons point passer la fleur du printemps, 8 couronnons-nous de roses, avant qu’elles ne se fanent… 13. Mais c’est surtout dans le livre d’Isaïe que nous trouverons le précédent vétérotestamentaire dont la formule utilisée par saint Paul constitue le strict démarquage. Il s’agit d’imprécations, dans lesquelles il est notamment affirmé qu’Assur est un instrument dont la main de Dieu se sert afin de mieux punir Israël. Voici ce que déclare ici le prophète : 12 Le Seigneur Yahvé Sabaot vous appelait ce jour-là à pleurer et à vous lamenter, à vous tondre et à ceindre le sac. 13 Et voici la joie et l’allégresse, on tue des bœufs et on égorge des moutons, on mange de la viande et on boit du vin « Mangeons et buvons, car demain nous mourrons. » 14 Mes oreilles ont reçu cette révélation de Yahvé Sabaot : « Jamais ce péché ne sera expié, que vous ne soyez morts », dit le Seigneur Yahvé Sabaot. 14. Ce même livre prophétique confirme d’ailleurs à plusieurs reprises la condamnation de ceux qui, abandonnant la loi de Dieu, se sont adonnés aux plaisirs21. Et c’est donc de ce contexte-là que Paul aura, pour l’essentiel, tiré cette inquiétante conséquence : « Si les morts ne ressuscitent pas, mangeons et buvons, car demain nous mourrons »22. https://books.openedition.org/vrin/3682?lang=fr |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Mar 14 Mai 2024, 11:39 | |
| Cette belle étude littéraire et comparative montrerait aussi l'inutilité d'assigner à une "citation" présumée une origine unique et précise quand il s'agit d'un topos, d'un "lieu commun" (et) quasi universel -- on aurait pu également convoquer Qohéleth qui, au fond, ne dit pas autre chose et le dit tout à fait positivement: manger, boire, jouir de la vie avant la mort où c'en sera fini et où tout sera indifférent (y compris, d'ailleurs et c'est le maillon faible du raisonnement, d'avoir mangé, bu, joui ou non, plus ou moins); ou Desproges, vivons heureux en attendant la mort. En effet "Paul" en 1 Corinthiens 15 assume cette logique, non seulement comme une généralité, dans une rhétorique de l'absurde, pour en exclure ou en forclore la prémisse préjugée irréelle (s'il n'y a pas, s'il n'y avait pas de résurrection -- mais il y en a !), mais encore par un engagement "existentiel", en écho aux v. 12-19 qui apparaissent bien comme le moment le plus "risqué" du raisonnement: s'il n'y a pas de résurrection nous sommes effectivement les plus misérables, les dindons de la farce... On peut certes considérer que le nous désigne au premier chef les "apôtres" (au sens paulinien), comme en 2 Corinthiens où il s'oppose plus explicitement à un "vous", mais cela ne peut manquer de rejaillir sur les destinataires, au moins dans la mesure où ils adhèrent à la démonstration. Comme on l'a souvent remarqué (p. ex. ici), cette petite phrase à elle seule infirmerait à jamais toutes les prétentions hédonistes ou eudémonistes du christianisme -- dès le NT ! -- à "rendre heureux" au présent, d'une manière ou d'une autre, fût-ce la plus "spirituelle", la plus paradoxale ou la plus perverse. Mais c'est aussi la logique matthéenne (par ailleurs antipaulinienne) du "trésor dans le ciel" ou du "salaire-récompense" futur opposé au présent. |
| | | free
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Mer 22 Mai 2024, 10:48 | |
| "Or si l'on proclame que le Christ s'est réveillé d'entre les morts, comment quelques-uns d'entre vous peuvent-ils dire qu'il n'y a pas de résurrection des morts ? S'il n'y a pas de résurrection des morts, le Christ non plus ne s'est pas réveillé. Et si le Christ ne s'est pas réveillé, alors notre proclamation est inutile, et votre foi aussi est inutile. Nous apparaissons même comme de faux témoins de Dieu, puisque nous avons témoigné contre Dieu qu'il a réveillé le Christ, alors qu'il ne l'a pas réveillé, s'il est vrai que les morts ne se réveillent pas. En effet, si les morts ne se réveillent pas, le Christ non plus ne s'est pas réveillé. Et si le Christ ne s'est pas réveillé, votre foi est futile, vous êtes encore dans vos péchés et ceux qui se sont endormis dans le Christ sont perdus. Si c'est pour cette vie seulement que nous avons mis notre espérance dans le Christ, nous sommes les plus pitoyables de tous" (1 Co 15,12-19).
… encore 1 Corinthiens 15. Si les chrétiens refusent d’agir, alors Christ n’est pas ressuscité. Guy Wagner
L’œuvre de Dieu n’est pas... et ne doit donc pas être « pour rien ».
Reprenons le dernier verset du chapitre et, particulièrement les derniers mots : « sachant que la peine que vous prenez n’est pas vaine dans le Seigneur ». L’adjectif kenos (vide, vain, pour rien) est déjà apparu aux w 10 et 14 (cf S.F. p. 205). Il faut le rapprocher de eikê (en vain) (v. 2), de mataios (illusoire) (v. 17) et de ophelos (utile) (v. 23). Pourquoi la foi est-elle vaine si les morts ne ressuscitent pas (v. 14) ? Parce qu’elle est sans objet ? Mais dans ce cas il faut admettre que son objet est l’après vie ! Parce qu’elle est sans fondement? Oui, dans la logique de l’apôtre pour lequel la résurrection du Christ implique celle des morts. Il faut remarquer toutefois que la phrase exacte est « vaine est notre prédication et vaine est votre foi». La prédication trouve son fondement dans l’événement de la résurrection du Christ. La prédication est elle même action dans la mesure où elle prolonge cet événement en le faisant connaître. La prédication est, pour Paul une démonstration de la puissance de l’Esprit (1/18). Elle porte du fruit. La conversion des Cor. prouve, selon 2 Cor 3/2 son efficacité. Mais la foi, elle-même, si elle est réelle, ne peut qu’entrer dans ce dynamisme : dans la mesure où les Cor. nient l’avenir de Dieu en niant la résurrection des morts, ils se mettent en marge de cette grande action, ils stoppent ce mouvement. Tout devient « pour rien », leur foi, la prédication de l’apôtre et la résurrection du Christ. Paul ne peut pas, bien entendu, s’y résoudre. Mais il est obligé de tout reprendre au point de départ. Ses amis sont encore « dans leurs péchés » (v. 17). Ils sont comme des païens qui ne savent absolument rien. Si, croyant être dans la vérité, ils ne retiennent pas le message de l’apôtre « tel qu’il le leur a annoncé » (v. 2), alors leur foi est nulle. Oui, il doit leur « faire connaître (v. 1) l’évangile comme s’ils ne l’avaient jamais entendu !
La résurrection ne nous empêche pas de mourir.
« Christ est mort » : ainsi commence la célèbre confession de foi que Paul cite au début du chapitre. Nous sommes tellement habitués à cette affirmation que nous ne percevons même plus le paradoxe. A la base de notre foi se trouve cet homme mort et enseveli ! Mais, bien entendu, il n’est pas mort... pour rien. Il est mort « pour nos péchés ». En 2 Cor 4/12 Paul écrit « ainsi la mort agit en nous (les apôtres) et la vie en vous » (les bénéficiaires). La mort se poursuit donc, d’une certaine manière dans les souffrances de l’apostolat et ceci pour donner la vie. Ce n’est pas forcer le texte, croyons nous, que de dire que Paul pense déjà, en citant la confession de foi, aux dangers qu’il court et, par contraste, à la légèreté des Cor.
Dans l’énumération des témoins de l’apparition, Paul mentionne les cinq cents dont « la plupart sont encore vivants mais dont quelques-uns sont morts » (v. 6). On explique généralement comme la TOB « ils peuvent encore témoigner ce qu’ils ont vu. Votre foi a donc un fondement solide». A quoi nous avons envie de rétorquer : mais maintenant qu’ils sont morts, le fondement est chancelant. Paul imagine-t-il vraiment que les Cor. vont se livrer à une enquête ? Craint-il, à ce point cette enquête qu’il s’inquiète à l’idée qu’ils risquent de n’en trouver que 450 ou 480 ? Barth a bien raison de dire que Paul n’a aucune intention apologétique dans ce chapitre. Il ne cherche pas à prouver que la résurrection est un événement si évident que nul, croyant ou incroyant, ne saurait le nier sans mauvaise foi. Il sait mieux que quiconque, lui l’ancien persécuteur, que la certitude de la résurrection ne repose sur aucune preuve mais sur l’intervention du Christ perçue par la foi ! Pour lui la résurrection du Christ est l’acte divin déroutant, bouleversant qui brise toutes les certitudes. L’apparition, est le signe inattendu du surgissement d’un monde si renouvelé qu’on ne saurait le décrire. S’il nomme donc tous ces témoins, c’est pour bien montrer qu’il n’est pas le seul a avoir ainsi pris conscience de l’événement qui mobilise toute la communauté chrétienne dans l’espérance. C’est bien l’expérience commune de tous ceux dont le message a donné naissance à l’église 6. Paul ne pouvait, évidemment imaginer que, quelques siècles plus tard des gens liraient son texte avec une mentalité positiviste en y cherchant des preuves pour se rassurer !
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Une des difficultés majeures de ce texte tient aux significations diverses que Paul donne à la mort. La mort physique n’est pas, comme telle, l’ennemi (v. 26). Paul l’affronte quasi journellement mais il écrit (et à notre avis à la même époque et à Ephèse) aux Philippiens que, non seulement il ne la craint pas, mais qu’il la désirerait plutôt puisqu’elle lui apporterait la communion parfaite avec le Christ (1/21). Remarquons encore que cette présentation ne coïncide pas avec ce qu’il dit en 1 Thess 4/13. La mort évoque à certains moments celle du Christ vue comme comble du péché des hommes et péché accompli au nom de la loi (v. 56). Elle évoque aussi, comme dirait Montaigne, le « mourir » c’est-à-dire la souffrance qui affaiblit, la « nécrose » (2 Cor. 4/10), et donc la puissance de destruction qui s’oppose à la puissance vivifiante du Ressuscité. Globalement elle est le signe que nous ne sommes pas dans le royaume, que le monde se débat encore sous la puissance du péché et du mal. Faire comme si le péché et la mort étaient déjà vaincus et éliminés, c’est, pour Paul, non seulement vivre dans l’illusion, mais refuser le combat nécessaire. En paraphrasant Paul nous pourrions dire : « amis de Corinthe, vous faites comme si Jésus n’avait mené aucun combat, comme s’il ne l’avait payé de sa vie, comme s’il n’était pas ressuscité, comme s’il s’était borné à vous apprendre une manière de nier le mal, la souffrance et la mort. Comment ne voyez vous pas que cela n’a rien à voir avec l’évangile tel que je vous Vai prêché, tels que l’on découvert et prêché tous les témoins de la résurrection et tel que le vivent les apôtres. »
En reprenant les w. 20 à 28 dans la perspective de la mort, nous voyons que Paul veut les convaincre qu’ils ne sont pas encore ressuscités. Pourquoi dit-il « prémices de ceux qui sont morts » et non « de ceux qui sont ressuscités », sinon parce qu’il lance encore une flèche à ses amis? S’ils nient la mort, cela ne les concerne pas ! L’évocation du récit de Gen 3 indique que la condition mortelle des fils d’Adam est le salaire du péché (Rom 5) et le v. 23, avec sa remarque un peu brutale « chacun en son rang » rappelle aux Cor. que le Christ seul est glorifié. Qu’ils ne se mettent donc pas à sa place ! Ils connaîtront la gloire à la parousie, par avant !
Nous pensons, avec K. Barth, qu’il faut voir dans le to télos du v. 24 un adverbe (alors, à la fin), dans les w. 24 et 25 des parenthèses (quand il aura remis... car il faut) et au v. 26 la proposition principale. Celle-ci ( le dernier ennemi détruit sera la mort ») anticipe le v. 54 qui sera la vraie finale du thème. La difficulté de la phrase s’explique par l’entrecroisement des deux thèmes que nous avons distingués, l’action de Dieu et du Christ d’une part et, de l’autre, la réalité encore actuelle de la mort.
La mort de Jésus et sa résurrection aboutiront donc à la victoire définitive sur la mort mais cela se fera par un long et difficile combat du Christ et des chrétiens. Le déroulement apparemment chaotique, mais finalement très structuré de l’exposé de Paul reflète, à sa manière, la situation ambiguë dans laquelle nous nous trouvons entre le « déjà » de Pâques et le a pas encore » de la parousie.
https://www.persee.fr/doc/ether_0014-2239_1981_num_56_4_2656 |
| | | Narkissos
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Mer 22 Mai 2024, 11:53 | |
| Etude déjà ancienne (1981), qui nous replonge dans un climat théologico-exégétique assez dépaysant: on a un peu oublié aujourd'hui Barth et Bultmann, que j'ai pour ma part découverts sur le tard, un peu plus tard dans la même décennie.
Cet article m'intéresse notamment sur un point dont nous avons souvent parlé, la distinction des "nous" et des "vous" dans les textes "pauliniens", la correspondance corinthienne en particulier. Il faudrait en effet mieux distinguer d'un passage à l'autre. Il y a ainsi dans les premiers chapitres de 1 Corinthiens (surtout chap. 4) une nuance de reproche, de critique, d'ironie, de sarcasme (Nietzsche dirait de ressentiment, en français dans le texte) du "nous" au "vous" qui est totalement absente de 2 Corinthiens: nous mourons et vous vivez, nous sommes humiliés et vous êtes glorifiés, cela s'entend d'un côté comme un reproche acerbe et de l'autre comme l'énoncé d'une situation parfaitement normale, conforme à la raison d'être de l'"apostolat": nous mourons pour que vous viviez, comme le Christ lui-même, c'est dans l'ordre du "mystère". Mais à mon avis il ne faut pas se presser de ranger 1 Corinthiens 15 d'un côté ou de l'autre -- je ne reviens pas sur ce qui distingue ce chapitre du reste de l'"épître" (cf. p. ex. supra 21.4.2024). Ici c'est surtout un "je, moi", qui s'oppose au "vous", dès le début; le "nous" du v. 11 englobe des "apôtres" qui ne sont peut-être pas si "pauliniens", avec lesquels "Paul" semble dans un rapport de rivalité, d'après ce qui précède. On peut encore distinguer un "nous apostolique" (paulinien ou autre) aux v. 15-19, 30-32, mais dans la partie finale (v. 35ss) le "nous" ne se distingue plus du tout d'un "vous", il représente tous les croyants -- comme dans les épîtres ultérieures, Romains etc.
On retrouve par là les apories de la distinction, qui tourne à la "hiérarchie", ou de l'indistinction, "égalitariste". Pas de différence entre "nous" et "vous", cela peut signifier "nous ne valons pas mieux que vous", modestie vraie ou fausse, mais aussi "vous devez être comme nous", tous apôtres, tous prédicateurs, tous actifs, tous persécutés, tous souffrants -- mais alors on fait de la "foi" une "oeuvre", "activité" ou "activisme", contrairement à toute la logique qui se déploiera à partir de l'épître aux Romains (et, en règle générale, sans distinction significative des "nous" et des "vous").
Reste qu'en effet la doctrine, qu'elle se rapporte à un passé mythique ou historique (la résurrection du Christ) et/ou à une eschatologie future ou futuriste (la résurrection à venir), a des effets présents, "existentiels" comme on disait encore beaucoup dans les années 1980, qui déterminent un type de "foi", non seulement individuelle mais collective. Selon la façon dont on l'interprète, on aboutira plutôt à une "religion" ou à une "secte" (au sens de la typologie de Weber). |
| | | free
Nombre de messages : 10098 Age : 63 Date d'inscription : 21/03/2008
| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Lun 27 Mai 2024, 12:48 | |
| Entre résurrection et croix : nommer l’événement selon Paul (1 Corinthiens 15) Guilhen Antier
2. « Si Christ n’est pas ressuscité, alors notre prédication est vide et vide
est notre foi. [...] Si Christ n’est pas ressuscité, votre foi est inutile, vous êtes encore dans vos péchés » (1 Co 15,14). Au fondement de la foi, de la prédication et du salut, il y a et il n’y a que la résurrection du Christ. Pas la plus petite mention de la croix n’intervient au cours de la démonstration. La résurrection, et elle seule, est en mesure de re-créer le sujet en l’arrachant au péché. Autrement dit, l’événement subjectif de la résurrection du Christ opère comme réel de l’advenue de Paul comme sujet.
Le réel, c’est ce dont le sujet, au point de l’événement, fait l’expérience interruptrice, décisive, sans pour autant être en mesure de le déchiffrer. C’est le choc du réel qui crée le sujet sans qu’il ne soit une expérience sensible, consciente ou immédiate. Le réel est un point de butée fondatrice qui met la langue en impasse. Il est semblable à un coup de foudre qui saisit celui qui en fait l’expérience, au point qu’il en a le souffle coupé - et la parole aussi. Ce n’est que dans l’après-coup que peuvent se balbutier des mots qui s’efforceront, d’une façon toujours impropre et fragmentaire, de rendre compte de quelque chose qui leur échappe6. C’est pourquoi le concept même de résurrection ne soutient aucun rapport univoque ni adéquat au langage. « Résurrection » fonctionne alors comme concept vide, comme nom de ce qui arrive au sujet sans qu’il sache pourquoi ni comment, sans être attendu ni mérité, mais dont, une fois qu’il a eu lieu, il faut rendre compte dans un langage qui en porte la trace. Autrement dit, tout sujet de la résurrection est requis pour assumer un paradoxe qui consiste à déclarer l’ indéclarable.
L’événement de la résurrection comme réel du sujet-déclarant n’est donc pas quelque chose en plus, un surplus d’être, un objet de satisfaction. Il est plutôt quelque chose en moins. La résurrection entendue comme vérité du sujet s’offre dans un retrait, au sens où, pour Alain Badiou, « la vérité n’est tolérable pour la pensée [...] qu’autant qu’on vise non sa plénitude ou son dire intégral, mais les ressorts de sa dimension soustractive ». La résurrection en tant qu’événement qui crée le sujet et l’ouvre à la déclaration trouve son origine dans un point de vide, une inconsistance, une disparition. La résurrection, pour autant qu’elle s’offre ultimement comme vérité, fait trou : elle échappe, et au sujet (que pourtant elle re suscite), et au langage (que pourtant elle renouvelle). C’est à la condition que la résurrection soit d’essence soustractive, qu’elle échappe, que ce qui a été vrai pour un peut devenir vrai pour tous.
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2. Mais d’où vient au juste que la résurrection de tous dépende de la résurrection d’un seul ? D’ou vient que « comme en Adam tous meurent, de même aussi en Christ tous seront faits vivants, mais chacun dans son propre rang : Christ prémices, ensuite ceux en Christ dans sa parousie » (1 Co 15,22-23) ? D’où vient que l’universel ne puisse s’ancrer ailleurs que dans la singularité ? En fait, la question suppose de déterminer le statut exact de cette singularité qu’est la résurrection du Christ. Il est d’emblée nécessaire de dire que Christ lui-même n’est pas sa propre origine. Il renvoie ultimement à un Autre, une Altérité radicale, un Père-Radicalement Autre : « Quant toute chose lui sera soumise, le fils lui-même sera soumis à celui qui lui a soumis toute chose » (1 Co 15,28). Pour ce qui est du Christ, sa singularité de Fils lui vient du « Dieu et Père » (1 Co 15,24) ; Christ tient alors, dans la chaîne universalisée des fils de la résurrection, la place logique de Fils premier-né renvoyant à un Père-Radicalement Autre.
L’événement-Christ atteste alors d’une division, d’une coupure opérée en Dieu lui-même entre un Père et un Fils, ce qui interdit qu’on fasse de Dieu le lieu d’une origine pleine et totalisée, et donc qu’on fixe une norme au déploiement universel de la vérité. La foi chrétienne ne s’exprime certainement pas dans les catégories du théisme pour lequel Dieu est tenu pour l’Un primordial d’où tout provient et où tout retourne. En tant qu’origine, Dieu n’est jamais qu’un Père qui se tient en retrait dans le souffle, le murmure indistinct qui passe à l’entrée de notre caverne sans se confondre avec les manifestations pleines et glorieuses où nous projetons nos propres fantasmes de toute-puissance. Ainsi, s’il y a de l’origine, l’origine n’est pas, elle n’a pas de consistance propre ; elle est le lieu d’un Autre qui échappe radicalement à toute détermination et à toute identification. Par conséquent, l’universel n’a d’autre origine qu’une singularité événementielle, qui n’a elle-même d’autre origine (aléatoire) que la pure différence qu’est le lieu de l’Autre. L’origine de l’origine reste à jamais hors-savoir.
À la suite de Paul, il faudra donc assigner au Fils de n’être pas le tout de l’origine, comme il faudra assigner au Père, à l’Autre, d’être tenu pour innommable, indiscernable, infigurable, c’est-à-dire avant tout absent. De l’ Autre, on n’a jamais la présence, on n’a que la trace, le nom, le signifiant. « Résurrection », en tant que nom vide de toute présence, doit alors être entendu en termes de premier signifiant dans le déploiement logique de tout discours sur Dieu.
https://www.persee.fr/doc/ether_0014-2239_2004_num_79_4_3792 |
| | | Narkissos
Nombre de messages : 12456 Age : 65 Date d'inscription : 22/03/2008
| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? Lun 27 Mai 2024, 13:19 | |
| Cf. supra 20-21.4.2024. On reviendrait tout près d'Eckhart dont on parle beaucoup ces jours-ci (p. ex. ici ou là): que tout ce qui est nommé, être, étant, personne, chose, événement, singularité, ne soit pas sa propre origine, manque à son identité comme à son essence, en plus d'un sens diffère de lui-même, cela vaut aussi, en cascade et en abyme, pour l'"origine" même: qu'on la nomme "Dieu", "Père", "Être", "Autre", "Abîme" ou "Néant", ça ne sera jamais ce que c'est, c'est au-delà (ou en-deçà) de l'"être" et de l'"essence" ( epekeina tès ousias); ça ne peut être désigné, enseigné au sens espagnol du terme, indiqué, par une métonymie spatiale ou un index tendu, que comme un "là-bas" ( ekei, Fort) qui n'est littéralement nulle part et ne sera jamais un "ici" ni un "là" ( Da): lieu sans lieu, espace sans espace. "Le Père" n'est le nom de l'origine que par rapport au "Fils", "Dieu" par rapport à un "monde" ou une "création"; la "déité", l'"être : néant" ou le "fond sans fond" de "Dieu" ne joue pas d'autre rôle par rapport à "Dieu" que le "Père" par rapport au "Fils": ce ne sont pas les noms mais le mouvement perpétuel, éternel, le flux de l'un à l'autre, qui compte -- y contribue aussi le jeu ou la danse des noms, jamais un seul ni le même, même pas "l'Autre". Au "Tout-Autre" de Barth, Pannikar répliquait "et tout autre qu'un autre"; et Derrida, par d'autres chemins, "tout autre est tout autre". Il n'y a jamais que de la "singularité", et il n'y en a nulle part -- au moins en ce sens qu'aucune singularité ne peut se refermer sur elle-même, se figer en identité, être simplement et seulement ce qu'elle est -- ni par conséquent s'opposer à une altérité qui est autant en elle que dehors. Cela peut aussi bien s'appeler "résurrection", ou "impermanence": que le dieu d'Abraham soit le dieu d'Isaac et le dieu de Jacob, ou de Moïse, non dieu des morts mais dieu des vivants, jamais le même, toujours le même, c'est "la résurrection" selon les Synoptiques; je suis-serai [ce] que je suis-serai, avec toi, selon le passage de référence, Exode 3; même l'Apocalypse dirait à sa façon quelque chose de semblable, en situant sa résurrection hors monde, entre deux mondes, sans ciel ni terre, sans lieu ni temps (pas plus d"où" et de "quand" que de "comment", pour reprendre le titre du présent fil). Cela me rappelle au passage qu'un des malentendus (possibles) du discours de "Paul" à l'Aréopage d'Athènes, selon Actes 17,18, c'est que "la Résurrection" ( Anastasis) serait prise par les Grecs pour un nom propre, féminin: Christos et Anastasis "en couple" comme Zeus et Héra, Résurrection parèdre ou consort, mère, soeur, épouse du "Christ"... En un sens et en plus d'un sens c'est vrai, "Christ" et "Résurrection" sont inséparables comme deux aspects du même qui n'est jamais le même; un seul mouvement, un seul esprit comme un seul corps ou une seule chair qui ne sont jamais, non plus, identiques à eux-mêmes. |
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| Sujet: Re: Le résurrection : où, quand, comment ? | |
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